Sheraz Mahal

Identité : Sheraz, rares sont les personnes qui s'attardent sur ce prénom pourtant c'est un prénom plutôt féminin dont il s’accommode mal, lui qui s'intéresse à tant de choses. Une idée de sa mère, qui pensait avoir inventé quelque chose d'original... Il ne lui a pourtant jamais fait la remarque, de peur de lui faire de la peine. Mahal, un nom de famille très évocateur et qui l'a souvent fait remarquer en classe, lui qui aime à se fondre avec le mobilier. Finalement, son 2e prénom, Anwar, est le seul de ses patronymes qui ne lui pose pas problème.

Date et Lieu de naissance : 21 avril 2003, à Oxford.

Statut civil : célibataire, il est clairement très loin de conclure avec qui que ce soit. La faute à une tendance à se sous-estimer et peut-être aussi à une éducation jalonnée de tabous. Ça ne l'empêche pas de sentir son coeur s'emballer et de voir les mots trébucher sur ses lèvres lorsqu'il se retrouve en binôme avec une fille qui lui plait. De quoi le faire passer pour le dernier des imbéciles.

Scolarité : 3e année. Préfet de Poufsouffle, photographe malgré lui pour le Club de Journalisme.

Profession : Sheraz a eu la chance de pouvoir intégrer le Programme des Bons Augures après que sa machine à équilibrer les potions a remporté le 2e prix du Concours National des Mécamages cette année. Évidemment, il a d'abord fallu convaincre le Ministère de fermer les yeux sur son inscription frauduleuse, le concours étant réservé aux détenteurs du précieux MULOTs de Mécamagie et c'est comme ça que l'IDEM lui a mis la main dessus, son carnet de notes exceptionnelles ayant tapé dans l’œil d'une certaine Imelda McGregor.

Si Sheraz peut être un garçon réservé à l'extrême, sa passion pour la mécamagie ne semble pas avoir de limite. Véritable encyclopédie vivante, il n'hésite pas à expérimenter, parfois à ses dépends, et même à inventer. Aussi, voir l'IDEM lui ouvrir ses portes ne l'a pas intimidé le moins du monde. Au contraire, ce sont des étoiles qui se sont allumées dans ses yeux noirs.

Grâce au Programme des Bons Augures, dont l'objet est de dénicher les jeunes talents prometteurs qui pourraient faire l'avenir du Monde Magique, Sheraz a le privilège de se glisser dans le rôle des assistants en herbe, deux fois par semaine, les vendredis et samedis. Il peut également s'il le souhaite grossir les effectifs de l'Institut à ses heures perdus. Vous saurez où le trouver aux prochaines vacances scolaires.

Baguette magique : Vingt-cinq centimètres de bois de pin rouge, coeur de plume de phoenix, qui, d'après Ollivander, aurait fourni une seconde plume. Rien que pour voir ce que ça fait, Sheraz serait curieux de rencontrer la baguette qui renferme la 2e plume.

Famille : Sheraz est l'enfant tardif de Kamal et Agnes Mahal, heureux propriétaires d'une petite librairie en plein coeur d'Oxford. Ce fils qu'ils ont tant attendu a fait l'objet de toutes les attentions et de tous les espoirs. Ils rêvaient d'en faire un astrophysicien ou peut-être un médecin alors quand un beau matin les tasses, théière, et autres pâtisseries se sont mises à flotter dans les airs, oui, ça a été un sacré choc. Et que dire du changement de couleur de cheveux qui a suivi ce petit numéro ? Pourtant, même précipités dans l'inconnu, les parents de Sheraz ont toujours fait de leur mieux, soutenant ce fils si différent d'eux avec amour et persévérance.

Après quelques accidents de ce genre, voir débarquer un grand gaillard en robe de velours devant leur porte a été un soulagement plus qu'une surprise. Sheraz avait reçu un don qu'ils ne pouvaient pas expliquer mais qu'ils se devaient d'accepter. Alors, plus qu'une évidence, déménager à l'autre bout de l'Angleterre, dans le petit village semi-magique de Loutry-Sainte-Chaspoule a été une véritable sortie de secours. Ça n'avait rien de commun avec leur vie de la ville mais au moins ici, Sheraz pourrait grandir sans avoir à se cacher.

Beaucoup de grands changements pour un adolescent qui ne tarda pas à se montrer extrêmement curieux de ce nouveau monde qui venait de lui ouvrir ses portes.

Ça n'était pas pour rassurer Agnes et il fallut du temps pour que chacun retrouve sa place mais c'est chose faite. Les Mahal sont aujourd'hui des voisins exemplaires. Ils ont même rouvert une petite librairie, The BookWyrm's, qui regorge de trésors pour qui s'intéresse à cette fine ligne de démarcation entre le monde moldu et le monde magique. N'hésitez pas à vous y arrêter à l'occasion, cela fait partie des curiosités du village.

En bon fan d'heroic fantasy, Sheraz ne se félicitera jamais assez d'avoir soufflé l'idée de remplacer le o par un y.

Hérédité du sang : Sheraz a grandi en tant que né moldu, d'où sa fascination pour la théorie magique et les expériences. S'il se heurte parfois à des idéologies qui lui déplaisent fortement, il conserve une forme de naïveté face à la Magie. Elle l'émerveille et le fascine sauf peut-être les matins où il se lève avec l'apparence d'un schtroumpf ou d'un ado boutonneux.

Particularité magique : Il lui arrive tout un tas de choses bizarres depuis ce matin, il n'y a pas si longtemps, où le petit déj' s'est mis à flotter au-dessus de la table. Pour une raison qu'il n'explique pas, Sheraz n'a montré aucun talent magique jusque tard dans l'adolescence. Quand on est métamorphomage - c'est comme ça que ça s'appelle apparemment - l'expression se mettre dans tous ses états prend tout son sens. Alors Sheraz a parfois le sentiment que rien de tout cela ne serait arrivé sans cette nouvelle élève, arrivée en cours d'année. Emma. Mieux vaut peut-être ne pas trop y repenser si on ne veut pas repartir pour un tour. Qu'est-ce que ce sera cette fois ? Les cheveux roses et bouclés ? Les yeux ? Allez donc savoir...

Caractère : Sheraz est porté par sa passion et son émerveillement. C'est un garçon qui n'aime pas se mettre en avant et pourtant, malgré son jeune âge, c'est déjà un puits de science magique et non magique. Méticuleux et entêté, il apprécie ce qui challenge son intellect et l'invite à repousser les limites. Passionné de mécanique fine depuis son plus jeune âge, il a découvert la mécamagie en mettant un pied dans le monde magique et ça a été pour lui l'expérience d'ouverture de son champ des possibles la plus libératrice qu'il ait connue.

Sans doute sapé par sa découverte tardive de la magie, son don qu'il ne maîtrise pas et attire souvent l'attention sur lui au moment où il préférerait l'éviter, Sheraz est ce genre de personne qui préfère se tenir en retrait. Se taire et écouter, ce sont aussi des principes hérités de son éducation très à l'ancienne. Profondément gentil, il ne sera jamais le mec le plus populaire, le plus en vue ou que sais-je.

Sheraz est en soi un jardin secret qui vaut la peine d'être découvert même s'il est vrai qu'il préfère souvent la compagnie de ses vis, écrous et parchemins à celle des autres êtres humains. Du moins c'est l'image qu'il donne. En vérité c'est plutôt qu'il se laisse si facilement absorber dans ses recherches ou emporter par sa créativité qu'il en oublie parfois qu'il y a un monde tout autour de lui. Mais si vous êtes son ami, pas juste une connaissance, vous pourrez toujours compter sur sa loyauté et son enthousiasme.

Patronus : une nuée de nymphes des jardins. Le genre de papillons qui adorent investir les serres magiques. Il n'a jamais compris d'où ça pouvait bien venir, vu ses prouesses en cours de botanique et son incapacité à garder en vie ne serait-ce qu'un cactus, magique ou non. En tout cas c'est un sortilège qu'il adore et dont il use et abuse juste pour le plaisir des yeux.

Miroir de Risèd : changeant mais inutile de dire qu'il a bien souvent des tâches d'huile ou d'encre sur ses vêtements, l'air un peu fou fou ou des objets étranges et fascinants entre les mains.

Epouvantard : un jeune garçon en tenue de robin des bois qui enjambe le rebord d'une fenêtre, en faisant mine de le prendre par la main. Il ne fait aucun doute que, lorsque ce sujet sera étudié, l'épouvantard de Sheraz risque d'en laisser plus d'un perplexe. Pourtant, pour le jeune homme, l'image ne prête ni à rêver ni à sourire. Elle le plonge dans un état de panique qu'il n'explique pas et qui lui fait monter les larmes aux yeux en un claquement de doigts. Autant dire que pour lui Peter Pan s'arrête à environ quinze minutes de film...

Particularités :Si l'on considère le fait qu'il n'a pas grandi dans un environnement magique, Sheraz a pris ses marques à une vitesse qui a surpris ses professeurs. Véritable "geek du monde magique", il a, en plus de sa curiosité insatiable, une facilité telle à la pratique que l'on peine à croire qu'il soit le premier sorcier de sa lignée...

Sheraz adore les casses-têtes, il en a d'ailleurs une belle collection, qu'ils soient magiques ou non magiques. Il aime aussi les énigmes plus mathématiques, comme les sudoku ou les équations d'arithmancie à plusieurs inconnues. Chacun son truc hein...

Quand il atteint un certain degré de concentration, ses cheveux et ses yeux noirs prennent une légère teinte bleutée. Le plus drôle c'est qu'il est tellement concentré sur ce qu'il fait qu'il ne s'en est jamais rendu compte.

Il a une tâche de naissance sur la fesse gauche qui évoque vaguement un laguz. Ce qui est très drôle pour quelqu'un étant né un 21. Enfin, cela reste une private joke parce que très honnêtement, personne n'est prêt de la voir celle là.

Qui es-tu ? : une petite créature verte unicellulaire vivant dans les eaux salées, le plus souvent en suspension et apparemment passive... mais toujours en train de préparer un mauvais coup.

Faceclaim & Crédits :Tony Revolori

Trigger Warnings :  adoption

Comment avez-vous connu le forum? :  

Un petit plus ? : +, comment ça je la fais à chaque fois  

La rentrée avait apporté son lot de surprise mais celle-ci, Sheraz avait eu du mal à l'avaler. Quelqu'un parmi ses petits camarades avaient forcément voulu lui jouer un sale tour. Il fallait avouer que c'était rudement bien monté, pour que la Directrice elle-même ne se pose pas de questions... Mais lui, Sheraz, n'était pas dupe.

« Vous avez demandé à me voir Mr Mahal ? »
« Oui... euh... »
« Eh bien entrez, ne restez pas à la porte tout de même. »

Il s'éclaircit la voix, se faxant entre la porte et son encadrement comme s'il avait été coupable de quelque chose. Le jeune homme referma la porte dans son dos sans s'en éloigner vraiment. Il n'en avait pas pour longtemps.

« Je voulais vous rapporter ceci. », fit-il en posant finalement un petit écusson marqué du blaireau de Poufsouffle.

La Directrice déchaussa la paire de bésicles à travers laquelle elle scrutait un morceau de parchemin écrit ridiculement petit. Il ne put s'empêcher de décompter les secondes interminables qu'il fallut au petit objet pour toucher le bureau de bois précieux.

« Vous nous quittez Mr Mahal ? Je suis peinée de l'apprendre. », répondit la Directrice en lui accordant enfin un regard appuyé.
« Euh... mais non, pas du tout. », balbutia le jeune homme, intimidé.
« Ah... j'ai du mal comprendre. Donc vous n'êtes pas venu me rendre cet insigne de préfet de Poufsouffle. », corrigea-t-elle avec une insistance non voilée.
« Mais si ! », il se récriait comme un petit oisillon tombé du nid, assez farouchement pour tout dire, « Si quelqu'un n'est vraiment pas fait pour être préfet c'est moi. Enfin !! Regardez-moi ! Il doit forcément y avoir une erreur ! »
« Vous insinuez que je n'ai pas assez d'expérience pour savoir à qui distribuer mes insignes de préfet. Ou peut-être que c'est votre Directrice de Maison qui manque de discernement ? »
« Je n'ai jamais dit ça ! »

Enfin il ruait dans les brancards. La Directrice eut un petit sourire satisfait mais le laissa poursuivre.

« Je veux dire, il y a quand même des élèves bien plus qualifiés que moi pour ce poste... Joseph Benton par exemple : tout le monde l'aime. Ou... le capitaine de l'équipe de Quidditch ! »

Mahyar pouffa, ce qui eut pour effet de faire monter la moutarde au nez de Mahal. Il était largement temps de mettre un terme à cette conversation, qu'elle avait vu venir à la minute où elle avait décidé de lui jouer ce coup-là.

« Vous allez me reprendre cet insigne de préfet de Poufsouffle Mr Mahal, ça vous sortira de votre petite zone de confort. Et que je ne vous entende pas vous plaindre. Quand il s'agit de filouter le concours des Mécamages au nez et à la barbe du Ministère, vous n'avez pas besoin de venir pleurer dans mes robes, encore que vous n'avez pas eu trop de mon aide pour vous tirer de ce mauvais pas... »
« Mais je vous l'ai déjà dit : je n'avais pas l'intention de concourir personnellement. »

Il s'était simplement trouvé au bon endroit au bon moment, son petit prototype sous le bras et un heureux hasard avait voulu que l'invention d'un des candidats les plus prometteurs tombe en rade juste avant de passer devant le jury. C'est vrai que pour le coup il avait eu une chance insolente. Dommage qu'il n'ait pas pris le temps de briefer plus que ça le candidat qui allait présenter son invention, sans quoi, ils auraient parfaitement fait illusion. Pour couronner le tout, l'autre l'avait balancé dès qu'il avait vu la grise mine du commissaire dépêché par le Ministère pour veiller au bon déroulement du concours. On ne pouvait pas toujours avoir de la chance.

« En effet vous l'avez répété au moins une centaine de fois et je crois bien que sans mon intervention et celle de Miss MacGregor nous y serions encore. »
« Mais pourquoi ? »
« Sheraz, vous connaissez le règlement de cet établissement par coeur, votre dossier scolaire fait partie de ceux que l'on peut exhiber dans cette ridicule compétition entre les écoles magiques internationales... certes, vous manquez de confiance en vous mais c'est précisément ce qu'il vous manque. De toute manière, vous me devez bien ce petit service après vos frasques de l'autre jour alors vous allez épingler cet insigne de préfet de Poufsouffle sur votre uniforme et me débarrasser le plancher. Je ne veux plus vous voir pour aujourd'hui. Allez oust. »

Qu'aurait-il pu répondre à cela ?








Il dressa l'oreille, interpellé par le bruit caractéristique d'une mécanique malmenée. Chrissie Collins venait de balancer un petit objet sur les pavés. On pouvait l'entendre vociférer de très loin puis elle s'éloigna à grand pas furibonds vers l'intérieur du château. Il attendit que le silence retombe dans la cour pour aller voir ce qu'elle avait bazardé. Le boîtier était complètement explosé et les enchantements grésillaient et jetaient des étincelles. C'était mauvais signe. Il se pencha tout de même pour ramasser le petit appareil photo magique sans trop se méfier. Ça n'était pas de la mécanique complexe.

« Aoutch ! Saleté ! »

Il venait de se prendre une décharge salée. Secouant sa main avant de la pincer entre ses genoux, Sheraz tira sa baguette pour jeter un sortilège de désenchantement express.

« Il est mort c'est ça ? »
« Ben... je dirais pas ça. », il n'aimait pas annoncer de mauvaises nouvelles, surtout pas à elle. Griselda Lovely était sans doute la personne la plus gentille et la plus adorable de l'univers. « Il est pas dans sa meilleure forme mais je suis sûr qu'on peut le retaper. »
« C'est vrai ?!!! », à l'enthousiasme qui électrisait la Serdaigle, il était sûr de pouvoir compter au moins cinq ou six points d'exclamation dans cette phrase.

Il avait surtout dit ça pour lui faire plaisir sans avoir trop réfléchi à la question. Il n'y connaissait rien en appareil photo pour commencer ni même en photo. Le temps de creuser le sujet de façon à peu près exhaustive, une semaine leur avait filé sous le nez et Sheraz s'était appliqué à éviter l'adorable Serdaigle aux grands yeux de chien battu. Une autre semaine s'était envolée puis une autre avant qu'elle ne lui tombe sur le paletot.

« J'ai presque fini regarde. », fit-il en tirant un cliché sans même prendre la peine de cadrer quoi que ce soit.

Il lui mit l'appareil dans les mains. Il était bien plus léger qu'avant malgré un tas de petits rouages rutilants qui n'étaient pas là avant.

« Tu vois là, c'est pour faire le point. Vous n'aurez plus besoin de cadrer vraiment. Quoi que vous fassiez la photo sortira nette. Et ici c'est pour recouper la scène. Comme ça vous ne garderez que le plus intéressant. Tiens voilà. C'est cadeau. Si jamais tu as l'impression que ça grince un peu, n'hésite pas. J'ai jamais enchanté un appareil photo alors il se peut que les charmes s'enrayent un peu à la longue. »
« Je n'aurais pas besoin de te le ramener si c'est toi qui prends les photos. », minauda Griselda avec un petit air de ne pas y toucher.
« Pourquoi je prendrais les photos ? J'y connais rien à tout ça moi. », entre temps c'était devenu faux mais inutile de le souligner. Il n'avait aucune envie de faire partie du journal des étudiants (qu'il ne lisait pas au demeurant). Griselda et sa clique faisaient ça très bien à son goût.
« Pas besoin de t'y connaître puisqu'avec ton appareil les photos sont inrratables. Du coup n'importe qui peut les prendre pas vrai ? »
« Oui mais pas moi. »
« Oh allez s'il te plait Sheraz. Fais pas ta tête de cochon : dis oui ! Depuis que Chrissie est partie en claquant la porte, c'est plus pareil au journal. Bon, c'est vrai que ses photos étaient très mauvaises et je pense toujours que Downie a eu raison de le faire remarquer. Mais avec toi ce serait différent... »

S'il y avait bien une chose que Sheraz ne se voyait pas faire c'était intégrer un club. A la rigueur le club d'échec version sorcier mais pas le club de journalisme. Son truc à lui c'était pas dénoncer les injustices, au contraire. Le plus souvent il passait à côté sans s'en formaliser ou si peu mais voilà, maintenant qu'il avait un appareil photo magique flambant neuf entre les mains, il était devenu le photographe officiel du journal. Sans avoir rien demandé.

« Okay mais juste le temps que vous trouviez quelqu'un. »

Griselda avait répondu d'un petit hum hum chantant. C'était il y a presque un an.

« Sheraz ? Ça veut dire quoi le gris ? »
« Hein ? »
« Tes cheveux sont en train de virer au gris. Tu ne m'as pas dit qu'ils pouvaient changer de couleur selon ce que tu ressentais ? »
« Euh si. Apparemment. », se renfrogna le jeune homme, balayant l'idée de sa récente propulsion au journal devant la perspective de prendre quarante ans dans la vue sans avoir rien demandé. Il ne faisait pas bon traîner là sans savoir ce qu'il allait advenir de lui cette fois. « Je dois y aller là. »
« Okay, tiens oublie pas l'appareil photo. Et... Sheraz ?! », héla-t-elle alors qu'il était déjà à quelques mètres d'elle, « Moi à ta place je noterai. Ça peut peut-être t'aider de savoir à quoi correspond chaque couleur ... »
« J'y penserai. Merci du conseil Grise. »

La voix du jeune homme se perdit dans le loin comme il prenait un virage en épingle pour mieux disparaître du champ de vision de la Serdaigle. Avec un peu de chance, il n'aurait pas à s'en faire pour ses vieux jours. Si ça se trouvait, avec l'âge il allait gagner en charisme et enfin pouvoir séduire. Un petit coup d'oeil au miroir le laissa vite déchanter. Il avait simplement l'air d'un bobo qui s'était décoloré pour adopter la tendance gris perle du moment. Et dire que certains appelaient ça un don.






Elle passa une main sur son visage. Les traits tirés, la mâchoire serrée. Il l'avait rarement vue si tendue, si épuisée. Il approcha avec un pauvre sourire, rempli d'amour et de compassion pour venir s'asseoir sur l'accoudoir du canapé, tout près d'eux, sans faire de bruit.

« Tu es la meilleure ma chérie. »
« Je sais pas Kamal. Je n'en peux plus de ces hurlements. Je craque. »

Elle était au bord des larmes et ça lui brisa le coeur. Il savait bien ce qu'elle se disait. Eux qui avaient tant souhaité devenir parents, voilà que la vie leur jouait un tour étrange. Ils n'avaient plus l'âge des couches, des biberons la nuit, encore moins de ces hurlements quasi permanents. Les Mahal étaient épuisés, à bout de ressource, mis genou à terre par ce petit avorton qu'ils avaient retrouvé au beau milieu de leur salon, par une nuit d'hiver, déjà hurlant à pleins poumons. Il n'y avait que dans les bras d'Agnes que le petit garçon se calmait. Et il s'y agrippait comme à un radeau de survie.

Les enquêteurs n'avaient trouvé aucune trace d'effraction. Les recherches initiées tout de suite, on leur avait proposé de les décharger de l'enfant. Ils avaient refusé d'une seule voix, se doutant bien que l'entre deux ne serait pas des plus plaisant pour un petit garçonnet visiblement très insécurisé.

« Tout va rentrer dans l'ordre ma chérie, tu verras. Les parents de ce petit bout doivent être morts d'inquiétude. Mettons nous à leur place cinq minutes. »

Elle soupira, reposant finalement son dos sur le dossier du canapé. Le petit lardon ronflait, les mains crispées sur son chandail en mohair bleu lavande. Elle souffla sur une mèche de cheveux qui lui retombait sur son front et ferma les yeux un instant. Kamal la couvrit d'un petit plaid. Il savait bien ce qu'elle n'avait pas la meilleure image d'elle-même depuis quelques temps. Elle devait se dire qu'elle aurait sans doute fait la plus mauvaise mère du monde et que finalement, dans leur malheur, ça avait peut-être été une bonne chose qu'ils n'arrivent pas à avoir d'enfant. Pourtant, à la voir s'épuiser en vaine caresses, en baisers inutiles, en berceuses mimées du bout de ses lèvres lasses, presque mécaniquement, lui, Kamal, voyait quelle femme extraordinaire il avait épousée. Et, s'il avait eu un fils, elle s'en serait occupé aussi bien que de ce petit garçon potelé qui dévorait toute leur patience et leur énergie.

On frappa quatre petit coups secs à la porte.

« Oh ! Agent Brody. Entrez, entrez. »

La jeune femme salua d'un bref signe de tête, avisant immédiatement Agnes qui somnolait sur le canapé. Kamal et Agnes Mahal étaient de bons concitoyens. Le genre que l'on retrouvait toujours au service de la soupe populaire à la veille de Noël, aux fêtes des voisins et autres événements du genre. Au poste, tout le monde les avait pris en affection avec leur histoire de bébé mystérieusement apparu dans leur salon. Ils étaient passés à côté de quelque chose, ça ne faisait aucun doute. A moins que les Mahal aient été impliqués. Ça avait été la seule théorie plausible mais à voir leur mine défraîchie et les vagissements du petit lardon démoniaque qui se trouvait en pension chez eux, franchement on avait plus envie de les plaindre qu'autre chose. Brody espérait bien faire toute la lumière sur cette affaire un de ces quatre.

« J'étais venue vous tenir au courant de l'avancée de l'enquête. Vous allez recevoir la visite de Mme Rowling d'ici la fin de la semaine. Vous la connaissez. C'est elle qui assurera le suivi du bébé. Nous n'avons aucun retour malgré les campagnes dans les médias et les enquêtes auprès des Plannings Familiaux. »
« Vous voulez dire qu'il va être placé ? »
« Oui, j'en ai bien peur... », répondit l'agente après une petite hésitation.

Les choses n'étaient jamais simples quand on y mêlait l'affect. Agnes s'était levée d'un bond. Le bébé recommença à pleurer puis, comme elle le berçait contre son épaule, il sembla se calmer, toujours cramponné à l'épaule de la quinquagénaire.

« Nous nous en doutions. C'est la procédure si on ne retrouve pas sa famille il faut bien que quelqu'un s'en occupe. »
« Non. Non, je refuse. Il doit bien y avoir une autre solution. »
« Agnes, soyez raisonnable. Nous pouvons nous asseoir et en parler calmement. Je me doutais que ce ne serait pas facile à entendre pour vous et je tenais à venir personnellement. Ce que vous avez fait pour ce petit est tout simplement... formidable. »
« Kamal ! »
« L'agent Brody a raison. J'ai préparé du thé. Vous prendrez bien une tasse de thé agent Brody. »
« Euh... oui merci. Avec deux sucres. », elle se pinça les lèvres, posant une main qui se voulait rassurante sur le genou d'Agnes Mahal. Des larmes roulaient sur ses joues, silencieuses et dignes, « Agnes... »
« Non, Lila. Vous ne pouvez pas comprendre. Vous avez vu le temps que ça m'a pris de gagner la confiance de ce bébé. Un mois et demi et je ne peux toujours pas le coucher dans son lit à barreau. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé avec cet enfant mais s'il y a une chose dont je suis sûre c'est qu'être balloté de famille en famille... vous allez le bousiller ce gosse ! C'est moi qui vous le dit. »
- Ça n'est pas la mort non plus Agnes. Il s'adaptera. Les gens du centre d'accueil ont l'habitude de ce genre de cas vous savez. »

Elle sentait bien que quoi qu'elle dise, Agnes Mahal ne lâcherait pas ce petit garçon. Elle était capable tout autant que lui de se cramponner et de s'époumoner jusqu'à ce que quelqu'un veuille bien entendre ce qu'elle avait à dire.

« Vous pourriez peut-être... déposer un dossier d'adoption. », suggéra finalement l'agente, pas convaincue que perpétuer l'enfer quotidien dans lequel ils avaient l'air de vivre, pouvait être une bonne solution.

Kamal et Agnes Mahal échangèrent un long regard silencieux.