Pub des Trois Balais
Elle s’était levée, avait fait quelques pas, et s’était enfermée dans sa bulle. Sa bulle froide, solitaire, celle dans laquelle elle se glissait de temps en temps dans son dortoir. Norà aimait jouer les jeunes femmes bien dans leur peau, toujours heureuse rien qu’en affichant un sourire solaire, pourtant la morosité parvenait parfois à la rattraper. Il lui suffisait d’avoir la vague à l’âme et de jeter un oeil au feu de cheminée pour changer du tout au tout. Le feu avait cette influence incroyable sur elle, le don de la conforter comme le don de la désoler. Beaucoup de Gryffondor aimaient se regrouper dans la salle commune pour se blottir devant l’âtre lorsque le temps pluvieux d’hiver anéantissait toute trace de gaieté. Norà, elle, le fuyait. C’était comme enfoncer le couteau dans la plaie, comme se rappeler qu’elle était d’autant plus seule maintenant que sa grand-mère était partie. Se rappeler qu’elle portait toutes ses espérances sur les épaules sans recevoir nul autre soutien familial. A Poudlard, elle avait d’abord trouvé
@Queenie Walker. C’avait été une évidence et rapidement la petite blonde était devenue un pilier. Israfel avait fait son petit bout de chemin et avait pris une place grandissante. L’idée de le perdre pour une connerie l’ébranlait, soucieuse à l’idée de replonger dans les ténèbres qui lui attrapaient parfois la cheville pour la tirer dans ses affres.
Ce fut un vent de panique qui s’engouffra dans les poumons de Norà, mangeant toute forme de raison qui eut voulu résister. L’angoisse s’infiltrait dans ses veines alors que sa raison s’éteignait à petit feu, disparaissant pour laisser la rousse évacuer ses émotions refoulées. Elle prit une grande inspiration, comme pour reprendre possession d’elle-même et finit par faire demi-tour pour poser son front et le bout de son nez contre l’épaule d’Israfel. Elle s’attendait à ce qu’il la repousse, à ce que cette tentative échoue et signe la fin du lien qui les avait unis jusqu’ici. Finalement, Israfel fut traversé par un petit rire qui brisa la glace emprisonnant la Gryffondor. Il n’était pas fâché? Norà releva doucement la tête, juste pour guetter l’expression du Clearwater. Son visage était doux et inspirait la confiance. Norà se sentait encore plus ridicule, mais si soulagée. Elle repensa à la bagarre qui avait opposé Is à Douglas, à l’excès de colère qu’il avait manifesté. Elle s’était attendue à voir un lion échauffé, grognant ses excès de contrariété. Et pourtant, Israfel ne faisait montre de rien de tout cela. Elle lui adressa un petit sourire désolé avant de reposer sa tête contre son épaule, voulant prolonger le moment ne serait-ce que de quelques secondes.
Norà laissa le lion poser ses mains sur sa taille, en profitant pour se blottir contre lui. Elle fut prise d’un grand éclat de rire lorsqu’Israfel se mit à plaisanter. A moins que ce ne soit pas réellement une blague? Elle aurait voulu plaisanter à son tour en lui disant qu’un verre ce n’était pas grand chose, mais elle suspectait Israfel de mal le prendre. Et ce n’était pas le moment, surtout après ce qu’il venait de se passer. Norà releva la tête d’un air plaisantin pour annoncer la couleur.
« Avec un italien, ça passe? » Tenta-t-elle avant d’exploser de rire et de passer ses bras autour de la taille d’Israfel pour le serrer contre elle.
« Je plaisante Israfel.» murmura-t-elle, se gardant d’ajouter qu’elle n’en avait pas du tout envie. Ils avaient eu leur lot de confidences ce soir.
Elle repensa à ce qui avait mis le feu aux poudres sans pouvoir se l’expliquer. L’alcool l’avait-elle transformé en peste? Elle ne sut pas s’excuser et se contenta de bredouiller, montrant les regrets qui l’envahissaient. Israfel ne dit rien pendant un certain temps, laissant le doute s’immiscer dans l’esprit de la rousse. Sa tendresse suffisait à apaiser les tensions. Israfel hissait le drapeau blanc sans dire mot. Norà finit par se résoudre à arrêter de trop réfléchir ce soir alors qu’Israfel la serrait un peu plus contre lui. Aucun mot n’était plus fort que les gestes. Elle comprenait très bien qu’il n’avait pas l’intention de la lâcher si facilement. Dans un murmure, une promesse vint effleurer les lèvres d’Israfel, laissant Norà complètement silencieuse. Elle leva la tête pour s’emparer tendrement de sa bouche alors qu’une de ses mains glissait dans la sienne pour la serrer.
La rousse n’en dit plus, ne cherchant pas à revenir sur ces mots qu’elle avait pourtant inscrits au fer rouge dans sa tête, et se laissa attirer vers le chemin qui les mènerait au château. Elle jeta un oeil en arrière et s’assura que le Clearwater voulait réellement partir avant de marcher dans ses pas.