Maëlys Ezechiel

La journée pouvait sembler parfaitement normal dans les ruelles de la ville, quelques passants profitant du soleil pour discuter amicalement des dernières nouvelles, certains à hausser le ton, probablement à parler de sujets sensibles.

" Ah ! Les pécores et la politique ... Voyez ? Eux, ils n'ont pas encore compris que ça ne servait à rien d'en discuter aussi longtemps et de se disputer pour si peu. Ils n'y gagneront rien, au mieux, ils obtiendront un poste dans un métier médiocre, genre force de l'ord- ... AÏE ! Mais laissez-moi- ... "

Ses pieds avaient quittés le sol, ces braves Messieurs de la police urbaine n'avaient probablement pas aimé le trait d'humour qu'elle tentait de leur offrir pendant qu'ils venaient à la ramener chez elle, l'envoyant valser tête la première dans la banquette arrière de leur véhicule.
Sa chevelure en bataille, les yeux plissés à manger le cuir des fauteuils, un râle étouffé quitte ses lèvres dans un état d'exaspération profond, probablement dans un instant où ces braves gardiens de la paix s'imaginaient qu'elle allait enfin se taire dans une bouderie ridicule.
Que nenni !

" Vous savez ... " Elle s'était déjà redressée, l'index droit levé, la tête penchée entre les deux sièges de l'avant pour mieux se faire entendre, prenant son ton le plus insupportable au possible, sa voix partant dans un aigu affreux.

" ... Tes parents ne t'ont jamais appris à te taire après une bêtise ? " Souffle l'Officier au volant dans un râle d'ennui, son regard partant à examiner la jeune femme à travers le rétroviseur.
" Ils étaient trop occupés à m'apprendre quoi avoir un véritable travail une fois adulte. "  Son sourire s'étire dans l'une de ses plus infâmes et angéliques expressions, offrant la vue de sa rangée de dents blanches. Un geste et des mots pas bien plaisants pour les conducteurs, à en croire le petit coup de frein vengeur offert en réponse, manquant de faire chuter Maëlys tête la première une fois de plus.

" Ceinture et silence. "

Courageuse mais pas téméraire, il ne faut pas plus d'une seconde après l'ordre pour qu'elle file immédiatement reprendre une place sûre et attacher sa ceinture, calant bien vite le coude à la fenêtre, poing contre sa joue à étirer une terrible moue boudeuse.

Le reste du trajet fût difficile. Pour elle ? C'était tout l'inverse, entre les instants à jouer d'ouverture et fermeture de sa fenêtre, ceux à forcer de ses genoux à l'arrière d'un siège en prétendant avoir mal à ses pauvres jambes et, bien évidemment, ses commentaires réguliers chacun plus difficile à supporter que le précédent.
Après une bonne demi-heure de calvaire pour les forces de l'ordre, le Domicile de la jeune femme était enfin à portée, la voiture se garant en face alors que le premier officier laissa entendre un énième râle désespéré. " J'imagine qu'elle n'est pas- ... "

" Bingo. Je prends la lettre ? " L'Officier opine en récupérant un calpin et un stylo, prenant rapidement quelques notes avant de ne déchirer le morceau de papier et le tendre à la Rouquine.

Une demande de visite au poste à venir pour sa mère, pas la première, mais ... Qui sait, peut-être la dernière. Avec son entrée bientôt proche pour l'école, ce genre d'événements ne se déroulera probablement plus, après tout.
Débouclant sa ceinture, la jeune femme commence à quitter la voiture, filant d'un pas rapide vers la porte de sa maison sous le regard peiné des officiers. Mais, avant qu'elle ne se décide de passer la porte, la voilà qui se détourne rapidement à croiser leur regard dans l'un de ses habituels grands sourires, penchée vers l'avant à les saluer dans un grand geste de la dextre ! " Vous allez me manquer, Bill, Marc ! Vous étiez sympa' ! "
Mais avant qu'ils ne puissent répondre, un doigt d'honneur de la Rousse venait de se présenter avant qu'elle ne s'échappe au sein de sa maison le plus rapidement possible.

La voilà désormais à l'entrée, son dos se colle un instant à la porte, son regard glisse aux alentours. Plus aucun son, plus le moindre bruit, mouvement, un simple silence, une absence dans cette trop grande maison. Son sourire se dissipe quelques instants avant qu'elle n'en vienne à soupirer, les yeux clos, frappant d'un petit mouvement du talon droit contre le bois servant de support à son corps.