Howling With the Winds

Identité : Maeve Rhiannon Cynfeirdd ([may-v ree-an-awn kan-verth). Des noms qu'elle arbore avec fierté puisqu'ils sont aussi anciens que la lignée dont elle descend. Le choix du prénom Maeve, que l'on doit à son père, n'est pas anodin puisqu'il fait référence à l'implacable guerrière Madb des irlandais, personnification du pouvoir.

Date et Lieu de naissance :  44 ans. Maeve est née, comme tous les Cynfeirdd, sur les falaises du Pembrokes au sud du Cymru (Pays de Galles). Là, se dresse Caer Cynfeirdd, la forteresse des premiers bardes, battue par les embruns. Facilement reconnaissable à son pont de pierre en arc brisé qui enjambe une avancée étroite où les lames rageuses de l'océan viennent se jeter sur des dents de roc acérées. Ici on parle le vieux gallois et il n'est pas rare d'entendre résonner Hen Wlad fy Nhadau, les soirs de liesse.

Statut civil : mariage frappé de malédiction, autrement dit, mariage caduc. Maeve et Eochaid se connaissaient depuis l'enfance. Ils se sont mariés tardivement après de longues années à se chercher, à se provoquer. Ils ont même eu le temps d'avoir un enfant avant de se passer la bague au doigt, Maeve conservant le nom de Cynfeirdd. Ils en auraient certainement eu deux ou trois de plus sans cette chasse en bordure des terres maudites du floi, dans le Nord de l'Écosse.

Pour ce qui concerne ses goûts, elle a un penchant fort prononcé pour tout ce qui dégage un charisme et une capacité à dominer égaux ou supérieurs aux siens. Disons que lorsque l'occasion se présente, elle ne s'interdit rien...

Scolarité : Chez les Cynfeirdd, rien de prévisible quant aux décisions du Choixpeau. Maeve a porté fièrement les couleurs de Serpentard, tandis que ses frères rejoignaient les maisons de Poufsouffle et Serdaigle.

Profession : A la ville, Maeve Cynfeirdd est psychologue assermentée. Cela signifie qu'elle peut exercer auprès des départements sous secret professionnel du Ministère.

Entrée en post aux termes de cinq année d'études brillantes, elle ferme son cabinet pour se consacrer à la recherche sur les maléfices après l'incident du floi, soit après sept ans d'exercice. La malédiction ne mettra que quatre ans à s'accomplir parfaitement.

Dans l'intervalle, Maeve continue de suivre quelques rares patients qu'elle ne facture pas. Elle vit de la fortune des Cynfeirdd qu'elle ne manque pas de faire grossir en reprenant le petit groupe de mercenaires jusqu'alors mené par son père et dont elle fait partie depuis le milieu de l'adolescence. Exerçant entre les ombres de la nuit et celles des vides juridiques qui ne permettent pas tout à fait de dire que ce que font les Cynfeirdd, hors la vue de tous, est totalement illégal quoiqu'aucun d'eux ne s'embarrasse du code de protection des êtres et créatures magiques tant que les gallions sont au rendez-vous. Ghoules, Chaporouges, Vampires, Erklings, tout y passe sans distinction de classe.

Elle reprend son cabinet de psychologue peut après ses 43 ans, sur demande du Ministère et avec une motivation toute autre que le simple bien de la communauté magique...

Baguette magique : les baguettes des Cynfeirdd sont transmises par héritage. Si elles sont passées entre les mains d'un Ollivander, ce n'est certainement pas celui qui tient la boutique actuellement. Généralement, les Cynfeirdd n'ont donc qu'une seule baguette tout au long de leur vie. Ils la choisissent, ou elles les choisissent, dans la grande vitrine de la bibliothèque où les baguettes retournent sauf exception à la mort de leur propriétaire. La baguette de Maeve est sculptée dans un bois d'aubépine très blanc, elle renferme une vibrisse de dragon-nuage, créature mythique reconnue pour sa férocité tant que pour son chant mélodieux. Sa baguette jumelle, en bois d'épine noire, est exposée au centre de la vitrine. Elle n'a jamais choisi aucun sorcier à ce jour. Les deux baguettes auraient été offertes en récompense par un riche enchanteur qui se serait laissé débordé par sa ménagerie magique.

Famille : la famille Cynfeirdd ne se revendique pas de sang pur, elle fait bel et bien partie de la haute société magique de part son ancienneté et sa grande fortune. Naturellement cymraeg (comprendre, gallois), les premières mentions de cette famille remontent au Xe siècle et relatent les exploits de Deryn ([de-ran), premier barde lancé sur les routes à la recherche d'aventures à transposer dans son art. Si a l'époque l'idée de chanter ses propres louanges avait valu à Deryn d'être mis aux bancs de la très respectable société des bardes, très rapidement, et c'est ce que l'histoire aura retenu, sa réputation de tueur de monstres le précéda où qu'il aille. Cette tradition s'étant perpétuée de père en fils et en filles, les Cynfeirdd alimentent encore aujourd'hui les rumeurs les plus folles. Ils seraient, à leur heures perdues, des espèces de mercenaires volant au secours de qui aurait la bourse suffisamment garnie pour se payer leurs services. On raconte aussi que les sous-sols et les combles de Caer Cynfeirdd regorgeraient d'or, de trésors, et d'objets anciens, magiques pour certains.

Fille de Geraint et Aderyn Cynfeirdd, Maeve est aujourd'hui le chef de cette très noble famille, ses parents étant trop âgés pour se porter en représentants de la lignée auprès du reste du monde magique. Elle a également deux frères, plus jeunes qu'elle, Bron et Elffin et une fille Freya. Tout ce petit monde vit à Caer Cynfeirdd avec le reste de la famille.

Hérédité du sang : les Cynfeirdd se revendiquent de sang mêlé même si les registres du Ministère semblent dire autre chose.

Particularité magique : un talent naturel pour la musique, de là à dire que la magie y est pour quelque chose...

Caractère : Maeve est un meneuse d'hommes. Sa main de fer n'a besoin d'aucun gant de velours pour se faire aimer ou respecter. Son caractère parfois rugueux, toujours sûr, fait qu'on aurait facilement tendance à se placer sous son égide protectrice. Mais n'entre pas qui veut dans les bonnes grâces de cette matriarche un brin autoritaire. Elle a se comportement de chef de meute très dissuasif pour tout ce qui vient de l'extérieur, comme pour ceux qui la suivent de près.

Au grand jour, c'est son intellect vif et sa grande culture qui la définissent. On vous dira que Maeve Cynfeirdd est une femme exceptionnelle et fascinante tant par sa froideur étudiée que par son poids dans les comptes de Gringott's. Séductrice à toute heure, la finesse de son humour et son verbe sans détour peuvent déstabiliser ou irriter qui n'est pas suffisamment armé pour lui faire face. Elle ne craint pas de se faire des ennemis ni de les humilier publiquement quand l'occasion se présente.

A la tête de ses mercenaires, c'est une alpha à qui revient toujours le dernier mot mais aussi, souvent, le dernier souffle de leurs proies car c'est elle qui est la plus vindicative. Elle sait cependant écouter pour mieux prendre une décision et ne fera jamais un choix qui ne serait pas de l'intérêt du groupe. En retour, elle attend qu'on ne discute pas ses ordres, ce qui peut être assez difficile à avaler mais c'est comme ça.

Naturellement provocatrice, elle remettrait sa place en jeu sans ciller, convaincue d'écraser sans trop de difficulté celui ou celle qui aurait osé la lui disputer.

Évidemment, ce n'est pas quelqu'un qui regarde en arrière ou qui pourrait avoir tendance à la mélancolie. Maeve avance. Qui l'aime la suive.

Patronus : un kelpi, pour en avoir chevauché un quelques fois, elle en garde un souvenir grisant, merveilleux et inaltérable.

Miroir de Risèd : Maeve n’est pas le genre à se laisser dépérir devant une miroir du Risèd donc nous ne le saurons probablement jamais mais s’il fallait être créatif, on se l’imaginerait bien une lame à la main, toute maculée de sang, un sourire pleinement satisfait sur les lèvres. Mieux vaut peut-être ne pas créer l’occasion donc.

Epouvantard :

Particularités : quelques cicatrices plus ou moins vilaines mais qui ont chacune une histoire à raconter.

Qui es-tu ? : Tu peux dire ici le pseudo que tu utilises, ton âge si tu le veux, ton pronom, ta zone géographique, etc. C'est totalement libre ! Tu peux même nous raconter ta vie !

Faceclaim & Crédits :Katheryn Winnick, cobaltplasma, eukanova, kerry darlington, cometdefyinggravity, Matt Kenyon, Tina Yeh, majesticrosegraph


Trigger Warnings : à voir ensemble mais rien qui me vienne a priori

Un petit plus ? : +

2023 : tentative d'assassinat de Fearchach McLachlan et démission de ses fonctions de psychomage pour la seconde fois
2022 : Rencontre avec Jameson Clearwater
2021 : Maeve reprend son cabinet de psychomagie
2019 : Eochaid quitte la famille et garde désormais la forme de l'ours à plein temps
2015 : malédiction d'eochaid, maeve abandonne la psychomagie, le ministère de la magie invalide le mariage de maeve et eochaid après que la malédiction de ce dernier ait été évaluée comme imbrisable
2008 : prise de fonction en tant que psychomage assermentée
2003 : mulot de psychomagie
1996 : entrée poudlard et rencontre avec Eochaid
1978 : naissance maeve





Les bruits de leurs pas semblaient se cogner et rebondir contre les épais murs de pierre de Caer Cynfeirdd. Il faisait sombre dans les cachots et on sentait l'humidité de l'océan qui rugissait à leur porte, au pied de la falaise. Ils n'auraient pas dû se trouver là. Gwyneth l'avait interdit. Pourtant quel meilleur terrain de jeu que le dédale des couloirs oubliés par le temps quand au-dehors, la bruine ne leur laissait comme recours que les intérieurs tapissés du regard des adultes, toujours prompt à les remettre dans le rang.

Les deux aînés avaient semés Elffin à partir de geôle du Vert Galant. Les os vermoulus, verdis de mousses séculaires marchaient comme un superbe avertissement sur son esprit encore impressionnable. Ils connaissaient bien cette histoire. Geraint lui-même se plaisait à la leur raconter les soirs d'hiver, lorsque les vents rugissaient à en faire branler les fenêtres. L'homme qui avait infiltré les défenses de la forteresse. Ça ne lui avait pas rapporté grand chose malheureusement.

Les éclats de voix s'estompaient à une vitesse folle, défiant les uns de retrouver les autres. Bron avait fini par se décourager. Dans leur chasse, ils ne ramenaient jamais aucun trésor, si ce n'est la fois où Elfinn avait trouvé un fourreux bleu dans le baquet du vieux puits à souhait qu'ils avaient d'autant plus formellement interdiction d'approcher. Ce jour-là, la colère de Geraint les avait fauchés sur place et la petite créature, mortifiée par une apparition d'une telle vibrance, en avait crevé d'angoisse. Même les mains savantes de leur mère Aderyn, n'avait pu ramener le petit compagnon qu'Elffin se faisait une joie d'adopter.

Elle entendit la voix de son frère appeler. Il avait finalement résolu de rebrousser chemin à la recherche d'Elffin. Tant pis. Il lui semblait avoir entendu quelque chose. De la musique. Elle voulait pas revenir sur ses pas maintenant. Prudente, la fillette tendait l'oreille, écartant l'écho de la voix de Bron puis celle de leur benjamin qui piaillait en protestation. Il était vrai qu'ils n'étaient pas toujours très tendre avec lui. C'était sans doute le lot des plus petits. A nouveau le son mélodieux d'une harpe tinta à ses oreilles. C'aurait aussi bien pu venir des étapes au-dessus de leur tête comme le lui avait fait remarqué son cadet. Mais Maeve était certaine que non. Laissant derrière elle tout murmure de présence humaine, elle s'orientait à tatôn dans les couloirs. La lumière mourrante et blafarde ne lui garantissait en rien qu'elle ne tournait pas en rond. Mais la musique si. Bientôt, une lueur chaleureuse se dessina l'extrêmité du boyau dans lequel elle s'était engagé. Cela provenait d'une porte basse ou plutôt d'une arcade dont l'entrée était couverte d'un brocard d'or magnifique. Le drap semblait miroiter. La petite fille leva prudemment la main, observant longuement les motifs se mouvoir en un éternel tournoi de gentilhommes et de gentes dames.

« Sais-tu au moins ce que c'est ? »

La voix de Geraint la fit sursauter au moment où ses doigts s'apprêter à effleurer l'étoffe. Il se tenait là, silhouette découpée dans l'obscurité, encore plus sombre que le reste. Elle le défia du regard, sachant à quoi s'attendre. Elle n'aurait jamais dû se trouver ici.

« Un coupon du Drap d'Or d'Henri VIII ? »

Malgré la crainte que lui inspirait la présence de son père, elle ne pouvait réprimer une pointe d'excitation. Cela faisait aussi partie des histoires que l'on comptait au coin du feu. Comment le roi cruel avait quéri l'aide d'enchanteurs illustres pour surpasser en faste le roi de France lors de leur première rencontre au Champ du Drap d'Or. Que les Cynfeirdd en aient eu un coupon en leurs possessions n'avait rien de surprenant à ses yeux d'enfant mais le brocard était si finement enchanté que c'était miraculeux d'être tombée dessus dans ce boyau interdit. D'ailleurs, si le coupon du Drap d'Or faisait office de porte, à quoi fallait-il s'attendre de l'autre côté de ce qui était déjà une merveille en soi.

Le vieux loup eut un sourire taillé à la lame du rasoir. Un sourire fier. Il posa sa patte d'ours sur l'épaule de sa fille. Elle avait hérité du caractère entêté de sa mère mais pour tout le reste, elle était une version de lui-même, qu'il voyait déjà améliorée à bien des égards.

« Puisque tu es arrivée jusqu'ici... »

La main de son père écarta le brocard d'or...




Il fit tinter les chaînes qui servaient de suspensoir aux luminaires. Décidément, les Serpentards avaient beau faire les malins et se sentir supérieurs à tous, Eochaid ne pouvait s'empêcher de se dire que leur salle commune ressemblait plus à un caveau d'expiation qu'à autre chose. Il eut un frisson désagréable, bien heureux de son lot à lui de Gryffondor.

« Regardez qui va-là : la maîtresse du donjon. C'est pour moi tout ça ? » fit-il d'un ton leste en faisant tinter les maillons de la chaîne, le globe lumineux qui aurait dû y pendre, toujours dans sa main.

Elle approcha, fauchant cet excès de confiance dans un baiser qui lui mordit presque les lèvres et le prit aux tripes. Embrassant la récompense qu'il pensait mériter pour avoir accompli l'exploit d'être arrivé jusque-là sans aide extérieure, il se sentait enfin libre de poser ses mains sur elle. Eochaid portait son uniforme de sang et or, comme pure provocation jetée à la face de ses pédants camarades qui arboraient le blason au serpent. Le jeu en valait la chandelle, encore qu'il n'était pas sûr de pouvoir en profiter bien longtemps...

Justement, il lui semblait entendre des pas dans le couloir. L'irlandais esquissa un mouvement de retrait mais Maeve lui coupa l'herbe sous le pied, le retenant par la cravate. Le Gryffondor lui jeta un regard paniqué. Avait-il été assez con pour tomber dans un tel traquenard ? Tu parles d'une récompense. Ça sentait le lynchage en règle dans un nid de serpents. Il ne pouvait pas croire qu'elle l'avait attiré jusque-là et qu'il n'y avait vu que du feu.

Cela faisait longtemps qu'elle lui avait tapé dans l'oeil. Maeve Cynfeirdd avec son regard glaçant et ses petits phrasés assassins beaucoup trop bien tournés pour que l'on puisse ouvertement la traiter de connasse. Pourtant, elle pouvait l'être parfois. Mais elle était trop fine. Elle était intouchable. Et lui, Eochaid, ne rêvait que de libérer sa chevelure blond glacé pour y enfouir son visage, respirer son parfum. Elle lui tournait autour elle aussi. Il l'avait bien remarqué. Ce petit jeu se faisait à deux mais lui y jouait ouvertement. Et puis, un peu plus tôt ce matin, en sortant du cours de Défense Contre les Forces du Mal où ils brillaient toujours l'un comme l'autre, ce qui était étonnant pour une fille de leur milieu, si sophistiquée, si bien de sa petite personne. Rejoins moi dans la salle commune de Serpentard, sans aide extérieure... avait-elle soufflé en passant sous son nez. Elle avait laissé sa phrase en suspens et ça avait suffi à lui faire miroiter monts et merveilles. Et, pauvre imbécile, maintenant elle le tenait par les couilles - par la cravate mais tout de même par les couilles - avec ce sourire vipérin qui lui promettait le pire.

« Bordel, Maeve ! »
« Eh bien quoi "Maeve" ? On n'assume pas finalement ? »

Sa voix était caressante à souhait. Elle lui tira un frisson désagréable en même temps que deux étudiants arrivaient dans la salle commune pour le découvrir là avec des mines outrées. D'emblée le premier Serpentard s'avisa de jouer les coq de basse cours. Elle, évidemment, pouvait jouer sur tous les tableaux dans la posture où elle le tenait. Facile, Maeve Cynfeirdd. Quelle connasse tout de même.

« Va voir ailleurs Sewell. C'est pas de ton âge tout ça. »
« Comment ça "pas de mon âge" ?! A quoi tu joues Cynfeirdd ? »
« Parce que tu t'imagines que je dois te rendre des comptes peut-être ? Et ne t'avise pas de m'agiter ton insigne sous le nez si tu ne veux pas que ça se règle à ma façon. »

Le dénommé Sewell braqua un regard outrée sur la belle mais contraint de constater qu'il n'avait pas prévu de s'attarder là après une telle menace. Eochaid se demandait ce que ça voulait bien dire à ma façon mais puisqu'il n'y avait rien là dedans contre lui.

« Eh bien madame, je dois dire... »
« Je ne la ramènerai pas trop. Ce n'est pas censé être toi le courageux de nous deux ? »

Elle le gratifia d'un autre sourire vipérin. Cette fois-ci il comprit ce que cela signifiait vraiment. A nouveau il sentit ses entrailles se tordre. Elle relâcha sa cravate presque théâtralement mais lui, n'allait plus jamais lâcher cette fille.





Le petit groupe attendait à l'endroit convenu. Personne ne viendrait avant une ou deux heures. Bron et Emrys entretenaient le feu magique. Elffin était occupé à tailler un bidule avec son opinel. Maeve reviendrait dans un petit moment avec Owain et Ceri, quand ils auraient fini de répandre le sang du Nuckelavee sur les carrés de la ferme d'algues. Depuis le début de l'épidémie, quatorze jeunes de l'exploitation de Morlay avaient passé la baguette à gauche. D'autres suivraient car les épidémies de ce genre ne faisaient pas les affaires des médicomages. C'était pour cela que Morlay n'avait pas fait appel à leurs services. Un de ses sous-fifres l'avait fait à sa place. Un brave type ce Darrow.

Lorsqu'il arriva sur la jetée, juste avant le point du jour, le petit groupe se mit en alerte. Il s'était enveloppé dans une cape de brise-lame pour qu'on ne le reconnut pas. Tout ceci devait rester entre eux. Ni Morlay ni les autres ne devaient jamais rien savoir.

« Et comment comptez vous le convaincre d'arrêter de brûler toutes ces algues pour faire du varech ? »
« Je... je crois qu'il est déjà convaincu. »
« C'est votre problème après tout. Vous avez notre paiement cette fois ? »

Maeve n'était pas le genre à faire crédit. D'ordinaire, elle n'acceptait pas les affaires douteuses et à la dégaine de ce Darrow, ils avaient tous bien deviné qu'ils seraient payé en monnaie de demiguise mais les Cynfeirdd ne travaillaient pas pour la gloire. Darrow passa la main sous sa cape pour en ressortir un paquet grossièrement ficelé qu'il tendit à Maeve à contre coeur. Sans doute avait-il espéré qu'elle ne lui forcerait pas la main là-dessus. Tout le monde n'était pas taillé pour la profanation de tombe.

« Le filet de McCrowley. Comme convenu. »

Maeve déballa le baluchon sans vraiment lui adresser un regard. Dans l'étoffe grossière, un petit éclat d'argent lui tira un sourire satisfait. La bride utilisée par McCrowley, devenu le héros du petit village portuaire pour avoir mater le kelpie qui y avait déjà enlevé plusieurs sorciers. Là où était le fameux McCrowley, il n'en n'avait certainement plus l'utilité...





Quatre jours qu'ils chassaient le fuath à la lisière du floi. Les vapeurs nauséabondes des marais maudits leur montaient à la tête, rendant la mission plus difficile que d'ordinaire. Chacun ne rêvait que de quitter l'humidité poisseuse qui les collait comme une seconde peau et de rentrer chez soi. A cela s'ajoutait l'infatigable crachin, typique de cette région du Nord de l'Écosse, qui douchait le peu de bonne humeur de la meute. Pourquoi le fuath était-il venu se perdre là, dans les eaux stagnantes qui finiraient par lui être fatales à terme ? Ils n'en savaient foutre rien mais on les payait grassement pour faire cesser les disparitions et les noyades. Ce soir-là, ils l'avaient aperçu un peu plus à l'est, là où la forêt renonçait devant la tourbière, ses racines pourrissant au contact de l'eau stagnante et ses ramures asphyxiées par la mousse brunâtre et duveteuse qui proliférait dans le floi. Toute la difficulté était là car une fois lancés aux trousses du fuath, ils auraient du mal à être attentifs à cette frontière traîtresse et sournoise.

Le floi s'étendait sur des miles et des miles. Étendue marécageuse dont les eaux croupissantes étaient connues pour porter malédiction, elle habitait les faits divers depuis une vingtaine d'années dans la région. Jeunes hommes lentement contaminés puis changés en lechi. La fille de la Chapelière de fleurs en veau de lune. Les Cynfeirdd avaient entendu toute sorte de choses en arrivant mais ce qui les avait marqué surtout, c'était que ces récits avaient l'adhésion de tous dans les villages qu'ils avaient traversés. Étonnamment, on ne les avait pas appelé pour le floi. Qu'auraient-ils pu y faire de toute manière ? Le Ministère lui-même avait considéré qu'il s'agissait d'un phénomène naturel et remarquable. Aucune considération pour les pauvres hères qui devaient passer leur temps à tenir leurs gosses à l'oeil et par le collet. C'était quand même curieux. Maeve s'était fait cette remarque en terminant la coupe d'hydromel qu'Eochaid lui avait servie. L'auberge où ils s'étaient arrêtés pour deux jours ne payait pas de mine mais la cuisine y était bonne et le coucher correct. Sûr qu'elle n'y aurait pas mis les pieds pour un gala de l'IDEM. Ils étaient repartis sur les coups de 21h, laissant le superflu derrière eux.

Ceri avait eu du mal à retrouver la trace du fuath, d'autres créatures faisant l'aller retour entre la forêt dense et le floi. Une trace de pourriture ici, une filet d'algues sèches là, auraient tout aussi bien pu être le travail d'un chevreuil affolé. Maeve adressa un regard oblique à Eochaid qui la dépassait par la gauche. Cette fois-ci, il n'avait rien trouvé d'autre qu'un cardon bleu à ramener pour Freya. Il l'avait épinglé à sa cape pour ne pas le perdre sans doute. Ca lui donnait des airs de galant des bals de Noël à Poudlard. Il avait pourtant beaucoup changé depuis. Les chasses lui avaient mis du plomb dans la tête. Une longue cicatrice lui barrait la bouche la bouche et le menton, donnant à ses baisers ce pli si particulier qu'elle aimait tout particulièrement. Il lui retourna un regard appuyé.

« Donne-moi le filet. »

Le fameux filet de McCrowley. Maeve fronça les sourcils, se braquant à l'idée. C'était à elle de passer devant. Ça n'était une question de glorioles mais plus une question de hiérarchie. C'était à elle de prendre les risques.


« Non pas cette fois et tu sais que j'ai raison. », opposa-t-il avec une fermeté qu'il employait rarement à son endroit, lui qui était toujours le joyeux luron de la bande. Mais là il avait peur. Il y avait trop de paramètres hasardeux avec le floi qui menaçait tout près, ils ne savaient pas exactement où. « Je suis bien meilleur cavalier que toi. »

C'était vrai. Maeve hésita. Elle ne voulait pas lâcher l'affaire mais s'obstiner leur aurait fait prendre plus de risques à tous. Ceri leur faisait signe en silence. La silhouette décharné du fuath se découpait contre les lueurs verdâtres de la nuit. Patiemment, à pas de velours, ils l'encerclèrent, Maeve adressant encore un regard à Eochaid.

Il acquiesça, toujours aussi affermi dans sa décision. D'un coup de talons, la meute donna l'assaut, le fuath prenant aussitôt la fuite. A ces heures, c'était le genre de créatures qui pouvaient se montrer féroces mais face à des proies plus modestes, moins nombreuses. Son appétit de la chair humaine montrait là ses limites. Le sombral d'Emrys bondit au-dessus d'une souche gigantesque, réceptionnant juste dans les naseaux du fuath qui fit un volte face trop presque pour que le sortilège du chasseur ne l'atteigne. Maeve l'entendit pester mais ne s'arrêta pas. Sur les talons de Bron, elle fonçait entre les branches basses, courbée sur le dos de sa monture. Elffin avait pris de la hauteur, prêt à donner de la fronde. Une valeur sûre sur ce type de proie à condition de faire mouche mais Elffin trafiquait lui-même ses engins. Elle pouvait lui faire confiance autant quà chaque membre du groupe.

Eochaid et Ceri filaient maintenant le fuath de près, pris en tenaille entre eux deux. Mais la vitesse effrénée à laquelle le cheval fonçait interdisait toute attaque de précision. Ceri parvint à lui faire une longue estafilade à la tête. L'animal poussa une espèce de haro menaçant envoyant des crocs à la main qui l'avait blessé. Dans sa ruade sur le côté, il manqua de peu désarçonner Eochaid mais le fuyard et ses deux assaillants bifurquèrent dans la direction opposée au floi, ce qui était une bonne chose. Maeve eut seulement le temps de voir Eochaid piquer des deux pour pousser son sombral à bout de limites, dressé dans ses étriers. Il bondit, le filet de McCrowley au poing. C'était plus risqué qu'autre chose. Sur le visage de Maeve, une expression sévère annonçait le pire. Le filet mue par le sortilège de mise en place s'arrima à la tête de la bête furibonde tandis que l'homme retombait de tout son poids sur sa croupe. Tous tirèrent la bride, stupéfaits, le coeur au bord des lèvres. La chute ne tarda pas mais l'irlandais ne désserait pas le point. Ses réflexes excités par la perspective d'une mort aussi lente que douloureuse, piétiné, empâlé ou écorché par la course du fuath, Eochaid parvint à extirper sa baguette de sa manche. Un autre sortilège habilement placé lui permit de prendre la place d'un cavalier non désiré. Le fuath n'était pas tout à fait un kelpie. Aussi il ne valait pas rêver de le dompter avec un malheureux filet mais les enchantements de cet artéfact étaient tout de même d'une aide précieuse. Les deux rennes tenues en main gauche, Eochaid glissa la lame d'argent de son long couteau sous la mâchoire du fauve. Un flot chaud et sirupeux le lui fit glisser des doigts. Le fuath fonçait tête baisser comme cherchant à distancer la mort. Eochaid prit alors conscience qu'il ne pourrait plus l'arrêter et à cette vitesse là, il n'eut guère le temps de réfléchir à s'éjecter que sa monture s'affaissait sous lui, le précipitant vers l'avant directement dans les eaux saumâtres et putrides du floi.

Face à lui, un petit groupe de cinq cavaliers avaient rattrapé la chevauché infernale et le regardait avec horreur et consternation.

Eochaid se redressa, essuyant vainement ses mains sur son plastron de cuir. Le chardon bleu lui lascéra la paume. Il eut un regard pour sa femme. Un long regard silencieux.





Elle lui avait donné la chasse toute la nuit, le suivant de loin pour ne pas tisonner le fauve. A pied, seule. Ça ne ressemblait guère à leurs méthodes. Sa proie la surpassait physiquement. Il devait facilement taper dans les 900 kilos, une toise et demi. Quelque chose dans le genre. A plusieurs reprises, ils s'étaient observés à quelques distances l'un de l'autre puis, au point du jour, l'ours était venu s'étendre à ses pieds pour laisser tomber son épaisse fourrure brun roux. Sur ses genoux, les mèches de la même couleur filaient entre ses caresses aimantes et inconsolables. Maeve posa son front sur celui d'Eochaid, ses épaules secouées de hoquets pudiques. Lui, dormait profondément, épuisé par les changements de forme de plus en plus fréquents et la furie sauvage de l'ours qui prenait petit à petit le pas sur l'homme.

Elle attendit qu'il se réveille pour sortir ses vêtements de son sac. Il la regarda longuement, hésitant. Maeve insista silencieusement, la main toujours tendue vers lui.

« On rentre. », finit-elle par ordonner d'une voix trouble en lui collant d'un coup rageur les vêtements sur le torse.

Eochaid l'attira contre lui, front contre front, repoussa le poing serré contre son torse. Les vêtements retombèrent dans l'herbe. Ils avaient eu huit années devant eux. Huit années d'études et de chasse. Huit années à s'aimer comme des désespérés. A préparer Freya. Désormais, huit années étaient derrière eux et l'ours devant. Il pressa encore longuement ses lèvres sur le front clair de Maeve, l'étouffant d'un bras solide, elle et ses pleurs trop rares, ses yeux rougis qu'il n'avait peut-être même encore jamais vus. C'était un adieu. Il ne prendrait plus le risque de rentrer.

« En quoi est-ce si important ? », insista-t-elle, refusant volontairement de donner une couleur à ses mots.

Bertold lui adressa un de ces regards désespérés, ceux qui ne venaient jamais que quand il touchait à quelque chose. C'était signe d'avancée. Le Dr Cynfeirdd ne lui en demanderait pas plus. Incapable de prononcer les mots, le petit sorcier bouffi semblait près de disparaître complètement dans le divan du cabinet de sa psy.

« Il n'y a aucune urgence à répondre à cette question Bertold. Vous avez déjà avancé énormément,. Je pense que ça suffira pour aujourd'hui. »

A nouveau le bonhomme acquiesça frénétiquement, rassemblant ses quelques effets sur ses genoux. Cette phrase qui sonnait comme une libération lui redonna des couleurs. Le Dr Cynfeirdd lui adressa un sourire encourageant. Il la regarda un instant, plein de gratitude mais toujours incapable de verbaliser quoique ce soit. Il se rappelait encore le jour où Greg de la compta lui avait donné la carte de visite de la psy. Son premier rendez-vous. Maeve Cynfeirdd était une femme beaucoup trop belle pour être psy. Elle l'avait intimidé dès le premier regard et pourtant, il ne lui avait fallu qu'une dizaine de minutes pour le mettre à l'aise. Deux séances pour qu'il se sente parfaitement en confiance. Mais c'était seulement maintenant que les choses commençaient à se déverrouiller et il lui était reconnaissant de ne pas l'avoir foutu à la porte depuis le temps. Elle était payée pour mais tout de même. Ca avait de la valeur à ses yeux.

« Je vous dis à la semaine prochaine. Pensez à reprendre rendez-vous avec Sansa avant de partir, ce sera plus simple. »

Il la remercia d'une poignée de main chaleureuse et s'éloigna d'un pas presque rebondissant, en tout cas, plus énergique. Maeve le raccompagna puis le suivit du regard. Elle ne connaissait pas le patient suivant. Une demi heure de battement entre les deux rendez-vous.

« Vous perdez un temps précieux si vous voulez mon avis. Tout ce temps mis bout à bout, en une semaine vous perdez deux jours de travail. Et dire qu'on vous paie pour ça. »
« Barton, vous savez bien que je me contrefiche de votre avis, presque autant que de la déontologie.... vous aussi vous aimez perdre votre temps à ce que je vois. »

Nigellus Barton était le secrétaire personnel d'elle ne savait plus trop quelle grosse légume du ministère. Sa mouche du coche attitrée. Il ne manquait pas une occasion de venir crier au non respect de la déontologie sous ses fenêtres. Elle se délectait toujours de ces petits revers, si gracieusement distribués à la moindre anicroche.

Le secrétaire lui adressa un regard fielleux, repartant en haussant les épaules et en marmonnant pour lui-même.

Maeve adressa un regard à la grande horloge. Il lui restait encore 20 minutes "à perdre" pour se vider l'esprit de son travail avec Bertold. C'était sa façon de faire. Enchaîner aurait été contre productif. Généralement, elle dédiait une partie de ce temps hors rendez-vous à relire ses notes mais puisqu'il s'agissait d'un nouveau patient, elle s'efforcerait de l'accueillir sur une page vierge.