Connexion — ft. Edel Almadovar

Bien qu’au courant depuis la veille, la nouvelle de la fermeture des portes de Poudlard avait eu l’effet d’une bombe dans le coeur de Siobhán, qui avait alors pris pleinement conscience de ce qui était en train de se jouer juste là, devant elle. L’histoire était en train de s’écrire sous ses yeux océan, à la fois à travers les décisions du Ministère, mais aussi par celle que venait de leur annoncer la Directrice de l’éminente école de sorcellerie britannique.

Bizarrement, même si elle savait qu’@Apolline Dunn roderait dans les couloirs pendant toute la durée du blocus — tout le monde était au courant d'ailleurs, puisqu’elle avait jugé utile de le crier à qui voulait l’entendre dans la Grande Salle — la demie-vélane ne se sentait pas plus que ça menacée. Les murs solides et robustes de Poudlard qui se dressaient fièrement tout autour d’eux, témoins d’une histoire plus que centenaire, y étaient sûrement pour quelque chose.

Le discours de la préfète-en-cheffe avait provoqué un véritable raz-de-marrée de réactions autour d’elle. L’on distinguait ceux qui avaient réagi à voix haute, jugeant utile de partager leurs avis aussi insignifiants soient-ils, de ceux qui avaient gardé le silence. Parmi eux, certains n’en pensaient pas moins. Était-ce de la timidité ou simplement la juste expression de leur volonté de ne pas attirer l’attention ?

Du côté d’@Edel Almadovar, en tout cas, ça n’avait rien avoir avec de la timidité. S’il n’avait pu retenir son côté joueur au départ, son visage s’était très vite refermé après le discours de la fille Dunn. Siobhán avait lu toute la tension qui avait envahit ses traits, pour y avoir été confrontée à deux reprises. Elle-même inondée par toute la rage et la colère que de tels mots pouvaient susciter, elle n’avait pu s’empêcher de lui lancer un regard, comme tant d’autres s’étaient perdus depuis la dernière nuit qu’ils avaient passé ensemble. La Serpentard connaissait très bien, au fond d’elle, les raisons qui les avaient poussés tous les deux à rester muets. Par respect pour @Xris Andērson et son histoire avec Apolline, ils n’avaient rien dit, alors que tous leurs sens leur hurlaient de faire le contraire.

Parce qu’elle s’était reconnue dans sa réaction, Siobhán n’avait pu s’empêcher de le suivre, lorsqu’il avait quitté la Grande Salle, sans adresser un mot à ceux qui étaient restés et qui penseraient certainement que sa fureur rebelle l’aurait emportée. Il avait quelques minutes d’avance sur elle — juste assez pour éviter d’attirer les soupçons.

Ils devaient se parler parce qu’elle n’aimait pas l’idée de le savoir dans cet état.

Depuis cette dernière matinée où ils s’étaient quittés, quelque chose avait changé.

Quelque chose d’assez fort pour empêcher à leurs yeux de s’éviter, comme ils avaient l’habitude de le faire avant. Quelque chose d’assez important pour qu’il l’ait attrapée à la volée, une fois, au détour d’un couloir, pour lui voler un baiser, avant de la relâcher. Quelque chose qui poussait Siobhán à s’inquiéter de son état, avant même de se préoccuper du sien.

Arrivée à sa hauteur, son bras se colla simplement contre le sien. Par pur magnétisme.

« Qu’est-ce que tu vas faire ? », demanda-t-elle simplement, en continuant de marcher à ses côtés.

Curieuse de connaître l’état de ses pensées en cet instant, alors même que les siennes bouillonnaient encore.

La prise de parole de la Dunn avait indéniablement tendu tous les hybrides présents dans l’assemblée, y compris leurs proches. Siobhán ne faisait pas exception. L’utilisation du mot « danger » associé de près ou de loin à ce qu’elle était avait raidi ses traits, y compris les plus doux d’entre eux. Et pourtant, maintenant qu’elle était seule aux côtés d’Edel, plus rien d’autre ne semblait compter. La vélane se contentait simplement de guetter son regard pour essayer de comprendre ce qu’il pensait, au plus profond de son être. Leur tendresse évocatrice à l’instant où il la saisit par le col pour la couvrir de sa veste fit frissonner sa peau. A cet instant précis, elle aurait eu envie de l’embrasser, sans se préoccuper du reste, oubliant qu’ils étaient en public, que n’importe qui aurait pu les voir. Mais au lieu de ça, elle le laissa tirer sur sa cigarette, consciente qu’il s’agissait aussi d’une sorte d’échappatoire.

« Tu as eu raison de ne rien dire. Pour Xris. La situation est déjà bien assez compliquée », répondit-elle à voix basse.

Ses yeux étaient rivés sur cette cigarette qui mourrait peu à peu entre ses lèvres. Balayant de temps à autre son visage pour remonter jusqu’à ses yeux. Un nouveau frisson se dessina sur sa peau alors que l’observation de son portrait lui rappelait des instants figés dans le temps qui s’animaient avec vigueur dès qu’elle le regardait un peu trop longtemps.

« Et pourtant, regarde. Je t’ai déjà suivi », assuma-t-elle avec un sourire au coin des lèvres, dont lui seul pourrait comprendre la teneur.

Il était de plus en plus difficile de prétendre qu’elle n’était pas attirée par lui à la manière d’un aimant. Il était de plus en plus compliqué de croire qu’il ne comptait pas. Il était de plus en plus fourbe de s’imaginer qu’il n’y avait pas plus que ça. Et pourtant, Siobhán apprenait à laisser glisser ce qu’elle ressentait en sa compagnie, se laissant simplement bercer par le rythme de leurs cœurs qui battaient régulièrement en harmonie. Transcendés en simultané, apaisés en synchronisé. Exactement comme maintenant. Si l’effet de leur peau l’une contre l’autre n’avait nul autre pareil, la sensation de cette connexion qu’ils partageaient même à distance était incomparable. A tel point qu’elle se surprit à fermer les yeux quand il perdit sa main dans ses cheveux. Et à nouveau quand il annonça vouloir garder un œil sur elle. Un sourire se dessina sur son visage alors que cette déclaration trouvait son écho dans la première discussion qu’ils avaient eue, dans la salle commune. Quand elle avait brusquement déclaré qu’elle n’avait besoin de personne pour veiller sur elle. Elle n’en avait pas encore tout à fait conscience, mais elle avait pourtant bel et bien besoin de lui.

«Saúl m’a dit de ne pas bouger. Mon père m’a dit de ne pas me déclarer » Une pause. « Tu es le premier à me poser la question. »

Cette prise de conscience était nouvelle alors que les hommes de sa vie avaient pris la fâcheuse habitude de ne pas lui laisser son libre-arbitre. Mais en l’espace d’un mois, Edel avait cerné sa soif de liberté, ce désir de suivre son propre chemin. Son cœur se mit à battre un peu plus fort tant cette phrase y trouvait toute sa place. Tentant tant bien que mal de le faire taire, elle reprit :

« Je réfléchis à un plan pour faire en sorte de ne jamais me trouver au même endroit que cette fille. Tu n’aurais pas une idée, par hasard ? Un lieu à Poudlard où l’ont pourrait disparaître, quelques heures ou quelques jours… »

Un sourire malicieux pointa au bord de ses lèvres. S’il avait une solution, nul doute qu’ils pourraient la mettre à profit pour s’échapper de l’ambiance pesante qui régnait au château.

A son tour, elle combla ce pas qu’il avait fait en arrière et ses doigts se perdirent sur ses vêtements, réajustant ce qui pouvait l’être en sentant la chaleur de sa peau à travers le tissu. Les mains de Siobhán retombèrent à l’instant où elle sentit le feu en elle se raviver, non sans avoir attrapé sa cigarette puis aspiré ses fumées avant de la lui rendre. Autant partager ce funeste destin qui les attendait.

« Tu vas le faire ? Il n’y a pas un autre moyen ? », demanda-t-elle plus sérieusement, les yeux rivés dans les siens.

Si Edel y prêtait attention, il percevrait le petit éclat d’inquiétude qui perlait dans sa voix.

Alors qu’elle savait d’ores-et-déjà qu’elle n’écrirait jamais son nom sur un bout de papier. Pour Eynaelle, pour Finn. Et puis surtout, par respect pour la mémoire de sa mère.

Edel avait gardé le silence à la mention de @Xris Andērson. Preuve tangible s’il en fallait encore une que les conflits intérieurs de son meilleur ami n’étaient pas un sujet qu’il souhaitait aborder. Siobhán le respectait. Ses choix autant que le reste.

Les jours qui se profilaient seraient compliqués pour tout le monde, c’était certain. Le capitaine des Serpentard, s’il n’était pas à proprement parler concerné par le sujet, allait être tout autant mis à rude épreuve. Écartelé sur l’autel des sentiments, tiraillé entre ses émotions contraires et ses pensées opposées. L’amour ou l’amitié. Il n’y avait aucun doute quant au fait qu’il ne pourrait pas choisir les deux et que la nécessité d’une décision finirait doucement par s’imposer. Mais ni Siobhán, ni Edel n’avaient pour le moment la volonté de l’y contraindre. Le temps s’en chargerait pour eux. D’autant qu’ils ne savaient pas si les portes de Poudlard allaient longtemps rester fermées. Ils resteraient terrés comme des animaux à l’arrivée du froid, qui n’attendraient rien d’autre que le retour de jours meilleurs pour se montrer à nouveau.

Le silence se fit. Siobhán comprit que le sujet était clos.

Quand Edel le rompit, un petit sourire vint naître sur son visage de porcelaine. Encore. Car elle savait bien que l'enfermement compliquerait leurs moments d’égarement. Qu'ils apprendraient à se contenter de quelques minutes grappillées par-ci, par-là, au détour d'un couloir. Chaque seconde de sa présence était bonne à prendre. Précisément comme celles qu'ils vivaient actuellement et qui lui donnaient la sensation que rien d'autre n'existait autour d'eux. Que le chaos qui régnait en dehors de ces portes n'était qu'une futilité, et qu'il lui suffirait de plonger dans les bras du Serpentard pour se sentir mieux.

L'addiction qui la tenait désormais dans un étau avait sournoisement fait son apparition, sans même prendre la peine de s'annoncer.

Au-delà d'une simple attirance physique, Siobhán se rendait bien compte que quelque chose d'autre se jouait dans son ventre, à chaque fois qu'elle le voyait. Elle continuait pourtant de s'en cacher, y compris de ses propres yeux. Elle refusait de voir l'évidence qui se présentait devant elle, consciente qu'elle serait accompagnée de son lot de souffrances et de questionnements alors qu'elle pouvait juste se laisser porter aux côtés de celui avec qui elle se sentait simplement bien et qui lui laissait tout le loisir de s'assumer telle qu'elle était. Sans chercher à la brider.

Mais de l'addiction naissait aussi l'attachement. Son cœur se serra lorsqu'Edel lui annonça, presque avec fierté, qu'il s'inscrirait. La Korrigan savait bien qu'il n'avait pas d'autre choix, que sa famille et celle de @Saúl Ochoa enfantait certaines des plus belles créatures qui pouvaient exister dans ce monde. Et pourtant, elle aurait aimé le protéger. L'enfermer avec elle dans cette bulle qui les rendait invisibles aux yeux des autres, pour ne jamais avoir à craindre pour sa sécurité. D'autant que le tempérament fougueux du vert-et-argent ne la rassurait pas vraiment. Edel était imprévisible à souhait. Et c'était précisément ce qui l'inquiétait, même si elle ne voulait pas lui montrer.

« Ça me rend malade rien que d'y penser. Quand je pense qu'elle clame à qui veut bien l'entendre que ça ne veut rien dire... »

Ses yeux se baissèrent en suivant le mouvement de sa tête alors que ses poings se resserraient en repensant à @Apolline Dunn. L'idée qu'Edel puisse souffrir de n'importe quelle façon de ces mesures restrictives lui donnait envie de soulever le monde tant il devenait injuste. Mais ses seuls bras ne suffiraient pas, elle le savait bien, même si elle les mettrait à contribution de cette famille qu'elle venait tout juste de se découvrir. Mais ça, personne ne le savait à part @Eynaelle Sanderson. C'était le minimum qu'elle pouvait faire.

Car le moindre pas de côté risquait de mettre en danger les siens. S'il n'y avait eu qu'elle, Siobhán aurait suivi cette Gryffondor dans sa quête de meilleurs lendemains, c'était certain. Même si, à l'instant où Edel chuchota près de son oreille, elle prit conscience que la seule personne qu'elle avait envie de suivre se trouvait juste sous ses iris bleutés.

« Promets-moi juste que tu seras prudent. C'est tout ce que je te demande », chuchota-t-elle à son tour en serrant un peu plus sa main dans la sienne.

On pouvait lire dans son souffle tout le dévouement qu'elle s'obstinait à dissimuler et qui pourtant, peu à peu, transcendait la moindre de ses pensées.

C’était la deuxième fois qu’une bulle prenait naissance autour d’eux dans un lieu où ils n’étaient pas tout à fait à l’abri des regards indiscrets. Comme chez les Rosewell, le cœur battant d’un rassemblement se faisait entendre tout près d’eux. Comme chez les Rosewell, ils avaient dessiné eux-mêmes les contours de leur intimité, oubliant tout le reste, comme si le temps s’était arrêté au moment où leurs yeux s’étaient croisés. L’idée qu’ils puissent être vus ne revêtait aucune once d’importance. Xris savait déjà, Blodeuyn aussi, Finn finirait par le savoir. Et puis quoi ? Après tout, ils ne faisaient rien de mal. Même si une partie d’elle se tuait encore à lui rappeler que tout ça était beaucoup trop dangereux.

A cette pensée, Siobhán sentit sa gorge se serrer, repensant à sa cousine à qui elle n’avait pas reparlé depuis qu’elle lui avait annoncé avoir passé un morceau de soirée, le 11 février dernier, en compagnie d’Edel. Depuis le jour où il aurait fallu qu’elle apprenne à lire entre les lignes, la vélane ressentait tout le poids de sa propre culpabilité peser sur ses épaules, alors qu’elle n’avait aucunement l’intention de la trahir. Son esprit était partagé et ses paupières fermées sur une situation qu’elle refusait encore de voir, se convainquant elle-même qu’elle n’avait rien à se reprocher et qu’Edel était encore libre de faire ses propres choix. Alors qu’elle aurait tout simplement dû les faire pour lui, quand bien même elle n’avait pas encore réussi à s’éloigner. Ce confinement forcé n’allait sans doute par l’y aider. Et plus le temps passait, plus il devenait compliqué de rester à distance, tant tout son corps se liguait contre elle et l’appelait à rester à ses côtés.

Il y avait des liens que même la plus grande des responsabilités ne parvenait pas à défaire.

Le nuage de fumée se dissipa au moment où le dos de sa main effleura les lèvres du Serpentard, lui rappelant avec chaleur tous ces moments hors du temps qu’ils avaient partagés. Siobhán le laissait faire, y compris quand il la rapprochait de lui et la serrait entre ses bras. C’était là qu’elle avait envie d’être, et pendant un instant, elle décida de faire taire les voix dans sa tête qui s’évertuaient à lui dicter les lois de la bienséance, nichant son visage tout contre lui alors qu’il tentait de la rassurer en lui faisant la promesse silencieuse qu’il resterait toujours près d’elle. Parce qu’il l’avait dit, la dernière fois, qu’il ne serait jamais très loin. Inconscient qu’il était le seul objet de ses craintes, quand elle aurait été prête à donner son propre nom si cela signifiait l’épargner lui, Saúl, son frère et Eynaelle.

Heureusement, elle savait que sa mère n’avait plus rien à craindre. Heureusement, elle ne verrait rien de tout ça.

«  Je me demande comment ma mère aurait perçu tout ça. Et ce qu’elle aurait fait, à notre place », lâcha-t-elle tout naturellement, sans se rendre compte que, pour la première fois depuis toujours, la douleur dans sa poitrine ne se réveilla pas. Sans se rendre compte qu’Edel ne savait peut-être même pas qu’elle n’était plus là. Finn n’était pas du genre à parler d’elle, encore moins à ses amis. «  J’aimerais tellement qu’elle soit encore là pour nous conseiller. »

Sans bouger, sa main se resserra encore un peu plus autour de la sienne alors que les larmes ne s’étaient toujours pas décidées à couler. Edel avait cet effet-là sur elle, celui d’aspirer ses émotions négatives, de les transformer en mieux. Il y avait définitivement quelque chose qui dépassait le simple plaisir charnel mais qui, pour le moment, se devait de rester secret.

Ce quelque chose qui la poussait à ouvrir son cœur malgré tous les risques, à se confier à lui malgré les dangers.

«  S’il n’y avait pas Finn, Eynaelle… et toi », ajouta-t-elle en sentant ses joues rougir — par chance, il ne voyait pas son visage, parce qu’elle ne s’était toujours pas éloignée de lui — «  J’ai failli suivre la Serdaigle tout à l’heure. Je déteste l’idée de rester là, à rien faire. Tu crois qu’on pourrait… faire quelque chose depuis l’intérieur ? »

Chamboulée par la douceur des mots d’Edel, elle l’avait laissé guider sa main sur ce pendentif qui ne la quittait plus depuis les dernières vacances d’hiver. À nouveau, ce fut le parfum de Maeve qui parvint à ses narines, la replongeant avec tendresse dans des souvenirs d’antan alors que le manque de sa mère se faisait toujours sentir avec le temps, tout aussi cruellement. La proximité d’Edel faisait également remonter toute la pureté de ses effluves autour d’elle, l’apaisant comme une caresse de ses doigts sur sa peau. Un mélange délicat de fragrances qui apportait à Siobhán exactement ce dont elle avait besoin sur le moment.

D'une accalmie, et de lui.

Ses yeux se perdirent dans les siens au moment où sa main remonta son visage. L'envie de l'embrasser fila dans son esprit, alors que ses pupilles descendaient lentement vers ses lèvres.

Tout son être brûlait pour ce garçon. Pour tout ce qu'il disait. Pour tout ce qu'il incarnait.

« J'espère être à la hauteur... », chuchota-t-elle en prenant le risque de se perdre dans le noir de ses pupilles.

La suite de sa phrase se perdit dans sa gorge. « De cet héritage », aurait-elle pu continuer.

Au lieu de ça, ses mots lâchés en l'air prenaient un tout autre sens. Edel n'en prendrait peut-être pas conscience, et elle non plus d'ailleurs, mais ces propos dépassaient largement leur discussion au sujet de sa mère, répondant à des questionnements bien plus vastes encore.

Elle espérait être à la hauteur de tout, tout le temps. Mais surtout à la hauteur de celui qui se présentait là, juste en face d'elle. Pour ne pas le décevoir.

Un double sens qu'elle décidait, silencieusement, de garder pour elle, plutôt que de poursuivre sa phrase.

Ses épaules s’étaient affaissées légèrement lorsqu’elle avait compris qu’Edel tenait le même discours raisonné que son père dans la Grande Salle, la poussant à définitivement quitter les lieux pour le suivre jusqu'ici.

L'adrénaline qui circulait activement entre tous ses membres lui donnait le goût d’agir furieusement, de faire tout ce qui était en son pouvoir pour lutter. Pour elle, pour les siens, pour tous ceux qui n’en avaient pas la possibilité. Gardant en tête les notes d’@Eynaelle Sanderson, l’Irlandaise savait que son heure viendrait tôt ou tard. Restait à savoir quand, comment, et surtout, si cela suffirait à combler son besoin d’exaltation.

D'autres détails qu'elle allait bien se garder d'émettre à haute voix.

Si Edel souhaitait attendre leur sortie, c’était son choix et il lui appartenait. Quant à elle, elle saurait se faire guider par l'amertume qui se rependait dans sa bouche, par l'injustice grandissante qui la révulsait. N’en déplaise à tous ceux qui l’entourait. Elle avait déjà accepté de rester enfermée à Poudlard ; aucun de ses proches ne pouvait s’attendre à la voir rester les bras ballants en attendant que l’histoire se fasse sans son coup de main. Pas après tout ce qu’elle avait fait pour obtenir la vérité.

En parlant d’Eynaelle, la Serpentard avait senti les bras d’Edel se crisper autour d’elle, signe qu’il devait se demander pourquoi la jaune-et-noir était citée. Même s’il avait gardé le silence, Siobhán ressentait ce besoin étrange de lui confier ce qu’elle savait. Comme une manière de s'ouvrir encore un peu plus à lui, naturellement, alors qu'il n'avait, encore une fois, rien demandé.

Néanmoins, pour reprendre le contrôle de ses pensées, elle fut forcée de s'arracher à son regard qui l'empêchait de garder les pieds sur terre. Elle se concentra alors sur la bague qu'elle tournait obsessionnellement autour de son doigt.

« Eynaelle est ma cousine au 1er degré. Du côté de ma mère justement. C’est une longue histoire, je l’ai appris très récemment. Mais... la vie est étrange. Il a fallu que l’une de mes cousines ne me parle plus... pour qu’une autre apparaisse. »

Son cœur se serra à cette pensée, repensant à @Blodeuyn Cynfeirdd qui l’ignorait soigneusement depuis leur dernière dispute sur le lieu où elles étaient pourtant censées toujours se retrouver. La vie était faite de mystères qui la bousculaient parfois dans une incompréhension profonde. Et qui la blessaient plus qu’il n’y paraissait.

Mais si même Edel n’avait rien vu, comment aurait-elle pu deviner ce qui se passait juste sous ses yeux ?

La réponse était toute trouvée.

En les ouvrant. Tout simplement.