Tell me something I don't already know — ft. Xris Andērson

Il y avait eu une fête d’anniversaire ce soir-là, dans la salle commune. Un Serpentard qui en avait invité d’autres, et ceux qui n’étaient pas conviés s’étaient quand même joints aux festivités, en passant. Pas Siobhán. Elle n’était pas du genre à s’imposer là où elle n’était pas voulue. Elle s’était contentée de passer dans la salle commune sur son chemin vers la bibliothèque, où elle savait qu’elle allait trouver le calme dont elle avait besoin pour travailler et oublier. Le silence l’assourdissait suffisamment pour faire taire ses tracas ; se concentrer sur ses devoirs à réaliser l’aidait à faire définitivement le vide quand elle en avait besoin. Ce soir était un de ces soirs — un de plus sur la liste. Elle n’avait pas plus d’explications que ça à donner et s’était simplement éclipsée des cachots dès qu’elle en avait eu l’opportunité.

Quelques heures plus tard, alors que la fête était bien terminée et que tous les étudiants avaient regagné leurs dortoirs, la salle commune était encore secouée de leur passage, mal rangée, flairant l’alcool depuis le bout du couloir. En rentrant chez les Serpentard, la disciple à moitié vélane ne put s’empêcher d’ouvrir de grands yeux surpris, dans un mélange de désespoir et de dégoût alors que personne n’avait jugé bon de ranger. Avec la fermeture des portes, ce genre de petite soirée se multipliait, tant les jeunes sorciers avaient besoin de se retrouver et de ses socialiser, à défaut de pouvoir s’évader au dehors des grands murs épais de ce château.

Restait que le savoir-vivre n’était pas une vertu chez tout le monde. Pourtant, ce n’était pas bien compliqué ; un coup de baguette et c’était plié. Encore fallait-il être assez lucide pour l’effectuer et éviter à la vaisselle de se briser en mille éclats sur le sol au moindre mouvement mal maîtrisé. L’Irlandaise leva les yeux au ciel, exaspérée du spectacle qui s’offrait à elle alors qu’un geste souple suffit à animer les objets, verres, assiettes, mégots, vers la place qui leur revenait. Les bouteilles allèrent quant à elles s’immiscer dans une cachette sombre que Siobhán remarqua seulement en plissant les yeux avant de s’en approcher.

Plusieurs bouteilles étaient encore pleines et elle jugea que l’heure était assez avancée pour se permettre de savourer un petit verre auprès de l’âtre. Si cela pouvait l’aider à dormir, après tout, quelques gorgées d’un liquoreux aux reflets ambrés ne pouvaient faire de mal à personne. Elle prit le fauteuil près de la cheminée — son petit préféré — et se servit un verre qu’elle porta à ses lèvres juste après l’avoir flairé délicatement. Le liquide lui fit froncer le nez alors qu’il descendait difficilement dans sa gorge malgré ses saveurs sucrées perdues dans l’amertume d’une substance qu’elle ne parvenait pas à identifier. Brandissant le verre devant elle pour mieux l’observer, la vélane ne vit rien d’alarmant dans son aspect et termina son verre avant de s’en servir un autre. Puis un autre. Elle n’avait pas l’habitude de s’octroyer ce genre de moments et entretenait avec l’alcool des rapports plutôt conflictuels de par sa corpulence qui faisait monter ses effluves jusqu’à sa tête en un rien de temps.

Mais c’était un samedi. Et la liberté n’était pas un délit alors qu’elle venait de faire disparaître les dégâts d’une fête à laquelle elle n’avait même pas participé. Une nouvelle gorgée vint glisser dans sa gorge alors qu’elle sentit une présence derrière elle et se retourna un peu trop vivement pour que ce soit entièrement naturel.

« Xris ? Quelle surprise. Oh, je t’en prie assieds-toi, ça m’évitera peut-être de passer pour une ivrogne si quelqu’un d’autre rentre après toi. »

Ses relations avec @Xris Andērson étaient un peu tendues ces temps-ci mais peut-être que c’était justement l’occasion d’en discuter. L’alcool avait le pouvoir de délier les langues.

Son esprit était toujours clair malgré quelques aspérités, causées sans nul doute par les molécules d’éthanol qui pénétraient peu à peu son sang. Loin d’être suffisant pour lui faire perdre complètement la raison, elle préférait malgré tout rester assise pour ne pas montrer à Xris qu’elle venait de s’enfiler trois verres en quelques minutes et que oui : cette quantité suffirait amplement à quelqu’un qui n’avait pas l’habitude de boire autre chose que de l’eau.

« Tu trouves pas que ça a un goût bizarre ? » demanda-t-elle en lui tendant le reste de son dernier verre pour l’inviter à expérimenter. « J’ai trouvé ça en rangeant la salle commune, dans une cachette secrète. Ça avait l’air bon comme ça mais je trouve qu’il y a un arrière-goût, non ? Enfin, ça se boit quand même, hein. »

Tout prétexte était bon pour oublier ce qui la taraudait.

La porte se referma derrière lui.
Quelques derniers regards furent échangés.
Les pas de Xris s’évanouirent bientôt en direction des cachots.
L’air était encore frais en cette soirée et le grand blond en profita pour respirer à plein poumon.
La liberté n’était plus de mise au sein du Château et beaucoup d’élèves semblaient le vivre de plus en plus difficilement.
Mais Xris semblait avoir trouvé une échappatoire.

Un petit sourire traversa son visage alors qu’il chuchota le mot de passe devant le mur de brique qui se tenait devant lui.
A peine celles-ci se retirèrent pour dévoiler l’entrée de la Maison Serpentard, Xris fronça du nez.
L’endroit empestait l’alcool.
Et a en juger par les bouteilles qui trainaient encore autour de la pièce, le Capitaine se doutait qu’il n’était pas le seul à s’être laissé enivré ce soir.
Xris passa une main dans ses cheveux ébouriffés alors qu’il avança vers une silhouette qu’il connaissait bien.

Siobhán se trouvait devant l’âtre qui dispensait toujours cette chaleur réconfortante, et réchauffait la pièce de ses couleurs chaudes et ambrées.
Dans sa main opaline, un verre emplit d’un liquide sombre se balançait.
Sa voix lui parvint alors qu’il entrait dans son champ de vision.
Il marqua une légère pause dans son avancée pour regarder sa silhouette fine qui semblait se délester d’un poids invisible au fur et à mesure que les gorgées d’alcool lui brulaient la gorge.

- Si ce n’est pas trop tard…

Xris se laissa tomber sur le canapé à côté de Siobhán et pris en main le verre qu’elle lui tendait.
Il ignorait si c’était elle qui avait mis en place une soirée ayant eu pour but d’oublier les actualités peu réjouissantes qui prenaient désormais une grande place dans leurs vies respectives.
Mais il en doutait.
La jeune femme n’était pas du genre à organiser de tels évènements, du moins en dehors de son propre anniversaire.
Le même jour que le sien.

Le grand blond porta le verre à ses lèvres et en bu une grande gorgée.
Il était assoiffé.
Il allait répondre alors que la vélane ajouta une information capitale.
Elle avait trouvé la bouteille en rangeant.
Xris la regarda, surpris.

- Donc toi, tu me fais boire un verre dont on ne connait pas la provenance. Il marqua une pause, jetant à nouveau un regard au verre qu’il tenait en main. Oh et puis…
La dernière gorgée de ce liquide brun vint tapisser sa gorge d’une traînée brûlante.
Une de plus.
Une de moins.
Quelle serait réellement la différence ?
Si la boisson était empoisonnée, alors sa sentence était déjà actée.

- Qu’est-ce que tu fais là aussi tard, d’ailleurs… ?

Xris s’adossa à l’épais coussin.
Son regard croisa celui de Siobhán à qui il n’avait pas réellement adressé la parole depuis le discours de la Directrice.
Un sujet glissant pour les deux amis, qui ne voyaient pas les choses de la même manière.
Autant donc ne pas l’aborder.