Let's not pretend — ft. Samir Mesli

Une fois le matériel restant soigneusement rangé selon les souhaits de leur capitaine, l’équipe de Serpentard avait progressivement quitté les lieux, non sans les saluer de loin. Son frère n’avait, bien entendu, pas manquer de lui adresser son habituel regard de biais, qu’il lui réservait dès qu’elle s’adressait à quelqu’un d’autre qu’à lui, et, surtout, quand il s’agissait d’un individu masculin. Il n’y avait plus que l’ombre des deux retardataires qui s’allongeait sur la pelouse du terrain de Quidditch alors que le soleil incertain et parfois timide perdait davantage de sa splendeur sur sa route pour un coucher à flanc de colline.

Malgré l’atmosphère qui s’obscurcissait sous le poids des nuages imposants en cette fin de journée, Siobhán ne put s’empêcher de remarquer, bien malgré elle, que les traits se Samir avaient changé quand elle s’était mise à rire. Pour le protéger de son influence et par réflexe, un petit pas en arrière suffit à l’éloigner pour éviter toute confusion. Au fond d’elle, la vélane aurait voulu lui confier ce qu’elle était pour qu’il sache dans quoi il s’engageait avant même d’y mettre les pieds, voire qu’il puisse s’y préparer. Mais dans le contexte actuel, elle ne pouvait s’y résoudre.

Les sorciers de tous horizons avaient généralement un avis bien tranché sur la question des hybrides. Surtout ces temps-ci. Si certains voulaient les protéger, d’autres n’hésiteraient pas à les dénoncer pour s’attirer les faveurs d’un gouvernement dont la fourberie n’était plus à prouver. C’était quitte ou double, et elle n’avait aucune connaissance de la position des Mesli sur un sujet pareil. Elle en savait trop peu sur le frère Gryffondor de Samir, mais assez pour l’avoir vu à plusieurs reprises très proche d’Apolline, d’aussi loin qu’elle pouvait l’observer. Aucun risque ne pouvait être pris qui ne mettrait également en danger sa famille et ses proches de manière générale. C’était une issue que l’Irlandaise ne pouvait permettre. Alors, elle garderait encore ses distances jusqu’à ce que la situation se tasse un peu. Jusqu’à ce qu’elle soit sûre de pouvoir faire confiance à Samir. Le bruit ne pouvait pas se reprendre ; elle y veillerait.

Toujours à distance, l’Irlandaise emprisonna une mèche récalcitrante derrière son oreille sans trop savoir comment réagir pour ne pas qu’il perçoive qu’elle était distraite par ses pensées. Il n’était pas non plus question de refuser de l’aider ; pendant trop longtemps la solitude avait été sa seule compagnie et elle avait le sentiment qu’il était temps d’accepter de changer les choses, elle qui s’ouvrait peu à peu aux autres et au monde qui l’entourait. Doucement, pas à pas, sans vraiment en prendre conscience.

« C’est un sortilège des plus utiles pour les frileux qui tiennent à leur style sans vouloir se recouvrir de plusieurs épaisseurs, en effet », confessa-t-elle avec un sourire, le regard baissé, elle qui détestait se retrouver étriquée sous de trop nombreuses couches de vêtements. « Le danger c’est d’y mettre la bonne intensité pour ne pas te retrouver brûlé. C’est la seule subtilité. Je ne suis pas sûre que ton frère apprécie que je t’apprenne des sorts qui pourraient te mettre en danger aussi rapidement après ton arrivée, pas vrai ? »

Il lui fallait simplement espérer que la rumeur, incarnée de près ou de loin par nul autre que frère jumeau, serait vraie, sans quoi elle se couvrirait de ridicule une seconde fois. Et comme ils avaient déjà repris leur échange depuis le départ une fois, il n’était pas question d’envisager à nouveau de jouer à ce jeu là. Mais rapidement, toute lueur de doute fut éclipsée par les lumières de la curiosité qui faisaient briller ses yeux. Siobhán releva la tête, sincèrement captivée.

« Sérieusement, tu parles arabe ? Et tu voudrais bien me l’enseigner ? J’en serais honorée, vraiment. Je pensais bêtement que tu étais né en France puisque tu as étudié là-bas... Tu sais, je trouve que l’apprentissage d'une langue est une merveilleuse manière de voyager sans même bouger, alors deux... Ça me permettra de découvrir un peu d'où tu viens. Tu crois que ça peut se faire en parallèle de l’apprentissage du français ? Ou bien est-ce qu’il vaut mieux apprendre séparément ? »

Sentant qu’elle s’emballait peut-être un peu trop, la vélane changea de ton pour une voix plus douce qui ne montrait pas la démonstration de son intérêt. Ou, en tout cas, pas entièrement.

« Finalement, ce sera peut-être ça qui prendra le plus de temps, plutôt qu’une petite remise à niveau de rien du tout en métamorphose… » Elle fit une pause, le temps d'une inspiration. « Demain dans la journée, ça fait trop court ? Ou n'importe quel jour de la semaine, si tu veux. On peut se retrouver entre deux cours ou après si tu préfères. Sinon, tu m'envoies une note, comme ça... Je ne t'impose rien. » Samir n'avait pas l'air d'être de ceux qui aimaient qu'on lui impose des choses. Ça lui rappelait étrangement quelqu'un. « Qu'est-ce que tu en penses ? »