Tenebrae - Part 2 [Perséphone]

Galvanisée par l'ambiance électrique, Perséphone avait la sensation de reprendre vie. Premier vent de liberté depuis son retour forcé à Poudlard et le blocus, la rencontre les Flèches d'Appleby et les Chauves-Souris de Fichucastel  en league 1 était la meilleure chose qui pouvait lui arriver. A la demande du coach Warwick, elle avait revêtu le fameux numéro 9 et pris un blitz dans les vestiaires. Il fallait donner l'impression que Perséphone Fogg n'avait jamais quitté les stades et quoi de mieux que de voir la joueuse sortir avec le reste de l'équipe anglaise - de bonnes amies à elle au demeurant - avec le slogan si facilement reconnaissable sur ses épaules. What the Fogg ? Qu'importait que ce soit du flan, ce jour-là était spécial pour Perséphone. Pour une fois, mettre un peu de distance avec sa famille lui faisait le plus grand bien. Curieux quand elle n'aspirait au fond qu'à cela, être une famille.

Elle allait justement rattraper Tracy Hawkes dans le couloir quand une voix qu'elle ne connaissait pas la figea sur place. Ses prunelles brun doré interrogèrent ses camarades mais, habitués à suivre les stratégies du capitaine, Perséphone s'exécuta. Question de bon sens. Un attentat ? Elle n'avait clairement pas l'étoffe d'un héros et si un auror s'offrait de lui faire escorte pour éviter le pire, elle n'allait pas dire non.

Il n'avait fallu que quelques mots pour que la peur s'insinue dans son coeur. Par réflexe, elle s'assura que sa baguette était bien dans le petit logement de sa manche gauche et suivit le mouvement, sans faire de vague si ce n'est lorsqu'à la sortie du couloir, un cercueil, qui n'avait décidément rien à faire ici, les accueillit que Miss Fogg acheva de se décomposer. Tracy lui donna un petit coup de coude, voyant que la jeune femme avait la chair de poule mais Perséphone faisait bonne figure. Du moins jusqu'à ce qu'elle se rende compte que l'occupant supposé de l'étrange pièce de menuiserie se dirigeait vers eux d'un pas lent mais décidé.

Ni une ni deux, cédant à la même panique que les autres, Perséphone enfourcha son blitz. Elle aurait plus tard une petite pensée pour les créations de Michel-Ange Grimm qui auraient pu la mener à sa perte autant que lui assurer une fuite rapide et efficace. Là tout ce qu'elle avait pour elle, puisque le coach Warwick avait mis son balais fétiche sous clé, c'était d'avoir joué de ses petits doigts de fée pour nouer ses cheveux en une tresse à toute épreuve et l'extension de garantie que le club avait dû signer avec le fabriquant, du moins osait-elle l'espérer. Elle s'apprêtait à donner une impulsion du talon pour lever le camp quand quelque chose la retint. Elle eut un léger sursaut et jetant un oeil par dessus son épaule, elle reconnut l'auror qui avait tout de même meilleure allure que leur invité surprise à la rune explosive.

Perséphone piqua vers le ciel, lançant un accrochez-vous dans le même temps comme elle pouvait facilement deviner que ça n'allait pas être la chevauchée fantastique. Peu de balais auraient tenu les performances avec un second passager. Les blitz n'étaient pas de mauvais instrument mais entre la différence de poids et la déflagration qui les souffla littéralement, le balais de Perséphone fit une embardée. Consciente qu'elle jouait sa vie sur ce coup-là, la poursuiveuse focalisa sur le terrain, recyclant la feinte de Warlock pour leur éviter le pire. La course se termina par une belle roulade désordonnée. Perséphone se protégeant le visage de ses avant-bras pour éviter une fracture.

Son coeur battait à tout rompre. Par réflexe, elle voulu se redresser, constatant qu'elle était toujours entière mais de nouvelles explosions lui firent rentrer la tête dans les épaules. Elle eut à peine le temps de comprendre que l'auror avait déjà bondi pour la protéger ce qui n'était pas une mauvaise chose car la terreur la paralysa quelques secondes et elle aurait probablement lamentablement échoué à lancer le moindre sortilège de protection. Tout autour d'eux, un vacarme de tous les diables ne laissaient rien augurer de bon. Perséphone risqua un oeil vers les tribunes en flamme et le souhait silencieux de garder l'auror en guise de carapace lui traversa l'esprit. Dire que son père était un héros de guerre et elle... elle rougit vaguement à l'idée de ce qu'aurait pu en penser @Barnabas Fogg et, si ce rougissement était plus dû à de la colère qu'à de la honte, il avait au moins l'avantage de lui redonner un petit coup de peps.

La voix de l'auror la ramena à quelque chose de plus concret.

« Oui. Désolée pour cet atterrissage, c'était un peu violent. », elle saisit la main qu'il lui tendait, avisant leur blitz qui grésillait un peu plus loin. Il ne faudrait pas compter là dessus pour s'en tirer. « Vous n'avez rien de cassé ? », demanda-t-elle soucieuse et aussi un petit peu intéressée malgré elle.

Il se présenta, offrant une promesse qu'elle n'était pas sûre de le voir tenir mais qui avait le mérite de cocher toutes les cases du roman courtois.

« J'ai bien envie de vous croire. », fit-elle avec un sourire plus désespéré qu'autre chose, « Perséphone. Fogg. », ajouta-t-elle avec un brin d'hésitation. « Je vous aurais bien dit les issus de secours mais peut-être qu'on ferait mieux de viser l'infirmerie.Les soigneurs y gardent des portoloins pour l'hôpital de Maddock Rowe... »

Le chemin serait peut-être plus long mais ils avaient bien moins de risque de périr sous un éboulement. Quant à transplaner... elle n'était pas sûre que la league ait eu le temps de lever les protections avant d'évacuer.

Il fallait dire qu'au vu du paysage revigorant qui les entourait, tout reposer sur lui ou presque. Il aurait été vraiment fâcheux que l'atterrissage l'ait estropié.

Fergus approuva l'idée et ils ne perdirent pas plus de temps à discuter des détails de leur itinéraire. L'auror semblait suffisamment bien informé et ils se retrouvèrent à courir côte à côte vers le couloir qui menait à l'infirmerie. Par courtoisie plus qu'autre chose sans doute, il annonça qu'il passait devant. Encore une fois, elle n'allait pas s'en plaindre. Perséphone suivit du regard le sortilège plutôt attendu d'un patronus tout en rattrapant l'auror dans les escaliers. Comme elle ne s'était pas attendu à ce qu'il s'arrête carrément,elle manqua lui rentrer dedans, se contentant de s'aider de sa main pour freiner.


« Tout va bien ? On croirait que vous avez vu - »

Un fantôme ? C'était en quelque sorte le cas. Loin d'être rassurée, elle jeta un coup d'oeil autour d'eux et au-delà, pour s'assurer que d'autres inferis ne leur arrivaient pas dessus. Pour une première rencontre, elle s'en rappellerait et pouvait d'ores et déjà dire que la chose lui foutait une angoisse insurmontable. Il y avait peu de chance qu'elle dorme sur ses deux oreilles ce soir, ni même avant un moment. L'auror se ressaisit presque aussitôt, achevant de délivrer son message à son patronus. Un joli renard, sans doute signe d'une certaine finesse d'esprit. Mieux valait se dire ça...

La poursuiveuse acquiesça à l'idée de lever le camp le plus vite possible. Il fallait qu'il atteigne l'infirmerie et ses précieux portauloins. Tout à coup, les murs se mirent à vibrer et une chaleur écrasante les enveloppa. Perséphone se protégea le visage par réflexe portant sa main à sa gorge de surprise. Au même moment, Fergus la souleva sans prévenir. Un petit cri de surprise lui échappa tandis que par réflexe, elle cherchait une prise sur ses épaules ou son dos. Voilà qu'ils sauraient littéralement dans le vide mais ça n'avait rien d'aussi effrayant que tout le reste. Ils se réceptionnèrent sur un sortilège bien placé et leur regard eurent à peine le temps de se croiser que Fergus l'entraînait par la main vers l'extérieur, avant que tout ne s'effondre sur eux. Soufflés par une nouvelle explosion, ils y arrivèrent bien plus vite que prévus. Elle pouvait sentir son coeur battre à tout rompre contre l'auror qui s'était à nouveau positionné en bouclier pour la protéger. Le souffle court, les yeux plongés dans les siens, elle mit quelques secondes à relâcher le morceau de tissu auquel ses doigts s'étaient cramponnés par pur réflexe.

« Retour à la case départ. Si vous avez une meilleure idée, là tout de suite, je suis preneuse. » suggéra-t-elle d'une voix qui trahissait son niveau de stress.

Curieusement, à aucun moment ni le feudeymon ni les inféris ne semblaient se préoccuper d'eux. Mais elle n'avait pas envie de rester pour savoir jusqu'à quand. Elle détachait à peine son regard de l'auror que quelque chose leur fonçait dessus dans sa vision périphérique.

« Flipendo ! », lança-t-elle par réflexe, sa baguette de laurier jaillissant de sa manche sans dévier.

Le banal sortilège percuta le morceau de siège enflammé juste à temps. Un sortilège de première année, surprenant en pareille situation, mais efficace. Perséphone ne put s'empêchait de se dire qu'elle jouissait d'une espèce de chance du débutant qui n'allait pas durer.

« Là bas ! », cria la jeune femme en avisant un petit escadron de sorciers en uniforme noir qui tentaient une percée par les airs.

***

Perséphone grimaça. Elle avait beau être à Sainte Mangouste, loin du stade en flamme, l'odeur de roussi la prenait au nez, promettant de la suivre ad vitam. Une infirmière s'affairait autour d'elle, sans doute à prendre des constantes.

« Vous pensez que je pourrais être chez moi avant la nuit ? », demanda-t-elle presque naïvement. Elle ne rêvait que d'une bonne douche et d'un livre, même si c'était entre les murs de Poudlard et ça ne serait probablement pas le cas puisqu'elle avait loupé le coche pour l'heure du retour. Une chambre dans n'importe quel hôtel ferait parfaitement bien l'affaire.

L'infirmière se retint de sourire.

« Je ne veux pas vous faire de faux espoir mademoiselle Fogg. Vous avez l'air de vous porter comme un charme mais je dois attendre le retour de vos examens et cela peut prendre du temps. Et puis, il y a quelqu'un qui voudrait vous voir. », s'excusa la femme à la blouse lila.

Perséphone murmura un ce n'est pas grave entre ses dents, plus contrariée à l'idée de ce quelqu'un qui n'avait pas de nom qu'autre chose. L'espace d'un instant, elle s'imagina que ce pouvait être ses parents puis l'idée ridicule que  @Barnabas Fogg ait pu se souvenir qu'elle était au stade ce jour-là anéanti cette illusion. Peut-être son frère ? Comme elle ne portait pas le même nom de famille que sa mère et qu'elle ne l'avait pas avertie de son petit retour dans le monde du Quidditch, il n'y avait aucune raison qu'Ariana Valero, sa mère, eusse été prévenue. Sauf par  @Persée Fogg peut-être. Mais les nouvelles n'allaient tout de même pas aussi vite.

Finalement, elle n'eut aucun mal à reconnaître la personne qui attendait dans l'encadrement de la porte. Elle se fit simplement la réflexion que, pour avoir passé autant de temps à lui courir après et à se rouler dans l'herbe avec lui, elle remarquait seulement que son "héros" était plutôt agréable à regarder.

« Les infirmières en ont après vous aussi ? », s'enquit-elle avec un petit clin d'oeil à l'attention de la sienne qui quittait la pièce amusée. Perséphone ne releva pas l'étonnant empressement qu'elle mettait à quitter la pièce comme lui s'y présentait. Elle avait sans doute son caractère spontané l'empêchait-il de voir le mal partout, « Fergus, c'est bien ça ? Est-ce que je peux faire quelque chose... »

Elle eut une petite grimace compatissante pour l'uniforme mais dans le fond il valait mieux ça que lui. Il fallait dire qu'il avait extensivement servi de bouclier humain cet après-midi et elle ne pouvait que lui en être reconnaissante. Elle le suivit du regard, intriguée, comme elle voyait qu'il arborait un masque plus sérieux tout à coup. Perséphone ne dit d'abord pas un mot, suspendue à ses lèvres, comme elle se demandait ce qu'il avait de si terrible à lui annoncer. Ce petit silence mystérieux dura quelques secondes pendant lesquelles elle ne le quitta pas des yeux. Puis il finit par se lancer, son attention tout entière reportée sur le petit calepin dans lequel il s'apprenait à prendre... sa déposition ? Probablement un truc dans le genre. Sa mère avait beau être auror, Perséphone n'avait à peu près aucune notion de ce qui lui pendait au nez. Et justement, sa mère avait quelque chose à faire dans cette histoire.

« Ah oui ? C'est drôle ça. Le monde est petit. », releva-t-elle. Sa mère avait des années de métier derrière elle et il était plutôt rare qu'elle leur parle du boulot. Sans doute pour leur propre sécurité, du moins c'était ce que Perséphone avait toujours supposé, « Si ça peut vous mettre à l'aise, ma mère n'est pas le genre à casser du sucre sur le dos de ses collègues. En fait elle ne parle jamais du boulot donc pour moi vous être une page vierge. Pas d'a priori. Rien du tout. », offrit-elle dans le but de briser un peu la glace.

Elle se rendrait très vite compte que l'auror n'était pas tout à fait dans le même état d'esprit ni dans la même situation qu'elle. La mention de trafic de stupéfiants lui fit sortir les yeux de la tête. Pendant un bref instant, elle se retint de lui demander si c'était bien de son casier judiciaire dont il parlait. Premièrement, elle découvrait qu'elle en avait un même si, après réflexion, ça n'était pas surprenant vu la conclusion de sa dernière visite à Mrs Carmilla. Elle n'en menait clairement pas large et elle avait clairement l'intention de s'expliquer, voire rectifier, quand toute volonté de coopérer l'abandonna au moment où il fit allusion à ses collègues moins conciliants et surtout à la plaie que ça allait être de l'interroger à leur place.

« Eh ben dis donc, je ne sais pas comment je dois le prendre... », souligna-t-elle avec une petite pointe offensée dans la voix. Perséphone croisa les bras sur sa poitrine, résolument vexée mais toujours trop fière pour l'envoyer chier directement. Et puis, la mention de casier judiciaire avait de quoi la calmer. Elle allait répliquer quand il reprit la parole pour lui poser une première salve de questions qui la laissèrent coite quelques secondes. Bouche bée, Perséphone était au comble de l'indignation. « Attendez, vous me suspectez d'avoir mi le feu au stade et lâché ces horreurs dans les gradins c'est ça ? », répliqua-t-elle d'un ton incrédule, « Je veux dire... il faut pas au moins un niveau ASPIC pour ce genre de conneries ? »

Ca lui paraissait une évidence mais elle ne percevait pas que son plaidoyer était sans doute le meilleur qu'un barjo dans le genre de celui après lequel les aurors courraient aurait pu sortir. Après tout, quel meilleur alibi que son incompétence...

« Un avocat ?? Mais vous plaisantez j'espère ! Enfin, je vois pas comment... », laissa-t-elle échapper dans un moment de panique. Son joli teint noisette avait perdu de sa couleur tout à coup. Elle se ressaisit, consciente qu'il valait mieux jouer la coopération que se braquer complètement, « Écoutez, je n'ai rien à cacher c'est juste que ça me paraît complètement dingue cette histoire. Je n'ai pas le niveau pour et sincèrement si je ne fais pas des cauchemars pendant des mois après tout ça ce sera un miracle. Enfin, je suppose que ce n'est pas ce que vous voulez entendre.», elle ne le quittait toujours pas des yeux, appelant à un peu de pitié de sa part sans vraiment s'en rendre compte. Finalement, elle détourna le visage vers le mur à sa gauche, complètement dépassée, « Je devais faire mon retour au stade avec ce match. Mon coach s'était arrangé pour que je porte mon numéro 9 sur le banc des remplaçants. C'était juste un coup de comm bien sûr. Je devais pas bouger du banc mais il avait besoin de s'assurer que ma côte ne tombe pas complètement en chute libre après... tout ça. Trafic de stupéfiant ? C'est un peu fort de café, vous êtes sûr que vous ne vous êtes pas trompé ? », elle n'avait pas pu s'empêcher de poser la question.

Pour tout dire ce soir-là, Perséphone avait accepté le verre de la charmeresse sans vraiment se poser de question. Elle avait peut-être fait l'erreur de s'ouvrir un peu trop et de croire qu'il existait un remède miracle à son mal-être finalement très banal. Quand elle avait commencé à recouvrer ses esprits, sa bande de potes s'était volatilisée et les dorures de l'appartement dans lequel se tenait leur petite sauterie avaient cédé la place au parement tout déconfit d'une cellule de dégrisement. La belle gueule du golden boy qui l'avait poursuivie de ses ardeurs toute la soirée avait troqué la sienne et elle devait subir la compagnie d'un ivrogne aux cheveux gras qui puait l'alcool artisanal de bubobulb. Autant dire qu'elle était vite redescendue après ça et la honte avait cédé la place à tout le reste, jusqu'à ce que le coach Warwick ne se ramène, la poussant sans rien faire à se cacher derrière ce masque d'arrogance qui lui ressemblait si peu. Elle savait que les agents qui l'avaient récupérée lui avaient fait faire des analyses mais elle était trop stone pour se rappeler du petit compte rendu qu'on avait fait devant elle, sans doute pour en appeler à son bon sens moral.

Perséphone s'éclaircit la voix. Ca devenait trop intime pour elle. Mieux valait s'en tenir aux questions qu'on lui avait posées.

« Oui j'ai été quelques fois au stade dans la semaine, comme les autres. Même si je devais rester sur la touche, c'était l'occasion de me remettre en vol et puis, avec le blocus... bref. Le coach Warwick peut confirmer. Et la capitaine de l'équipe aussi. »

Il semblait qu'elle avait fini de s'insurger mais dans sa voix, on entendait tout son dépit.

A l'arc presque comique de ses sourcils, il aurait pu deviner qu'elle n'avait pas besoin d'une dissertation ni d'un cours magistral sur comment fabriquer un inferi dans son garage. Elle ne le coupa pas cependant, préférant de loin voir à quel moment il se rendrait compte qu'il fallait s'arrêter mais ce moment n'arriva jamais.

Elle cessa de rire à l'évocation de la situation des lycans actuellement. Au vu de la situation d'Eugène, son frère aîné, ça n'avait rien pour la faire sourire, si ce n'était cette petite parenthèse dans laquelle il dévoilait son opinion sur la question. Perséphone était à peu près sûre que ça n'était pas comme ça qu'on conduisait l'interrogatoire d'un Mage Noir mais là encore elle ne dit rien, toujours indulgente. Il fallut qu'il pousse encore un peu pour la faire réagir.

« Un profil "marqué" ?! », à nouveau dans la voix de la jeune femme on pouvait sentir une petite pointe d'indignation. L'auror s'empressa de préciser son propos mais seulement pour mieux s'enfoncer. S'il avait porté son regard sur elle, plutôt que de faire les cents pas, il aurait bien remarqué l'expression de plus en plus atterrée de Perséphone Fogg et ses yeux fauve qui lançaient des éclairs « de fragilité ? un peu de mal ? perdue ? je vois que vous avez cerné Perséphone Fogg de A à Z, félicitation. »

Fragile ? Ca n'était certainement pas un qualificatif qu'elle acceptait quand bien même il revêtait une part de vérité. Mais ça n'était pas le sujet et elle se demandait bien sur quelle base il se permettait d'e juger. Quand il eut terminé, concluant qu'elle pourrait rentrer sans plus d'embêtement, il referma ce maudit dossier, content de lui, ce qui acheva de la faire fulminer.

« Je ne suis ni fragile ni perdue monsieur... Clearwater. Vous devriez le noter dans votre rapport. », siffla-t-elle. Elle avait dû jeter un oeil à son badge pour s'en rappeler et d'ailleurs maintenant qu'elle le voyait, elle ne put s'empêcher de penser au professeur de Sortilèges. S'il y avait un lien de parenté, il fallait s'attendre à ce que le bonhomme soit du genre borné et très content de lui. Ca n'était pas forcément pour lui déplaire chez le professeur mais chez l'auror, elle avait des doutes.

Toujours un peu en bute, elle accueillit son sourire avec une petite moue encore contrariée, mais l'idée de sortir de Ste Mangouste avait suffisamment de charme pour qu'elle passe à autre chose. N'empêche qu'elle emporterait ce portrait peu flatteur avec elle pendant un petit moment. Juste de quoi égratigner son égo. Aussitôt dit, Fergus exécuta un nouveau patronus, confirmant dans son message le lien qu'elle avait supputé un peu plus tôt. C'était presque mignon de l'entendre le dire. Papa.

Elle eut une petite hésitation avant de prendre le bras qu'il lui offrait, se demandant si les aurors avaient des dérogations spéciales pour pouvoir transplaner directement depuis les chambres sans repasser par le hall d'entrée.

« C'est une proposition ? », demanda-t-elle d'un ton polisson, en lui adressant un petit regard en coin. A son tour d'être contente d'elle et pour couronner le tout, des fois que l'idée de se faire draguer par une étudiante lui donne des envies de fuite, elle tenait bien fermement ce bras qu'il avait cédé en toute naïveté. Elle laissa passer un petit silence gêné avant de lui faire grâce, « Je plaisante. Avouez que c'est de bonne guerre... », elle espérait bien qu'il ne serait pas si à l'aise que ça à l'idée, ça lui ferait les pieds.

Elle n'eut pas le temps d'en juger que le monde réel leur sauta à la figure, à peine le pas de la porte franchi.

« Mademoiselle Fogg, racontez nous ce qui s'est passé ? Il y a eu des blessés ? »
« Des rumeurs circulent sur un possible rachat de votre contrat en Ligue 1 , dites nous tout : c'est le retour du numéro 9 ? »

Ils n'étaient pas bien nombreux mais ils étaient là, les journalistes sportifs, trop entreprenants pour le commun des mortels, trop excités aussi. Perséphone sourit, cette agitation lui avait manquée quand bien même elle la prenait de court. Rodée à l'exercice, la jeune femme quitta le bras de l'auror aussi rapidement et discrètement que possible. Elle ne voulait pas qu'une photo volée puisse alimenter de folles rumeurs sur ses histoires de coeur. Pas tellement pour elle, en soit plus on parlait d'elle mieux c'était pour sa carrière, mais elle se méfiait de la tournure que certaines interprétations auraient pu donner à l'histoire une fois retranscrite. Et puis, pour lui, elle ne pouvait pas laisser la porte ouverte à ce genre d'âneries.

« Je crois que vous êtes mieux informés que moi. », minauda la jeune femme qui dégageait tout à coup une assurance folle et l'aura solaire que les photos magiques aimaient à montrer. Elle avait ce large sourire pétillant, presque complice, et la presse adorait ça, même s'ils n'étaient que trois pelés un tondu.

« Le bureau des aurors est sur le coup ? Est-ce que vous avez un suspect ? »
« Est-ce que c'est votre petit ami ? »

Et voilà que la machine s'emballer.

« Non non, absolument pas. Monsieur est agent du bureau des aurors, rien de plus. », disqualifia la jeune femme en continuant son chemin vers le hall d'entrée, sans s'arrêter. Elle espérait bien que ledit petit ami allait l'imiter et non se laisser piéger. Elle l'aurait bien traîner en le tirant par la main mais encore une fois, elle ne voulait pas donner d'eau au moulin des journalistes.

A son trait d'humour il se referma comme une huître des Hébrides. Elle qui avait simplement voulu détendre l'atmosphère après être un peu montée dans les tours : ça n'était pas une réussite. Un peu gênée de la situation, Perséphone adressa un long regard à ses baskets en se demandant s'ils allaient faire tout le reste du trajet dans cette ambiance à couper au couteau. Il amorça finalement un début d'explication mais les journalistes leur tombèrent dessus avant qu'il ait pu dire grand chose.

Une rupture difficile, en déduisit-elle. Ou pire. Elle ne saurait jamais maintenant. Quoiqu'il en soit, elle résolut de s'abstenir de toute taquinerie portant sur le sujet à l'avenir. Enfin, sauf s'il lançait les hostilités mais vu l'espérance de vie de leur relation bureaucratique, elle avait de gros doutes là dessus.

L'auror géra les journalistes d'une main sévère, laissant la brochette de professionnels à ses protestations. Perséphone ne put s'empêcher de sourire. Elle commençait à se faire à l'image du héros faisant rempart devant la demoiselle en danger. Fort dommage que des types de ce genre ne croisent jamais sa route dans la vraie vie. Il fallait dire que la plupart des hommes qui l'accostaient venaient rarement en amoureux désintéressés. Il y avait toujours un autographe ou une photo à faire et il lui était même arrivé de se demander ce qu'ils allaient en faire exactement avant de se raviser. Mieux valait ne rien savoir du tout.

« Impressionnant. Un tantinet démesuré mais impressionnant. Dommage que je ne puisse pas vous embaucher comme garde du corps. », s'amusa-t-elle en guise de remerciement. Elle ne lui fit pas remarquer qu'elle aurait très bien pu gérer les journalistes, comme elle le faisait toujours. Peut-être parce qu'elle appréciait être la protégée de quelqu'un, ce petit excès d'attention qui ne durerait pas. Il s'en excusant tout de même, devinant les effets à court terme de cette petite incartade, « Ca l'est parfois mais pour être honnête, mais le plus souvent il y a un petit côté grisant je trouve. Tant qu'on ne se laisse pas déborder. », c'était vrai qu'elle aimait se prêter à l'exercice de la conférence de presse mieux qu'aucun de joueurs de sa génération, c'était sans doute ce qui contribuait à la rendre si populaire alors qu'elle ne jouait qu'en seconde league. Elle aimait ce trop plein d'attention, pourvu qu'il ne dure qu'un instant. Curieusement, par ailleurs, Perséphone Fogg pouvait se montrer assez solitaire à ses heures. « C'est surtout pour vous. Je ne voudrais pas vous mettre dans une situation pénible.», ajouta-t-elle, renvoyant directement à ce qu'il avait commencé à lui dire, « Je ferais au mieux pour démentir et puis, ils auront du mal à entretenir le mythe plus de quelques semaines sans renouveler leurs photos. Au pire, je m'arrangerai pour qu'on me voit avec un autre... »

Elle n'aimait pas faire ça mais si le démenti ne fonctionnait pas, ça restait une solution de secours. Ce n'était pas comme si elle n'était pas certaine de trouver un volontaire même en jouant franc jeu dès le départ.

Il lui tendit à nouveau son bras, rebondissant sur la petite taquinerie qu'elle lui avait adressée un peu plus tôt. Aussitôt, elle sourit et lui adressa un petit regard en coin complice.

L'instant d'après, le frais de la campagne écossaise la saisit. Il avait choisi un lieu un peu à l'écart étonnamment. Pourtant il y avait une ère de transplanage juste devant le portail. L'explication ne tarda pas à venir, en même temps qu'un bout de papier qu'elle avait pour ordre de n'ouvrir qu'une fois à l'intérieur. Elle obtempéra, peu rassurée à l'idée que des inféris ou autre puissent faire leur apparition dans la nuit pour leur tordre le cou et, se projetant quelques minutes en avant, elle espérait franchement qu'elle passerait d'un Clearwater à l'autre et qu'il n'allait pas la laisser attendre toute seule ici. L'instant d'après, elle se faisait la remarque qu'elle avait tout de même passé l'âge de la peur du noir. Elle glissa le petit papier dans sa poche arrière tandis qu'il dissipait ses craintes, allant même jusqu'à l'inviter à le recontacter en cas de besoin.

Décidément, ce Fergus Clearwater sortait d'un livre de contes. Elle aurait largement pu attribuer cela à la formation consciencieuse des aurors si sa mère n'avait pas fait partie du lot. Or, elle imaginait mal Ariana Valero se fendre de ce genre de propositions. D'ailleurs, elle n'avait jamais ramené qui que ce soit à la maison en leur présence.

Elle pouffa devant son trait d'humour, accueillant le clin d'oeil avec un nouveau sourire pétillant en attendant le Pr Clearwater.