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Iris Faux-Orpin
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1982
cw : mariage forcé, violences conjugales, polygamie, suicide, mort violente


I. Le Palais des Songhaï

Le pépiement argentin des fontaines. Voilà ce qu'il retiendrait de sa visite au palais de Songhaï. Ça n'était pas exactement un palais mais un domaine clos dont chaque détail avait été étudié pour impressionner le visiteur. Des jardins luxuriants au choix de la pierre de sable, coûteuse à souhait. Des soieries précieuses à l'atmosphère paisible qui transportait déjà en son sein les graines de l'érudition. Qui savait quels trésors, quels joyaux les Iba avaient amassés dans leur forteresse des sables ? Toutes sortes de rumeurs circulaient sur les secrets des maîtres de l'eau. Des certitudes aussi, volontairement colportées par le maître des lieux, par le truchements de ses nombreux tyindikatas. L'homme se plaisait parfois à se faire appeler Mansa Iba mais à l'ombre de Mawdo Sô, il portait simplement le nom que son père lui avait donné. Sakoura Iba. Cela ne lui enlevait pas qu'il était l'homme le plus riche du pays et ce n'était pas peu dire.

La légende voulait que le plus beau joyau de Songhaï était une femme. La deuxième fille du premier lit de Sakoura Iba. Un émerveillement pour les yeux et l'esprit, disait-on. Il était toujours fasciné par ce que l'on pouvait dire des femmes lorsqu'on cherchait à attirer la convoitise de ses voisins. Cela fonctionnait d'une certaine façon. Nombreuses avaient été les filles de Sakoura Iba, à franchir la grande porte en ogive, ployant sous le poids de l'or du Mali, leur ceinture de cauris fièrement exhibée sur leur ventre dénudé. Même à ce détail, on reconnaissait la progéniture d'Iba. Les petits coquillages étaient passés au fil d'un lacet d'or pur et eux-mêmes, lamés du précieux métal. On parlait encore de la ceinture de Rokia, sertie d'émeraudes. De celle de Nilaja, aux grenats mélanites imitant parfaitement les petites porcelaines dentelés. Toutes les filles de Sakoura Iba quittaient sa maison avec les honneurs et les richesses dus à des princesses. Et chacune de ces sorties était épiée par le peuple, comme un événement en soi. Chacun attendant le jour où le joyau de Songhaï quitterait à son tour la maison de son père. Mais ce jour ne venait jamais. On avait vu quelques fois la fille adorée de Sakoura Iba, accompagner son père non pas en inférieure mais comme s'il avait prévu d'en faire son légitime héritier, devant ses fils tous plus braves les uns que les autres. Ces quelques rares apparitions avaient suffi à construire la légende de Zeyna la Blanche, plus belle que les plus belles reines de l'Egypte ancienne.


Zenya était belle en effet, autant que l'écrin dans lequel elle évoluait au quotidien. Elle recevait ses instructeurs dans les jardins de nagamalli, sous les immenses fromagers, où flottaient le parfum des fleurs les plus rares et les plus spectaculaires. Sous l'oeil farouche des pêcheurs de la garde, ses tyindikatas personnels lui versaient le délicieux djoussouma tchireye, directement tiré des calices de l'hibicus magniflora qui portait son ombre à toute une partie du jardin. On la disait éduquée aux arts des griots, baignée chaque jour dans le lait de l'antilope tyi wara. Les devins lui avaient prédit une grande destinée, alors, lorsque Mawdo Sô avait franchi les portes du palais de Songhaï, les bouches s'étaient tut et les oreilles s'étaient mises à écouter aux portes. Dans son jardin merveilleux, Zeyna ne s'en était nullement émue. Son père avait déjà refusé sa main à une dizaine d'hommes, tous plus appréciés que l'aspirant empereur du Mali, pour ce que valait ses prétentions.

Lui, n'avait que faire des rêveries d'une femme de plus. Il en avait déjà trois à l'époque. Il était venu pour discuter alliances politiques avec le déjà vieux Sakoura Iba des Songhaï. L'homme qui l'attendait au terme d'une enfilade de colonnes de sable stupéfiante était vêtu d'un boubou de drap de coton blanc, le crâne couvert d'une kofia savamment brodée à la main, cadeau de mariage de sa première épouse, Maïssara.

« Ah ! fils des Sô. Pourquoi es-tu venu me chercher jusque dans mon humble demeure ? », ouvrit le vieil homme avec emphase, accompagnant la parole d'un geste théâtral. Il savait bien que sa demeure n'avait rien d'humble et se plaisait visiblement à ce petit jeu de convenance qu'ils étaient obligés de jouer tous les deux et qui faisait surtout perdre son temps à Mawdo Sô.

« Ce n'est pas toi que je suis venu quérir Sakoura Iba mais mon héritage. », opposa l'homme à la peau d'ébène.

Mawdo Sô avait de ces visages presque parfaits que l'on ne croise qu'une ou deux fois dans sa vie. Sa bouche aux lèvres pleines se refermait toujours sur une ligne dure et inflexible. Il avait des yeux perçants, parfaitement noirs. Ses muscles tendus faisaient saillir par endroit les veines sous sa peau lisse et sombre. Et, comme il était grand, solide et élancé, on avait rarement le cran de lui dire non. Il avait aussi pour lui une éloquence rare, portée par une voix puissante, qui lui faisait justice plus souvent encore que son bras.

Pour toutes ces raisons, Mawdo Sô, fils de Modibo Sô était l'homme derrière qui les opprimés et les insurgés marchaient comme un seul, scandant son nom et celui de son Empire. Lui, le fils des Sô, était l'espoir incarné d'une autre Afrique. Plus forte et affranchie.

Sakoura Iba éclata d'un rire sonore, dévoilant toutes ses dents et sa gorge.

« Allons nous installer sous l'arbre des palabres, fils des Sô. »

Aussitôt, un de ses tyindikatas se précipita à son service, offrant un bâton de marche avant de disparaître. Ici pas de fétiche, les serviteurs étaient de chair et de sang, respirant le même air que les autres habitants du palais tout en étant nés dans la mauvaise caste, sous la mauvaise étoile. Le poing refermé dans son fos, Iba se retourna pour s'assurer que Sô le suivait. Ils continuèrent de parler tandis que l'aîné ouvrait le chemin jusqu'à un jardin plus dénudé, presque laissé à la caresse implacable du soleil. Dans cette cours sans artifice, le patriarche tenait conseil et discutait des choses importantes. Seul un tyindikata, dépouillé de toute parure superflue, était à servir le thé rose et brûlant qui venait d'être infusé.

« Tu as des rêves de grandeur, fils des Sô. Pourtant, tel que je te vois tu n'as que les vêtements que tu portes sur le dos et tu pourrais bien en changer demain, comme le serpent quitte ses habits de peau. Moi je suis riche, j'ai neuf épouses et plus d'enfants et petits enfants que je ne peux en compter. Mes pêcheurs t'auront jeté aux hippopotames ou aux crocodiles avant que tu ne me dépossèdes de tout cela. », avertit le vieil homme.
« Qui a parlé de vous déposséder ? », répondit Sô d'une voix plus sucrée que les doucelettes de son enfance, « Je ne cherche à déposséder personne. Au contraire. Je ne suis que le serviteur d'une cause juste, celle d'un Empire du Mali puissant et respecté. Vous n'y êtes pas insensible, je le sais car tout autant que moi vous exécrez ces imbéciles qui dirigent depuis leur siège éjectable à Tombouctou. », il semblait presque qu'il avait écrasé ces derniers mots entre ses dents et son regard brûlait d'une flamme dévastatrice qui aurait presque fait sursauté l'ancien. « Autrefois Soundjata, mon propre père, est parti du Vert Pays et a rallié tous les royaumes sur le passage de son armée. Le Songhaï était de ceux-là. Moi je n'ai pas d'armée mais j'ai le don de l'éloquence et ma volonté file droit comme la flèche de Soundjata. On me suit déjà mais je ne ferais rien d'un Empire debout sur une seule jambe. »

Cette fois le vieux Iba le prenait au sérieux. Se redressant sur sa canne, il le regardait de pied en cap, comme pour jauger de la valeur de Mawdo Sô, un air grave peint sur le visage.

« Reste quelques jours, fils de Soundjata. Tu seras mon invité. Ainsi, tu pourras mieux m'entretenir de tes projets. »

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Le rire de Zeyna s'éleva, claire comme l'eau de la fontaine où elle baignait ses pieds. Lunja, Tilelli et Timet les deux soeurs, l'accompagnaient, elles aussi pieds nus dans la fontaine aux écailles multicolores. C'était un des plus beaux endroits des jardins privés de Zeyna. Sous les flamboyants, près de l'arbre du voyageur qui lui faisait comme un trône de verdure, le joyau de Songhaï aimait à jouer de la kora et à passer du temps avec ses tyindikatas, auxquelles s'ajoutait Ašbaku, seul jeune homme à servir une fille de Sakoura Iba. Tous couverts du même or que leur maîtresse, ils jouissaient d'égards et d'affection qui faisaient verdir d'envie les autres moins bien traités qu'eux. Ceux que l'on reléguait aux casernes sombres à leurs rares heures de liberté, que l'on ne considérait qu'alors qu'on avait besoin d'eux. Lunja, Tilelli et Timet, elles, partageaient la chambre de Zeyna. Ašbaku avait son minuscule appartement, adjacent à celui de la belle. Chacun bénéficiaient des enseignements dispensés à leur maîtresse, afin que leurs compagnies fût aussi riche qu'agréable. Peu étaient admis en leur joyeuse présence, et moins encore osait interrompre le doux filet de leur quotidien. Alors les protestations des pêcheurs qui montaient la garde devant l'entrée parvinrent à leurs oreilles, tous se redressèrent comme un seul, sur leur garde. Les tyindikatas s'étaient instantanément armés, prêts à défendre la belle Zeyna qui, plus mesurée, dardait d'un oeil sévère l'entrée de ses jardins. La vision de trois femmes, toutes en chair, qui dandinaient leurs airs importants en leur direction ne lui tira pas même un sourire. C'était les soeurs aînées de son père. Ses tantes, Zahira, Nihahsah et Yumna. Elles ne quittaient jamais leurs appartements près de la naissance du fleuve. Lorsqu'elles le faisaient, une fille Iba s'en allait. Et cette fois-ci, c'était Zeyna.

La jeune femme releva le menton, masquant au mieux ce sentiment de trahison qui la prenait aux tripes. Alors elle releva ses robes à mi-cuisse, l'eau ruisselant sur sa peau dorée, enjamba la margelle du petit bassin aux écailles multicolore et baisa ses tyindikatas , ses amis d'enfance, sur les lèvres. Les larmes roulèrent sur les joues de Tilelli, rondes et chaudes. Les autres ne tardèrent pas à l'imiter malgré leurs efforts. La silhouette de Zeyna qui les quittait pour toujours à la suite des trois sorcières leur brisait le coeur. Elle ne se retourna pas, passant devant ses tantes sans se laisser entourer comme l'aurait ordonné la tradition. Mais elles n'avaient pas à se battre, c'était déjà bien plus que les trois vieilles l'avaient espéré de la part d'une jeune femme plus éveillée à la réalité du monde qu'aucune de ses soeurs. Sakoura l'avait trop couvée pour qu'elle ait bon caractère. Ça n'était pas une jeune femme intimidée ou abattue qu'elles descendaient à la source du Niger. Au contraire dans le regard de Zeyna, un feu bravache persistait.

Elle ne leur adressa jamais la parole. Elle ne les regarda même pas mettre en place les éléments de leur rituel sordide. La belle Zeyna émit une légère résistance, malgré elle, lorsque la main de Yumna lui intima de s'agenouiller sur les pavés. Elle ferma les yeux lorsqu'on lui versa sur la tête l'eau de la naissance du fleuve, l'huile et le lait. Si quelques larmes furent emportées, elles demeurèrent invisibles. L'huile du baobab glissait lentement sur sa peau, comme un linceul collant. Des mains essuyaient son corps sans une once de douceur ou d'attention, simplement appliquées à une routine trop souvent répétée. Enfin, on versa le lait écru, encore tiède, sur sa peau assouplie et satinée puis on traça les sceaux des quatre piliers du mariage. La fidélité. La dévotion. La fécondité. L'indissolubilité. Chacun gravé à même la chair, imprégnés jusqu'à l'âme par la magie la plus ancienne. La brûlure était connue pour provoquer les premiers signes de rébellion mais Zeyna se contenta de serrer les dents en un mauvais rictus. Alors ses robes de voiles délicats furent sacrifiées au feu. Entre temps, Zahira était revenue avec le djeli et le forgeron. Tous deux les yeux bandés pour accomplir la partie de l'office réserver aux hommes. La préservation de la mémoire de ce funeste jour, et la confection de la ceinture de cauris dans les flammes magiques qui auraient consumé les habits d'innocence de la jeune femme. Les trois soeurs nouèrent la ceinture à sa taille, encore fumante. Une brûlure intense dévora Zeyna de l'intérieur. Ça n'était pas celle du feu, mais celle du serment lié à même sa chair. Alors, elle ploya, le front sur les dalles dures et froides, le souffle coupé, les onglets cassés à force de labourer le sol ingrat qui n'offrait là aucun réconfort.

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Ils étaient nombreux à franchir la porte en ogive du Palais des Songhaï ce matin-là. Mawdo Sô, sa suite et sa toute jeune épouse, ployant sous le poids de l'or du Mali. De mémoire de Songhaï, jamais on ne vit plus belle ceinture de cauris. Un ouvrage d'or massif d'une finesse qui eu pu faire douter qu'il s'agissait bien d'un travail terrestre. L'on s'était assemblé en nombre pour dire au revoir à Zeyna, le Joyau des Songhaï , désormais celui du tout proche Empire du Mali.




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II. La Quatrième Épouse



Elle travaillait le fonio, son dernier pendu à son sein. Son oeil de serpent caché derrière ses paupières d'ébène, le petit bienheureux tétait goulument. Insensible au regard des autres, il esquissait des sourires aux génies de temps en temps, lové dans le pagne de sa mère. Assis en cercle autour de la matriarche, une ribambelle de petits gamins à la peau d'ébène, et deux autres femmes. La première entretenait la conversation depuis déjà une demi-heure. Quant à la seconde, elle se contentait acquiescer de temps à autre pour manifester sa présence. Yamara était la première épouse Sô. La plus jeune de toutes mais celle qu'il avait choisi, quoique certaines accusations sous-entendaient qu'elle avait attaché l'hériter de Soundjata Keita avec un philtre pagu. Et il était assez vrai que Yamara Sangaré avait les connaissances nécessaires à cela. Tout cela lui conférait un certain statut et des prérogatives dans la maison de Mawdo Sô. Elle pouvait de fait se permettre d'afficher son mépris, voire de le revendiquer, quant à ce quatrième mariage qui s'était fait du jour au lendemain et encore, en terre Iba. L’œil couvant les cinq garçons qui remuaient la poussière à ses pieds, la matriarche fit claquer sa langue en signe de désapprobation.

« ... voilà ce que j'en ferais moi des prétentions de madame la princesse Songhaï ha ! », elle les foulerait au pied dès le départ. Dans cette maison, tous vivaient sous son autorité sauf les vieilles mamans qui avaient la sagesse et le respect absolu de tous bien sûr.

Yamara ne venait pas d'une des anciennes familles fondatrices. Sa naissance sans prétention, elle la compensait par une autorité de fer et un mépris de tout ceux qui prétendaient la surpasser dans sa propre maison. Elle n'avait par ailleurs besoin de rien pour imposer le respect. C'était une dogon, une femme serpent1. Cela suffisait à inspirer la crainte. Son bannissement par le ɔgɔ2 de son village, l'avait poussée hors les frontières de son pays natal près de Bandiagara. A défaut de conserver ses richesses, confisquées par le ɔgɔ, elle avait emporté avec elle ses trois serpents. Certains les disaient animagus, d'autres, au contraire, pensaient que les yaŋa dana de Yamara, ses chasseurs nocturnes, étaient des serpents qui avaient la faculté d'abuser les hommes en prenant leur apparence. Entre eux, comme avec Yamara, ils ne parlaient que la langue secrète des dogons, qui est aussi la langue des serpents. Yamara les employait à son commerce de doloière, sans doute pour les laver de leur réputation de maîtres des maléfices et des poisons. Mais elle avait aussi plaisir à laisser courir la rumeur quand cela l'arrangeait, augmentant ainsi son influence et son aura sur la petite communauté qui s'était formée autour des élans impériaux de son époux.

Cira, était la deuxième femme Mawdo Sô. Son mariage était le fruit du rapprochement de Sô avec les wodaabe du Diafanu. Elle s'en était toujours estimée heureuse sachant qu'elle aurait pu trouver un mari plus laid, plus vieux et plus présent que Mawdo Sô à qui elle avait donné deux filles et un garçon. Plus vieille, plus quelconque, elle n'avait aucune prétention dans la maison de Yamara, qui avait fini par la prendre sous son aile et elles partageaient une réelle entende. La seconde appuyant toujours la première. Elles élevaient leurs enfants conjointement, sauf peut-être le petit Ogobara, car son oeil de serpent faisait peur à Ciramadi Cissé qui avait grandi dans la légende de Bida, le boa à sept têtes.

Peye-Peye était la troisième épouse. C'était la fille d'un devin par les cauris de la région de Sama, dont la prophétie disait qu'en l'épousant, Mawdo Sô ouvrirait la marche vers son grand empire. Comme elle était aveugle de naissance, elle se tenait souvent en retrait dans les conversations de ses co-épouses. Sa voix portant peu, elle s'occupait surtout de son unique fils Sena et affairait ses mains aux travaux du quotidien que Yamara voulait bien lui déléguer.

Le trio fonctionnait relativement bien ainsi, rassemblé sous le toit de la maison de Bamako au bord du fleuve.

Aussi, quand Mawdo Sô ramena sa princesse songhaï, croulant sous le poids de l'or des Iba, Yamara, la femme-serpent, siffla de mécontentement. Elle ne dit rien pourtant, soucieuse de préserver un semblant d'apparence. Drapée dans ses étoffes précieuses, elle attendait le moindre faux pas de sa nouvelle co-épouse et celui-ci ne tarda pas à venir.

C'était que la princesse songhaï tenait plus du fauve que de la femme. Elle égalait Yamara en fierté mais refusait obstinément l'obéissance due à son époux, malgré sa ceinture de cauris qui aurait dû l'y contraindre. Zeyna ne pouvait s'empêcher de regimber. Ça n'était bien souvent pas grand chose. Un regard noir opposé à son mari. Une remarque. C'était tout ce qu'elle pouvait se permettre. Du reste, elle ne savait rien faire de tout ce qui tenait occupées les femmes de la maison, ce que Yamara prenait comme une insulte directe à sa personne, plus modeste de naissance. Et elle ne semblait pas avoir peur de son Ogobara, c'était sans doute le plus insupportable pour la femme-serpent. S'ajoutait à tout cela que, comme l'exigeait son devoir, Mawdo ne devait plus retrouver le lit de Yamara, tant que son mariage avec Zeyna n'aurait porté aucun fruit.

Au départ, la femme-serpent, habituée à ce manège, ferma les yeux, laissant chacun faire ce qu'il avait à faire. Là où Ciramadi et Peye Peye s'étaient contentées de refermer la porte de la chambre conjugale derrière elles sans un mot, Zeyna devait encore se distinguer des autres. La première nuit, presque toute la maisonnée s'était relevée pour aller voir ce qu'il pouvait bien se passer dans la chambre de la quatrième épouse. Derrière la porte close, on entendait comme des bris de terre cuite, des meubles renversés, des feulements rageux et menaçants. Yamara avait fini par se relever elle aussi, pour disperser les curieux. Au petit matin, c'est avec un regard plein de fiel qu'elle avait accueilli son époux, venu lui signifier qu'elle pouvait aller remettre de l'ordre dans la chambre et accueillir sa co-épouse, comme l'exigeait la tradition. Ce moment du matin aurait dû créer des liens entre elles quatre, le visage d'autres femmes venues l'entourer étant supposé amener un peu de réconfort. Mais Zeyna se murait dans le silence, refusant même les soins que ses co-épouses devaient lui prodiguer. Elle pouvait même se montrer violente, comme cette fois où elle avait balayé d'un revers le cordial de fertilité préparé par Yamara elle-même.

« Tu es une idiote Zeyna la blanche. Tu es trop occupée à nous cracher à la figure pour voir que je te tends la main. Et bien soit, tu ne viendras pas pleurer si cette situation s'éternise. », menaça Yamara, avec la validation de Cira. Peye Peye, elle, ne disait rien, rassemblant les débris de pots en terre cuite éparpillés dans la pièce d'un geste doux de la main qui semblait les balayer de loin.

Cela dura près d'un mois avant que la femme-serpent ne s'en irrite vraiment. C'était qu'elle n'aimait guère dormir seule dans son lit. Alors il lui vint une idée. Une idée mauvaise mais une idée fiable, qui la débarrasserait au moins de la présence de son époux, lui laissant le champ libre pour traiter avec Zeyna comme elle l'entendrait. Elle avait pris pour habitude d'administrer son cordial à l'insu de la songhaï, en le disséminant dans la nourriture et même dans la boisson qu'elles partageaient. Après tout, plus d'enfants ne pouvaient pas être un mal. Il lui suffisait que Zeyna en produise au moins un, ou le début d'un. Elle n'était pas regardante. Après quelques temps de ce petit manège, elle attendit que Mawdo fût seul pour attirer son attention.

« Ce soir, quand tu iras retrouver Zeyna, siffla-t-elle d'un ton sirupeux, « Tu emmèneras mes frères et tu les laisseras passer devant toi. »

Elle posa un profond baiser sur les lèvres de Mawdo Sô, pour rappeler à son corps ce que c'était que d'être l'époux de Yamara Sangaré puis elle rejoignit ses appartements, où ses fils attendaient qu'elle vint les border. La nuit étendit son pagne noir sur le marigot aux crocodiles. Alors on entendit le sifflement des serpents, comme ils quittaient la chambre de Yamara pour se porter au devant de Mawdo Sô, dans celle de Zeyna.

Il n'y eut même pas de bruit. Un petit cri de surprise peut-être.

Le lendemain, lorsqu'elles entrèrent dans la chambre de leur co-épouse, les trois premières femmes de Mawdo Sô ne trouvèrent que le lit à refaire. Zeyna se trouvait là elle aussi, les genoux regroupés entre ses bras, le corps encore pesant et endolori. Sur son visage tracé de larmes, nulle expression, pas un battement de cil.

La femme-serpent l'observa longuement, laissant la corvée de ménage à ses co-épouses, un air pleinement satisfait sur le visage. A son bras, ses frères serpents s'enroulaient lascivement, comme une seconde peau.

Dès demain, Mawdo retournerait chasser les grands noms qui avaient fait l'Empire avant de revenir s'étendre dans la couche de sa première épouse...



1, dans la tradition dogon, l'homme n'était pas originellement destiné à la mort. Arrivant à un âge avancé, il prenait la forme d'un serpent et rejoignait le monde des génies. Dans le monde magique, cet héritage se perpétue sous la forme d'une affinité avec les serpents, nombre de dogons sont d'ailleurs fourchelangue et/ou animagus.

2 lire hogon, le hogon est la figure d'autorité politique et religieuse du village en Pays Dogon. Il est aussi le garant de sa sécurité et de sa prospérité.





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III. La Maison de Nana Sô



Il faisait chaud. La tête de la vieille balançait mollement d’avant en arrière alors qu’elle continuait d’agiter son éventail de paille tressée. Nana Sô était un sacré personnage. Il fallait voir la façon dont elle avait reçu son fils lorsqu’il était apparu devant l’entrée en arc de sa maison de Niani, sa nouvelle épouse, une armée de fétiches et tout un barda se traînant à sa suite. Nana Sô n’aimait pas les fétiches. Elle ne leur faisait pas confiance. Elle disait toujours que le seul vrai maître du fétiche, c’était le féticheur. Et comme on ne pouvait pas faire confiance aux féticheurs… Appuyée sur son bâton rutilant, qui donnait toujours l’impression qu’elle était trop diminuée par son grand âge pour représenter un réel obstacle, elle avait regardé toute cette "ménagerie" d’un œil en fente de meurtrière, puis avait craché dans la poussière rouge et battue de sa cour, juste aux pieds de Mawdo. N’entrait pas qui voulait chez Nana Sô. Bien sûr, elle aurait bien été en peine d’interdire quoique ce fût à son fils. Elle ne semblait même pas vouloir se donner la peine d’y perdre du temps à vrai dire. Mawdo allait et venait à son gré dans la maison de sa mère et, justement pour cette raison, il n’y venait presque jamais. Cela semblait convenir à la vieille.

« Je garde ma fille ! Tout le foutoir tu peux l’emporter avec toi. », avait-elle déclaré d’un ton peu amène, faisant mine de s’en retourner à sa natte sous le grand fromager. C’était comme un défi lancé à quiconque se serait pris de lui imposer quoique ce soit.

Et les fétiches ? Avait-il relevé sur le ton de l’insistance. Il paraissait impensable qu’une princesse songhaï soit collée aux corvées de la maison et pour ce qu’il en savait, celle-là n’était vraiment bonne à rien. Non pas qu’il se soucia réellement du confort de sa quatrième épouse, mais il devait observer un minimum de respect s’il ne voulait pas risquer de remettre en question son accord avec les Iba. L’histoire avait déjà montré que les songhaï pouvaient être de féroces séparatistes.

« Pour les entendre jaboter à longueur de journée ?! Non merci. Et avec une armée pareille tssss, je ne supporte pas le bruit des ces nabots grotesques et encore moins celui du bois que l’on cogne. Tu devrais le savoir. »
« Gardes-en au moins un pour mon épouse. », avait insisté le fils.

Proposition qu’elle avait balayée sans la moindre considération. Binetou faisait d’après elle le travail de dix fétiches et de toute manière, elle ne gardait personne dans sa maison qui ne mettait pas la main à la pâte. Mawdo Sô, de guerre lasse, avait choisi de ne pas persister dans son idée. Il avait tout de même réussi à imposer un de ses hommes-ombres1 au terme d’une discussion houleuse.

Nianankoro semblait dormir lui aussi. Lascivement étendu sur la branche d’un arbre, pattes  ballant dans le vide. Pourtant, tapi dans les ombres des feuillages, jamais rien n’échappait à son œil jaune. Elle l’entendait la nuit, quand elle furetait dans sa chambre à la recherche des serpents. Ça n’était jamais qu’un froissement de l’air. Un murmure presque inaudible. Il n’y avait jamais eu de serpents, répétait Nana Sô avec agacement. Allez savoir comment, Zeyna savait que ce ton sec qu’employait la vieille n’était pas vraiment dirigé à son encontre. Elle pouvait se montrer acariâtre, sans doute parce que la vie l’avait été avec elle. Mais elle tolérait sa présence, assise sur sa natte à faire semblant de somnoler.

« A force de te mettre la rate au court-bouillon, tu finiras par l’empoisonner ce petit. », fit la vieille en ouvrant vaguement un œil.

Elle n’avait jamais vraiment besoin de la regarder pour lire en elle. Zeyna l’avait remarqué dès son arrivée. Le calme contrastant avec l’agitation constante de la maison de Bamako et la compagnie détestable de ses co-épouses. Ici à Niani, il n’y avait que la vieille Namandié et Binetou, un peu plus jeune qu’elle mais qui s’effaçait complètement derrière sa timidité maladive. L’aura de Nana Sô imprégnait les lieux, imposant le respect de cet environnement sur lequel elle régnait en maître absolu. On se sentait en sécurité dans la maison de Niani. Peut-être parce qu’il n’y avait pas d’hommes hormis quelques rares visiteurs et les enfants qui venaient écouter les histoires de la vieille tous les dimanches sans exception.

Zeyna baissa les yeux sur l’arrondi de son ventre. Proéminent. Omniprésent. Il semblait que ce renflement allait la bouffer de l’intérieur. Qu’elle disparaîtrait bientôt, dévorée par la stamina de son époux. Mais bien loin d’être naïve, elle savait pertinement que rien de tel ne viendrait la délivrer.

Elle ne répondit rien. Trop honteuse de secrètement l’espérer cet empoisonnement,

« Il ne faut pas. », reprit la vieille, d’un ton plus doux, plus compatissant. Finalement elle lui fit signe de se rapprocher d’un geste impatient de sa main.

Zeyna sursauta presque, lui retournant un de ces regards d'animal blessé qui ne lui ressemblait pas. Le marigot aux crocodile l'avait vidée de sa force, dépossédée de toute fierté. Dans son malheur, il lui semblait qu’elle finirait par se montrer plus mauvaise encore que son bourreau. Elle ne concevait aucun amour pour ce petit homoncule qui battait en elle. Aucune curiosité. Rien. Pourtant, elle savait bien que l’enfant à naître mériterait mieux. Elle ne s’en sentait simplement pas capable.

La vieille ne répondit pas tout de suite à cette protestation silencieuse. Elle acquiesçait répétitivement, sa bouche prenant ce pli étrange qui laissait deviner qu’elle retenait son jugement ou du moins qu’elle le tournait et le retournait dans sa bouche pour le laisser mûrir.

« Tu l’aimeras parce qu’il sortira de toi. C'est tout. », imposa-t-elle avec une certitude qui ébranlait tout désir de la contredire, « Ne t’en fais pas pour ça. Une mère aime toujours son enfant. Quelque part au fond d’elle. Ce sera suffisant. »

Zeyna n’en était pas convaincue. Mais elle ne dit rien. Elle ne voulait plus rien dire. A nouveau son regard tomba sur ses seins gonflés et déjà douloureux. Reverrait-elle un jour les bracelets qu’elle portait aux chevilles ? Derrière les trahisons de son corps, au moins la ceinture de cauris disparaissait de sa vue. Elle lui ceignait pourtant toujours la taille. Elle la sentait mordre sa peau distendue la nuit, quand elle s’allongeait sur le flanc, épuisée de sa chasse aux nuisibles.

La vieille se redressa, s'appuyant fortement sur son bâton. De prime abord, on aurait pu penser qu'elle ne se souciait plus de sa bru. Elle lui offrait déjà le gîte et le couvert. C'aurait pu être suffisant, considérant que son fils ne lui avait guère laissé le choix. Zeyna expulsa un profond mais discret soupir, reportant son regard dans le loin, prête à apprécier un brin de solitude. Le menton posé sur ses genoux, elle n'avait l'âme à rien et n'écartait pas l'idée de rester là à regarder passer les heures jusqu'à ce qu'il soit temps de fermer les yeux. Elle ne les fermerait pas ou très peu, c'était couru d'avance.

« Et enlève moi ces breloques. Tu vas préparer l'attiéké pendant le nandji réduit. »

Zeyna lui adressa un regard par dessus son épaule. Un regard plein de gratitude. Elle ne disait pas je vais t'apprendre mais c'était ce qu'elle ferait, avec patience, comme elle l'avait fait pour le sombi et le bissap. Plutôt que de la mettre à l'écart pour les manquements que son éducation de princess, Nana Sô semblait résolue à lui donner à faire jusqu'à ce qu'elle tombe de sommeil. Jusqu'à ce que ses méninges ne sachent plus aligner deux pensées cohérentes. Zeyna se redressa, relevant sa robe de lin pour ne pas l'abîmer. Elle considéra les bijoux qu'elle avait portés toute sa vie. A quoi lui avait servi cette figure d'idole féminin presque révérée, instruite, indépendante... Elle déverrouilla le fermoir du bracelet qui lui ceignait le bras à mi-hauteur et jeta le petit bijou à même la poussière avant de suivre la vieille à l'intérieur.

 ᚈᚔᚄᚓᚇ     

Les lunes passèrent. Les mains de Zeyna s'usèrent aux corvées, redonnant un sens à son quotidien. Finalement, le moment arriva. C'était à l'heure des serpents. L'amour était dans les bras de Nana. Dans son coeur à elle, pas plus qu'avant. Au moins, ne ressemblait-elle pas trop à son père.

Nana lui avait adressé un de ces regards sévères, l'enfant blottie contre son sein. Ceux qui disaient qu'elle méditait la meilleure façon de dire les choses.

« Commence par lui donner un nom. Le reste viendra. Plus tard. » conseilla-t-elle, les fragments de ses mots en disaient longs mais elle semblait s'interdire de condamner.



1 guerriers animagus de la garde personnelle de Mawdo Sô, qui avaient la faculté de se changer en panthère à la robe noire. Ces guerriers étaient connus pour leur loyauté, leur discrétion mais aussi pour leur aptitude à la violence et au carnage.




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IV. Les Mains Sales


Dans la maison des Dansoko, il y avait beaucoup de filles. Elles riaient et chahutaient à longueur de journée. La cervelle plus légère encore que leurs pas de danse. Il y avait aussi cette fille. Sassouma. Cette fille-là, elle avait quelque chose de différent. Quelque chose de sombre qui contrastait avec la joie de vivre des autres. Elle avait beau se mêler à leurs jeux. Imiter leur façon de parler. Elle finissait toujours pas se détacher du groupe, presque par accident, et c'est là qu'elle redevenait cette petite figure sombre et maigrichonne, qui observait les autres un peu en retrait. Sogolon, la maman de toutes ces filles, aimait beaucoup Sassouma car elle était la seule à comprendre ce que c'était que de tenir une maison. D'ailleurs, peut-être pour cette raison, elle gardait Sassouma dans ses jupes plutôt que de l'envoyer à l'école comme les autres. Aux mariages, aux enterrements, à la Fête du Poisson, Sogolon gardait toujours Sassouma dans ses jupes, au plus près d'elle. C'était une curieuse habitude qui faisait parler les voisins. On avait longtemps suspecté que Sogolon avait donné à Modibo un enfant handicapé. D'autres rumeurs racontaient que le couple avait eu un enfant des génies. Alors, quand un beau matin, une fille de plus s'était ajoutée à leur ribambelle de gamines, personne ne s'était vraiment étonné mais tous avaient posé des questions.  Sogolon n'avait pu que tristement confirmer. L'enfant était née avec un genre de handicap. Ça n'avait rien de physique, inutile de la regarder sous toutes les coutures. Non. C'était dans sa tête. Comme si elle était d'un autre monde. Évidemment ça rendait la jeune fille inapte à presque tout ce qui faisait la vie en société. C'était un bien grand malheur que d'avoir un enfant condamné à avoir un pied dans le monde des génies1. Elle s'était faite très tôt à l'idée de ne jamais la marier mais son coeur de maman n'avait jamais pu se résigner à l'abandonner. Tel était le récit que faisait Sogolon Dansoko à qui voulait bien y prêter l'oreille. Les commères du quartier ne pouvaient que compatir, ressortant pour l'occasion leurs mimiques contrites les mieux travaillées. Certaines se confondaient même en lamentations, répétant sans doute leur rôle de pleureuses pour être sûres qu'on se rappellerait d'elles quand l'occasion se présenterait. C'était qu'il ne manquait pas de mariages ni d'enterrements dans la petite commune de Djakorosso.

Sassouma menait donc sa petite vie, un peu en dehors du monde. Elle observait la même routine. Chaque matin, sa mère l'envoyait chercher de l'eau au puits, juste avant l'aube. Ensuite elle ne quittait plus la maison sauf pour accompagner Sogolon, au marché, aux mariages, aux enterrements justement.

C'était un peu après le mariage de Naîgnouma. On ramassait encore des confettis partout dans la grand rue. Sogolon pouvait être fière. On parlerait longtemps de la fête et son nom serait sur toutes les lèvres pendant un petit moment. Fort satisfaite de cet état de fait, la maîtresse de maison dormait, le sourire aux lèvres, son oreiller tendrement pressé contre son visage. Comme à son habitude Sassouma avait récupéré la grande jarre à cul rond que l'on rangeait dans l'arrière cuisine et quitté sans bruit la maison des Dansoko. A cette heure-ci, il n'y avait que les ricanements de margouillats pour lui tenir compagnie. Patiente, elle avait répété les gestes sans doute appris par sa mère pour que le puits se vide dans la cruche par un sortilège invoquant surtout la visualisation. Les yeux clos, attentive au bruit de l'eau, elle ne l'avait pas entendu arriver.

Pourtant il était là. Un homme à la peau plus sombre que la sienne. Dans le loin, elle pouvait voir son regard braqué sur elle avec intensité. Ils se jaugèrent longuement, comme pour déterminer ce qu'il convenait de faire maintenant qu'ils s'étaient révélés l'un à l'autre. Puis, sans crier gare, Sassouma prit ses jambes à son cou, renversant par la même occasion le précieux don du puits dans la poussière ocre et sèche. Elle courrait, courrait à perdre haleine. Le tissu de sa robe fouettant ses jambes maigrelettes et ses longues et fines tresses noires sa figure paniquée. Sur ses talons, l'homme avait été prompt à réagir, lui donnant la chasse dans un dangereux jeu de sable, comme elle transplanait pour lui échapper et lui pour la prendre au piège. Ocre jaune mêlé d'ocre rouge, le prédateur touchait à sa proie, toujours plus près de la tenir quand soudain sa main trouva une prise à la ceinture de la belle. Il la tira vers l'arrière. Un cri déchirant lui perça les tympans, l'obligeant à lâcher prise mais il l'attrapa fermement par les tresses, esquivant bourrades, coups de pied furieux, cris et crachats. Elle lui laboura le visage de ses ongles comme il venait l’immobiliser de tout son poids. Il la retourna de force face contre terre . La gamine était belle. Elle était fraîche malgré son air farouche. Sa peau était douce. La vie ne l'avait qu'à peine effleurée. Lui, savait ce qu'il avait à faire. Ses mains enserraient déjà son cou de cygne. Ça ne devait guère durer et ça aurait été plutôt facile finalement. Revoilà les petites mains pleines de griffes. Elle lutte. Elle se débat la petite princesse. Ses longs doigts graciles tirent, serrent de toute leur force. Mais quelle force ? A nouveau, elle tente le sable, la désagrégation. Mais il ne s'y laissera pas prendre une seconde fois. Un coup de genou bien placé contre un maigre espoir de fuite. C'était sans compter sur la ceinture. Plié de douleur par ce coup bas, il s'y cramponnait comme à sa vie. Mais la douleur qui incendiait son corps à elle était sans exemple. Chaque ruade en avant lui dévorait les entrailles. Chaque renoncement la cinglait comme un coup de fouet. Mais la souffrance ne serait jamais rien contre la peur panique de la mort. Qu'elle lutte ou s'abandonne, les petits coquillages cruels ne lui cédaient rien. Leur rappel à l'ordre cuisant lui mordait dans les chairs, à la naissance de l’aine, là où la ceinture menaçait de casser. Lui, tirait, sa main solidement refermée sur cette maudite ceinture. Elle finirait par rompre. Elle, ressentait le désastre à venir dans tout son corps, luttant contre la rupture de ses nerfs. Les veines saillant sur ses bras, les yeux injectés de sang, elle n'avait rien de la jeune fille fraîche d'un instant plus tôt. C'était un démon. Une ogresse aux lèvres humectée de rage. Cette rage de vivre, tisonnée par la torture que lui infligeait l'ignorant, à tirer sur cette ceinture comme un forcené. Alors elle n'avait pas le choix. Elle ne pouvait plus être celle qui luttait. Il fallait devenir l'assaillant. Désormais, c'était ses mains à elle qui lui enserrait le visage. Ses mains à elle qui lui déformaient la figure à concentrer leur flux maléfique sur un seul objectif. Cruel et impératif. La vie. La mort. C'était ses mains à elle, quand les os se rompirent sous la pression insupportable. Ses mains à elle entre lesquelles ce visage déjà déformé par la nécessité d'un acte inhumain, s'affaissait lentement sur lui-même, emportant le nom de Nyéléni Sô dans un borborygme sale et immonde. Sales. Immondes. Ses mains à elle.

La douleur avait complètement cessé.

Elle se tenait là, contemplant l'horreur de ce qu'elle venait de faire, assise sur le torse de l'ignorant qui pulsait encore entre ses cuisses. Sa robe lui offrait un semblant de dignité mais son visage... ce qui avait été son visage...

Alors elle resta là. Les genoux dans la boue grasse. Sale. Immonde.

1 la notion de monde des génies renvoie à un plan d'élévation intellectuel auquel on ne devrait pas accéder de son vivant. Dans le monde des vivants, le génie est plutôt perçu comme mal faisant, notamment dans certaines croyances ouest africaines où on le rend responsable des morts infantiles. Le handicap décrit par Sogolon serait à rapprocher d'une forme d'autisme bien qu'elle ne soit pas assez précise pour que ce diagnostic puisse être sûr.



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V. La Femme aux Deux Ceintures


Tilelli est un autre nom de Liberté avait-elle dit. C'était il y a si longtemps. Une vie. Trente huit ans déjà que les trois enfants avaient passé la porte du mystérieux Palais des Songhaï avec leur mère. Trente huit ans. Une vie qui aurait pu être plus longue. Elle l'avait tout de suite aimée, cette petite fille à la peau dorée qui semblait déjà détenir tant de pouvoir. Du haut de ses six ou sept ans, elle avait scellé leur destin. Mais c'était un sceau de bienveillance qui s'était apposé à leur toute nouvelle condition de tyindikatas. Sakoura Iba pouvait faire preuve de bienveillance lui aussi, mais ses largesses avait un prix. La liberté. Voilà ce qu'il leur en avait coûté de fuir les hauteurs du Djurdjura et leur Kabylie natale pour demander asile dans la maison des maîtres de l'eau. Lunja, Timet et elle étaient entrées au service de la princesse songhaï dans leur tout jeune âge. Elles partageaient ses jeux, sa chambre, son lit. A bien des égards, elles étaient, elles aussi des princesses dans les appartements de Zeyna. Ašbaku était arrivé quelques mois plus tard apportant à leur petit groupe une dynamique nouvelle. C'était le seul garçon. Après lui, plus rien n'avait bougé jusqu'à ce triste jour où Zeyna avait quitté le palais des songhaï pour suivre Mawdo Sô, mettant fin à l'illusion dorée qu'aucun d'eux n'était véritablement esclave. Sous l'égide de Zeyna, la vie avait été plus douce que le miel. Ils avaient touché à tout ce qui lui était donné. De l'instruction à la nourriture. Des soieries aux présents délicats. Ils avaient appris ensemble ce qu'était la vie, petit groupe presque autarcique éveillé à tous les plaisirs. C'était une image sur papier glacée que Sakoura Iba avait foulée au pied en plaçant sa fille sur le jeu d'échec du futur Empereur du Mali.  Elle s'était interposée pour la défendre. Tous les quatre comme un seul s'étaient dressés entre elle et les vieilles tantes. Mais Zeyna avait préféré les quitter dignement et sans heurt. Avait-elle pu ignorer ce qu'il adviendrait d'eux ensuite ? Tilleli en doutait mais elle n'avait jamais pu lui en vouloir. Dépouillée de ses étoffes précieuses et de ses bijoux, renvoyée comme une malpropre à briquer les sols sans aide magique, elle avait longtemps pensé à Zeyna et à sa maudite ceinture, qui l'avait privée de sa superbe et de tout son pouvoir. En soi, Tilleli se demandait même si son misérable sort à elle ne restait pas plus enviable.

Elle avait souvent repensé à Zeyna. Tristement. Elle avait su qu'elle avait donné naissance à une petite fille. Que Mawdo Sô l'avait installée dans une maison achetée pour elle seule et sans doute sa suite. Quand elle fermait les yeux le soir, blottie contre l'épaule d'Ašbaku, elle se l'imaginait Impératrice du Mali avec une foule de fétiches pour la servir. Une foule de griots pour chanter les louanges de la famille impériale peut-être. Mawdo Sô avait déjà trois épouses avant Zeyna. Mais aucune des trois ne pouvait surpasser le joyau de songhaï. Pas aux yeux de Tilleli en tout cas. Dans son coeur, comme une prière, elle espérait que son amie ait su gagner le coeur de l'Empereur. Sans cela, la belle histoire était condamnée à rester à l'état de songe si ce n'est de cauchemar. Elle conservait au moins d'apaiser la tyindikata, au moment de fermer les yeux. C'était aussi une manière de vivre bien, comme par procuration. La journée, elle épiait discrètement, espérant quelques nouvelles. Le vieux Iba s'enorgueillissait toujours de ce mariage qu'il avait su amener d'une main de maître. Il se réjouissait toujours aussi de ce que les négociations traînaient en longueur, le plaçant en position de force puisqu'il n'avait encore rien eu à céder. Mais dans l'oeil du vieux malin, Tilleli le voyait, il y avait des regrets. Zeyna avait toujours été son enfant préférée.

Alors quand les pêcheurs de la garde l'avaient ramenée, plusieurs années après la débâcle de Sô, quelle joie ça avait été. Le joyau de retour au Palais des Songhaï. Les larmes dans les yeux du vieil Iba quand il avait étreint sa fille chérie. Tilleli avait pleuré elle aussi. Finalement Zeyna avait été la seule, égale à elle même, à ne rien montrer de ses sentiments. Elle avait alors simplement réintégré ses appartements, rappelé auprès d'elle leur joyeuse équipe mais ils n'avaient rien retrouvé de leur joie d'antan. Si l'affection demeurait intacte, il y avait chez Zeyna une réserve implacable qui leur interdisait tout retour à leur Éden doré. Elle avait mûri sans doute. Appris des choses qu'eux, les tyindikatas n'effleureraient jamais, pas même en pensée. Mais elle ne partageait rien de ces choses-là. Elle préférait désormais la tranquillité de son jardin à l'animation d'une bonne conversation. Une fois, Tilleli l'avait même surprise à retourner la terre de ses mains pour y semer quelques graines. Elle avait soutenu le regard de sa maîtresse un moment, avant de disparaître, promettant le silence dans un regard fuyant.

Ašbaku les avait trouvées toutes les deux ce matin-là. Tilleli berçant dans ses bras leur princesse adorée. La longue litanie de ses larmes et de ses lamentations n'avait cessé que lorsque les pêcheurs de la garde étaient venus disposer du corps. L'un d'eux avait ramassé le lacet d'or négligemment abandonné sur les sols de l'appartement dévasté par l'onde de choc.

« Ils voudront probablement le faire réparer, pour le rite funéraire. », avait-il dit en voyant le mauvais regard que lui lançaient les tyindikatas. Il ne voulait surtout pas qu'on l'accuse de vol. Il soupesa la fine ceinture un peu surpris par son poids, contemplant le gâchis. Ça n'était pas lui qui aurait pu payer un tel bijou à son épouse mais il était à peu près certain qu'elle en aurait fait meilleur usage. Les lubies des plus riches le dépassaient totalement. En revanche, son statut de pêcheur 1 lui en disait plus long qu'à n'importe qui sur la décharge magique qui avait pu laisser la pièce dans cet état. Il avait vu la princesse. Son corps était intact. Cela n'augurait rien de bon. Sans doute condamnerait-on ces appartements pour plus de sécurité. « Vous ne devriez pas rester ici. Cet endroit est maudit. »

1chez les songhaï, la caste des pêcheurs est reconnue pour son grand pouvoir.





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