« Michel, tu ne me parles pas comme ça ! »Ma mère avait tapé du poing
sur la table. J’étais situé à l’autre bout, le visage rouge de colère. Mes yeux allaient de la cheminée à ma mère. On s’était disputé et de mémoire, ça ne m’était jamais arrivé. Les yeux pleins de rage, j’avais regardé le feu et je continuais de fulminer.
« Et vous attendiez quoi pour nous le dire hein ? Je peux savoir ? »J’avais deviné par moi même et par pur hasard, tombant sur un très vieux parchemin dans la Forge, situé en dessous de l’immense immeuble qui nous servait de résidence, et de lieu de travail. Je n’avais d’ailleurs pas compris pourquoi ce bout de papier trainait là, mon père ne faisait jamais ce genre d’erreur.
« J’attendais que vous soyez prêt. Regarde toi, tu agis encore comme un adolescent. »Elle avait baissé d’un ton, mais sa froideur n’en était pas moindre. Son accent hébreux jaillaissait quand elle était en colère et je ne l’avais quasiment jamais entendu. Passant ma main sur mon nez, je fis une moue de colère, mais je n’osais pas en dire d’avantage.
« C’est Amenadiel, qui a dut laissé traîné ce parchemin. Visiblement, lui, pensait que vous étiez prêt. Mais ne t’inquiète pas, je m’occuperai de lui juste après avoir eu cette discussion. En attendant, si c’est ton amourette avec la fille de la Ministre qui te met dans cet état, je te déconseille de lui dire et... »
« Je suis obligé de lui dire la vérité, elle est enceinte. »Ma mère ouvrit la bouche, ses mains posées sur la table en chêne aux runes anciennes. Visiblement, elle accusait le coup. Personnellement, je l’observais droit dans les yeux, pour savoir désormais ce qu’elle avait à dire. Elle se tourna vers la fenêtre, observant le Chemin de Travers silencieux à cette heure de la nuit.
« Tu… tu vas le garder ? » avait-elle dit d’une petite voix bizarrement cassée.
« Maman ! Bien sur que je vais le garder ! Je suis amoureux d’Apolline depuis l’âge de 8 ans ! Je commence à en avoir marre de pas être pris au sérieux dans cette maison… De toute façon, on n’a pas le choix, elle est enceinte depuis 6 mois et... »
Ma mère tourna la tête à une vitesse ahurissante, elle s’avança vers moi, dans son magnifique tailleur aux couleurs bleue nuit et argenté.
« Tu as dit combien ? » avait-elle dit d’un air précipité.
« 6 mois, elle a du faire un déni de grossesse et… »Mais elle me coupa, mettant les mains sur sa bouche. Finalement elle passa une main sur son front et elle soupira d’un air un peu pressé.
« Fais la venir demain. » me coupa-t-elle.
« Mais demain… on doit être à Poudlard et... »Elle s’avança vers moi, les yeux étrangement furieux.
« Michel, pour la première fois de ta vie, écoute ta mère sans faire d’histoire. Réfléchis pour une fois, si tes frères et toi avaient ces prénoms, ce n’est pas pour faire joli ou parce qu’on était fan des Archanges ! Il faut absolument que je lui parle. Et demain, j’appellerai un ami à Ste Mangouste et il protestera un rendez-vous médical. Puis, vous viendrez ici. Je dois lui parler expressement. »J’ouvrais la bouche pour rétorquer ou poser des questions, mais mon frère Amenadiel rentra pile à ce moment là :
« Oulah… Pas bon ça… Euh, j’ai encore du Mithril en fonte, je voulais juste... »
« Toi, tu sors et tu vas la chercher. Toi, assis toi, dépêche toi. »Amenadiel n’était pas assez fou, pour oser s’opposer à notre mère. Je passais alors à côté de lui et je marmonnais en gobelbabil, langue qu’elle ne comprenait pas :
« Gukak trikolath tek. » (Elle est au courant en Gobelbabil)
« Et arrêtez avec cette langue de sauvage ! »
***
4 Septembre.Le plan de ma mère avait fonctionné. L’Université n’avait absolument pas discuté quoi que ce soit, à croire que lorsqu’on était une femme enceinte, on avait tous les droits. Traversant le Chemin de Traverse sous la pluie, je tenais Apolline par la main, et je me dirigeais vers notre demeure.
« Il faut que tu me fasses confiance, Apo, c’est très sérieux. »
Je n’avais pas pu trouver les mots pour lui dire sur la route, ni le courage d’ailleurs. C’était ma mère qui allait tout nous expliquer, après tout elle semblait en savoir plus que moi. Pourtant, il y avait de quoi s’inquiéter, parce que j’étais très sérieux. Passant la porte en bois, nous passâmes tous les deux et un bruit d’enchantement qui se déclenche retendit mais rien ne se passa :
« J’ai modifié le sort pour que la maison t’accepte. Viens, on va à l’étage. »De mémoire, jamais elle n’était venu là. Montant les immenses marches en chêne, je passais devant l’ensemble des artefacts que mon père et mes aïeux avaient forgés, sans les regarder tellement j’étais habitué. Ils réverbaient une lumière incertaine et magnifique à la fois.
« Ca va ? »J’étais prévenant, depuis qu’elle était enceinte. Je l’avais attendu plusieurs fois, et je passais mon temps à être aux petits soins. Avant que nous passâmes la porte de la salle à manger, je trouvais bon de prévenir :
« Je te préviens, elle est un peu... »La porte s’ouvrit, dévoilant ma mère qui me foudroyait du regard. Ses yeux se posèrent ensuite sur Apolline.
« Un peu quoi ? Termine, Michel. Je t’en pris. »Je détournais immédiatement les yeux. Elle se contenta alors de sourire à Apolline, d’un sourire sincère et calme.
« Je suis ravie de te voir, Apolline. On dirait que quand mon fils aime quelque chose ou quelqu’un, rien ne peut l’arrêter. Mais quand je vois à quel point du belle d’aussi prêt, je commence à comprendre la raison de sa folie pour toi. Allez, rentrez. »
Et elle ouvrit la porte. Sur la table, plusieurs grimoires en hébreux et en latin étaient entreposé. Le feu ronflait dans la cheminée, et… la silhouette de mon père qui le contemplait me retourna l’estomac. Il se retourna, et ne nous accorda aucun sourire.
« Bonsoir Mademoiselle Dunn. Bonsoir, Michel. »