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The trouble with stories is, if you keep them going long enough, they all end in death

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The trouble with stories is, if you keep them going long enough, they all end in death.

Feat  @Nathanael E. Pierce
Octobre
Banlieu du Londres Magique
Demeure Pierce



Le visage de la sorcière avait perdu ses couleurs lorsque l'un des médicomages de St Mangouste lui avait répondu que Nathan n'était pas sur place. Il avait précisé, que le chef de service privilégiait les visites à domicile au vue du Décret de Mabon, et des récentes restrictions. Les sorciers restaient confinés chez eux, par peur de se faire attraper par les brigades ministérielles. La communauté entière avait été bousculée, et effrayée par les nouvelles dispositions. L'inconnu lui avait aussi rétorqué qu'il était bien trop tard pour une visite, en lui jetant un regard sous entendu. Amaranth n'avait pas eu la force de répondre, et sans donner son nom, elle s'était éclipsée dans un moment d'inattention.

Dans sa poche froissée, l'adresse élégamment écrite de la demeure de Nathaniel Pierce. Il lui avait confié, il y a des semaines de cela. Dans le cas d'une urgence. La sorcière avait hésité plusieurs jours. Se rendant compte qu'elle ne récupérait pas de son entrevue avec un certain loup, et la découverte de la maison ancestrale des Macleans. Elle avait réussi à se maitriser, Morri avait été, pour la première fois, partenaire. La magie qui hanté encore ses murs les avait torturés toutes les deux. Depuis, la noirceur des extrémités de sa main gauche s'était étendue. Elle portait un gant pour cacher les traces de son infamie. La sensation d'excision qu'elle avait entrevue, ne la quittait plus. Comme si, on tentait encore de lui arracher son autre de ses entrailles. En théorie, c'était tout ce qu'elle avait voulu jusqu'ici. Mais, elle saisissait la monstruosité que d'ôter la particularité de son propre corps, si ce n'était de sa propre âme. Multiple, doubles, ou encore jumelles. Elle n'avait pas la réponse, elle savait à présent qu'elle était ainsi. Et, se faire découper par une magie plus sombre encore que celle qui l'avait vu naître la consummait de l'intérieur.

Elle n'osait pas transplaner de nouveau. Elle ne se sentait pas la force, et le risque de finir désartibuler. Alors, elle poursuivit à pieds, évitant les lumières blafardes des lampadaires menaçants. Il était bien tard, tard dans la nuit, ou tôt dans le jour. Amaranth n'avait plus la notion de l'heure. Ses pas se faisaient plus douloureux. Plusieurs fois, elle s'arrêta pour reprendre son souffle, ou vomir ses tripes. Elle avait l'impression d'être en feu. Que cette maison, ces gens avec qui elle partageait un sang, un nom, l'avaient marqués. Leur devise  " Sanguis Purus, Sapiens Purus " la hantait. La sorcière n'avait jamais accordée d'importance au sang, et à sa prétendue supériorité. Et le fait, que la famille de sa propre mère, soit gouvernée par ce genre de doctrine au point de renier des héritiers impurs, et faire appel à une magie si corrosive qu'elle aurait un tel impact sur ces derniers, tout cela la rendait malade.

Les Mapleleafs étaient des empoissoneurs, des avorteuses. Les Macleans des mages noires adeptes de la pureté. l'héritage de sa mère semblait disparaitre sous l'ombre de ses aieuls perfides et meurtriers. Tous ses efforts pour transmettre l'importance du soin, de l'amour, et de la famille se noyaient dans cette filiation malsaine. Amaranth était elle le produit de l'union de ce que le monde faisait de pire.. ou l'espoir d'une mère pour sauver une lignée.

Toutes ses pensées se bousculaient, et n'arrangeaient rien à sa lucidité. Elle confondait, souvenirs, réalité et récits déformées. Merlin sembla lui faire apparaitre l'adresse tant convoitée. De ses doigts valides, elle caressa la plaque ou était inscrite le nom du sorcier.

Dans un dernier effort, elle utilisa le heurtoir pour annoncer son arrivée, et se faire entendre du propriétaire de la maison. Lentement, elle glissa au sol. Ses paupières papillonèrent, fiévreuses et épuisées.

- Nathan... Souffla t elle.
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@Amaranth Mapleleaf  & Nathanael



 «The purpose of a storyteller is not to tell you how to think, but to give you questions to think upon.»
Brandon Sanderson 



Tellement de choses avaient changé, ces derniers temps, que le Pierce avait parfois du mal à reconnaître le monde dans lequel il vivait. Si on lui avait dit, un an plus tôt, que la population serait parquée dans trois villes, que des décrets seraient mis en place et que le quotidien de tous s'en trouverait drastiquement changé, le médicomage n'y aurait pas cru...Et  pourtant, c'était bien le cas. Inquiet pour la suite ? Nathanael l'était, bien sûr, car il avait vu les couloirs de Ste-Mangouste se vider durant les derniers jours, si bien que l'ambiance semblait bien morose entre temps.

Comment pouvait-il aider, si ses patients étaient parqués chez eux, certains parfois incapables de se déplacer eux-même ? Alors le chef des urgences avait décidé de prendre le taureau par les cornes, essayant au mieux d'adapter son emploi du temps pour permettre des consultations à domicile. S'il avait pris l'habitude de le faire, jadis, pour certains patients fidèles, gravement malade, âgés ou bien pour certains proches, force était de constater que le médicomage allait devoir étendre ce procédé en de plus grandes proportions. S'il décida d'enjoindre certains de ses collègues à en faire autant, le Pierce était de ceux qui menaient par l'exemple et, au cours des jours suivants, ses déplacements se firent plus réguliers et, bien sûr, ses nuits plus courtes qu'à l'accoutumé.

Mais il était habitué à la privation de sommeil. C'était pénible, mais aucunement insurmontable pour un homme comme lui. Ce soir-là il avait deux visites à faire, il décida donc de couper court à sa journée et, une fois la nuit tombée après sa deuxième consultation, décida de retourner chez lui pour grappiller quelques rares heures de sommeil...sommeil qui se fit évidemment désiré, comme d'habitude. Combien de temps resta t-il, les bras croisés derrière sa tête, à regarder le plafond ? Il n'aurait su le dire mais, alors qu'il venait enfin de fermer les yeux, un bruit à l'entrée extirpa le Pierce de son sommeil léger.

Passant une main sur son visage et dans sa crinière d'ébène, soupirant de lassitude, ce fut simplement armé d'un seul caleçon noir que le colosse à la musculature parfaitement dessinée descendit les escaliers, trois marches par trois marches, pour se diriger vers la porte d'entrée. Une expression mauvaise sur le visage, ce fut sur un ton sec qu'il ouvrit la porte d'un :

« Il vaudrait mieux, pour vous, que vous vous soyez trompé d'ad...»

Mais il n'eut pas eu le temps de finir sa phrase, reconnaissant rapidement la personne assise par terre, dans son entrée. La surprise se lisant sur le visage de l'homme fort peu vêtu, il s'approcha d'un :

« Amaranth ? Qu'est-ce que tu fais là ? »

Comprenant à l'expression de la demoiselle qu'elle avait vu des jours meilleurs, il s'approcha et, s'agenouillant devant elle, posa le dos de sa main contre le front de son amie, réalisant qu'elle n'était pas juste fatiguée mais aussi fiévreuse...Et pas qu'un peu !

« Mais tu es brûlante ! Pourquoi n'es-tu pas à l'hôpital ? Allez viens, accroche-toi à moi. »

C'était le problème d'être médicomage, les malades et hypocondriaques dans son entourage savaient toujours où frapper. C'était aussi pour cela qu'il ne donnait que rarement son adresse...ceci, et le fait qu'il y était rarement. S'approchant, l'homme se pencha vers la demoiselle et, ni une ni deux, la prit dans ses bras et la souleva avec aisance, comme si elle n'était pas plus lourde qu'une plume. Se redressa, il porta son amie jusqu'à l'intérieur de sa maison et, refermant la porte du bout de son pied droit, il se dirigea vers le salon où il permettant à son amie de s'asseoir, sur le canapé. Sur un ton plus léger, quoique encore un peu endormi, il précisa :


« Tu sais que les consultations à domicile, en général, c'est moi qui me déplace et non pas l'inverse ? »


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Les minutes semblèrent éternelles, Amaranth luttait pour ne pas sombrer. Elle reconnut la voix rauque de Nathan, l'avait elle réveillé. La mauvaise humeur du sorcier tirait de son lit s'interrompit en reconnaissant la jeune femme.
Son regard embrumé devina la presque nudité du médicomage, et dans un autre contexte aurait pu faire rougir Ama. Elle n'était jamais loin de replonger dans son premier amour. Mais à l'heure tardive, elle n'était plus capable de grand chose.

Elle ne put répondre à sa question rhétorique. Elle n'était pas à l'hôpital parce que lui n'y était pas. Leur pacte était ainsi. Elle n'acceptait que son aide, et aucune institution ne lui inspirait confiance. Trop de choses étaient en jeu pour Amaranth exposent sa nature double.
Ses bras musclés et nus s'emparèrent de sa silhouette épuisée, et avec une force dont elle ignorait tout. Nathan la fit rentrer chez lui, pour l'installer confortablement sur le sofa.

Sa dernière phrase lui tira un sourire faible. Elle réussit à articuler quelques mots pour répondre à sa plaisanterie.
- Je mourrais.. d'envie de te voir..

Son souffle se fit plus lent. La sorcière s'enfonça dans un sommeil fiévreux. Ses dernières forces l'avaient quittés. Elle n'avait pas réussi à raconter son exploit à Nathan. Elle avait réussi, ou plutôt, elles avaient réussi toutes les deux. Elles avaient fait face à plus noire que leur propre nature. Plus douloureux que des blessures auto-infligées. La menace extérieure avait été pour la première fois, plus grande que celle qu'Amaranth abritait. La nouvelle n'était pas rassurante, mais le progrès était évident.

Il n'y avait que lui pour comprendre l'ampleur de l'exploit. Amaranth disparu dans l'épaisse brouillard de son esprit.

La pièce aux tentures élégantes, et au mobilier sombre se mit à vibrer. Le foyer de la cheminée de la demeure des Pierce, s'alluma de lui-même dissipant une fumée étrange. Des voluptes sombres enveloppèrent le corps de la sorcière, modifiant subtilement quelques détails. Certaines mèches de ses cheveux s'assombrirent, ils semblaient plus courts. Sa peau albâtre fut striée d'anciennes plaies. La nécrose de sa main gauche s'étendit, remontant jusqu'au poignet. La fatigue sembla quitter le corps, retrouvant des formes plus appétissantes et musclées.

Les paupières de la sorcière se relevèrent, offrant des pupilles plus sombres que celles d'Amaranth. Lentement, Morrighan s'éveilla, découvrant son hôte dans une tenue des surprenantes. Un sourire en coin se dessina, plus malicieux que moqueur.

- Nathaniel, navrée d'avoir interrompu ta nuit... S'excusa l'autre. Qui pour la première fois, s'était entièrement incarnée sans violence ni bain de sang.
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Nathanael n'avait jamais été très doué pour mettre des barrières entre le professionnel et le personnel, car les deux mondes n'avaient toujours fait qu'un, pour le Pierce. Il vivait pour son travail, passant bien plus de temps à l'hôpital que dans son propre foyer, aussi n'avait-il jamais été vraiment attaché à cette maison...mais aussi parce que c'était une maison remplie de mauvais souvenirs et de regrets, car c'était la demeure où il aurait dû vivre vieux, avec son épouse. Mais cela n'arriverait jamais et, depuis la mort de son aimée, il n'avait simplement pas eu la force ou le temps de déménager ailleurs.

Il se disait toujours qu'il ferait cela le mois prochain, l'année prochaine mais, dix ans plus tard, il se retrouvait toujours au même endroit. Médicomage investi, il n'avait donné son adresse qu'à une poignée ou deux de connaissances, mais personne ne venait le voir aussi tard dans la nuit, sans une excellence raison. En réalisant l'importance de la fièvre qui s'emparait de la demoiselle, le Pierce commença à s'inquiéter et, s'il retint un sourire face à la plaisanterie de son amie, le changement rapide d'atmosphère figea son visage en une expression sérieuse, alors qu'une voix encore trop peu familière se fit entendre.

« Bonsoir, Morrighan. »

C'était donc avec elle qu'il allait avoir une discussion, aujourd'hui ? La dernière ne s'étant terminé que trop sèchement, la faute à la mauvaise humeur du Pierce, le concerné était plus que sceptique jusqu'à ce que Morrighan ne s'excuse de cette visite tardive, un sourire entendu sur le visage. Au moins semblait-elle plus tolérable que la dernière fois, ce qui permit au médicomage de se détendre quelque peu, alors qu'il passait une main dans sa nuque raide.

« Ce n'est rien. Vous n'avez pas interrompu grand chose, de toute façon. »

Vous ? Oui, elle et Amaranth, bien sûr. Se redressant, Nathanael balaya la pièce pour trouver un t-shirt noir qui traînait sur le dossier d'une chaise. L'attrapant avant de s'en vêtir, il reporta à nouveau son attention vers cette...personnalité, dont il ne connaissait rien, avant de rentrer directement dans le vif du sujet.

« Alors, est-ce que tu peux me dire ce que vous faites là, toutes les deux ? Vous deviez avoir une bonne raison de frapper à ma porte, à cette heure-ci. Que se passe t-il ? »

Il n'était pas du genre  à tourner autour du pot, surtout à une heure aussi tardive, là où sa patience était la plus frêle. Se dirigeant vers la cuisine juste derrière, conscient qu'il allait sans doute avoir besoin de café pour garder ses yeux ouverts, Nathan se demanda si Morrighan était du genre à boire quelque chose, elle aussi, ou non. Semi fatigué et semi moqueur, il demanda donc :

« Est-ce que je peux te servir quelque chose ? De l'eau ? Thé ? Café ? Whisky ? Sang de nouveau né ? Larmes d'enfants ? Je ne sais pas trop ce que tu bois.  »


© NE

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La bien nommée Morrighan jeta un coup d'oeil à la demeure. Elle devinait aisément que la maison avait eu une autre atmosphère il y a bien des années. Elle devinait aisément le passé de ses interlocuteurs, lorsqu'elle n'était pas de front, elle ne pouvait que faire ressentir à son hôte les vérités que l'ont taisés. Mais pour la première fois, elle était là. De chair et de sang. La plus que Sorcière se redressa, profitant de retrouver un corps. Voilà des siècles qu'elle n'avait été aussi vivante. Son regard sombre croisa un miroir. Dans lequel, le reflet d'une épouse qui n'était plus. Elle saisit la nature de cette étrange sobriété. Un deuil qui ne se ferait jamais vraiment.

Elle en avait eu son lot. Avant de répandre le sang, elle en avait perdu tout autant. C'était dans une autre vie, un autre temps. Non sans perdre une miette, elle observa l'adonis couvrir son torse. Merlin, cela faisait des siècles qu'elle n'avait pas profité d'une telle beauté. Dans ses souvenirs, les hommes n'étaient que corps, et violences. Ils méprisaient les femmes et les sorcières. Ils les violaient, les découpaient, les profanaient. Morrighan avait vécu ce genre d'époque. Alors un homme qui consacrait sa vie au soin, c'était un fantasme pour la gaélique qu'elle était.

Elle laissa la question passer. Le suivant jusqu'à la cuisine, l'observant faire avec un certain interêt. Elle ne put s'empêcher de rire à gorge déployée à ses propositions de boissons.

- Le sang frais d'hommes me suffisait à une certaine époque, mais pour ce soir. Un café, avec une touche de whisky si c'est possible. Le ton était taquin, aimable, et presque agréable. C'était le plus surprenant. Que Morrighan soit une personne, plus qu'une personnalité. Elle prit appuie contre le comptoir, observant le médicomage s'apprétait, avant d'entamer le récit demandé.  

- Nous nous sommes rendus à Loustry, pour le travail précisa Morri. Elle n'était pas embarassée par le ton direct du sorcier. Elle aimait être factuelle.   Une nouvelle rencontre avec le Loup. Glenn Yard. Une maison étrange nous a attiré. Quelque chose de familier.. Elle réflechit un instant, La mère du Lycan est la soeur de celle d'Ama. Morrighan et Amaranth étaient soeurs de naissance, mais pas de mère.  Et cette maison - Celle des Macleans - est.. Elle frissonna, s'interrompit d'effroi. J'ai cru qu'on allait m'arracher de ses entrailles. Ce qui est à l'oeuvre là bas est maléfique. Ama m'a protégé, elle nous a sorti de cet enfer. L'effort de nous contenir l'a épuisé. Et ce feu qui ne cesse de l'entailler me torture tout autant..

Elle secoua son visage, en chassant la sensation qui la brulait encore. Elle en avait connu des horreurs dans ses premières vies, mais elle pouvait affirmer que cette ascendance maléfique était terrible.
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Nathanael enviait ceux qui possédaient un havre de paix, un endroit où ils pouvaient se ressourcer et être eux-même car, très honnêtement, il n'était plus trop sûr de savoir qui il était réellement, ces derniers temps. Un médicomage ? Un frère ? Un mari éploré ? Un fils indigne et ingrat ? Un homme voguant à travers la vie en pilote automatique, à peine plus vivant qu'une ombre ? Car, au bout du compte, mis à part son métier il n'était rien ni personne, et c'était sans doute cela le constat le plus effrayant, qu'il n'osait vocaliser. Il était important parce qu'il était utile, mais sans ses talentueux médicaux, il ne serait rien.

Il le savait. Il l'avait accepté.

C'était pour cela qu'il se noyait autant dans le travail, parce qu'il n'avait finalement rien d'autre à offrir, rien d'autre sous la main et peut-être était-ce mieux ainsi. Il n'était pas une bonne personne, il essayait simplement de se racheter pour ses errances passées, pour les personnes qu'il n'avait pas pu sauver. C'était plus fort que lui. D'autres auraient renvoyé Amaranth d'où elle venait, compte tenu de l'heure, mais le Pierce n'était plus à quelques heures de sommeil près. Ainsi, malgré la transition de personnalités il resta calme, quelque peu rassuré de voir que la discussion s'engageait sans doute mieux que la dernière fois.

Désormais vêtu, il se dirigea vers la cuisine et, laissant un sourire fatigué s'étirer sur son visage, face au ton de Morrighan, l'homme prépara la commande, ajoutant un peu de whisky à la fin avant de se servir, de son côté, un café noir assez serré qui aurait, au moins, le mérite de le maintenir éveillé. Tendant la tasse à Morri, il brisa le silence d'un :

« Et un Irish coffee, un. »

Lui ? Il ne buvait qu'en des occasions bien spécifiques mais jamais au beau milieu de la nuit. Grandir avec un père alcoolique lui avait appris les ravages que cette substance pouvait faire, et il n'était aucune intention d'être comme son géniteur. Pas après toutes les raclées prises, à force de se noyer dans la bouteille. Au lieu de cela il invita Morri à retourner dans le salon, prenant place dans le canapé alors qu'elle commençait à expliquer ce qu'il s'était passé. La mère Yard était donc la tante de Amaranth, hum ? Intéressante surprise, mais qui n'expliquait toujours pas son état.
Enfin les pièces du puzzle s'assemblèrent, se dessinant sous les traits d'une maison frappée d'un maléfice, qui perdurait toujours aujourd'hui apparemment. Le visage toujours fermé en une expression sérieuse, malgré la fatigue et l'épuisement, le Pierce avala une gorgée de ce chaud et amer liquide, demandant :

« Une maison frappée d'un maléfice, donc ? Et ce maléfice, en ressentez-vous les effets encore maintenant, ici ?  »

Notant cette information dans un coin de sa tête, hésitant à en parler aux autorités appropriées, le Pierce tint tout de même à demander :

« Est-ce que tu sais ce que Amaranth espérait, en venait ici ? Je suis un médicomage, mais je ne sais pas un briseur de maléfice. Elle doit en avoir conscience. »

Que pouvait-il faire ? Leur donner quelque chose pour combattre la douleur et la fièvre, de façon temporaire ? Il pourrait, oui, mais ce remède ne serait évidemment que temporaire, surtout si le maléfice persistait.

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Morrighan observa la nuées de pensées se formait sur le visage parfaitement dessiné du médicomage. Devinant aisément le rapport douloureux à l'alcool et à la paternité. Encore une fois, elle tue les non dits qu'elle était capable de comprendre. Personne n'avait besoin de savoir que ses secrets ne l'étaient plus. Cette capacité qui avait prit une forme plus académique dans cette société, était un don pour ceux qui avaient connus la mort par deux fois.

Elle reprit sa place sur le confortable sofa, caressant l'étoffe de sa main saine. Se rappelant, les coffres de velours et d'autres tissus que son époux lui offrait. Sublimes et rares, des motifs ouvragés qui avaient été réduits à néant avec le reste de sa demeure. Le feu dans l'âtre s'agita en échos aux souvenirs douloureux de la sorcière. Elle reporta son attention sur Nathan. Elle réflechit, à sa première question.

- Non, pour la première fois, je ne les ressens plus. Son observation était sans appel. Lorsqu'elle était incarnée, le maléfice ne la consommait plus. Leurs places étaient échangées, c'était Ama qui devait potentiellement souffrir de cette malédiction. Ou peut-être était ce amoindri du fait de la nature entière de son âme et du fait qu'elle soit l'hôte. Peut être que cet échange de place permettrait de rétablir l'équilibre entre leurs deux âmes, ou moitié d'âmes. Elle n'avait pas encore fait la lumière sur ce qu'elles étaient. Elle soupçonnait des choses. Varda dans sa tentative, avait sans doute fait appel à un morceau de l'âme de Morrighan pour permettre à celle de son enfant de vivre. Le fait que de son vivant, Morri avait été bien plus qu'une sorcière. Dans un siècle paien, elle avait été devenue une entité auquelle on vouait un culte après sa propre mort.

« Est-ce que tu sais ce que Amaranth espérait, en venait ici ? Je suis un médicomage, mais je ne sais pas un briseur de maléfice. Elle doit en avoir conscience. »

Sa question lui arqua un sourcil. Elle fit une pause, goutant la boisson chaude avec un plaisir à peine dissimulée. C'était sa langue qui était engourdie par l'alcool, ses papilles qui s'affolaient pour la liqueur sombre.

- Que tu la soulage, que tu l'écoute, que tu la rassure. Tu n'es pas qu'un médicomage corrigea t elle, avec un ton presque agacé. Tu n'avais jamais été qu'un médicomage Nathaniel.. Tu en doute encore aujourd'hui, après tout ce qu'il s'est passé.. Elle marqua une nouvelle pause, balayant du regard le sorcier.

- C'était peut être une mauvaise idée de venir te voir, mais c'était la seule solution.   Maugréa t elle d'un ton presque compatissant pour sa propre sorcière.

Elle songeait à quitter la demeure sans aucune cérémonie, mais se ravisa. La sorcière se releva, quittant le confort du canapé, et les souvenirs de la boisson. Son coeur se serra un instant, elle ne pouvait trahir Amaranth, et manquer de respect à la personne qu'elle estimait le plus. Les deux presques soeurs avaient conclus un accord, celui d'avancer ensemble malgré la difficulté, malgré la douleur. Elles étaient liées, et pour survivre l'une dans l'autre, il le fallait.
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Nathanael se demandait souvent s'il aurait été ainsi, aussi patient, aussi attentif, aussi prévenant s'il avait été enfant unique. S'il n'avait eu qu'à s'occuper de ses propres blessures, et pas celles d'autres avant les siennes. Son père aurait-il été aussi dur envers lui, s'il avait été son seul choix d'héritier possible ? L'aurait-il été encore plus, pour cette même raison ? Quel genre d'homme le Pierce serait-il, s'il n'avait pas appris à se recoudre et à serrer les dents, dés un si jeune âge ? Il posait parfois la question, mais les réponses qui venaient étaient toujours pleines de regret et d'incertitude, car il savait aussi que, si son passé avait été différent, il n'aurait pas eu ses frères et sœur mais, surtout, il n'aurait peut-être jamais croisé le chemin de sa femme.

Alors oui son chemin avait été pénible et douloureux, plus qu'il ne voulait bien l'admettre, mais regretter le passé ne le mènerait à rien de bon. S'il n'avait pas été médicomage, combien de patients auraient été perdus, sans ses soins ? Amaranth aurait-elle reçu l'attention que sa situation méritait ? Probablement pas, et c'était ce sur quoi le médicomage se concentrait, quand Morrighan révéla que la douleur s'en était allée.

Devrait-il alerter d'autres personnes de ce qui se tramait, dans cette maison ? Mais qui ? Des lois avaient-elles seulement été enfreintes ? Autant de questions sans réponse, mais parmi elles une seule remportait la palme. Pourquoi son amie était-elle venue ici ? Elle aurait été bien mieux prise en charge à Ste-Mangouste, pour aider à traiter sa douleur alors que ici, chez lui, les moyens du Pierce étaient bien plus limités.

Portant sa tasse de café à ses lèvres, Nathanael manqua presque d'avaler de travers face à une phrase qui, pour lui, n'était qu'un ramassis de bêtises. Lui, plus qu'un médicomage ? Bien sûr que non, il n'était rien que cela et l'avait accepté depuis longtemps mais, cette fois-ci, il réprima son envie de donner son envie sur le sujet, car il savait que cette discussion ne mènerait à rien de bon.
Il était là pour aider, pas pour se lancer dans un grand débat d'idées, sur son existence et l'utilité de celle-ci. Il n'avait jamais espéré être plus qu'un médicomage et, si cela pouvait sembler triste, il l'avait accepté sans rien attendre de plus de cette chose pathétique qu'était son existence. Au lieu de cela, quand Morrighan avoua que cette visite était la seule solution à sa portée, le Pierce hocha la tête et, posant sa tasse de café sur la table basse, devant lui, perçant le silence d'un simple :

« Je vois. »

Frottant ses mains, l'une contre l'autre, Nathanael n'avait guère plus à dire, pour le moment. Il était là pour aider et écouter, comme d'habitude, comme quoi son travail ne s'arrêtait jamais vraiment. Peinant à sentir le café faire effet, le guérisseur passa une main dans sa crinière d'ébène, avant de demander à Morrighan :

« Il est temps que j'ai une discussion avec elle, alors. Peux-tu lui redonner les rennes ? »

Que pourrait-il seulement lui dire, pour la rassurer, quand lui-même ne comprenait pas tout ce qui était en train de se passer ? Il ne le savait pas, mais allait devoir improviser...comme d'habitude.


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La presque sorcière se renfrogna sans aucune grâce. Morrighan fit rouler son regard vers le plafond ouvragé. Elle n'aimait pas ce qu'elle entendait. Merlin, quel homme inébranlable pensa t elle avec agacement. Si les principes pouvaient avoir un visage ce serait celui du médicomage. Elle ne comprenait pas l'attrait de son autre pour le sorcier. Ou bien elle le comprenait trop bien. Elle situait ce qui pouvait être irresistible, outre le dessin parfait de sa machoire, et sa carrure, et son regard. Elle interrompit le fil de ses pensées.

Il demandait à parler à Amaranth, mais Morri n'était pas disposée à offrir en pature sa sorcière de soeur. Allait il lui faire la morale, lui expliquer qu'il ne pouvait rien pour elle. Elle grommela derrière ses dents. Il était hors de question de laisser un homme, lui expliquait qu'il n'était pas celui qui lui fallait. L'une comme l'autre avaient eu leur compte. Amaranth avait besoin de repos, d'affection, d'attention. Et si même lui, ne souhaitait pas lui offrir, c'était Morri qui allait gérer la suite.

Elle bu une dernière gorgée de l'elixir, et s'adressa au sorcier avec le ton le plus neutre possible. Autant dire que ce n'était pas son fort.

- Pour cette nuit, Amaranth restera indisponible.

La sorcière réajusta son chemisier avec une certaine minutie, observant les contours surpris du visage de Nathan, et se dépêcha de conclure les raisons de cette décision.

- Elle est épuisée, je lui transmettrais ton inquiétude, et je prendrais soin d'elle. Merci de ton accueil.

Elle avait décidé, ce soir. Il n'y aura qu'elle aux commandes, et cela valait mieux ainsi. Elles trouveraient, toutes les deux, des solutions. Morri, demeurait critique envers tous les hommes qui côtoyaient son hôte. Elles les connaissaient, ses nombreuses vies et cicatrices étaient en mesure de prouver la lâcheté qui coulait dans leurs veines. Morrighan avait aimer autant qu'elle avait souffert. Et si le pêché de chair restait son préféré, elle n'avait plus de coeur à offrir.
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