Tous les même tous les même et y'en a marre (Cheucheun)

Mes jambes longues et fines croisés, j’étais dans une petite cour intérieur en train de fumer. Ma garde avait été longue et pénible dessinant des cernes sous mes yeux malgré ma condition de Lycan. Preuve que l’usure faisait quand même ses effets sur moi. Elle s’était terminé par un soin en urgence, d’une maladie rare venu d’Argentine d’un patient dont la peau se transformait en écaille. Rien qu’en y pensant j’en avais la nausée.
J’attendais donc. J’avais eu vent qu’un étudiant à Poudlard, voulait se porter volontaire pour le SAMU magique. Et… comble du comble, cet étudiant n’était autre que le fils du beau Braxton Clearwater. Souriant toute seule, j’observais le matériel déballé ça et là à même le sol.
Quand je vis arrivé un petit jeune homme plutôt séduisant, brun et l’air complètement perdu, je sus tout de suite que c’était à mon homme que j’avais affaire, jetant ma cigarette dans le cendrier, je m’approchais de lui avec ma blouse verte.

« Alors c’est toi Sean Clearwater ? »

Avec un petit sourire, je lui tendis la main.

« Ellie Yard, Médicomage urgentiste et cheffe d’équipe lors des interventions du SAM Magique, je suis chargé de ta formation. »

Je lui adressais un petit sourire, mettant mes mains dans les poches de ma blouse et regardant tout le bordel qu’il y avait par terre.

« Et oui… On commence aujourd’hui. C’est tout le nécessaire qu’on trimbale lors des interventions. C’est lourd, c’est chiant à porter et c’est toi qui va t’y coller parce que t’es le plus beau et le plus musclé de l’équipe… Et le plus jeune aussi. »

J’aurai pu tout porter, sans peine puisque j’étais une Louve. Mais… Un, je ne voulais pas attirer l’attention sur moi, et deux, j’aimais bien voir les rookies en chier un peu lors de leur arrivée. S’il n’était pas capable de garder son sang froid face à ça, il y avait peu de chance qu’il le garde en intervention.

« Alors… J’sais pas grand-chose de toi. T’es en parcours Médicomagie ? Ou tu fais ça pour l’aspect héroïque de la chose ? Ou l’adrénaline ? Y’en a là, si tu veux. De l’adré. »

Je désignais des seringues du bout des pieds, et je me tournais vers lui pour lui faire un grand sourire amusé. Lui faisant un petit clin d’oeil, je poursuivis sur ma salve de questions.

« J’ai vu avec mes supérieurs pour organiser ta formation. Ca va se faire en plusieurs étapes, et faudra bien m’écouter, surtout quand on va sur le terrain. On est pas là pour attraper un Souafle ou briser des sorts comme à l’IDEM-Crackbadaboum. On sauve des vies. Si on réussit, on se félicite, si on échoue, on picole. »

Je lui fis un léger sourire, et je déclarais d’un air amusé pour continuer un peu à le tourmenter.

« Tu ressembles à ton Papa. Il va bien ? J’le connais parce qu’il a toujours un p’tit bobo à faire soigner tu sais. Mais derrière son aspect bourru, c’est un mec bien… Enfin, sauf avec les petites brunes. Là, c’est une autre paire de manche. Il part plus vite qu’un lémurien à la poursuite d’une noix de coco ! J’espère que t’es pas pareil. Et que quand une belle brune te dit qu’elle t’aime, tu t’enfuis pas en courant... »

Je le fixais, puis je me mis à éclater de rire avant de reprendre :

« Détends toi… Je te charie. Bon, t’as quoi comme notions ? Si tu me dis que t’es pas capable de lancer un Episkey tu vas te retrouver à porter le sac à dos toute ta vie bonhomme. »

Des cris et des rires suraigus d’enfants se firent entendre. Ils couraient à côté de lui, le frôlant dans des déguisements de petits sorciers sans se douter un seul instant qu’ils venaient d’en croiser un vrai. Sean observa les petits moldus avec un léger sourire avant de remonter le col de sa veste pour prendre une sombre ruelle déserte. C’était le matin d’halloween et déjà les rues du Londres non magique grouillaient de vies costumées. Le jeune sorcier n‘était pas censé se trouver là, surtout depuis le dernier décret du Ministère de la Magie, mais il avait besoin de se changer les idées avant de débuter son premier jour de travail.

Tout s’était déroulé assez vite depuis la rentrée, et Sean pouvait à peine croire qu’il allait enfin débuter cette nouvelle vie pour laquelle il avait mis tant de temps à se décider. Prenant la direction d’un passage vers le Londres magique, il serra distraitement dans la poche intérieure de son blouson la lettre qu’il avait écrite à Yeleen et qu’il n’enverrait finalement pas. Il lui avait tout expliqué, ses doutes et ses espoirs, le nouveau chemin que prenait sa vie – avant de se rendre compte que la sienne était de plus en plus floue pour lui. Cela faisait un moment que Yeleen ne lui avait plus écrit. Bien trop longtemps pour que cela soit anodin. Mais au lieu de se rendre compte de l’évidence sur la fin de leur relation, Sean avait préféré enfouir son angoisse tout comme sa lettre dans une poche bien cachée et d’éviter au maximum d’y penser.

Une fois parvenu devant Sainte Mangouste, le jeune écossais accosta le premier guérisseur venu pour demander où il pourrait trouver @Ellie Yard, sa tutrice. Suivant les indications, il trouva sans mal la petite cour où elle était censée prendre sa pause – très certainement en train de fumer. Il n’était pas bien sûr du genre de personnage sur qui il tomberait mais n’eut pas à deviner bien longtemps car la médicomage s’avança d’elle-même vers lui pour se présenter. Le Clearwater s’empressa de se pencher vers elle pour lui serrer la main, observant la brune énergique qui lui servirait de mentor.

Rapidement cependant, son sourire motivé se figea en entendant ses qualificatifs. C’était sans doute une manière pour elle de le bizuter. Aussi, Sean se redressa avec son éternel air gêné, passant une main dans ses cheveux pour se donner une contenance.

- Enchanté docteur Yard, merci d’avoir accepté de devenir ma tutrice…

Il jeta un coup d’œil au matériel en songeant immédiatement à divers sortilèges qui lui aurait permis de tout transporter sans peine. Mais peut-être qu’il faisait partie du test de vérifier comment Sean pouvait s’en sortir sans magie. Cela ne le gênait aucunement, au contraire. En attendant, la médicomage souhaitait en savoir plus sur l’étudiant, ce qui paraissait bien naturel.

- Je… Je ne suis pas en parcours médicomagie. A vrai dire j’avais débuté un MULOT en sécurité magique, avec un stage au bureau des Aurors. Mais… comme vous le savez surement, il y a des passerelles possibles pour la spécialité médicomagique comme nous avons une partie des cours en commun notamment tout ce qui concerne les soins de première urgence. Ma mère était… médecin moldue donc j’ai également de bonnes connaissances en Études de la Médecine Moldue. C’est pour ça que le directeur a accepté cette réorientation pour une formation accélérée en apprentissage direct…

Ça, et le fait que @Luke Korrigan soit très proche de la famille Clearwater. Sean devait sans doute autant remercier l’ami de son père que le directeur de Poudlard… Le jeune homme passa au silence la recherche d’adrénaline qui avait forcément fait pencher la balance pour ce choix de métier, associée au sentiment de se sentir utile en sauvant des vies. Mais quand la guérisseuse évoqua @Braxton Clearwater, le fils se contenta de blêmir en écarquillant les yeux. Que devait-il comprendre exactement ? Sean préféra déglutir en secouant la tête, se gardant bien de donner son avis sur la question des belles brunes.

- J’ai mon C.O.U.I.C évidemment, donc je maîtrise tous les sorts de premier secours. Mais je suis conscient de manquer d’énormément de connaissances. Je ferai tout pour rattraper mon retard.

Les mains dans les poches de ma blouse, j’observais Sean et je lui accordais pour la première un vrai sourire. En quelques instants seulement, il avait dissipé les maigres doutes que j’avais encore le concernant. Je doutais toujours, des étudiants qui avaient fait le mauvais choix et qui se retrouvaient sur le terrain en découvrant que la Médicomagie, ce n’était pas fait pour eux. Là, c’était plutôt l’inverse. Je voyais dans les yeux de ce jeune garçon qu’il était fait pour ça, et non pour combattre d’éventuels mages noirs.

« C’est un bon début dans ce cas petit. C’est un joli CV. Joli CV pour joli minois comme on dit à Loustry. »

Je lui fis un clin d’oeil. C’était un proverbe totalement inventé, mais j’aimais bien le déstabiliser un peu. Il était mignon et c’était une façon pour moi également de lui signifier que je l’aimais déjà un peu comme il était. Observant le matériel, je poursuivis :

« T’as de bonnes bases. Et t’as aussi ça dans le sang, c’est bien. Mais là on est plus sur de la bobologie qu’on peut trouver à l’infirmerie de Poudlard. Généralement, on part sur des urgences, et qui dit urgence, dit manque de temps. Alors avant que je t’explique le matériel, il faut que je t’explique certaines règles. Analyser, Protéger, Secourir. C’est les trois lettres que tu dois retenir. Un, on doit, lorsqu’on arrive sur le lieux, analyser la situation. Puis on protège la victime, sans pour autant oublier de se protéger soit même. Ensuite, on applique les premiers secours. Pour les deux premières parties, tu auras pas de soucis, et la dernière viendra avec le t... »

Ma montre enchantée, se mit à vibrer. Je l’observais et je fronçais les sourcils. Sans plus attendre, je rangeais l’ensemble du matériel et des potions qui était étalé au sol dans le sac à dos vert et argent aux couleurs de Ste Mangouste. Puis, j’appliquais un sort d’allégement avec un petit sourire espiègle à l’encontre de Sean.

« Tu vas avoir droit à ta première intervention. Allez, porte ça. »

Je lui mis le sac à dos sur les épaules. Il était assez grand mais… léger comme une plume avec le sort que je venais d’appliquer. Passant devant lui, je continuais de le regarder d’un air amusé. Il devait sans doute comprendre que depuis le début, je m’étais joué de lui.

« On y va. Surtout, écoute bien tout ce que je dis d’accord ? »

Et, avec un sourire, j’activais la montre pour me diriger vers l’endroit où nous avions besoin de nous, tout en sortant ma baguette pour le faire transplaner avec moi.


Chemin de Traverse, Allée des Embrunes.

Un petit groupe de sorciers, tous à l’aspect plus sinistre les uns que les autres étaient en train de former un cercle autour d’une personne que je supposais être la victime. Vérifiant que Sean était bien avec moi, je me tournais vers lui et je déclarais :

« Ok, tu vas surveiller mes arrières, tout en écoutant ce que j’ai à te dire. »

Je levais ma baguette et je fis sortir quelques gerbes de flammes dans des détonations rapides et sèches, afin que le groupe de badaud sinistre me laisse passer. Inutile de nous présenter, puisque tout le monde ici nous reconnaissait avec nos blouses… Nos blouses ! Je me rendais compte que je n’en avais pas fourni à Sean.
Le patient, était un homme d’une cinquantaine d’année. Pâle, l’ensemble de ses veines de son corps entier était noir de jais, et il respirait difficilement. Allongé sur le dos, il toussait, et à côté de sa main, une petite noire, avec une flamme rouge avait roulé. Elle proclamait un murmure qui ne m’offrait qu’une envie… M’en saisir.

« Ne touche pas à ça. »

J’enlevais le haut de ma blouse, pour me retrouver en débardeur de sport et je couvrais la sphère tout en me tournant vers Sean.

« Ok, donc là, on est sur de la Magie Noire. Ca va te permettre d’entrer dans le vif du sujet dés le départ. La majorité des infections liées à cette forme de magie, se gère de la même manière dans l’urgence. Il faut d’abord sceller la magie noire en lui, dans une zone du corps grâce à un sort de Scellement. Puis, on le transfert à Ste Mangouste, où ils prennent le relais. »

Je pris dans le sac qu’avait Sean, des parchemins et des bougies. Sortant les parchemins, on pouvait voir que la majorité était écrite dans une langue semblable au Japonais. Allumant les bougies je les lui donnais. 

« La majorité des sorts de scellement nous viennent d’Asie. Ils ont toujours excellé là dedans. Bien, place les bougies et vient ensuite avec moi, on sera pas trop de deux pour sceller le maléfice. »

La présentation de Sean correspondait sans doute au moins en partie à ce que la médicomage attendait de lui car elle lui offrit un franc sourire qui l’aurait fait presque rougir s’il n’avait pas dans le même temps légèrement blêmit de stress. Cependant, sa remarque qui suivit ne lui permit plus de camoufler ses oreilles rougissantes sous sa chevelure. Joli minois… C’était sans doute une manière pour elle de le bizuter…

Le Clearwater se reprit cependant rapidement en tachant de reprendre une posture professionnelle, acquiesçant, notant mentalement les quelques concepts qu’elle lui décrivit d’une traite. Il prendrait le temps ce soir, de retour dans la petite chambre qu’il louait sous les toits londoniens, de retranscrire tout ce savoir sur la pile de parchemin qui n’attendait qu’à être noircie par de nouvelles connaissances. Sa tutrice fut interrompue dans son monologue par un tintement de sa montre qu’elle consultât brièvement avant de rassembler tout le matériel dans un sac à dos. Attrapant le sac qu'elle lui tendit, Sean eut un haussement de sourcil de surprise en le sentant aussi léger de l’air. Évidemment… Fallait-il être naïf…

En déglutissant, Sean hocha de nouveau la tête quand la sorcière se drapa d’un air bien plus sérieux en lui demandant de la suivre pour sa toute première mission. Il ne s’était pas attendu à se retrouver si vite sur le terrain, mais déjà, par-delà l’angoisse soudaine, l’étudiant ressentit cette petite étincelle d’excitation lui remuer les entrailles.

Peu impressionnée par la ruelle dans laquelle ils venaient d’atterrir, la mécamage se hâta d’éloigner les badauds avant de de se pencher sur la victime. Première étape : analyser, songea le jeune homme en ne la lâchant pas d’une semelle. Il avait cependant sortit sa baguette quand elle lui ordonna de veiller sur leurs arrières, jetant des coups d’œil tout autour d’eux tout en restant attentif à ses paroles. Deuxième étape, protéger…

Mais avant que Ellie Yard ne recouvre de sa veste une étrange boule sombre à côté du corps, Sean put en percevoir un éclat qui lui transperça le cœur. Il cligna plusieurs fois des yeux, tentant de comprendre cet appel qu’il ressentait si violemment. Sa tutrice ne tarda pas à lui en expliquer l’origine. De la magie noire… Sean eut besoin de tout le self-contrôle appris dans ses entraînements à la résistance mentale pour retrouver l’entièreté de ses mouvements.

Il déposa son sac au sol pour voir Ellie en sortir quelques liasses de papiers et des bougies qu’elle alluma d’un mouvement de la main. Sean se hâta de suivre ses consignes, les attrapant pour les disposer tout autour du corps, prenant au passage un soin exagéré à contourner la boule noire recouverte afin de ne pas trop s’en approcher. Une fois que ce fut fait, il rejoignit en quelques enjambées la sorcière penchée sur ses parchemins.

Cependant, derrière elle, un curieux passant attira son attention alors qu'il s’était approché d’un peu trop près de la mécamage. Sean leva sa baguette vers lui afin de le repousser doucement d’un simple sort d’éloignement.

- Écartez-vous s’il vous plait, laissez-nous intervenir, se contenta-t-il de lancer non sans ressentir une assez grande fierté devant l’institution qu’il représentait à présent.

Mais l’homme revint rapidement sur ses pas avec un drôle de regard hagard. Le jeune écossais compris alors qu’il n'était pas tant fasciné par leurs agissement que par la sphère noire encore posée au sol. Il avait du lui aussi percevoir l'éclat et ressentir l’appel de cette magie ténébreuse… Sean réagit aussi rapidement qu’on le lui avait enseigné lors de son précédent apprentissage, et d’un stupéfix parfaitement exécuté, il figea l’homme dans sa progression. Une fois la menace écartée, il put enfin tourner son attention vers Ellie.

Dernière étape : secourir…


(Dé réussi)

Accroupie, je terminais de placer les dernières bougies. Du coin de l’oeil, je vis Sean s’exécuter à merveille, et bien mieux que je ne l’aurai espéré. D’un mouvement de baguette rapide, j’envoyais un sortilège de Coussinage pour éviter que l’homme ne se fasse mal en tombant afin d’avoir un nouveau blessé à gérer sur les bras. Mes yeux se posèrent sur la sphère, recouverte par ma blouse. Elle avait plus d’attirance que je ne l’avais imaginé. Ma lycanthropie et les pouvoirs liés à la Nature me protégeait plus que les autres, enfin c’était ma théorie car je n’étais certaine de rien.

« Le bureau des Aurors ne devrait pas tarder. »

Et effectivement, quand j’eus finis de parler, plusieurs transplanages résonnèrent. Tous le monde les reconnus immédiatement avec leurs uniformes, et beaucoup s’en allèrent, ne voulant pas avoir de problèmes, ou ne voulant pas être vu dans l’Allée des Embrumes. Un jeune homme s’approcha de nous, envoya un sortilège qui enferma la sphère dans une espèce de cage dorée, et plusieurs autres Aurors se chargèrent de la transférer à l’abri des regards. Un petit poids dans ma poitrine s’en alla, quand la sphère disparut de mon champs de contact.
A ma grande surprise, l’Auror qui avait enlevé la sphère se pencha sur Sean et l’embrassa sur la joue. J’ouvrais la bouche. Si on m’avait dit qu’il était gay…

« J’vois que tu es déjà à pieds d’oeuvre, p’tite tête. Bien, je vais aller poser des questions à l’intérieur. On se voit ce soir, Sean. »

J’ouvris la bouche, mes sorts de scellement dans la main. C’était vraiment donné du lard aux éruptifs.

« J’comprends mieux pourquoi mon charme n’a pas eu d’effet sur toi. Je juge pas, au contraire. Mais… Vous êtes aussi mignon l’un que l’autre, si vous pouviez en laisser aux célibataires hétéros des comme vous, ça serait super sympa. » dis-je avec une pointe de sarcasme amusé.

La tête de l’Auror me disait quelque chose, mais je n’arrivais pas à savoir quoi. Me rappelant brusquement qu’on avait un homme entrain de mourir, je commençais rapidement à prendre les petits parchemins écrits en japonais et je commençais à les lire avec un accent anglais bien évidemment. Je tendis alors la main à Sean.

« Il faut qu’on se tienne la main, pour que le flux magique passe. Je dirai rien à ton p’tit copain promis. C’est pour sauver cet homme. »

Je continuais de lui sourire, attendant qu’il me prenne la main. Le sort de scellement se plaça déjà sur sa cuisse. C’était le meilleur endroit pour sceller. Les veines noires commencèrent à disparaître, mais pas assez. Il me fallait un peu plus d’aide en terme de magie, et j’étais convaincu que le petit avait assez de potentiel pour m’aider.

« Allez beau gosse. Donne moi la main, oublie ton mec et rejoins moi pour la vie... »

Je me mis alors à rire. C’était bien évidemment une vanne, juste pour l’embêter. Il me plaisait, ce petit Sean. J’étais certains qu’il était assez brillant pour comprendre tous les niveaux d’humour.

Juste après l’annonce de sa tutrice, une troupe d’Aurors fit son apparition, et Sean sentit son cœur se serrer brièvement en voyant ses anciens collègues de travail s’activer dès leur arrivée. Parmi eux, une figure bien familière suffit cependant à le faire se dérider. @Fergus Clearwater !

Son cousin s’approcha de lui pour le saluer après s’être occupé de la sphère ténébreuse avec le professionnalisme qui le caractérisait. Le jeune étudiant se sentit alors soudainement bien plus soulagé sans la présence de cet artefact de magie noire juste à côté d’eux. Se tournant de nouveau vers sa tutrice, Sean fronça cependant des sourcils en l’écoutant, sans bien comprendre dans un premier temps la portée de ses paroles. Mais au fur et à mesure que la lumière se fit dans son esprit, ses yeux s’écarquillèrent alors qu’il secouait silencieusement la tête en blêmissant.

Ses charmes qui n’avaient pas eu d’effet ? Fergus, son petit copain ? Sean manqua de s’étouffer, alors qu’un dernier « beau gosse » suffit à lui faire retrouver toutes ses couleurs avec une intensité bien plus écarlate. Mais la médicomage lui lançait un sourire si pétillant en lui tendant la main que le jeune écossais fut plus perdu qu’autre chose... Est-ce qu’elle se moquait de lui ? Sans parvenir à distinguer pleinement le premier du second degré, Sean s’approcha d’elle en bafouillant.

- N… Non non docteur… Ce n’est pas mon petit copain… C’est… mon cousin… Je suis pas… enfin y’a rien de mal à… Mais enfin… Je suis pas… vos charmes… enfin je veux dire… vous êtes… sérieusement…

Préférant arrêter là le massacre, il scella ses lèvres avec un certain désespoir avant de se reprendre pour lui attraper fermement la main. Blague ou pas, il y avait bien plus urgent en ce moment que de dissiper le moindre malentendu. La vie d’un homme était en jeu.

Ellie avait préparé son sort de scellement qu'elle avait commencé à appliquer sur la cuisse de l’homme atteint. Le mal qui le rongeait de l’intérieur apparaissait clairement par la façon dont il entaillait de marques noires son corps. Si ces dernières avaient commencé à disparaitre, la magie de la médicomage avait semble-t-il besoin d’un coup de pouce. Aussi, Sean fit son possible pour lui transmettre sa propre énergie. Au fond de lui, alors qu’il puisait dans ses pouvoirs, il se sentit de plus en plus assailli de doutes. Est-ce que les différentes expériences qu’il avait eu avec des mages noirs et leur magie n’avait pas un peu trop entaché la sienne ? Et si malgré lui il transmettait quelque chose de mauvais à la victime ? Au pire, à Ellie ? Peut-être aurait-il dû la mettre en garde à propos de son passé. Mais Luke l’avait sans doute déjà fait…

Il pouvait cependant balayer ses doutes, car les marques noires se dissipaient belles et bien, alors que le teint cireux de l’homme couché au sol reprenait quelques couleurs. Désirant redoubler d’effort, Sean plaça sa deuxième main sur la première pour renforcer son emprise sur la poigne de la médicomage. Sa tête commençait à lui tourner, mais rien de bien alarmant selon lui. Les petites veines noires rejoignaient toutes le sortilège placé sur la cuisse. Le sceau devrait tenir jusqu’au transfert à Sainte Mangouste. Sean espérait que ce serait le cas mais n’osait dire un seul mot de peur de déconcentrer Ellie.

Le sort fit son œuvre et grace à l’énergie de Sean, l’homme fut sauvé. Observant ce dernier j’inspectais le sceau, le trouvant étrangement brillant et parfait. Mes sourcils se froncèrent et je relevais mes yeux vers Sean pour lui dire cette fois-ci sérieusement :

« C’était bien. T’as un don pour ça. Et c’est pas des bêtises, c’était du beau boulot. »

Je me relevais et d’un coup de baguette je transportais le corps à Ste Mangouste par portoloin, joignant mon rapport avec. Observant ma montre, je remarquais qu’on avait dépassé le cadre de la formation et de mon temps de travail depuis quinze minutes. Relevant le museau vers lui, je lui souris et je déclarai :

« Allez, viens. On va boire un verre. Tu me raconteras plein de truc sur ton cousin beau gosse. C’est fou cette famille quand même, vu le nombre de brun ténébreux que vous arrivez à fournir. C’est presque indécent. »

Et, avec un sourire malicieux, je lui tendis le bras pour un transplanage d’escorte, direction le Chaudron Baveur.

L’endroit n’avait pas bougé et ne bougeait jamais. M’installant sur une table pour deux, je déposais mon manteau et je gardais ma blouse. Commandant deux verres de whisky pur feu, comme le voulait la tradition après chaque opération difficile, je regardais mon verre arriver avec une petite convoitise non-feinte.

« Hé voilà ! La tradition. A ta première mission réussite en tant que membre du SAMU Magique. C’était bien joué. »

Je trinquais avec lui et je bus plusieurs lourdes gorgées. Déposant mon verre devant moi, je relevais le nez vers lui, et… j’étais enfin décidé à le laisser tranquille et en paix. J’arrêtais de le taquiner. Déjà, je ne voulais pas qu’il se plaigne pour harcèlement et ses facultés avaient prouvé que le bizutage était bel et bien terminé. Lui adressant un sourire sincère, je déclarais :

« Alors ? Dis moi qu’est ce qui t’as amené à choisir cette voie. Faut être maso pour faire ce job, j’aimerai savoir qu’est ce qui te pousse à vouloir te faire du mal comme ça. Et me sors pas une connerie du genre  « aider les autres et mon prochain ». Ca existe pas, et ca marche pas avec moi. On a tous une raison de faire ça. »

Je rejetais mes cheveux en arrière, tout en l’écoutant. Le serveur se contenta lui de s’occuper d’autres clients et on était assez éloigné pour que personne ne nous entende. Du moins, sauf les Lycanthrope, et il n’y avait que moi qui avait cette particularité dans le bar.

« T’as l’air un peu amoché. Par au niveau du corps, mais au niveau du coeur. Quand je te faisais mes petites blagues, j’ai bien vu que ça te plaisait pas trop. C’était juste du bizutage. T’es mignon, mais t’es un peu jeune pour moi. Et beaucoup trop... »

Je bougeais mes mains, pour lui faire passer un message. J’allais dire « fracasser et démoli », mais je n’osais pas le vexer, alors je me contentais simplement de dire :

« Pas prêt quoi. »

Ils n’avaient pas mis longtemps à se retrouver installés autour d’une table du Chaudron Baveur, un verre de scotch chacun devant eux. Sa tutrice avait-elle perçut le léger accent écossais de son phrasé, ou bien connaissait-elle la réputation de son clan ? Quoi qu’il en fût, Sean était ravi de voir sa première journée si bien se terminer. Relevant ses pupilles sombres sur la médicomage, il se reposa sur l’ambiance décontractée du pub pour se permettre de réellement l’observer pour la première fois depuis leur rencontre.

Ellie Yard s’était montrée d’un tel professionnalisme, gérant cette situation d’une main de maître qu’elle l’impressionnait profondément. Elle paraissait rodée par l’expérience, sans être pourtant bien plus âgée que lui. A peine quelques années devaient les séparer et pourtant, Ellie le devançait dans de nombreux domaines. La sorcière avait ce je-ne-sais quoi de sûre d’elle qui le déstabilisait mais le fascinait tout autant. Et malgré tout, bien qu’elle semblât adorer le taquiner avec des remarques sur son physique et celui de sa famille, la guérisseuse montrait une réelle bienveillance. La preuve, c’était qu’elle l’invitait à boire un verre pour son premier jour, alors qu’elle avait sans doute bien mieux à faire de ses journées, et surtout de ses soirées.

Suivant son geste, Sean vida une partie de son verre dans son gosier, appréciant la chaleur du breuvage fumé. Ayant eu une histoire compliquée avec l’alcool, cela faisait longtemps qu’il n’avait pas apprécié en toute simplicité un bon whiskey. En fait, cela faisait longtemps qu’il ne s’était pas détendu en soirée, dans un pub, en présence d'une compagnie féminine… Les pommettes légèrement plus colorées, le regard portant une pointe de brillance, il redressa son visage devant l’interrogatoire de sa tutrice. Secouant lentement la tête, ile jeune écossais se concentra de nouveau sur son verre en fronçant légèrement les sourcils, cherchant une réponse satisfaisante à lui apporter.

- Honnêtement, je ne sais pas vraiment… J’aime l’idée de me sentir utile, j’ai vraiment besoin de ce moteur dans ma vie professionnelle. Vous savez que mon père était Langue-de-Plomb… Peut-être que le fait de me retrouver impuissant alors qu’il rentrait souvent de mission en piteux état m’a motivé. Ou alors c’est le métier de ma mère qui m’a inspiré… Vraiment, je ne sais pas trop.

Sa mère l’avait déjà alerté sur le danger de chercher à sauver tout le monde. Le syndrome Clearwater, répétait-elle souvent. Mais Sean se sentait incapable de ne pas répondre à cet appel. Il avait besoin d’agir, d’arrêter de trop réfléchir et de se lancer dans la bataille. Ellie ne se montrait pas franchement dupe, et alors qu’elle rejetait sa longue chevelure en arrière, son regard brilla vers lui. Elle le trouvait… cabossé, et… trop jeune ? Sean se redressa en se sentant piqué par sa remarque, sans bien savoir pourquoi. Il n’était pas si jeune que ça, et puis que voulait-elle dire quand elle disait ne pas le sentir prêt ? De quoi parlait-elle ? Un instant, le visage de Yeleen lui apparut avant de s'évanouir en laissant derrière lui une vague de triste nostalgie. Voilà peut-être de quoi parlait Ellie…

- Amoché, répéta-t-il avec un sourire crispé en jouant avec son verre à moitié vide. Heureusement qu’Ellie ne le rencontrait qu’aujourd’hui. Qu’aurait-elle dit si elle l’avait vu quelques mois auparavant…

- Je vais mieux pourtant. Je me fais soigner… Comment expliquer ce par quoi il était passé en quelques mots ? J’ai eu une histoire familiale… compliquée. J’ai été en effet un peu amoché par des sortilèges quand j’étais enfant. Et puis… plus récemment aussi. Vous rajoutez à ça une rupture difficile alors que nous étions fiancés et… voilà le résultat.

Sourire forcé. Il leva son verre dans sa direction avant de boire une nouvelle gorgée. Mais quelques secondes plus tard et il regrettait déjà sa tirade. Ellie n’était pas n’importe qui, mais sa tutrice d’apprentissage. Elle devait s'assurer de pouvoir compter sur lui durant les prochains mois que durerait sa formation. Aussi, il reprit sur un ton beaucoup plus sérieux.

- Mais je vais mieux, je vous assure… Et surtout, j’ai conscience de mes limites donc je suis toujt très vigilent. Et vous docteure Yard, qu’est-ce qui vous a poussé à suivre cette voie ?

Je le regardais tout en jouant avec mes cheveux. Il me plaisait bien ce garçon. Il parlait de son père, et de sa mère qui visiblement les avait guidé tout au long de son existence. Il était très famille, et pour ça, il venait de remonter dans ma quote pas trop difficile selon Zoey Woods. Je me mis à rire, tout en buvant quelques gorgées :

« En somme, tu reproduis un schéma familial. C’est pas incohérent. » répondis-je simplement pour commencer.

Quand il prononça le mot « Amoché » j’eus envie de passer de l’autre côté de la table et de le serrer contre moi comme un petit chiot. Il avait vraiment pas l’air dans son assiette et je soupirais simplement de tristesse face à ça. Qu’est ce qui avait bien pu lui arriver à ce pauvre garçon ?
Je plissais alors les sourcils, quand il me déclara avoir été victime autrefois de mauvais sorts. Ma mine s’assombrit un peu, sentant que ça devenait brusquement sérieux. Je me penchais vers lui, et je l’observais de mes yeux sous un autre angle. Pas de la pitié, mais plus… une certaine forme de respect. Il avait l’air d’en avoir pas mal bavé et pourtant, il gérait un max.

« Quel genre de maléfice ? Je te parle en tant que Médicomage, je peux t’aider si ça se trouve. Mais t’as l’air plutôt en forme, enfin, t’es capable de tenir la route. Ca preuve que t’as une bonne capacité d’adaptation et dans ces cas précis, c’est super important. »

Certains finissaient internés à vie, parce que fou ou dément pour ce genre de chose. Je brûlais d’en savoir plus sur la question, mais en même temps, est ce qu’il allait vraiment se confier. Je regardais nos verres, en me disant intimement que ça l’aiderait surement à délier sa langue.

« Ah. Désolé pour la rupture. Tu sais ce qu’on dit. Un pain de perdu, dix de retrouvé… C’est que c’était pas la bonne. Tu vas certainement trouvé quelqu’un, regarde moi ! »

Je lui montrais une main vide de tout anneau et de tout engagement.

« Célibataire depuis des années, et fière de l’être malgré mes amis. C’est un choix de vie. Une véritable mantra ! Pas d’petit ami, pas d’soucis. Que moi et mes 53 chats. »

Je lui mis un petit coup de pied sous la table en lui faisant un clin d’oeil.

« Je déconne. J’ai pas 16 chats. J’en ai deux. Mais t’y as cru, j’en suis sur… On peut te faire croire n’importe quoi, j’le vois dans tes yeux. »

Je bus alors plusieurs gorgées. Ce petit con avait réussi à me retourner ma question contre moi. Je buvais d’ailleurs encore un peu plus, vu que ma consistance de Lycan faisait que je gérais mieux l’alcool qu’un écossais. Je fis une grimace, puis je pesais mes mots pour chercher une réponse convenable. J’allais quand même pas lui dire que j’avais fini Médicomage parce que je vivais dans une Meute de Loup et qu’ils avaient besoin de soin que Ste Mangouste ne pouvait offrir ?

« La passion. La lumière dans les yeux de quelqu’un qui vous merci en vomissant de l’avoir guéri. La gloire aussi, d’être reconnu et pas du tout insulté par les patients qui pensent qu’on est des dieux vivants capable de résoudre tous leur problème. Et l’argent. Un salaire dix sept fois supérieur au ministre de la Magie, pour un métier facile comme un sort de première année... »

Les sarcasmes volaient les uns à la suite des autres, prouvant bien évidemment que je pensais totalement le contraire. Finalement, je n’eus pas le coeur de lui mentir d’avantage, avec sa tête de petit chiot de 5 semaines.

« J’ai fait ça pour aider ma famille, qui était dans le besoin à ce niveau là. Et pour me sentir utile, comme toi. Je me voyais pas derrière un bureau, à compter les Gobelins ou recensé les Centaures tout en cherchant à savoir si leur nom était d’origine Grecque, ou Moldave. Ni dans une boutique à faire des courbettes pour vendre des trucs aux gens qui leurs servent à rien. »

Je lui fis un léger clin d’oeil, et je repris plus sérieusement :

« Je te crois, quand tu me dis que tu vas mieux. Sinon, t’aurais jamais accepté de boire un verre avec une aussi jolie femme que moi. Attends, bouge pas, c’est pour une amie, elle me croira jamais. »

Je sortis de ma poche un vieil appareil photo magique, et je nous pris par surprise tous les deux. Pour la photo, je lui avais pris la main et lâché immédiatement après.

« Prends ça dans ta gueule Woods… Si tu pensais que j’en étais plus capable ! »