Remember to Forget

feat.  @Siobhán G. K. Almadovar


Dans cette salle de classe froide et poussiéreuse, deux élèves se tenaient face à face.

Quelques minutes auparavant, l’interview avec  @Chelsea Waldorf avait pris un tournant inattendu.  
L’arrivée de Siobhán avait compliqué la situation, tout en la simplifiant.  

Alors qu’un nuage était venu assombrir le ciel l’espace d’un court instant, la pièce sembla s’être réchauffée.
Délaissant le grand blond à qui elle avait adressé un regard énigmatique, Siobhán s’était éloignée, pour rejoindre la Première Année.
Autour d’elle, ce halo si particulier était apparu. Presque invisible pour celui qui ne savait pas où regarder.

Mais Xris connaissait la Préfète comme peu de personnes au sein du Château.
Et, si elle semblait souvent réticente à utiliser ses dons de vélane, elle semblait les maîtriser de mieux en mieux.
Il suffit de voir l’attitude de Chelsea changer alors que celle-ci quittait la pièce.
Apaisée.
Rassurée.
L’attitude réconfortante mêlée aux dons de Siobhán avaient métamorphosée la petite pleurnicharde en une fille calme et sereine.
Oubliant presque son faux traumatisme sur-joué.

Xris suivit la petite journaliste des yeux jusqu’à ce que celle-ci ait disparu dans le couloir.
Il ferma les yeux un court instant et s’accorda un soupir.
Ses pas le guidèrent lentement vers son amie, tentant d’absorber l’enchainement d’évènements qui avait pris place sous ses yeux.

Ses iris azur vinrent se poser dans ceux de Siobhán.
Il ne put s’empêcher de sourire brièvement.

- Bon choix de ta part de refuser l’interview…

Xris passa une main dans ses cheveux blonds.
Il jeta un œil vers la porte par laquelle Chelsea venait de disparaître.
Il savait que ses mots avaient un sens et qu’elle prendrait sa revanche tôt ou tard.
Et même s’il n’était pas impressionné outre mesure par la petite wannabe journaliste, ce genre de parasite tendait à l’exaspérer.

- Très belle attitude de… préfète… lâcha-t-il dans un demi-sourire. Désolé de t’avoir mis dans cette position.

Xris serra les dents.
Il devait l’admettre, la scène à laquelle Siobhán avait fait face en rentrant dans la salle de classe avait de quoi créer des interrogations.
Si la première année avait franchi le seuil invisible de sa patience, Xris aurait dû simplement quitter la pièce et ne pas revenir sur ses pas.
Ne pas se défaire de ce calme froid qui le caractérisait tant.

Mais sa fierté de Serpentard, mêlée à celle des Andērson, avait pris les devants.
Dirigeant les actions du grand blond dans une noirceur presque aveuglante.  
Que l’arrivée de son amie avait – comme souvent – rapidement dissipé.  

feat.  @Siobhán G. K. Almadovar


Xris passa de nouveau machinalement la main dans ses cheveux, portant un regard sur Siobhán, qui l’avait désormais rejoint vers l’entrée de la salle de classe.
Il l’observa quelques instants avant de reculer légèrement, prétendant être perdu dans ses pensées, suite à sa question.
Ce qui n’était pas loin de la réalité.
Mais l’interrogation qu’elle lui avait lancée n’était ici, pas le centre de ses propres questionnements.
Le grand blond fronça les sourcils.
Désormais dos à son amie, il évaluait la situation.
Il était d’un calme singulier, riant presque aux remarques que lui avait fait la Serpentard.
Xris était effectivement une personne qui agissait avec beaucoup de retenue.
Il était froid et distant et, même avec ses plus proches amis, ne prenait que très rarement les choses à la légère.

Or, ce n’était ici pas le cas.

Le grand blond serra les mâchoires.
Jamais il n’avait eu à ses préoccupé des dons de Siobhán jusqu’à présent.
Car ceux-ci n’avaient jamais eu aucun effet sur lui.
Mais la réelle question persistait et résonnait dans son esprit.
Étaient-ce les dons de vélane, ou la simple présence de celle-ci qui le menait à ce calme inattendu et inhabituel.

Ces derniers temps, il était vrai que les deux Serpentards s’étaient rapprochés.
En particulier suite à cette nuit éprouvante durant laquelle à la fois Xris et Siobhán avaient dû traverser des épreuves.
Xris se rassérénât.
Voilà ce que l’on ressentait lorsque l’on se retrouvait avec une personne d’une totale confiance.

- Je doute que les Préfets des autres maisons soient aussi appliqués que toi, lâcha-t-il face à l’annonce du retrait de points. Mais fait ce que tu penses devoir faire, dit-il d'un ton légèrement plus frois que précédemment.

Siobhán se retrouvait dans un étau à double tranchant.
Sa nomination au rôle de Préfète de Serpentard.
Et son père, Directeur de Poudlard.
Difficile d’échapper au règlement. Ni à son application.

- Elle a cherché à… transformer la réalité de ce qu’il s’est passé ce soir-là. Il marqua une légère pause, fronçant légèrement les sourcils. Sa colère revenait peu à peu et – d’une étrange manière – cette sensation l’apaisa. Et c’était exactement pour éviter ça que j’ai accepté cette stupide interview.

L’injustice pouvait mettre hors de lui le Serpentard.
Et @Chelsea Waldorf avait clairement joué sur cette corde sensible, tentant de modeler à son désir les paroles du Vert et Argent qui, à défaut d’avoir été prononcées, avaient pris vie au travers des mots écrits par la plume à papote.
Il s’éloigna quelques instants, tentant de calmer la rage qui bouillonnait à nouveau au sein de ses pensées.
Étouffant toute autre pensée lucide, comme cela avait été le cas avec les cordes.

- Je comprends, souffla-t-il en se rapprochant à nouveau de son amie. Je crois que c’est le cas pour chacun d’entre nous, mais à notre manière.

Il soupira.
Chacun à leur manière, ils avaient laissé une partie de leur âme dans cette caverne mal éclairée.
Leur courage sans faille, leur confiance en autrui.
Leur confiance en eux-mêmes.
Le rire des Gobelins résonna quelques secondes dans ses oreilles.
Sur le visage de son amie, la tristesse semblait percer vers la surface.
Sa voix s'était serrée, comme un rejet des mots qui quittaient ses lèvres.

- Tu en as parlé avec Edel ?

S’il était resté quelques temps au chevet de Siobhán lorsqu’ils s’étaient tous retrouvés à l’infirmerie, Xris avait pu voir que son meilleur ami n’avait que peu répété ses visites à sa femme.
Il avait également pris ses distances avec Xris également, et ils ne se croisaient plus que lors des entrainements de Quidditch, imposés par le Capitaine.

feat.  @Siobhán G. K. Almadovar


Le regard que lui lançait Siobhán semblait se balancer dans un équilibre fragile.
Entre la douceur dont elle pouvait faire preuve.
Et la dureté de ses croyances.
Beaucoup desquelles Xris avait lui-même adopté tout au long de sa vie.
Il était loyal et constant. Et n’agissait que rarement sur un simple coup de tête.
Il pouvait compter ces réactions sur les doigts de la main.
Avec sa famille. Mais aussi au sein du Château.
Le coup de poing dans le visage plissé par la bêtise de @Michel-Ange Grimm .
Le baiser échanger furtivement avec @Apolline Dunn dans la volière.
Et les cordes jetées sur @Apolline Dunn .

Des sentiments bruts. Sans filtres.
L’amour et la haine.
Deux opposés qui semblaient dicter bien des actions au Serpentard.
Et Siobhán le savait. Il les combattait sans cesse.
Soupirant à ses derniers mots, il croisa son regard tout aussi froid que le sien.

Il ne répondit pas.
Simplement parce qu’il le savait, elle avait raison.
Et il respectait cette décision qui lui incombait désormais, même si, en tant qu’élève exemplaire, elle devait détester cette décision tout autant que lui.

- Je sais… lâcha-t-il en soupirant, laissant instantanément comprendre que lui-même n’approuvait pas sa propre réaction.

Il suivit son amie des yeux à son tour, évaluant les éléments qui semblaient venir perturber ses iris claires.
Les couvrant d’un voile légèrement plus sombre.
Ce regard qui ne l’avait que rarement quitté depuis les grottes.
Car Xris s’était lui-même empêcher d’y repenser autant que possible.
Revoir les lames aiguisées transpercer les corps. Les mutiler.
Il revoyait la scène au ralenti.
Les cris, les rires.

La chaleur de la forge animée par les Gobelins.
Il pouvait encore ressentir la caresse subtile des flammes contre sa peau.

Le froid des murs en pierre de l’Église.
Le courant d’air glacé qui avait balayé l’espace alors qu’ils avaient tous compris la trahison et le danger grandissant.

Le regard de Xris disparu alors qu’il ferma brièvement les yeux.
Tentant à son tour d’essayer d’effacer ce souvenir indésirable.
Mais c’était comme une fumée invisible qui venait peu à peu l’étouffer.

La voix de Siobhán le ramena à la réalité. Il observa alors celle-ci s’éloigner de nouveau.
La pièce dans laquelle ils se tenaient lui parut soudain beaucoup plus accueillante.
Il respira profondément, ramenant toutes ses pensées au moment présent.
La vélane semblait troublée. Comme il l’avait lui-même été quelques secondes plus tôt.
Les mots qui avaient quittés sa bouche étaient comme amer, et Xris comprit, bien avant qu’elle ne lui avoue, la fausseté de ceux-ci.

Il avait remarqué depuis plusieurs jours qu’Edel était comme absent.
Et, s’il comprenait la situation, il l’était également auprès de son épouse.
Ce mot qui résonnait encore d’une étrange manière aux oreilles de grand blond.

- Il était là. Et peu importe ce qui t’empêche de lui en parler, je suis sure qu’il comprendra.

Si la jeune femme n’avait pas échangé sur son mal-être avec celui qu’elle considérait comme sa moitié, la raison devait être profonde.
Il ne s’agissait probablement pas juste d’un état de stress post-traumatique, car avoué ou non par les élèves, cette soirée avait été un réel choc.
Une collision dont l’onde de choc continuait encore à se répercuter.

- Et en attendant que tu sois prête… je suis là.

Il avait légèrement baissé le regard, avant de le relever pour croiser les iris ternies de Siobhán.
Elle savait qu’elle pouvait compter sur lui.
Ils avaient passé beaucoup de temps ensemble ces dernières semaines.
Mais le dire était autre chose, surtout pour une personne aussi pudique que Xris.

feat.  @Siobhán G. K. Almadovar


Alors qu’un nouveau rayon de soleil balaya la pièce d’un halo doré l’espace d’un court instant, Xris pu presque percevoir la tension qui commençait à tendre le corps de Siobhán.
Comme si chaque centimètre de son être était en manque d’oxygène.
A la limite de l’asphyxie.
Tout, dans son langage corporel semblait détenue dans un carcan, bientôt prêt à céder.

Lorsque les mots parvinrent à passer la barrière de ses lèvres, Xris pu presque percevoir une once de frustration dans le ton de son amie.
Comme si elle s’était elle-même trahie en laissant échapper une vérité qui ne devait jamais voir le jour.
Ces vérités qui, lorsque enterrées au plus profond de l’esprit, semblaient ne plus exister.
Un mirage.
Une sourdine jouée faiblement.

Mais, le grand blond le savait désormais à ses dépens, un jour la sourdine s’envolait.
Et chaque note frappait un peu plus fort dans la cage thoracique.

Et le capitaine des Verts et Argents sembla reconnaître cette frustration intérieure chez la Serpentard.
Il n’eut plus qu’à attendre quelques secondes, alors que les larmes lui montèrent aux yeux, avant de couler silencieusement sur ses joues de porcelaine, pour en avoir la confirmation.

Elle s’en voulait.
Elle s’en voulait d’avoir mis en danger celui qu’elle aimait plus que tout.
De l’avoir mené dans l’antre de l’ennemi et d’avoir voulu lui faire face.
D’avoir attirée derrière elle Edel, qui en retour, était prêt à tout pour défendre son épouse.
Mais au-delà de cela, Xris cru comprendre qu’elle s’en voulait de n’avoir pas été capable de parer les attaques des Gobelins.
D’avoir subi leurs attaques.

- Je comprends pourquoi tu penses comme ça. Et je ne vais pas te dire qu’il ne faut pas que tu le fasses parce que ça ne marche pas comme ça.

Xris marqua une légère pause, baissant le regard pour parvenir à croiser celui de son amie.
Il fit quelques pas vers elle, essayant comme il le pouvait de mettre fin à cette torpeur.

- Edel te suivrait jusqu’au fond des Enfers s’il le devait. Mais pas parce qu’il n’a pas confiance en toi, ni tes capacités pour te battre ou te défendre.

Le Serpentard s’approcha encore un peu de son amie et posa sa main sur son bras.
Ainsi il aurait toute son attention.
Et elle saurait que les mots qui allaient suivre étaient sincères.

- Personne n’avait prévu ce qui se passerait dans cette grotte. Personne n’aurait pu anticiper quoi que ce soit. Ni les ennemis, ni les armes, ni les blessures. Il marqua une légère pause, soupirant légèrement en repensant à tout cela. Aux blessures physiques, vites guéries à l’infirmerie, mais surtout à celles psychiques, qui ne disparaitraient pas de sitôt. Tu es une excellente sorcière, tu as le courage que beaucoup rêvent secrètement d’avoir. Et si tu cours au-devant du risque, ce n’est pas pour mettre les autres en danger, mais pour les protéger. Et ça, Edel le sait. Et c’est probablement pour ça que vous vous être trouvés.

Xris recula légèrement, se tournant vers la fenêtre d’où s’échappait un nouveau rayon de soleil ambré.

- Si tu penses que tu es incapable de protéger ceux à qui tu tiens, alors nous en sommes tous incapables.

Il se retourna légèrement, observant Siobhán du coin de l’œil.

- Si tu as pu m’en parler, alors tu pourras le faire avec lui aussi. Vous vous ressemblez, sauf que lui ne se pose pas de questions, lâcha-t-il simplement.

 

feat.  @Siobhán G. K. Almadovar


Xris et Edel n’étaient pas devenus meilleurs amis sans raison.
Siobhán avait raison, en de nombreux points ils étaient similaires.
Ils comprenaient ainsi les mécanismes des réflexions et agissements de l’autre.
Et ils étaient là pour s’épauler mutuellement, sans se poser de question.

Mais si les deux étudiants portaient en eux beaucoup de similarités, ils partageaient aussi beaucoup de divergences.
Ainsi, peut-être le grand blond était-il en mesure de comprendre avec plus de patience et de recul les pensées sombres et l’atteinte à sa propre personne que Siobhán s’infligeait en ce moment.
Edel était quelqu’un de sanguin. Qui agissait sur des coups de tête souvent irréfléchis, voyant où le cours de la vie le ferait dériver.
Xris en revanche prenait en considération les répercussions de ses actes.
Il était plus contenu. Ce qui s’apparentait souvent, pour ceux qui ne le connaissaient pas réellement, à de la froideur.

Les mots du Serpentard étaient sincères.
Mais Siobhán, sans étonnement, n’en cru pas un mot.
Xris sourit intérieurement en l’entendant protester.
La fierté des Verts et Argents, mêlée à celle apportée par son héritage la rendait imperturbable dans son flot de pensées.
Surtout lorsqu’elles évoluaient autour de sa propre personne.

Mais ce léger sourire intérieur fut vite dispersé par les larmes et la colère qui émanait désormais de la jeune femme.
Un halo de lumière remplacé par une aura sombre, comme la nuit qui tomberait bientôt sur le Château.
Xris observa la posture fière et droite de son amie se fissurer.
Et, avant qu’elle n’explose totalement, Siobhán disparu à travers l’encadrement de la porte, vers le couloir.

- Sio… attends… souffla le jeune homme.

Le Capitaine des Serpentards soupira légèrement.
Il était un piètre ami.
Et il n’était même pas parvenu à convaincre la vélane de sa valeur.
De ses capacités.

Xris attrapa à son tour ses affaires, avant de sortir de la salle de classe, les mâchoires serrées.
Empruntant le couloir Ouest, ce dernier fut surpris de voir la silhouette de son amie, recroquevillées contre le mur.

- Sio… répéta-t-il, les épaules baissées…

Il était rare que le Serpentard utilise le diminutif de son amie pour s’adresser à celle-ci.
Seulement dans les moments les plus privés, de confidence, partagés par les deux étudiants.
Comme celui-ci.
Le grand blond lâcha son sac au sol, avant de glisser son bras derrière les épaules de la jeune femme, l’amenant doucement vers lui.
Dans une étreinte amicale, le Vert et Argent tenta une dernière fois de rassurer celle qui semblait avoir succombé au doute et à la peur d’elle-même.

- Tu es capable de grandes et belles choses. Regarde comme tu as apaisé Chelsea tout à l’heure. Tes dons deviennent excellents. Et ta magie est toute aussi efficace. Et si tu veux, on peut s’entraîner ensemble pour que tu t’en rendes compte.

Il marqua une courte pause, son regard se perdant au loin.
Quelques élèves approchaient mais Xris les ignora totalement, se focalisant uniquement sur son amie.

- Maintenant je t’interdis de dire que tu es un danger pour qui que ce soit. Ou je vais finir par m’énerver.

Il faisait allusion aux nombreuses fois où Siobhán lui avait fait la leçon en le sommant de cesser son attitude sous peine de la voir sortir de ses gonds.