The Black Snake Moan

Ils tirèrent leur baguette comme un seul homme et dans un même réflexe, pourfendant le nuage de suie et de fumée pour y voir plus clair. Derrière le charme de bouclier qu'elle avait projeté devant lui, c'était le poêle qui se dessinait, hoquetant comme un perdu. Urielle échangea un regard avec Saúl. Par mesure de précaution, elle le garda en joue, prête à réagir au moindre mouvement suspect. Urielle faisait partie des duellistes les plus vives de sa promotion, ça n'était pas pour rien. Mais la réaction de Saúl arriva complètement à contrepied de ce qu'elle avait attendu.

On aurait cru un gamin qui venait de trouver un trésor. Elle plissa le front, avant de comprendre pourquoi, alors, un large sourire s'éclaira sur son visage moucheté de petites tâches de rousseur. Un calcifer.

« T'es sûr ?!! Celui de notre forge s'est éteint il y a quatre générations par excès d'orgueil... Fais voir... »

Elle approcha, les lueurs des flammèches dansant dans ses cheveux couleur de feu. D'instinct, elle fourra sa main dans sa poche, en tirant de barre de céréales avant de se rendre compte que son ancien compagnon de terrain n'avait rien de mieux à proposer. Elle éclata d'un rire solaire avant de jeter son menu butin dans le poêle. Le calcifer s'en reput goulument, répandant dans la pièce une douce odeur de sucre caramélisé.

« Eh bien je comprends mieux l'état pitoyable de l'appart. On va te requinquer et mettre un petit coup de baguette avant que je reparte. », assura-t-elle, ravie de se trouver un colocataire aussi exceptionnel, « J'ai encore quelques drachmes de ma précédente visite, je devrais pouvoir acheter quelque chose d'un peu plus consistant... »

Quelques drachmes durement acquises mais cela, elle se garda d'en toucher mot. Elle doutait que Saúl approuve le récit de ses mésaventures entre maison de charmes et fosse de combat... Il finirait bien par le savoir, elle n'en doutait pas, mais à voir la mine qu'il avait fait en découvrant l'appartement, elle pressentait qu'il aurait envie de régler ses comptes et là ça n'était pas le sujet. Elle avisa les fissures entre les planches de ces quatre murs tirant sa baguette pour attirer une poignée de noireaudes entre ses mains.

Essuyant les mains dans ses cheveux désormais noir de suie, elle fit signe à Saúl qu'ils pouvaient redescendre. Dehors, la rue s'égosillait de toutes parts pour attirer l'attention du chaland. Elle ne se faisait pas encore à cette agitation grouillante non plus qu'à la variété des hybrides qui prospéraient ici. Des créatures dont elle n'avait parfois même pas idée. C'était le cas de la personne qui tenait la triperie la plus proche. Urielle dissimula une grimace écoeurée en avisant les grosses mouches vertes qui se délectaient d'un morceau de foie aussi gras que gros. Elle tira légèrement sur la manche de son ami pour signifiait qu'ils pourraient peut-être trouver plus frais mais le commerçant les avait déjà hameçonnés :

« Que de la belle pièce ! J'ai du foie de gnolls mature à point, de la langue de succube prélevée de ce matin : excellent pour la fertilité si vous voyez ce que je veux dire... qu'est-ce qui vous ferez plaisir ? »

feat.   @Urielle Grimm  


30.11. Saúl ne put s'empêcher de rire lorsqu'il compara les friandises de ses poches à celles d'Urielle. L'odeur sucrée et caramélisée qui s'échappa du poêle suffit à donner une tout autre ambiance au lieu, sous-entendant alors que le Calcifer était disposé à se battre pour maintenir sa flamme. C'était une nouvelle qui provoqua un certain effet sur Saúl qui se redressa plus enthousiaste qu'il ne le fut en entrant dans ce taudis. Il y avait de quoi faire un bel appartement sous la protection de cette ancienne créature. Un sourire vint se dessiner sur ses lèvres lorsqu'il comprit très vite qu'Urielle ne sous-estimait pas le démon de feu qui habitait le poêle.

Urielle ne tarda pas à prendre la décision de lui trouver de quoi manger. Un sourire amusé se perdit sur le visage de Saúl qui l'observa étrangement tout d'un coup. Comment avait-il pu passer à côté de sa collègue de travail comme ça ? Il lui semblait découvrir un tout nouveau pan de sa personnalité et c'était quelque chose qu'il appréciait plus qu'il ne l'aurait pensé. Déjà, tout à l'heure, quand elle râla qu'il ne lui ait pas sorti le grand jeu lors du baiser échangé, il avait apprécié voir que cette dernière ne semblait pas faire un monde de son sang de vélane. Mais là, carrément, elle semblait embrasser la cause des fées en tentant du mieux qu'elle le pouvait de sauver ce démon de feu.

Saúl ne se fit pas attendre. Dans le sillage d'Urielle, on le vit descendre les escaliers de cet immeuble insalubre pour aller quérir de quoi nourrir le Calcifer afin de lui redonner une nouvelle jeunesse.

Le bruit des pas saccadé dans les escaliers, la porte qui s'ouvre sur l'une des rues au Marché aux Trolls, ils sont aussitôt engloutis dans le brouhaha ambiant.

Saúl manqua de rendre son déjeuner lorsqu'ils arrivèrent à la hauteur d'une triperie où le vendeur s'égosillait pour vendre sa marchandise. Un bref regard sur l'établi et Saúl abandonna aussitôt son goût pour le porc effilé que sa mère lui mettait dans ses tacos pour devenir végétarien.

Avec une moue dégoûtée, il s'approcha du gueulard en compagnie d'Urielle lorsque ce dernier, les repérant, tenta une accroche avec eux.

Saúl secoua la tête, amusé.

« - Pas besoin de ça pour la faire grimper au rideau, ne t'inquiète pas pour ça. » Fit-il avec arrogance. « T'aurais pas des œufs de serpencendre ? »

Les mains dans les poches, Saúl agita sa bourse contre sa jambe, histoire de faire tinter l'or qu'il possédait. Marchander n'était pas son fort, mais il allait devoir montrer deux, trois trucs à Urielle pour qu'elle puisse s'en sortir lorsqu'il ne serait pas là pour veiller sur elle.

Elle se retint de répondre qu'absolument rien sur cet étal ne pourrait jamais lui faire envie, si ce n'était une envie de vomir. Urielle avait largement fait ses preuves en tant qu'auror mais elle était tout de même née dans un certain milieu. Si elle n'arborait pas les grimaces de  @Camaël Grimm et  @Michel-Ange Grimm c'était uniquement parce qu'elle avait suffisamment de plomb dans la tête pour savoir que ça n'était pas la meilleure chose à faire là tout de suite.

Elle fit mine de rien quand le commerçant les brancha tout de suite sur les milliers de bébés qu'ils allaient engendrer grâce à sa bidoche cafie de mouches mais fronça les sourcils à l'idée des oeufs de serpencendre. Apparemment, le commerçant dû se faire la même réflexion qu'elle. Il leva les mains au-dessus de ses épaules avec un air de ne pas y toucher :

« Ah moi j'touche pas à ses saloperies. Puis une belle gueule comme toi... t'as pas besoin d'ça mon gars. Tu f'rais mieux de tout miser sur la langue. Une valeur sûre que j'te dis ! »
« Absolument ! », renchérit Urielle avec un enthousiasme forcé à l'extrême.

Dans le même temps, elle tirait Saúl dans la direction opposée.

« Pourquoi spécialement des oeufs de serpencendre ? Je suis assez d'accord avec le type à trois bras là : t'as pas besoin de ça. Calcifer non plus. Là où il est, il est pas prêt de rencontrer une calciférette si tu veux mon avis... »

Juste comme elle disait cela, une ravissante métisse les aborda, cheveux serpentant hors d'un foulard couleur safran, avec un grand sac besace sur le flanc.

« Des oeufs de serpencendre ? J'ai... mais il faudra y mettre le prix. Si c'est un filtre d'amour qui vous intéresse j'ai aussi... ça pourrait même vous coûter moins cher. », fit-elle d'une voix suave en découvrant le contenu de son sac sans fond.

Il y régnait un certain bordel, juste ce qu'il fallait pour donner l'impression que la petite vendeuse à la sauvette avait tout ce dont vous aviez besoin.

« Combien pour deux ? »
« Trente drachmes. Mais si t'as pas j'prends aussi les couronnes galantaises et les gallions... »

Elle se rappelait parfaitement bien la valeur des drachmes, apprise dans la proximité de Kayli (  @Tyler Argyros ) et elle n'avait pas envie de dépenser cette précieuse monnaie si durement acquise, d'autant qu'elle en aurait besoin pour sortir du Marché aux Trolls...

« Ou sinon... en nature... » rajouta la marchande en coulant un regard explicite à Saul.

Les yeux d'Urielle fuirent vers le côté tandis qu'elle dissimulait un sourire goguenard derrière sa main, à deux doigts de demander si elle dérangeait.

feat.   @Urielle Grimm  


30.11. « - Parce que les œufs de Serpencendre naissent des flammes qu'un sorcier aurait laissé mourir. » Expliqua Saúl en se laissant entraîner par Urielle pour aller trouver quelqu'un d'autre capable de leur proposer des produits plus sains et plus frais que ce qu'il y avait sur son étalage. Le Calcifer n'étant pas au top de sa forme, il valait mieux faire la fine bouche sur le choix des aliments qu'ils comptaient lui donner pour ronfler de nouveau comme il le fallait dans cet appartement insalubre.

Saúl se laissa surprendre par une magnifique créature à la peau hâlée. Un sourire ravageur vint aussitôt se greffer sur son visage plutôt fatigué. L'attitude dans laquelle il glissa instantanément sembla lui rendre toute sa superbe alors que ses charmes magiques se laissaient aller au gré du vent tout autour de lui. Quelques sorciers et hybrides autour d'eux ne purent s'empêcher de poser leur regard sur Saúl qui faisait son numéro devant la sorcière qui semblait parler le même langage que lui.

L'Hispanique se passa la langue sur les lèvres d'un air mutin.

« - Ma femme est plutôt de nature jalouse... » Fit Saúl en passant machinalement son bras autour de la taille d'Urielle qu'il attira contre lui.

Il valait mieux éviter de se frotter à n'importe qui au sein du Marché. La sorcière avait beau être magnifique, cela ne l'empêchait pas de garder ses secrets et probablement une part sombre comme n'importe qui dans cet endroit du monde. Saúl était bien placé pour le savoir puisqu'il était pareil. Il n'y avait qu'à voir son regard et son visage lorsqu'il tombait dans une colère noire pour savoir que tout aussi beau et magnifique qu'il fût, il pouvait se montrer terrible et diabolique. C'était très certainement dû à son hybridité de vélane qui ne pouvait clairement exprimer le côté harpie de son sang.

Et au vu de sa situation actuelle, il préférait éviter de s'enfoncer dans d'autres genres de problèmes.

Saúl fourra sa main libre dans sa poche pour en tirer une bourse de cuir noir. Il se détacha quelque peu d'Urielle pour en tirer la somme demandée qu'il tendit à la sorcière pour récupérer les deux œufs demandés.

30.11.23

Elle haussa un sourcil, sceptique sur cette explication mais convaincu par le potentiel incendiaire des oeufs de serpencendre. Et puis, il avait l'air si sûr de lui, quelque chose lui disait qu'elle pouvait au moins se fier à cela. Ils n'eurent pas le temps d'en débattre de toute manière. Une captivante créature les cueillit dans leur conversation, jetant presque immédiatement son dévolu sur celui des deux que son charme naturel n'éclipsait pas. Et comme de par hasard, presque aussitôt Urielle sentit poindre en elle un urgent besoin de faire de le gros dos. Elle ne lutta pas un brin contre cette poussée de jalousie injustifiée, ses yeux clairs poignardant l'autre femme du regard en guise d'ultime avertissement. Bien entendu, ce petit numéro de chat féroce passa complètement inaperçu puisque Saúl captait l'attention à lui seul, éclipsant la demi portion aux cheveux noirs ternes qui fulminait à son bras.

« Je vois ça... », commenta la charmeuse des quatre saisons en regardant de haut la petit avorton que son client venait d'appeler sa femme. Elle haussa un sourcil aussi critique que sceptique. Certaines choses ne s'expliquaient pas et quelque part, ça ne l'intéressait pas plus que cela, du moment qu'elle pouvait tirer quelques pièces sonnantes et trébuchantes de cette étrange rencontre.

Le léger changement d'attitude de la fille aux cheveux ternes acheva de la convaincre. Elle empocha les pièces et leur laissa les oeufs. Elle était déjà partie avant qu'Urielle ne s'aperçoive que ...

« Chouette : ils ne sont pas congelés... »

Dit comme cela, ce pouvait paraître une remarque tout à fait anodine, mais quand on connaissait le potentiel incendiaire de ces choses quand elles étaient fraîches, ils avaient plutôt intérêt à ce magner le train.

feat.   @Urielle Grimm  


30.11. Saúl ne remarqua rien sur le visage d'Urielle car ses yeux ne fixaient que la délicate silhouette de cette vendeuse pour le moins séduisante. Un sourire amusé vint se dessiner sur sa face lorsqu'elle consentit enfin à leur vendre les œufs de Serpencendre. C'était une petite victoire qui faisait son petit effet chez Saúl, qui ne cessait de s'enfoncer de plus en plus dans des ténèbres opaques à mesure qu'il poursuivait son enquête au sein du Witan. Une mission dans laquelle il patinait particulièrement puisqu'il n'arrivait toujours pas à se rapprocher suffisamment des premiers lieutenants du groupuscule. Certes, il y avait @Aethelia G. Sanderson qu'il connaissait, mais cela restait un cas isolé. Et le sang qui coulait dans ses veines était trop proche du sien pour qu'il ne s'amuse à donner son nom sans en avoir mesuré les conséquences.

La remarque d'Urielle lui fit lever un sourcil.

« - C'est justement ça qu'on veut, non ? » Fit-il, sans savoir s'il y avait là du sarcasme de la part de la jeune sorcière.

Sortant sa baguette magique de sa poche, Saúl la pointa sur ses mains pour qu'elle ne craigne pas la chaleur émise par les œufs. Il jeta un bref regard vers ces derniers qui dégageaient une magnifique couleur incandescente, puis, sans aucune appréhension, il les prit avec douceur. L'enchantement qu'il venait de se lancer faisait son petit effet. Il ne ressentait qu'une douce chaleur qui émanait des œufs de Serpencendre. Les observant avec une certaine fascination, Saúl sembla se perdre quelques instants dans le rougeoiement de ces derniers. C'était un peu comme observer une lampe lave des années 70 avec cette subtilité que la magie leur avait insufflée.

Il releva la tête vers Urielle avec un sourire espiègle.

« - Allez, femme. Je m'en remets à ta protection pour nous mener dans ton taudis. »

Autant jouer le jeu jusqu'au bout, et vu sa gueule, il ne pouvait que se permettre d'arborer le rôle du mâle dominant, surtout dans pareil endroit où la loi du plus fort était bien la seule qui puisse régir un lieu comme le Marché aux Trolls.

30.11.23

Elle arqua un sourcil toujours plus sceptique. Décidément, ils n'avaient pas du tout la même notion du danger ni des accidents domestiques qui auraient mérité un Darwin Award. Mais elle le laissa faire, convaincue qu'elle avait tout intérêt à s'en remettre à celui qui avait l'air dans son élément. En revanche, son personnage d'Uria lui revint en pleine face avec ce femme, elle se retint in extremis de le foudroyer d'un regard mais finalement, elle ravala sa hargne sous ses cheveux noirs de suie et capitula avant même d'avoir commencé. Uria pourra se montrer hargneuse avec les autres, même il fallait bien que leur couple dysfonctionnel se distingue d'une manière ou d'une autre.

Elle passa devant, se réjouissant de cela pour mieux revenir vers ce qu'il avait appelé à juste titre son taudis. Arrivés devant la porte branlante, elle s'effaça pour le laisser passer, referma la porte mine de rien et :

« Femme ??? Tu pousses Ochoa ! »

Et de l'assaisonner d'un petit regard assassin teinté de dépit. Puis, balayant la chose d'un haussement d'épaule plus amusé qu'autre chose, elle se rapprocha du poêle. Le Calcifer était vraiment dans un sale état. Elle fit un petit signe de tête pour dire à Saúl qu'il pouvait tenter son expérience. Ça n'était pas comme si elle tenait à ce taudis justement...

feat.   @Urielle Grimm  


30.11. Saúl éclata tout simplement de rire lorsqu'Urielle eut fermé la porte avant de l'enguirlander sur son terme peu approprié aux femmes de cette partie du monde. L'Hispanique aimait beaucoup cette façon qu'elles avaient, les Occidentales, à toujours se montrer un peu rebelle sur certains termes qui passeraient plus ou moins comme une lettre à la poste dans d'autres endroits du monde, comme son pays d'origine par exemple (bien que les choses tendaient un peu à bouger malgré tout). C'était un rire clair, sincère, libre de toute emprise de son quotidien pourtant si sombre. Et bien qu'il ne devait pas s'en rendre compte tout de suite, cela lui fit le plus grand bien.

Accompagné d'Urielle, Saúl s'approcha doucement du calcifer pour venir lui livrer son repas. Le visage tendu par une concentration soudaine - après tout, les œufs de serpencendre pouvaient lui exploser à la figure si le démon de feu les repoussait - Saúl les déposa dans le poêle le plus délicatement possible.

Retirant aussitôt ses mains alors que les braises lui caressèrent malencontreusement le dos de ses mains bronzé, il les secoua quelques instants avec une grimace sur la figure avant de se ressaisir quelques secondes plus tard pour observer la réaction de leur petite expérience.

Le calcifer semblait les observer un court instant, avant de s'en approcher comme s'il les reniflait doucement. Puis d'un coup, ce dernier se jeta sur les œufs de serpencendre pour les manger et se refaire une santé. Le résultat ne se fit pas attendre, car la chaleur augmentait déjà dans le taudis d'Urielle. Ce fut léger d'abord, puis, à mesure que le calcifer semblait reprendre des forces, la température atteignit rapidement celle d'une belle journée de printemps dans les rues de Tepoztlán.

Saúl retira aussitôt sa veste qu'il déposa sur ce qui semblait être un fauteuil à la base. Retroussant ses manches, il observa une dernière fois le calcifer avant de se tourner vers Urielle.

« - Bon, bah ça a l'air d'aller pour le moment. Tu te sens prête à l'entretenir ? » Demanda Saúl, l'air interrogateur, tout en se redressant à nouveau.

30.11.23

Elle ne put s'empêcher de pouffer en voyant la mine extasiée du Calcifer qui bectait goulument ses oeufs, ses yeux oscillants entre le rond et la demi lune tant le repas était à son goût. Pendant ce temps, Saúl secouait ses mains légèrement roussies. Urielle lui jeta un torchon humide imprégné d'un sortilège apaisant, souvenir des nombreuses fois où le vieux calcifer de la forge des Grimm lui avait léché les doigts. Tout à coup, il y eut une belle flambée. Urielle sursauta. Le poêle se mit à ronfler comme jamais répandant une chaleur délicieuse dans la pièce. Petit à petit, le taudis semblait reprendre vie et, la carcasse sur laquelle Saúl venait de jeter sa veste était comme en train de se faire repousser un rempaillage. Bientôt, des petits fils de toile verts s'extirpèrent du néant et commencèrent à s'ébattre tant et si bien que le tout avait de nouveau l'aspect d'un fauteuil. Dans leur dos, les impacts et bris aux vitres avaient disparu et le mobilier se redressait sur ses jambes brisées dans une grimace grinçante et douloureuse. Des rideaux tombèrent de nulle part à l'encadrement des fenêtres et la vieille pelure qui mangeait la moitié du plancher reprenait son étrange poil jaune de feugrison qu'on n'aurait jamais pu soupçonner sous la pelade d'origine.

Tout ce remue-ménage avait soulevé un nuage de poussière qu'un balais magique s'époumonait à chasser. Urielle éternua, incapable de maîtriser le petit chatouillement qui la prenait au nez.

« Je vais p-atchaaa ! avoir - atchaaa - trop le ch-tchaaa. Le choix ! »

Même si Le Taudis - elle se promettait de lui garder ce nom-là - n'avait plus rien d'un taudis, elle n'oubliait pas comment elle s'était réveillée là quelques heures auparavant sans trop savoir pour qui, pour quoi, ni la tâche qui lui marquait la paume gauche...

feat.   @Urielle Grimm  


30.11. La magie du Calcifer ne tarda pas à opérer dans l'habitation de fortune d'Urielle. Très vite, ce taudis devint un chouette appartement, lui rappelant vaguement le sien qu'il avait dû laisser à l'abandon quelque part dans le quartier de Soho, dans le Londres moldu. Saúl ressentit comme une pointe au cœur alors que ses souvenirs occupèrent instantanément son esprit. Cela faisait beaucoup trop longtemps qu'il se terrait dans les ombres, œuvrant faussement pour un ordre nouveau sous les ordres d'un ministère qui ne voulait pas de lui. Il ne put réprimer un rire faux devant cette conclusion que son esprit - quoiqu'un peu torturé - venait de lui faire.

Se frottant le nez vigoureusement alors qu'il luttait contre cette envie irrépressible d'éternuer en compagnie d'Urielle, il finit par lui faire un sourire alors qu'il s'asseyait sur un fauteuil désormais dans un bel état.

Tapotant machinalement le coussin comme pour juger de la qualité du mobilier, Saúl finit par croiser ses jambes alors qu'il prenait ses aises.

« - Alors je ne vais pas tarder à te laisser. » Conclut Saúl dès lors qu'Urielle lui affirma ne pas avoir le choix que de bien s'occuper du calcifer.

L'idée de lui proposait de le déplacer lui traversa l'esprit un temps mais il balaya rapidement l'idée. Savoir qu'elle était ici, sur le Marché aux Trolls, lui faisait le plus grand bien. C'était probablement stupide, puisqu'elle ne semblait être qu'une collègue (devenue ami avec le temps) de son ancien poste au sein du ministère, mais c'était plus que ça. Elle représentait un pont avec son passé, celui qu'il chérissait plus que tout, celui qu'il aurait tout donné pour pouvoir le vivre à nouveau.

Saúl finit par se redresser dans le fauteuil avant de se lever de celui-ci. Il s'apprêtait à quitter Urielle.

« - Je serais dans le coin. Si jamais tu ne me trouves pas et que t'as besoin d'un coup de main, n’hésite pas à te pointer aux camps des Roms. »

Il tendit doucement sa main vers celle d'Urielle. L'effleurant légèrement pour lui transmettre l'information sur sa localisation sans pour autant lui dire où ce dernier se trouvait, Saúl ajouta :

« - Tu sauras le trouver sans le savoir. Il te faudra juste le vouloir et laisser tes pieds t'y conduire. »

Saúl avait insisté sur le terme des pieds pour lui faire comprendre qu'aucune magie ne pourrait l'y mener puisque le camp était rudement protégé de toute intrusion. La magie des Roms était aussi incomprise que l'étaient les hybrides. Les sorciers ne parvenaient à la comprendre. Pourtant, elle était magnifique, on s'y perdait très vite en la contemplant ou en l'effleurant du bout des doigts. Et pourtant, Saúl était loin d'en maîtriser tous les rouages.

Déposant une bise sur la joue d'Urielle dans un au revoir qu'il fit en lui passant à côté, il posa la main sur la poignée.

« - Ça m'a fait plaisir de te revoir. » Dit-il, après quelques secondes d'hésitation.

Puis, préférant éviter un silence ou quelque chose qui pourrait donner envie à Urielle de lui demander si ça allait, Saúl disparut dans le couloir de l'immeuble, la porte se refermant derrière lui.