Run Through The Jungle

04.12.2023

Milan Hatcher était derrière le bureau, les bras croisés et la mine sombre. Devant lui, Nott n’avait pas même relevé les yeux, absorbée par le dossier qui n’avait pas l’air pourtant quelques secondes avant d’être si intéressant que ça. Milan dut partir vers la porte, la fermer calmement – ce n’était pas le genre à faire des scandales – et revenir vers elle en se raclant la gorge, pour qu’elle ne daigne relever les yeux sur lui. A ce moment-là, Nott crut que Milan allait lui asséner une phrase bien cinglante dont il avait le secret, mais au lieu de ça, il eut une grimace.

« Il se fout de notre gueule. »

La phrase la prit de court. La responsable du bureau raffermit son assise dans son fauteuil avant de pencher la tête, observant Milan comme si son physique avait pu la renseigner. Au lieu de ça, il n’en était rien. Il la perdait même, car ce n’était pas le genre de Milan de parler de cette façon ni d’être à ce point remonté.

« Comment ça ‘il se fout de notre gueule’ ? » reprit finalement Nott, ne comprenant pas où il voulait en venir en définitive.
« Mais Morfin ! »

Milan avait visiblement perdu la tête, ou tout du moins, le Directeur du Département de la Justice avait fait quelque chose qui dépassait son entendement. Nott se pinça doucement les lèvres, fermant calmement le dossier qui était resté sur son bureau, et posa sur son officier-formateur un regard plus appuyé, de manière à lui faire sentir qu’il avait toute son attention.

« Je suis passé sur un dossier récemment qui a tendance à naviguer entre nous, la BPM et le CIS – le cas un peu sordide d’une petite famille qui s’est faite attaquée par un loup-garou. Mais quand j’ai voulu faire revenir les analyses de Ste Mangouste, j’ai eu un petit message de Morfin en personne pour me dire que c’était du ressort de l’agent @Noma Karma. Jusque-là, pourquoi pas, et aujourd’hui j’ai un petit courrier sympa qui m’explique que je vais aller faire une intervention à Poudlard. »
« Une intervention à Poudlard ? »

Nott haussa un sourcil. Ça n’avait l’air de rien comme ça, mais pour un officier-formateur comme Milan, c’était presque une insulte. Il faisait partie des meilleurs éléments.

« Morfin m’a assuré que ça n’avait rien à voir avec le fait que je me suis intéressé à son dossier, mais entre nous, ça pue Nott. Depuis qu’il est arrivé, c’est la foire. J’ai l’impression qu’on loupe quelque chose. Que quelque chose nous échappe. »

Un silence fila. Nott regarda son agent, se remémorant qu’elle devait loyauté à son chef mais Morfin Byrne n’avait rien fait pour obtenir ne serait-ce que son estime. Même si Roberts pouvait avoir des travers non négligeables, elle avait toujours vu en cet homme un travailleur acharné et fatigué. Morfin, lui, avait le visage le plus souriant du monde face à l’objectif, ce qui n’était jamais bon signe au vu du travail délicat que ses équipes effectuaient.

« Ecoutes Milan, je suis au courant de rien… Je sais pas quoi te dire, peut-être que tu as raison, peut-être pas, j’en sais pas plus que toi… Mais je vais regarder. Ne t’inquiète pas. »
« Et pour Poudlard ? » grinça-t-il entre ses lippes.
« Ah ça… ça je peux rien faire pour toi » souffla Nott, un petit sourire moqueur pinçant ses lèvres. « Mais je suis sûr que tu sauras trouver le truc pour ne pas les endormir. »

Milan leva les yeux au ciel d’un air outré.



L’hiver se faisait sentir jusque dans les bureaux de la capitale. Emily s’imaginait bien demander à ce qu’on investisse dans un dragon et quelques pierres thermiques dans les murs. Cela aurait peut-être évité aux couloirs d’être glacés et glaçants. Emmitouflée dans sa grosse veste et dans un col rouge rouge, la petite brune passait dans les rayons avec sa petite desserte.

Ses doigts glissaient le long des dossiers tout en chantonnant, sifflotant une petite chanson, alors qu’elle tirait une des dernières boîtes. Celle-ci eut bien envie de lui mordre un doigt ou deux mais il suffisait de mettre une petite claque sur le museau de la boîte-mordeuse pour qu’elle cesse. De là la sorcière ouvrit la boîte, commença à y ranger quelques documents avant de s’arrêter, le regard soudainement attiré par une autre boîte affublée de trois yeux, dont deux dormaient pendant que le troisième guettait d’un air méchant la petite brune.

Elle referma la première boîte, non sans une caresse, comme celles qu’elle faisait aux jolis matagots de l’étage, et tendit la main pour obtenir la seconde.

La boîte émit un hurlement sinistre, presque comme une alarme. La sorcière fronça les sourcils, avant de se pencher en avant brusquement pour l’attraper. C’était sans compter les dents puissantes et acérées de la boîte qui se refermèrent sur sa main toute entière, la gobant. Elle pouvait de là sentir les bouts de papier sur le bout de ses phalanges alors que les petites incisives de la créature-objet pénétraient plus loin dans sa chair.

« Maiiiis… ! Mais ça va bien  oui ! Laisse-toi faire ! »

Elle siffla à son tour, alors que trois matagots étaient arrivés à leur niveau, d’un air circonspect. Emily n’était pas le genre à faire la foire avec les archives mordeuses, mais il semblait que cette fois, elle avait commis une petite erreur.

Ils se regardèrent, se demandant s’ils devaient aller chercher quelqu’un, alors que pendant ce temps, dans une lutte acharnée, la boîte venait d’en renverser cinq en se ruant comme un animal tentant de se libérer. Emily eut raison de celle-ci aussitôt qu’elle sortit sa baguette de son autre main, disciplinant d’un sortilège l’horrible cassette.

Elle souffla lourdement, avant d’extirper enfin sa main de l’intérieur. De nombreuses petites marques de morsure affublaient son poignet, mais elles disparurent presque aussitôt sous le regard curieux et étonné des matagots bien silencieux.

« T'écoutes rien hein, dommage pour toi j'ai l'habitude » maugréa doucement Emily, ouvrant délicatement le petit dossier qui avait été mis bien loin et bien bas sur les étagères des Archives.

Quand elle en tira les documents, elle se rendit compte qu’ils étaient pour la plus part chiffrés. Elle grommela un petit juron avant de plonger sa main dans ses nombreuses poches à la recherche d’un quelque chose qui lui permettrait au moins de lire le contenu. Ça ne faisait pas parti du matériel habituel mais Emily n’était pas une Archiviste comme les autres après tout.

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Les feuilles étaient fragiles, aussi Emily tentait tant bien que mal de faire attention à la façon dont elle tirait dessus, d’autant qu’il valait mieux éviter d’exciter les matagots et les autres livres-mordeurs du coin. Elle était si concentrée d’ailleurs qu’elle ne fit absolument pas attention à l’homme qui arrivait, et sursauta même quand ce dernier ouvrit la bouche.

Elle n’eut pas besoin de l’entendre pour savoir de qui il s’agissait. Son regard se posa sur lui au moment où une mèche de cheveux voyante, ornant le contour de son visage, s’illuminait d’une petite couleur rose - vive et inratable - avant de se couvrir d’un violet sombre, couleur de l’amertume.
C’était toujours comme ça avec Ebenezer Grimm. C’était peut-être le seul qui était capable de lui faire perdre le contrôle, et pourtant elle avait parfois été torturé, elle avait dû dormir des mois entiers en planque avec des visages volés, avec des identités falsifiés.

C’était le seul qui arrivait à faire jaillir la réalité sous le maquillage, sous l’artifice. Lui n’avait jamais compris, elle avait toujours éludé la question.

« C’est comme ça que tu dragues maintenant, Ben ? C’est pas gagné ton affaire », claqua la voix sans une once de douceur, avec ce timbre et cet accent si reconnaissable. Nott avait l’impression qu’à chaque fois qu’elle prenait une autre apparence, il lui collait aux basques comme pour la rappeler. Comme pour la forcer à porter ce vrai visage, à assumer ce qu’elle fuyait sans même le dire.

Ses cheveux virèrent de nouveau en brun mais cette fois, Nott ne changea pas de forme. Elle resta dans cette peau de femme la plus banale qu’elle ait trouvé - celui d’Emily Davis, du Bureau des Aurors. Une Archiviste un peu maladroite mais de bonne volonté. Elle agita le poignet devant Ebenezer, les morsures disparurent sous la magie de l’illusion - elle serait obligée de désinfecter en rentrant au Bureau mais pour l’heure, elle avait besoin de ce dossier qu’elle cala d’ailleurs sous son aisselle, l’air fermé.

« Tu sors de ton bureau ? D’après McClay, j’avais cru comprendre que tu avais commencé à fusionner avec ton fauteuil pourtant », cingla-t-elle de nouveau. « Trop tard pour celui-là en tout cas. Il est réquisitionné. »

Elle le toisa bien qu’elle était bien plus petite que lui sous cette apparence, remettant calmement la boîte avec dans l’idée de sortir le plus vite possible des archives.

Les trois matagots les fixaient toujours du haut des bibliothèques immenses avec un air mi-étonné mi-curieux de la situation. Il n’en faudrait pas beaucoup plus pour qu’ils sortent les griffes, mais fort heureusement, d’ici que l’idée ne les frôle, Nott s’imaginait déjà enfermée dans son bureau voir dans son appartement et parcourir ce dossier qui lui prendrait de toute façon quelques longues minutes de lecture si tout allait bien et que rien n’avait été oublié.
Car des dossiers tronqués et effacés, il y en avait à la pelle et Tyrfing n’y pouvait strictement rien. Le Directeur n’était de toute façon pas derrière elle, et elle se demandait même si elle n’était pas sur la sellette depuis qu’elle avait posé des questions qui avaient semblé «de trop».

« J’allais te dire, si tu tiens à ton job... mais bon, toi comme moi on sait que tu ne fais que ça pour passer le temps », siffla Nott en poussant doucement la desserte, « tu devrais pas rester là. Le dossier en question sera effacé dans quelques jours, comme ils l’ont fait pour d’autres avant, autant dire que si on nous trouve avec ça dans les mains, c’est Azkaban direct. Alors bouge-ton-cul, Ben. »

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« Si tu jouais moins avec l’argent… » souffla l’Archiviste déguisée, avant de commencer à mordre plus vigoureusement, avant de s’offusquer soudainement. Ebenezer avait de la chance qu’elle ne devait pas faire trop de boucan, sinon c’était certain qu’une droite serait partie quant à la fermeté de son fessier. C’était d’autant plus rageant qu’il l’avait bien aimé, ce cul, et ce plus que de raison !

Enculé… pensa la sorcière, avant de passer à autre chose. Partir vite était sa priorité, et tant pis pour ce crétin toujours fauché.

« Toujours le même refrain : les gobelins, l’argent » râla-t-elle, se rendant compte qu’il n’avait pas changé. Il n’avait pas changé et ça la foutait en rogne qu’il ne soit ni malheureux ni heureux. Comme si tout ce qu’il faisait ne servait à rien. Si sa situation ne changeait pas, comment pouvait-elle espérer avancer ? Peau-de-Chagrin n’était pas prête de disparaître avec les conneries de Grimm.

Elle avança avec sa desserte, l’air sombre, ses cheveux virant petit à petit à un noir épais, ce qui rendait plus frappant le manque de couleur de la norvégienne.

« J’ai de la chance de m’être rapprochée d’un super agent pour ça », un sourire mesquin fila sur ses lèvres, « un ami à toi… un certain Avery Harrow », et pour la peine, elle n’allait pas se priver de prendre le plus agaçant mais également le plus séduisant des agents des Mystères. Lui n’avait qu’à aller voir sa petite iranienne plutôt que de venir lui casser les pieds en plein casse.

C’était d’autant plus insupportable qu’elle sentait bien son regard sur lui, et plus elle le sentait, plus elle avait envie de lui arracher les yeux.

Cet excès de rage tomba dans le fond de son estomac quand elle entendit le timbre de voix qu’empruntait Ebenezer. Les « tu vois », « je crois », ça commençait toujours comme ça et après, elle se sentait plus malheureuse que les pierres. Après, elle était si pathétique que Peau-de-Chagrin la suivait toutes les nuits, et elle se retrouvait soudainement face à @Noma Karma dans un état plus que pathétique. Si l’agent savait…

Les cheveux noirs virèrent alors lentement mais sûrement à un violet morose, délavé, dont elle n’avait encore jamais vu la couleur, mais maintenant qu’ils étaient sortis de la salle des archives obscures, l’instabilité de la coloration capillaire était plus nette que le reste.

Et ce qui était plus net aussi, c’était le regard un peu sombre qu’elle lui jetait, tout juste arrêtée devant l’ascenseur. Elle aurait pu transplaner, l’abandonner tout seul avec la desserte, mais elle ne le fit pas. Nott n’était pas étonnée de sa propre incapacité à partir, mais c’est vrai que la surprenait toujours qu’il soit aussi con.

« Est-ce que tu es complètement débile ou est-ce que c’est un jeu pour toi ? Te faire paraître pour un idiot pour qu’on t’excuse de tout ? »

Elle serra les poignets de la desserte plus fermement, sentant son cœur accélérait bêtement dans sa poitrine. Elle avait soudainement l’impression d’avoir quatorze ans, de vivre ses premiers amours, plongée dans l’incompréhension, à cela prêt que ç’avait été avec son Maître qu’elle avait connu ses premiers émois et lui savait très bien où il allait, contrairement à cet imbécile de Grimm.

« Tu as fini de jouer avec ta petite iranienne et donc soudainement tu crois que j’ai de la place pour toi ? Que j’ai envie de boire une bière ou de manger une pizza ? Regarde-moi, j’ai pas le temps. La moitié du monde britannique est à feu et à sang ou est à ça de l’être, alors merci bien, mais si j’ai besoin de prendre un verre, ça sera avec @Noma Karma… ou Avery Harrow. »

Parce qu’il méritait aussi. Il devait comprendre que Nott n’était pas une roue de secours, que ce soit pour son Esmerald, son iranienne ou toutes les autres.

Les portes s’ouvrirent ; Nott poussa la desserte à l’intérieur d’un air terrible, toujours l’apparence d’Emily puisqu’elle devait encore rejoindre son foutu bureau.


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Avery Harrow, langue-de-plomb de ton coeur:

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Nott leva les yeux au ciel. Ce qui jadis l’aurait fait un peu rire et l’aurait peut-être charmé ne l’amusait pas aujourd’hui. La situation n’était déjà pas bien brillante, alors si en plus elle devait se coltiner le pire agent du Ministère... soit, elle abusait peut-être un peu, mais elle avait eu le temps de lister un nombre incalculable de défaut à ce pauvre type durant le laps de temps qu’il lui avait fallu pour vivre sa petite aventure, parce que c’était toujours pareil. Parfois elle se demandait si ça n’avait pas été une mauvaise idée de revenir en Grande-Bretagne. Sous couverture en Norvège, les choses lui paraissaient plus dures et plus douces à la fois.

« Quelle histoire, quel suspens... », souffla Nott, pas amusée et pas surprise non plus. Ebenezer et l’engagement. Ebenezer et l’amour. Ebenezer et les plans de vie. L’auror se demandait parfois par quelle magie il avait réussi à tenir son chat en vie, car il semblait que rien ne retenait son attention. Un peu comme un électron libre, capable du meilleur comme du pire, dans ce chaos qu’il appelait sa vie ou sa liberté. Quelle connerie, maintenant qu’elle y pensait, mais elle ne pouvait pas lui jeter la pierre. Après tout, elle était partie.

Une vie d’auror ne se mariait pas bien avec une famille et un couple. Et de toute façon, elle n’avait guère le temps de gérer un foyer avec toutes les heures qui commençaient à briser même sa volonté de fer.

De son côté de l’ascenseur, le visage de Nott paraissait un peu pâle.

Mira.
Mira était jolie, jeune et pétillante. Mais il semblait que rien ne retiendrait jamais Ebenezer, parce qu’il était plus changeant que la mer, plus tempétueux derrière son flegme britannique.

Il avait quitté Mira, ce qui lui fit plaisir, mais ça n’empêchait pas qu’il avait cherché à... rompre ? Quelque chose dans ce genre, pour elle. C’est pas comme s’ils avaient été ensemble, ni tout ce temps, ni ce petit instant, mais elle l’avait prise comme une insulte alors qu’elle avait cherché à se réconcilier à son retour. C’était lui qui lui avait claqué la porte au nez, même quand elle voulait seulement être cette bonne pote avec qui on boit une bière. Elle s’était inquiétée pour lui, pour ses problèmes avec les jeux, pour son coeur d’artichaut qui s’emballait à chaque beaux regards et à sa peine qui insoluble revenait toujours.

« Beaucoup plus amusante qu’on ne le croit, tu le saurais si tu étais invité » souffla-t-elle sans méchanceté mais avec ce petit sourire moqueur.

Ses doigts pianotaient sur la desserte, alors qu’ils continuaient à se montrer aigre, à se piquer, l’un l’autre. Pourquoi revenir si c’était pour se faire du mal ? Elle ne le regarda pas, même quand il lui parla, figée et fixant les deux portes dans un silence de mort. Plutôt être sourde que de parler avec un demeuré incapable de comprendre l’importance de ce rôle, incapable de respecter son dévouement son borne pour la justice.

Elle fronça les sourcils, soudainement vexée, bien plus que lorsqu’il avait supposé qu’elle avait perdu tous ses principes en tant que femme. Car la vertu avait peu de valeur en comparaison du sacrifice auquel elle se pliait servilement pour la sainte et grande institution du Ministère. Le sarcasme de trop, comme à chaque fois.

Ce silence laissa un peu de temps à Ebenezer de cogiter, et alors que les étages défilaient mollement, elle l’entendit mais ne cilla pas. Elle serra doucement les dents, l’air soudainement éreinté, et ce n’était clairement pas à cause du job.

« On a déjà eu cette foutue conversation, et pourtant t’es en train de me la refaire. » Son regard assassin glissa cette fois sur Ebenezer. Le genre qui montre que Nott n’est plus d’humeur. « Et c’est pas le genre de conversation qui m’intéresse. Si c’était pas assez clair lors de la première conversation, je vais utiliser des mots plus simples, suis-bien mes lèvres car ça va être rapide mais concis : tu ne se-ras ja-mais heu-reux avec moi, et je serais jamais heureuse avec toi. Tu grandis pas, je change pas. »
Elle haussa les épaules, comme si c’était évidemment la fin de leur course. Elle reprit, avec une voix plus lasse et mélancolique :
« Je suis pas l’aventure que tu attends. Juste un enfer, un peu différent, mais un enfer quand même, Ben. Alors arrêtes d’y croire. T’étais bien parti pour ne plus y croire quand tu étais avec Mira... »

Les portes s’ouvrirent ; Nott poussa la desserte en dehors, se rendant d’un petit pas agacé vers son bureau.

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Nott allait encore grogner mais une voix s’éleva derrière eux. Prise dans le personnage, la Cheffe du bureau des aurors ne put que se retourner lentement, jetant un regard à Bill Northempton qui leur faisait désormais face. Elle ravala sa salive, toute prête à sortir une petite excuse tirée de son chapeau – enfin, Emily, car Nott n’avait que peu à faire et il n’avait qu’à aller voir @Thaddeus Illiadis si jamais ça lui posait question à ce bon Northempton – mais Ebenezer fut plus rapide qu’elle. Une certaine habitude dans le geste, la voix qui ne bégaye ni ne tremble. Un menteur fini, pensa Nott, mais elle ne fit aucune remarque, jetant un regard à Bill pour voir s’il avalait la couleuvre.

Un sourire d’excuse se peignit sur le visage d’Emily alors que Nott murmurait :

« Désolée Bill… »

C’était tout à fait croyable de la part de la véritable Emily, et ce n’était pas tout le monde qui était au courant de ce qui rendait la Cheffe si redoutable. Pourtant les hauts placés savaient, eux, que la métamorphomage avait de quoi faire rougir même les plus fins professionnels de métamorphose. Ça jouait souvent au pari, et le seul sur lequel on n’arrivait pas encore à décider si c’était Nott ou non qui gagnait, c’était face à Luke Korrigan, même si nombre ici pensait qu’il était bien trop intellectuel pour tenir le duel. A tort ou à raison, Nott n’avait a priori aucune raison de se battre contre le Directeur de Poudlard, et ce même si cet enflure de Morfin Ward le lui demandait les yeux larmoyants.

Il en fait toujours des caisses, pensa Nott en voyant l’échange rendre plus agacé le pauvre Bill qui ne faisait jamais que son travail. Elle glissa un œil sur Ebenezer qui avait un sourire qui lui découpait le visage pour le rendre plus irritant que possible. L’air si doux d’Emily se fit soudainement désespéré, aussi elle détourna le regard, chassant d’une main celle qu’il portait sur son épaule.

« Il fait son boulot, contrairement à d’autres », Nott poussa la desserte, l’air renfrogné, avant de souffler plus bas, comme si elle voulait que même Ebenezer ne l’entende pas : « chez Tony ouais, c’est sûr qu’il va apprécier le spectacle… »

Ravalant quelque peu sa hargne, et arrivée devant la porte de son bureau, elle l’ouvrit en inspirant profondément, comme pour évacuer la tension dans ses épaules. Elle tourna son visage vers Ebenezer, le jaugeant comme un grand sphinx, précieux et fier, un peu arrogant sans doute. Le jauger c’était le juger. Etait-il seulement digne ?

« Samedi soir. Je sors pas au restau’ avec cette tête même si mes fesses sont plus fermes, et c’est toi qui paye. »

Et sans attendre de réponse, Nott la referma derrière elle dans un claquement sonore. Pas question de le laisser entrer avec son attitude et ses grands sourires et sa façon de toujours venir au pire moment, alors qu’elle avait besoin de travailler. Elle préférait encore galérer quelques heures que de devoir subir ses allusions et de devoir argumenter, encore et encore, sur ce qui aurait pu être et ne serait jamais.

Le niveau d’accréditation d’Ebenezer étant celui qu’il est n’arriverait pas à faire sauter la protection de la porte, alors Nott s’installa sur son bureau, reprenant son apparence, un verre de whisky et dans un soupir, s’effondra dans le fond de son siège.

Qu’est-ce que je suis en train de faire ? pensa-t-elle, l’air ailleurs un instant.

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