Can you teach me ?

@Yara Morães De Carvalho

La reprise des études sonnait bientôt pour Apolline. Mais avant cela, il y avait de nombreuses choses à régler. L’une d’entre elle se passait dans le domaine des Dunn. Marquée psychologiquement et physiquement par les événements, Apolline avait du mal à se relever de tout cela. Sa vengeance envers les loups-garous avait atteint son paroxysme. Elle qui avait pensé être devenue plus raisonnable après la mort de son petit frère et le combat contre Charles. Finalement ses vieux démons étaient vites remontés à la surface, encore plus lorsqu’il s’agissait de ses proches.

Son impulsivité avait failli lui coûter la vie. Mais il n’y avait pas que ça. Il y avait aussi sa manière de combattre, sa pratique magique. Rien n’était allé à Pré-Au-Lard et Apolline ne voulait plus jamais que cela ne se reproduise. Si Michel-Ange s’était tourné vers le métal et les armes magiques, issus de la forge, Apolline avait dû prendre un chemin différent. Apolline avait remarqué l’une des chasseuses présente sur la place. Même si elle avait galéré aussi de son côté, elle était parvenue à maîtriser les loups-garous, à combattre d’une manière qui faisait rêver la sorcière.

Mais Apolline s’était heurtée à un problème. Ressortant de ce carnage blessée et traumatisée, elle n’avait évidemment pas pensé à demander un moyen pour contacter la chasseuse. La seule chose qu’elle connaissait d’elle, c’était son nom de famille. Elle l’avait donné lorsqu’elle s’était présentée et qu’elle avait ordonné à tout ce petit monde de se mettre à l’abri. Qu’est-ce qu’elle regrettait de ne pas l’avoir écouté.

Néanmoins l’ancienne préfète en cheffe avait de la ressource, en la personne de son père. Qui de mieux que l’ancien ministre de la magie pour l’aider dans cette prise de contact. Evidemment, cela ne s’était pas fait sans des remontrances qu’Apolline avait bien mérité. Les Dunn avaient déjà perdu leur fils à cause d’un loup-garou – sous sa forme humaine – alors il était hors de question qu’il ne perde leur fille. Et c’était peut-être pour cela qu’Adair Dunn avait accepté de mettre en contact Apolline et la chasseuse. Il avait surement pris conscience que la soif de vengeance de sa fille la mènerait à sa perte, et qu’il fallait qu’elle ait le plus de cartes en main pour se défendre, voire attaquer, faire pencher la balance de son côté.

C’est pourquoi l’ancien Ministre de la Magie convoqua l’Agent Morães De Carvalho au domaine des Dunn. C’était l’endroit le plus sécurisé pour ce genre d’entrevue, aux yeux d’Adair. Il reste très évasif sur les raisons de cette convocation, lui laissant peu le choix de refuser.

Tout était réuni pour cette rencontre et Apolline était à la fois stressée et excitée. La jeune femme n’attendait plus que sa venue, qui n’allait pas tarder. Assise sur un petit banc collé à la terrasse d’entrée du Manoir, Apolline guettait les environs, plus précisément le portail au loin.

Elle ne patienta que quelques minutes. Apolline aperçut la chasseuse au loin. Ne voulant pas la brusquer, Apolline resta assise sur le banc, l’observant progresser dans le jardin.

« Bonjour. » la salua-t-elle d’un ton neutre.

En réalité Apolline ignorait comment se comporter avec la jeune femme. Ce sentiment de culpabilité ne la quittait pas, malgré les séances de psychomagie. Elle ne savait même pas si l’agent était amie ou camarade avec l’agent qui avait surement sacrifié sa vie pour sauver celle d’Apolline, elle avait encore des doutes sur sa mort, en raison du journal publié le lendemain de l'attaque. C’était pourquoi la sorcière avait adopté une attitude neutre envers la chasseuse, redoutant sa réaction en voyant Apolline.

ft. @Apolline Dunn

La lettre était arrivée dans un flot continu de factures et autres courriers sans intérêt. Si bien que Yara avait presque failli la manquer.

Dans son appartement de Londres, au petit matin et comme chaque jour, elle avait passé  en revue les différentes enveloppes sans vraiment les regarder. Dans sa main libre, une tasse de café — qui s'apparentait plutôt à de la pisse de veaudelune en réalité — qu'elle portait de temps à autre à ses lèvres, plus par habitude que par réelle envie. Et puis, une écriture familière retint son attention. Manquant de s'étouffer avec sa dernière gorgée, la Brésilienne défit avec une excitation non dissimulée le sceau de cire qu'elle reconnut comme étant celui d'Adair Dunn, avant de laisser tomber au sol toute une liasse de correspondances à sens unique.

Il y avait peu de chance que ce soit une coïncidence. Adair Dunn n'était pas du genre à agir sur un coup de tête, et les derniers événements qui avaient secoué le Royaume-Uni étaient encore trop à vif dans les esprits pour que Yara ne fasse pas immédiatement le rapprochement, bien que ses écrits restaient particulièrement flous. Les rumeurs allaient bon train, et dans ce contexte, la chasseuse espérait seulement que ses activités privées puissent regagner un peu de prestige. Cette missive était un premier signe encourageant.

Après ça, la journée passa lentement, trop lentement. Et à l'heure du rendez-vous, Yara transplana au lieu indiqué.


Le Manoir Dunn était comme dans ses souvenirs. Grand, fier, imposant, à l'image de son propriétaire. Yara avait eu l'immense honneur de servir Adair Dunn tout au long de son mandat. Elle se faisait un réel plaisir de le retrouver, et lorsqu'elle aperçut au loin une silhouette assise sur un banc du domaine, un sourire pointa au bout des lèvres.

Mais le domaine était vaste et à mesure qu'elle se rapprochait, Yara réalisait que ce n'était pas vers l'ancien Ministre de la magie qu'elle se dirigeait. Pour autant, le visage qui se laissait deviner à travers ses yeux plissés lui était, lui aussi, bien familier pour l'avoir croisé il y avait moins d'un mois de cela.

Son rendez-vous n'était que dans quelques minutes. Yara garda son cap, le pas certain, pour se diriger vers le rejeton Dunn.

Une fois à sa hauteur, Yara croisa ses bras sur sa poitrine et la toisa de haut en bas même si l'étudiante était assise. Ce qui aurait pu ressembler à un regard plein de  condescendance lui permettait surtout de jauger de l'état d'Apolline après leur petite mésaventure à Pré-au-Lard ; qu'elle n'avait pas un membre cassé - ou pire, qui manquait à l'appel. Tout ça, juste pour savoir dans quelles dispositions elle devait se placer avant son entretien avec le père de la jeune fille.

Puis, à son tour, Yara la salua.

« Bonjour. » Un silence. Yara restait constante mais impénétrable. Ses yeux d'ambre sondaient l'attitude plus qu'étrange de la jeune femme. Cette façon qu'Apolline avait eu de la saluer laissait à penser qu'elle attendait quelque chose d'elle, mais quoi exactement ? L'ancienne Serpentard n'aurait su le dire. « Contente de voir que t'es entière. » D'autres n'avaient pas le privilège de pouvoir s'en venter, après ce qu'il s'était passé à Pré-au-Lard — à commencer par l'agent Karma, qui n'avait pas hésité une seule seconde à donner sa vie pour la sauver. En d'autres lieux, Yara en aurait probablement profité pour ajouter un peu de son venin à cet échange, à base d'un court mais sincère " @Noma Karma ne peut pas en dire autant", mais elle se garda bien d'ajouter quoique ce soit. Un autre silence, alors qu'elle montrait le manoir derrière elle du bout de son pouce. « Je dois retrouver ton père dans une minute. Est-ce qu'il est déjà là ? »

Une manière comme une autre de l'inciter à cracher le morceau plus rapidement, ou bien de pouvoir prendre congé avant que ça ne devienne trop gênant.

@Yara Morães De Carvalho

Entière ? Apolline ne savait pas si elle pouvait dire ça. Depuis ces événements, elle avait dû panser des blessures externes et internes. Cependant, pouvait-elle répondre à la négative quand on savait le carnage qu’il y avait eu avec Crowley. La Dunn s’était attendue à une autre réflexion, à plus de piquant de la part de la chasseusse. Cela aurait été mérité. Ou alors, peut-être pas. Peut-être qu’Apolline avait raison de penser que @Noma Karma était toujours en vie, comme semblait le préciser la nomination de l’Agent Karma à titre non posthume.

« Contente de voir que tu vas bien. » répondit finalement Apolline.

A l’inverse de l’ancienne préfète-en-cheffe, Yara ne semblait avoir aucune séquelle. Elle semblait aller parfaitement bien. Quoi que légèrement pressée. C’était bizarre. Apolline n’aurait jamais imaginé que la chasseuse serait pressée de voir la jeune femme. Et finalement, la sorcière comprit la raison de l’attitude de Yara.

« Tu te méprends. » annonça Apolline avec une petite moue désolée.

Apolline se leva doucement du banc, s’avançant vers la chasseuse dans l’intention de lui expliquer la situation.

« Ce n’est pas avec mon père que tu as rendez-vous. » avoua-t-elle, les lèvres pincées.

Loin d’elle l’envie de faire descendre Yara de sa possible joie d’avoir un rendez-vous avec son père. S’imaginant que la chasseuse aurait des questions, Apolline décida de prendre les devants.

« C’est bien mon père qui t’a demandé de venir. Mais c’était pour me rencontrer moi. »

La jeune maman laissa sa révélation planer dans l’air, ne rajoutant rien. Elle espérait que cela éveillerait suffisamment la curiosité de Yara pour la retenir.

« Tu veux t'asseoir ? » lui proposa-t-elle en indiquant le banc à ses côtés, espérant qu'elle reste et ne parte pas en transplanant.

ft. @Apolline Dunn

Yara n’avait pas pour habitude de se méprendre. Pas plus qu’elle n’était coutumière qu’on pointe du doigt sa dite méprise avec autant de tact et d’assurance.

De toute sa hauteur, elle toisait Apolline dans une attente qui transpirait à travers son immobilisme. Entre deux silences qui s’éternisaient, sa patience fut mise à rude épreuve jusqu’à ce que la Gryffondor finisse enfin par cracher le morceau.

Pourquoi tout ce suspens et surtout, pourquoi cette supercherie ? Si Adair Dunn avait quelconque service à lui demander, il savait qu’il pouvait compter sur le sens de la loyauté et de la discrétion de son ancien agent privé. Yara n’avait jamais refusé ni révélé une mission tenue sous secret, pas plus qu’elle n’aurait lésiné sur les moyens pour satisfaire celui qu’elle avait servi pendant son mandat avec toute la droiture dont elle était capable. Cela valait évidemment pour sa famille, à commencer par la chair de sa chair.

Ou peut-être n’avait-elle pas été appelée pour rendre un service ? Mais alors, quelle était la raison de sa venue exactement ?

Le visage de la louve refoulée s’évertuait à paraître neutre, dénué de sentiments. Mais sa paire de sourcils très légèrement froncés trahissait un certain intérêt quant à la suite de ce petit entretien improvisé pour une partie. La Dunn fille avait réussi en cela un micro exploit : elle avait piqué la curiosité de Yara.

« Très bien. »

Les bras toujours fermement croisés sur sa poitrine, elle décida finalement de débloquer sa position pour accéder à la demande d’Apolline. Quelques pas à peine suffirent à avaler la distance qui les séparait avant qu’elle ne daigne s’asseoir sur le banc. Elle recroisa ses jambes, le corps de biais, un bras posé nonchalamment sur le dossier du côté où la jeune étudiante viendrait s’asseoir. Une mise en scène improvisée pour paraître à l’aise alors que son dos, en contact avec les planches de bois, brûlait avec ferveur. Un regard furtif en direction des fenêtres pour vérifier que de l’autre côté de la vitre, Adair Dunn aurait tout le loisir d’apercevoir ce qu’il se passait dans son jardin, et Yara se concentra de nouveau sur sa fille.

« Je suis pas certaine de comprendre la raison de cette invitation. Mais je doute pas que tu vas me l’expliquer. » Yara la regardait avec attention, d’en bas cette fois-ci puisqu’Apolline s’était levée. Sa main tapotait avec un brin de malice l’assise du banc afin d’inviter la jeune femme à la rejoindre. « Une lettre énigmatique signée de la main ton père, scellée du sceau de ta famille. Et maintenant j’apprends que c’est finalement pour toi que je me déplace… Que de mystères mademoiselle Dunn, décidément. » Yara ne la quittait pas du regard, guettant avec attention la moindre de ses réactions. « Qu’est ce que je peux faire pour toi, Apolline ? »

Son secret avait beau être bien à l’abri, le contexte sociopolitique réclamait qu’elle soit parée à toute éventualité.

@Yara Morães De Carvalho

Ces deux petits mots prononcés par Yara firent sourire Apo, de manière presque soulagée. C’était un premier pas qu’elle faisait, acceptant d’écouter la jeune femme. Le deuxième pas qu’elle fit, en prenant place sur le banc, donna une preuve supplémentaire à Apolline que la chasseuse était enclin à l’écouter. Une partie de son appréhension se dissipa à ce moment-là.

Apolline fit quelques pas sur le côté, se tournant vers la sorcière qui avait accepté sa proposition. La moindre des choses était de prendre place à ses côtés. Un léger sourire s’installa sur son visage lorsque finalement Yara l’invita à la rejoindre. Apparemment, elle avait piqué sa curiosité et ça c’était un très bon point pour Apo. Au moins, elle aurait toute son attention.

« Naturellement. » répondit Apolline en s’installant sur le banc, à côté de Yara.

Elle pivota légèrement, afin de mettre son corps de biais aussi, pour mieux observer Yara et notamment ses réactions lorsqu’Apolline lui expliquerait les réelles raisons de sa venue ici. Si l’appréhension commença à légèrement revenir, l’ancienne préfète-en-cheffe ne put s’empêcher d’avoir un sourire amusé face aux paroles de la chasseuse.

« J’ignorais comment je pouvais te contacter. Et même si je l’avais su, j’ai quelques doutes sur le fait que tu serais venue…pour moi. » commença-t-elle à expliquer, quelques peu hésitante sur la façon d’amener la conversation.

Son regard se posa quelques instants sur Yara, avant qu’Apolline ne change de position, pivotant de nouveau pour être droite, son corps tourné vers l’agréable jardin et l’entrée du domaine des Dunn. Elle laissa son regard se perdre sur l’horizon, ses pensées vagabondant dans ce qui lui était arrivé à Pré-Au-Lard. Elle se rappelait sans problème l’odeur du sang, la gueule du loup proche de son cou, et finalement les morceaux de ce même loup-garou sur son visage. Elle était parfaitement consciente qu’elle ne devait son salut qu’aux autres…et qu’elle avait flirté beaucoup trop proche avec la mort. Une situation qu’Apolline ne pouvait plus endurer et qui avait un lien étroit avec son caractère trop impulsif. Entendant la question de Yara, Apolline secoua la tête, sortant de ses pensées, mais ne bougea pas d’un millimètre, le regard toujours planté en face d’elle.

« Je n’ai pas brillé sur le terrain, à Pré-Au-Lard » souffla-t-elle, presque honteuse. « Un homme est mort par ma faute…enfin, il me semble. » continua-t-elle, les sourcils froncés. « Je t’ai vu en action là-bas. Et tout d’abord, je tiens à te présenter mes excuses. Si…si je t’avais écouté dès le début…je n’en serais pas là…nous en serions pas là. »

Apolline pivota une nouvelle fois, légèrement, se retournant de nouveau vers Yara. Elle planta quelques instants son regard dans le sien.

« J’ai vraiment eu du mal à me remettre de ce qui s’est passé à Pré-Au-Lard. Pour être honnête avec toi j’ai…j’ai été voir un psychomage. Cela m’a vraiment aidé. Mais…il m’a conseillé de trouver quelqu’un pour m’aider à me canaliser tout en restant forte. » expliqua-t-elle, une petite moue sur son visage. « Je t’ai observé là-bas. Tu t’es battue contre ces loups-garous avec une telle force tout en restant lucide, concentré, maîtresse de tes émotions. »

Apolline la gratifia d’un léger sourire, sincère.

« Apprends-moi. »

La jeune femme laissa énormément de sous-entendu dans cette demande. L’apprentissage était vaste, allant de la meilleure manière de se battre contre des loups-garous que de se contrôler en combat. Désormais, Apolline avait joué cartes sur table et c’était au tour de Yara.

ft. @Apolline Dunn

Les variations dans le visage d'Apolline étaient notables. Suffisamment pour montrer que l'oreille attentive prêtée par Yara était d'un grand soulagement pour la jeune femme.

La raison de cette convocation devait être suffisamment importante, sans quoi il y avait fort à parier que l'étudiante ne se serait pas montrée aussi hésitante. À raison, et bien que ce n'était pas dans ses habitudes, la chasseuse la rassurait.

« Il n'y a rien que je ne ferai pas pour ta famille, Apolline. Votre combat est le mien. »

La nature de leur lutte était loin de lui être étrangère, de même que les raisons qui avaient fait grandir leur haine vis-à-vis des loups-garous jusqu'à atteindre son paroxysme. La sienne puisait à quelque chose près dans les mêmes fondements, les mêmes origines. Et c'était probablement pour ça que la Brésilienne n'aurait jamais pu refuser quoique ce soit à un Dunn.

Mais ce n'était pas à elle de se livrer. Aussi, elle laissa Apolline reprendre la parole pour ne pas interrompre ses explications et confessions.

Sur le banc, le regard de Yara ne l'avait pas quittée depuis qu'elle l'avait rejointe. Il y avait sur son visage ce petit sourire si léger qu'il en était presque imperceptible, signe d'une certaine satisfaction quant à la nature des mots d'excuses qui venaient de lui être présentés, d'une impatience grandissante et — qui savait — d'une complicité nouvelle.

Heureusement, sa curiosité fut bientôt assouvie.

Apolline venait d'avoir le déclic. Elle avait pris conscience de la gravité de ce qu'il s'était passé à Pré-au-Lard mais surtout, elle venait de comprendre qu'elle pouvait avoir une utilité dans cette guerre, et qu'elle serait plus efficace pour la mener à bien vivante. Entière. Après la mort de ses parents, Yara n'avait pas eu besoin que d'autres périssent sous les griffes ou les crocs des lycans. Elle avait tout de suite su ce qu'Apolline venait tout juste de réaliser.

Les déclarations qui venaient de lui être faites la laissèrent un moment interdite bien qu'à la mention du psychomage, elle n'avait pu s'empêcher de souffler du nez ironiquement et de dévier son regard sur le jardin environnant. À ses yeux, il était inconcevable de penser que ces gens-là pouvaient comprendre, qu'ils pouvaient aider. Au fond d'elle, Yara était heureuse que la Gryffondor se soit tournée vers elle, au moins pour lui permettre de cesser de gaspiller son argent à tort et à travers. La fortune des Dunn était bien trop précieuse pour se laisser dilapider ainsi.

Au bout de quelques longues secondes de silence, la louve refoulée se tourna vers celle qui réclamait son aide.

« J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne, c'est que tu as déjà fait la moitié du chemin en comprenant ce que tu viens de comprendre. La mauvaise, c'est que tu as perdu beaucoup d'argent avec ce charlatant de psychomage. Quelle idée ! Tu aurais dû venir me voir depuis le début. Ton père aurait dû... » Un soupir souleva sa poitrine alors qu'un nouveau silence s'installait, plus court que le premier. « Laisse tomber. Bien sûr que je vais t'aider. »

Un visage flatté et heureux pivota vers la jeune femme.

Flatté, parce qu'à nouveau, Apolline lui donnait l'opportunité de servir sa famille et bien que la fin de Yara approchait à grands pas, il n'y avait rien qui aurait pu la satisfaire davantage de son vivant. Heureux, parce qu'en prenant en charge la formation de l'étudiante, c'était aussi un moyen de s'assurer que la relève était assurée. Ne restait plus qu'à faire en sorte que la haine de la Dunn pour les lycans ne connaisse aucune limite et ne varie jamais dans le temps.

Pour ça, jouer sur la corde sensible lui paraissait être le meilleur des enseignements.

Ses yeux se perdirent dans le paysage en face d'elle, abandonnant alors la silhouette à ses côtés.

« Avant qu'on commence, j'ai mes conditions et j'ai besoin de garanties, Apolline. Je n'ai pas de temps à perdre. Si ton engagement n'est pas sérieux, si c'est juste une distraction, un jeu, une passade, ça ne m'intéresse pas. Je ne m'investirai que si toi tu t'investis. C'est donnant-donnant. » Une pause. « Autre chose. Si on doit travailler ensemble, je veux que tu me jures loyauté et obéissance. C'est pas pour faire beau ou pour satisfaire mon ego pour une fois », expliquait-elle en se tournant de nouveau vers sa potentielle recrue. « C'est parce que je refuse qu'il t'arrive quelque chose sous ma garde. Ton père me le pardonnerait jamais. Donc, si je t'amène sur le terrain avec moi, je veux que tu ailles te planquer quand je te le dis, que tu m'abandonnes si je te le demande et que tu t'exécutes même si tu n'es pas d'accord. Je ne veux pas te voir tergiverser pendant des heures à cause de tes émotions. Elles n'ont pas leur place dans cette lutte-là. C'est bien clair ? Si tu t'en sens pas capable, dis-le moi tout de suite. »

Ses ambres attendaient de pouvoir scruter son regard, la moindre variation de taille de ses pupilles. Mais pour ça, encore fallait-il qu'Apolline se tourne vers la chasseuse, sans quoi, Yara saurait en tirer ses propres conclusions.

Une promesse ne se formulait pas dans le vide.

@Yara Morães De Carvalho

Si le combat de Yara était également celui de sa famille, était-il cependant aussi le même que celui d’Apolline ? Il y avait un combat plus personnel que la jeune femme souhaitait réaliser. Un combat contre les loups-garou, notamment l’un d’entre eux, mais surtout un combat contre elle-même, faire taire son impulsivité afin de gagner en lucidité. Les Dunn étaient réputés pour être réfléchis et calculateurs, ce qu’Apolline n’était pas du tout. Si le fait de ne pas ressembler à sa famille sur ce point là n’avait jamais embêter Apolline, il en était tout autre depuis le décès de son frère et encore plus depuis l’attaque de Pré-Au-Lard.

« C’est…soulageant de te l’entendre dire. » répondit-elle tout de même, considérant finalement que le combat avait la même souche.

C’était de très bon augure pour la suite de la discussion. Et pourtant les secondes de silence parurent des heures pour Apolline qui décida à couper tout contact visuel avec Yara. Elle avait bien trop peur de lire en elle un refus. Elle avait bien trop peur de lui montrer toute son appréhension quant à sa réponse. Fuir son regard était bien plus facile.

La positivité de la réponse de la chasseuse fit naturellement pivoter Apolline qui écarquilla les yeux de surprise. Elle ne s’imaginait pas que cela aurait été si simple d’obtenir l’aide de Yara. Et elle avait bien raison, si Apolline avait su, elle aurait été la voir dès le début et n’aurait pas laissé ce long mois s’écouler. Lorsque la jeune femme évoqua son père, Apolline pinça ses lèvres dans une moue presque résignée.

« Je pense que mon père n’était pas prêt à me voir m’engager dans cette voie. Je pense qu’il ne l’est toujours pas réellement…ni qu’il le sera complètement un jour. Et bien évidemment, je ne peux que le comprendre. »

Il avait perdu son héritier, son fils à cause des loups-garous. Alors il était normal qu’il craigne pour la vie de sa fille quand cette dernière rêvait de vengeance et de revanche sur le meurtrier de son frère et tous les sacs à puce qui l’accompagnait. Perdue dans ses douloureuses pensées Apolline pivota de nouveau, retrouvant l’horizon, son regard se perdant de nouveau dans ce qui restait de la verdure du jardin hivernal. Mais Apolline revint rapidement à la réalité, écoutant d’une oreille très attentive les conditions que posaient Yara. Ses paroles raisonnaient en elle, et si Apolline aurait en temps normal rebondi directement sur ses suppositions malvenues, la jeune femme tenta d’être raisonnée et posée. Elle inspira longuement mais silencieusement par le nez avant de se tourner vers Yara, les sourcils froncés. Visiblement, elle n’arrivait pas à cacher sa contrariété face à ce que pouvait penser la jeune femme sur l’engagement d’Apolline.

« Tu penses réellement que je vois tout cela comme un jeu ? » questionna-t-elle, légèrement sur la défensive. « Quel jeu horrible que celui où la mort signe la fin de la partie. J’ai beaucoup d’autres distractions, plus légère. Et cette demande ne l’est pas. Qu’as-tu besoin comme garantie ? Je serais prête à t’en donner sans aucun problème. » expliqua-t-elle avant de déglutir, les lèvres pincées. « Tu as très bien vu comment je suis Yara, sur le terrain. J’ai dû mal à écouter mon amour et père de ma fille alors… » avoua-t-elle finalement avant de laisser un silence plus au moins long. « Je ne jure jamais en l’air. Néanmoins, j’ai conscience que mes émotions sont un danger dans la plupart des situations. Et c’est aussi pour ça que j’ai besoin de toi Yara. J’ignore comment tu fais pour rester aussi calme et lucide sur le terrain. Au-delà du fait d’apprendre à me battre contre cette vermine, j’ai besoin que l’on m’apprenne à…me contrôler… »

C’était comme si Apolline était un petit animal sauvage qui cherchait à être apprivoisé. Si Yara avait été d’accord pour apprendre à Apolline à se battre contre les loups-garous, accepterait-elle de lui apprendre à contrôler ses émotions ?

ft. @Apolline Dunn

La couleur de leurs cheveux et cette lueur indescriptible qui faisait briller leurs yeux n'étaient pas leurs seuls points communs. Loin de là. Il y avait bien ce mauvais caractère dont l'évidence crevait les yeux, à n'en pas douter, mais ce n'était pas non plus ce qui les rapprochait le plus.

Leur ressemblance avait surtout à voir avec ce qu'elles n'avaient pas. Ce(ux) qui leur manquait(ent). Ce trou béant, vide, inoccupé dans leur poitrine que même les années n'avaient su combler. C'était là leur plus grande faiblesse à toutes les deux ; et si Yara avait appris à en faire une force au fil du temps, à force d'expériences, elle avait tout à gagner à enseigner ses méthodes à Apolline pour l'aider à en faire de même.

Il en allait de ce combat et de cette lutte qui les dépassait, certes, mais dans laquelle elles avaient toutes deux un rôle à jouer.

« Tu as quelque chose que je n'ai pas, Apolline. C'est la grande différence entre toi et moi », fit-elle après un temps, rebondissant sur ses propos, les yeux dans le vague. « Une famille. » Son ton était cassant mais son regard ne trahissait qu'un flegme éhonté, signe qu'elle avait su tirer un trait sur le passé. Ou peut-être était-ce l'impression qu'elle voulait bien lui donner ? « Celle dans laquelle t'as grandi d'abord. Et maintenant celle que tu as fondé. Ces deux parties de toi auront toujours à redire de ton engagement et de tes choix. Alors, la première chose à faire si tu veux avancer, c'est d'arrêter de te préoccuper de ce qu'ils peuvent penser. C'est un exercice qui sera long et compliqué, mais y'a pas de négociation possible si tu veux qu'on travaille ensemble. »

La pente était glissante. En évoquant une demande aussi stricte, Yara avait conscience de tromper celui à qui elle avait tant donné. Adair Dunn, s'il les observait peut-être de l'autre côté d'une fenêtre troublée par un voilage, l'aurait probablement assassinée sur place s'il l'avait entendue parler. Mais c'était un risque à prendre et la chasseuse était prête à tout sacrifier dès lors qu'il s'agissait de servir cette cause.

Un engagement aussi entêté impliquait forcément des vérités qui n'étaient toujours pas bonnes à entendre. Y compris des oreilles d'Apolline.

Plus le visage de cette dernière se figeait, plus Yara jubilait. Elle lisait entre ses mots une réelle détermination, l'envie d'une implication sincère et durable. Et c'était justement ça qu'elle voulait obtenir. C'était ça, sa garantie. Et il n'y avait qu'une seule façon de l'obtenir, en complément de ses propos passés.

« T'as trop d'ancres dans ce monde. Trop de personnes pour te retenir et t'empêcher de voir clair dans tes émotions. C'est ça, le problème. Pour mener ce combat à bien, tu dois accepter de laisser partir la Apolline que tu connaissais. Et pour ça, il faut que tu fasses connaissance avec la nouvelle Apolline, celle que tu dois devenir à chaque fois que tu vas te trouver sur le terrain. C'est cette Apolline-là qui réussira à se concentrer sur son seul objectif et oublier tout le reste. » Pour donner corps à ses propos, Yara pivota entièrement vers la jeune femme. « Aujourd'hui, ceux que tu aimes sont ta force intérieure. Demain, face aux loups, ils seront ta faiblesse. Mais tu apprendras que la plus grande faiblesse de toutes, c'est toi-même. » Son index vint se poser sur le haut de sa cage thoracique, non loin de son épaule pour insister sur ce dernier mot. Toi-même.

Volontairement, elle laissa le silence s'installer, puis quitta le banc pour se remettre debout devant celle qui allait devenir sa petite protégée.

« T'as dit que tu étais prête à me donner des garanties. Mais jusqu'où tu es prête à aller exactement ? », demanda-t-elle, le visage curieusement neutre, sans émotion. « J'accepte de t'aider à une condition. Je veux que tu fasses une demande de stage à la CIS, au sein de mon service, de mon unité. Je veux qu'on parte en mission ensemble. Aussi longtemps qu'elle durera. Des semaines, des mois, peu importe. Mais il n'y aura que toi et moi. C'est la garantie que je te demande. »

Sa main aurait pu venir chercher la sienne, restant d'abord suspendue dans l'attente d'un accord à passer. Mais il n'en fut rien. Yara se contenta de poser un regard sur elle, sondant la moindre de ses réactions.

« T'as pas à me donner une réponse maintenant. Pour le moment, je me contenterais que tu me promettes d'y réfléchir sérieusement. »

@Yara Morães De Carvalho

La révélation de Yara glaça le sang d’Apolline. Sans l’avoir forcément demandé, Apolline apprenait petit à petit à connaître la chasseuse. Et cette dernière n’avait pas de famille. Comment est-ce que cela était possible ? Immédiatement Apolline émit des hypothèses sur ce qui était arrivé à la famille de Yara, et également sur les raisons de la non création d’une famille par elle-même, au moins de cœur. Apolline connaissait le dur sentiment de perdre un membre de sa famille, mais elle n’osait imaginer la douleur que cela pouvait de perdre la totalité de sa famille ou d’être renié par celle-ci. Si la curiosité de l’ancienne gryffondor la piquait fortement, elle se mordit l’intérieur de la joue pour freiner son envie de lui demander plus d’informations sur elle.

« Hmmm. Je vois. » se contenta de répondre Apolline avant de froncer les sourcils face aux révélations qu’elle lui faisait à propos de cette même famille. « Je crois que tu oublies à qui tu parles. » lança Apolline d’un ton neutre qui ne se voulait pas forcément cassant mais qui n’était pas non plus très agréable.

Sa famille n’était pas n’importe qui. Si Apolline était prête à beaucoup de chose pour opérer ce changement en elle, ne pas écouter sa famille était quelque chose de difficile…bien qu’elle l’avait déjà fait un paquet de fois. A chaque fois qu’elle en avait fait qu’à sa tête, à n’écouter qu’elle-même, cela avait plutôt mal fini. De nombreux événements lui revint à l’esprit : sa quête de vengeance, son rite de magie noire, ses différentes attaques contre ses ennemis sans prendre le temps de réfléchir. Non, visiblement cela n’avait jamais été une réussite et cela lui faisait du mal de le reconnaître. Alors ce que lui demandait Yara était un gros effort.

« La plupart du temps c’est quand je me suis coupée de ma famille, de mes amis, de mes proches que je suis devenue l’ombre de moi-même, que j’ai pris les pires décisions de ma vie. » expliqua Apolline avant de faire une moue. « Mais…J’ai envie de te faire confiance Yara. »

Et elle espérait qu’elle ne le regretterait pas. Mais Apolline avait l’impression qu’elle faisait le bon choix en se tournant vers Yara. Elle tentait déjà de lui donner une première leçon. Il était évident que l’entourage d’Apolline était sa plus grande faiblesse et qu’ils étaient le moteur de toutes ses émotions. Mais comment faire connaissance avec cette Apolline dont Yara parlait ?

« Quand tu le dis comme ça, ça paraît tellement facile. Pourtant je ne suis pas bête, je sais que c’est loin de facile. Alors comment ? Comment faire connaissance avec cette nouvelle Apolline ? »

Il s’agirait surement d’une des nombreuses leçons que Yara lui enseignerait d’ici peu. Apolline se tourna vers Yara puis pivota pour se remettre correctement lorsque cette dernière se leva. Elle manqua de s’étouffer lorsque Yara posa une nouvelle condition.

« Je te demande pardon ? » répondit Apolline les yeux écarquillés par la surprise.

Même si Yara n’attendait pas une réponse immédiate – et heureusement – Apolline voyait déjà plusieurs raisons l’obligeant à décliner et la première était justement le sujet de la discussion précédente.

« Mais Yara…Je ne peux pas laisser ma fille durant des m… » commença à s'indigner la brune avant de brutalement s’arrêter, pensant comprendre où elle voulait en venir. « Oh…C’est un test ? » demanda-t-elle, un sourcil arqué, tentant de sonder la réaction de Yara. « Non ?...Je ne sais pas Yara. Au-delà du fait que ce n’est pas la carrière dans laquelle je me destine, j’ai déjà un stage dans le bureau des Auror. Enfin... »

Elle avait un stage. Malheureusement, le maître de stage qu’on lui avait donné, @Noma Karma semblait ne plus être de ce monde. D’abord parce qu’elle l’avait vu disparaître de ses yeux (malgré ce que semblait dire les journaux) et aussi parce qu’en un mois, il ne lui avait donné aucune nouvelle…alors qu’elle retournait à Poudlard dans quelques temps et qu’elle avait besoin d’être au clair sur ses deux stages.

« Est-ce qu’il y a des briseurs de sorts à la CIS ? » interrogea Apolline, tentant de chercher une solution pour contourner le problème et ne pas se fermer ni la porte du bureau des aurors ni la proposition de Yara. « Je réalise un double cursus à Poudlard. Justice Magique et Archéologie magique. J’ai toujours hésité entre ces deux branches. Briseurs de sorts est devenue une envie lors d’un voyage en Egypte. Mais…c’est une autre histoire. Quoi qu’il en soit, ma demande de stage à la CIS sera plus facilement validée si quelques briseurs de sorts s’y trouvent, et encore mieux, dans ton service, dans ton unité. » expliqua la jeune femme, une petite moue quelque peu hésitante.

Apolline avait joué carte sur table avec Yara et elle risquait de s’en mordre les doigts si Yara répondait par la négative aux différentes interrogations d’Apolline.

ft. @Apolline Dunn

Pour son plus grand bonheur, Apolline ne posa aucune question. Ce n’était pas tous les jours qu’on croisait quelqu’un qui déclarait sans aucune émotion ne pas avoir de famille mais pour autant, elle garda toutes ses interrogations pour elle, sans trahir son sens de la curiosité. Il n’y avait de toute façon pas besoin d’être Merlin pour faire des liens entre ce vide omniprésent dans la vie de Yara et la façon dont il avait été comblé par la haine, la rancœur et la vengeance envers une seule catégorie de monstres.

Car tout ce qui était arrivé à la chasseuse au fil des dix dernières années avait façonné ce qu’elle était devenue. Chaque parcelle de celle qui se présentait à Apolline aujourd’hui avait été créée de toute pièce sur les vestiges de celle qu’elle avait été un jour.

D’ailleurs, lorsque cette dernière eut un sursaut d’orgueil, Yara ne put s’empêcher de sourire et de répondre un « Non, je n’oublie pas » tranchant et immédiat.

Bien sûr qu’elle savait à qui elle parlait. Pour qui la prenait-elle ? Adair Dunn ne lui aurait jamais pardonné de tenir de tels propos devant la prunelle de ses yeux et pourtant, Yara avait foncé dans le tas tout de même, malgré tous les risques qu’elle encourrait. Pourquoi ? Parce qu’Apolline avait en elle toutes les ressources nécessaires et que sans même se connaître, elles se comprenaient.

Mais le ton employé par la Gryffondor pour lui répondre montrait qu’elle avait vu juste : ses ancres la retenaient en arrière. Pire encore — elle la forçaient à faire du sur-place. Et sur ce point, comme sur beaucoup d’autres, Yara n’était pas prête à faire de concessions.

Soit elles avançaient ensemble, soit elle continuerait d’avancer seule, comme elle l’avait toujours fait jusqu’ici.

Mais Yara était du genre tenace. Têtue.

Ce ne serait pas @Jack Deschain qui dirait le contraire.

Quant à Apolline, elle apprendrait à la connaître avec le temps. Même si d’une certaine façon, le processus d’apprivoisement était déjà engagé.

« Je te demande pas de te couper d’eux indéfiniment. C’est l’histoire de quelques semaines. Il n’y a que comme ça que tu te trouveras toi-même et que tu apprendras à séparer celle que tu es quand tu es avec eux, et celle que tu dois être quand tu es face à ces chiens. »

Debout face à l’étudiante, Yara n’en démordait pas. Même quand les yeux d’Apolline devinrent aussi rond que des ballons devant sa proposition qui aurait probablement insurgé son père s’il avait été là pour l’entendre.

« Tu m’as demandé mon aide. Ce sont mes conditions. Soit tu les acceptes, soit tu les refuses. Je ne fais pas dans la négociation. »

Son regard d’ambre maintenait le sien.

Oui, c’était un test. Et pour l’instant, il n’était pas concluant. Son flair l’avait-il trompée ? Apolline était-elle la bonne personne pour lui succéder, finalement ? Dans le doute, Yara lui présenta ce qu’elle appelait une concession mais qui n’avait rien de ça, au fond.

C’était tout au plus un subterfuge pour lui montrer toute l’étendue de son potentiel et pourquoi pas, la pousser à changer d’avis.

« Il y a des briseurs de sorts à la CIS, et là où je veux t’emmener, crois-moi, tes compétences sur le sujet seront bienvenues. La seule chose que je peux faire pour appuyer ton dossier, c’est écrire à ton école en présentant cette opportunité de stage comme un vrai tremplin dans ta carrière. Parce que ça le sera. Dans le contexte actuel et avec ce qu’il s’est passé à Pré-au-Lard, Poudlard ne pourra pas refuser. Et s’il le fait, alors le Ministère aura son mot à dire à celui qui se fait appeler Directeur. On va avoir besoin de renforts. Ici et ailleurs dans le monde. »

Les traits de Yara ne trahissaient aucune once de sourire, à peine une absence d’humanité qui donnait presque l’impression d’avoir à faire à l’un de ces robots moldus qui transcendaient les foules aux quatre coins du monde.

« Reste à savoir ce que tu veux vraiment, au fond de toi. Si tu es vraiment décidée à changer, alors tu accepteras. Je te laisse sept jours pour y réfléchir. Après ça, mon offre ne tiendra plus. »

Yara fit quelques pas pour s’approcher de la jeune Dunn, espérant ainsi capter son regard pour ce qu’elle s’apprêtait à dire. Sa main vint se poser sur son épaule dans un geste presque amical qui ne lui ressemblait pas mais qui était pourtant emprunt de sincérité.

Yara ne se forçait pas à apprécier la jeune femme.

D’une bien étrange manière, elle se voyait en elle.

« À partir d’aujourd’hui, tu as toutes les cartes en main pour devenir celle que tu as envie de devenir, Apolline… Et crois-moi si je te dis que j’aimerais beaucoup être celle qui te guidera dans cette quête. Mais tu es la seule à pouvoir le décider. »