It comes in pints [ft. Rhys]

La veille, le Gallois s'était pris un impero qui lui avait ordonné de tuer son collègue de travail. Il avait besoin de boire pour oublier ça et si possible faire passer la migraine. La veille encore, il avait passé la Saint-Valentin avec Jane, une demoiselle de passage... Là encore, il avait besoin d'oublier... Or, pour cela, il n'y avait qu'un lieu pour ça. Les Trois-Balais. L'air de rien, sans prévenir aucun de ses amis, il s'était rendu au comptoir, cherchant à éviter toute interaction sociale. Commandant un whisky gallois, les seuls qu'ils trouvaient tolérables à son palais en raison d'un chauvinisme un peu trop avancé, il s'installa confortablement. Ce n'était pas tant l'alcool qui lui permettrait d'oublier. Même si Lheina était souvent dans cette optique avec quelques herbes aromatiques pour agrémenter le tout, Rhys de son côté profitait du goût, mais ce qui lui changeait réellement les idées, c'était l'ambiance. Entendre des rires, des histoires... Sentir le bonheur des gens proches de lui était finalement le meilleur moyen d'oublier tous ses problèmes. Or pour ça...

Son amie Serpentard lui manquait. Il voulait éviter de l'inquiéter, surtout quand il s'agissait de frôler la mort... Non définitivement, il devait se passer de son soutien, mais de tous ses amis, Lheina aurait été la seule capable d'alléger le cœur du Gryffondor. D'ailleurs, à bien des égards, elle avait toujours été celle qui était la plus douce pour cette partie de son âme. Alors qu'il allait se resservir un whisky, quelqu'un lui rentra dedans au point de renverser l'intégralité de sa bière sur le Gallois. Poussant un juron dans sa langue natale, le Gallois se rendit compte de l'auteur de ce méfait. Camaël Grimm... Poufsouffle, beau-frère d'Apolline, une sorte de protégé qu'il appréciait de croiser. Un protégé qui sentait fort l'alcool... Ce qui était étrange sachant que Rhys venait de se faire asperger de bière, il arrivait à sentir la composition du sang du jeune Grimm. Ah, une chose était sûre, il ne pourrait pas rentrer en balais ce soir. La preuve, il confondait pinte et whisky.

Le moment gênant arriva surtout quand il chercha à le sécher. Le Gryffondor aurait bien essayé de l'en empêcher, mais il avait fréquenté suffisamment de poivrot autour de la belle Lheina pour savoir que c'était inutile. D'ailleurs, il n'avait pas vu si souvent le Grimm se mettre aussi mal... En-tout-cas pas seul. Quelque chose clochait. C'était sur cette idée qu'il décida de se laisser faire et de le suivre jusqu'au comptoir. Profitant de pouvoir s'asseoir pour se sécher par magie, cela n'allait pas changer son odeur. Pas grave, de toute façon, il ne comptait pas séduire en cette soirée. Alors que Camaël commanda, Rhys posa la somme due sur le comptoir avec un petit clin d’œil au Poufsouffle.

« Elle est pour moi cette tournée, tu payes la suivante. Oh et va t’asseoir, je t'amène le tout. On va éviter que tu me fasses une Lheina. »

Attendant que l'adulte encore gamin parte, il stoppa net le barman alors qu'il était sur le point de remplir la deuxième pinte pour le Grimm. Non, si quelque chose n'allait pas, le saouler était la pire solution. D'une certaine façon, le Gallois voulait juste vérifier que ce ne soit rien de trop grave avant de lui permettre de retourner dans son ivresse.

« Jusqu'à nouvel ordre, toutes les boissons pour lui sont dans leur version non-alcoolisée. Je payerai le double. »

Glissant de nouvelles pièce sur le comptoir comme si c'était un pourboire, il amena le tout à la table de Camaël. S'asseyant face à lui essayant de jauger son niveau d'ivrognerie, il leva son verre pour trinquer. Heureusement que la magie permettait d'avoir les mêmes goûts avec ou sans alcool... Il mettrait une petite heure avant de s'en rendre compte avec de la chance. Sauf si c'était un poivrot... Ce genre de technique fonctionnait très mal avec les experts... Il ne manquait plus qu'à prier.

« Et du coup à quoi on boit ? Tu as l'air particulièrement agité ce soir Cam. Tu as enfin trouvé dans quel sens il fallait te servir de ta baguette ? »

Le gryffondor remarqua, alors qu'il ramenait les boissons, que son protégé était si éméché qu'il en avait perdu la table avec ses amis. Cela l'arrangeait, il pourrait plus facilement déchiffrer ce qu'il se cachait derrière cette beuverie. Si ce désir de boire avait été animé juste par la camaraderie, il n'aurait sans doute pas oublié où étaient ses compagnons de boisson. Pourtant, malgré ce côté moralisateur, sévère qu'il avait, il eut un sourire en coin face à la bonne humeur du Poufsouffle concernant le goût des bières offertes. D'une certaine façon, c'était déjà une victoire de voir à quel point le jeune Grimm était heureux d'une boisson non-alcoolisée. De son côté, Rhys espérait que le whisky fasse passer la migraine qu'il avait depuis qu'un mage noir s'était amusé à se glisser dans son esprit et lui demander de tuer son partenaire.

« L'immortalité et l'amour hein ? »

Jamais ils n'avaient trinqué pour ça. L'immortalité était un désir étrange... Soit c'était le regret, soit la peur... Mais il avait du mal à comprendre. En revanche l'amour, c'était certes un sujet banal, mais aux dernières nouvelles Camaël était plus tourné vers l'amitié et le célibat... Réfléchissant sur comment aborder le sujet, son regard se fit plus dur à la première déclaration de son cadet. Bien que le côté sans filtre du Grimm était appréciable et qu'il était souvent un vent de fraîcheur à un château qui se prenait trop au sérieux et où Rhys ne faisait pas exception, l'ivrognerie du garçon le poussa à tomber dans l'insulte pour faire des louanges. Certes, il ne faisait qu'énoncer des faits... Il avait lui-même appris de la bouche de Selma l'héritage qu'elle avait. Raison de plus pour cette réaction aussi froide qu'un blizzard en mer du Nord. Posant sa main sur la pince de Camaël, l'empêchant de poursuivre sa boisson, le Gallois parla lentement, bien distinctement de telle sorte à ce que même l'esprit enivré puisse comprendre chacun des mots.

« Je sais que tu es quelqu'un de bien Cam... Alors je vais mettre ces paroles sur le compte de la boisson. Mais ne parle plus jamaisdes sœurs Montero ainsi, devant moi. Je ne suis pas particulièrement ami avec elles, mais elles ne méritent pas d'être résumées à ça. Ce sont des filles charmantes, très jolies, vives d'esprit... Sauf sur l'humour. Et surtout elles ont une naïveté, une innocence, qui fait qu'elles ne méritent pas d'être rabaissées à leurs origines... Après tout, toi, tu ne voudrais pas qu'on te rappelle constamment que tu es le frère de Michel-Ange, coureur de jupon notoire, qui a mis une fille enceinte au château, qui s'avère être ma meilleure amie, et dont l'humour exaspère encore les professeurs. Si ? »

Rhys retira sa main de la pinte. Et comme pour dédramatiser la situation trinqua de nouveau avec son cadet avec un petit clin d'œil. Il fallait dire que juger quelqu'un en raison de sa famille devant le Gallois n'était pas malin. La seule occasion où on pouvait le faire, c'était quand la dite famille était de sang-pur. Dans ce genre de cas, le Gryffondor n'avait aucune cohérence et jugeait durement tout héritier de sang pur dans son entourage. Rares étaient les exceptions à ce jugement. Alors qu'il buvait une nouvelle gorgée, il la recracha sur Camaël à l'image d'un geyser. Il s'étouffait, car le peu qu'il avait réussi à avaler, il l'avait fait de travers, il se contenta de répondre avec force entre deux quintes de toux.

« Je t'avais dit de ne pas faire une Lheina car elle est maladroite. Oui, c'est la plus belle fille du château ! Mais non, ce n'est pas ma copine. On est qu qu'amis... C'est une sang pur bordel de merde ! Et moi un né-moldu ! Sang pur. Né Moldu. Serpentard. Gryffondor. Si on était ensemble, je serais actuellement avec elle ! »

Se tapant sur le torse pour faire passer la boisson qui s'était visiblement trompée de voix, il se promet d'aller tirer les oreilles de Circé qui visiblement avait fait une erreur d'interprétation... Ou du moins avait eu des paroles qui avaient prêté à confusion. Non, il fallait être réaliste. Même si Lheina n'avait pas été de ce sang, elle était à des années-lumière de Rhys. Elle méritait ce qui se faisait de mieux. Alors qu'à ses yeux, lui méritait tout simplement d'être seul étouffé par la gloire après laquelle il courait. C'était d'une certaine façon pathétique, mais il acceptait ce destin avec une forme de fatalisme. Vouloir autre chose était été tout simplement égoïste, rendant quelqu'un malheureux dans une quête d'un bonheur dont son cœur n'était pas digne. Comme pour changer de sujet, il se rattrapa aux branches que Camaël avait placées plus tôt.

« Et sinon... En parlant de petite amie. Tu peux me dire pourquoi on a trinqué à l'amour ? Il y a une futur Madame Grimm ? »