Le danger ? Quel Danger ? Je me ris du danger ! {Aram}

Aram sirotait un verre accoudé sur le comptoir d’un bar miteux du Marché au Troll, le visage penché sur son verre alors qu’il était perdu dans ses pensées. Son long manteau était visiblement fatigué et pendait tristement le long de son corps, camouflant dans ses poches magiques intérieures quantité de secrets invisibles aux yeux des indiscrets qui l’entouraient. Cependant, son visage de fripouille hâlé par le soleil commençait à être connu ici. Un peu trop. Un badaud venait justement de se rapprocher de lui en parlant bien trop fort pour le sorcier rom qui n’aimait rien tant que la discrétion.

- Aram Romanez… On te voit de plus en plus souvent ici… Qu’est-ce qui t’amène ? T’as des nouvelles marchandises peut-être ? Tu serais prêt à me faire un prix ? C’est quoi, des choses à plumes ou à poils ?…

Le Romanez n’était pas d’humeur à marchander avec un poivrot sans le sous, aussi il se contenta de grogner en plongeant son nez dans son verre.

- J’ai tout revendu au Vesperum invenit l’ami, j’ai rien de plus à te proposer… Maintenant si tu veux bien m’excuser…

Si celui qui venait d’interrompre le cours de ses pensées ne lui était pas inconnu, il y avait une autre silhouette qui elle avait attiré ses soupçons. Une jeune femme qu’il n’avait jamais vu venait d’entrer dans le bistro et elle semblait s’intéresser d’un peu trop près à leur conversation. La femme n’avait pas du tout la dégaine d’une sorcière ayant l’habitude de traîner au Marché au Troll, et sa mine désintéressée penchée sur le menu qui traînait sur une table ne trompait personne. Qui était-elle ? Et surtout, qui servait-elle ? Avec sa famille actuellement menacée, Aram se méfiait de tout ce qui sortait de l’ordinaire. Et cette petite poupée de porcelaine dans ce taudis plein de rats détonnait clairement.

Le tzigane finit son verre et prit le chemin de la sortie avant de se détourner brusquement pour faire face à la femme, gardant la porte dans son dos au cas où il aurait besoin de s’échapper en urgence.

- Je peux vous aider princesse ? J’ai l’impression que je vous ai tapé dans l’œil…

Dans sa tête les choses lui avait clairement parut un peu moins dangereuses et plus facile. Le problème c’est qu’elle ne pouvait pas juste monter sur la table et demander de vive voix «  Qui a des informations sur le braconnages lié aux éclairs ? » Non clairement non. Bien qu’elle en était clairement capable, ayant le vent en poupe. Bien trop d’après sa mère. Elle s’était dirigé vers une table, cacher derrière le menu pour observer en détails les différentes personne présente, essayant d’établir qui avait le plus le profil «  Braconnier » . Si seulement il pouvait exister un sort qui fasse  ce genre de chose. Comme si le «  Braconnier » pouvait se mettre à scintiller parmi la foule. Ça serait vraiment pratique. Malheureusement Lara ne connaissait pas se genre de sort – si ce genre de sort existait – et elle devait se contenté d’essayer de deviné. Son regard se porta particulièrement sur un homme qui discutait avec un autre imbibé d’alcool. Il avait un léger sourire en coin et il portait sur lui une certaine insolence. Lara se reconcentra sur le menu quand leurs regards sembla se croiser une seconde.

«  Et flûte ! » marmonna-t-elle pour elle-même. Et si c’était lui le braconnier et qu’il avait à l’intérieur du Véritaserum plusieurs allier ? Elle n’avait pas pensé à ça. Cette fois il n’y aurait peut-être pas @Charles Graham pour la sauver. Tant pis. Elle était capable de se débrouiller seule. Heureusement le jeune homme se dirigea vers la sortie. Ou pas. Un sourire passa sur ses lèvres. Princesse. Un mot que Lara n’affectionnait pas vraiment, lui donnant l’impression d’être «  précieuse », «  douce » et «  inutile. » . Etant donné la fréquentation du Véritaserum, peuplé de visage peu engageant, on pouvait toutefois comprendre qu’elle faisait un peu «  princesse » à côté d’œil. «  Hum… Pas du tout. J’étais en train de regarder la carte. » Elle faisait une piètre menteuse. Est-ce que cet inconnu pourrait lui venir en aide. «  Mais je suis déçu. On m’avait recommandé les lieux pour des mets qui sortent de l’ordinaire. »

La jeune femme lui répondit avec grande hésitation, comme si elle cherchait une excuse à sa présence ici. Il n’y avait qu’un touriste égaré pour regarder la carte de ce taudis mal famé. Et des touristes, il n’y en avait pas au Marché aux Trolls. Aram se détendit cependant instantanément. Cette sorcière s’y prenait si mal qu’il était impossible qu’elle fasse partie de Thanatos, à moins qu’ils aient grandement abaissé leurs critères de recrutement. Quand la femme lui expliqua qu’on lui avait recommandé ces lieux, Aram aurait pu en éclater de rire s’il ne sentait pas des regards mauvais planer sur eux. Est-ce que la sorcière était suicidaire ? Si elle continuait à jouer ce rôle qui ne trompait personne, les marauds qui les entouraient finiraient par lui tomber dessus.

Le premier réflexe d’Aram fut la fuite. Clairement, il ne faisait pas bon pour sa réputation de traîner avec elle. Elle commençait déjà à bien trop éveiller les soupçons sur eux, et le premier système de défense du peuple rom était de passer inaperçu quand cela s’avérait nécessaire. Pourtant, au lieu de s’éloigner sans demander son reste, il resta planté là à fixer la pauvre gadji qui tentait de se fondre dans la pièce. C’était navrant à voir. Comme un agneau se noyant dans une mare de boue. Clairement, il ne pouvait pas rester là sans rien faire. Aussi, il se pencha en avant, au-dessus de la table pour marmonner d’un air sérieux :

- Celui qui t’a recommandé ce lieu te veux du mal, ma belle. Tu trouveras ici rien d’autre que des problèmes, tu peux me croire…

Jetant un coup d’œil par-dessus son épaule, Aram perçu plusieurs paires d’yeux qui les fixaient sans détour. Aussi, il prit sur lui d’entrer dans le jeu stupide de la jeune fille. Un sourire niais s’afficha sur son visage alors qu’il haussait les sourcils, pointant une ligne sur la carte.

- La soupe du jour bien-sûr ! Se tournant vers le rustre personnage derrière le bar, il leva une main en l’air en clamant haut et fort. Une soupe du jour pour la d’moiselle patron ! Et un rhum pour moi…

S’asseyant alors à la table que la sorcière avait choisi sans doute par hasard, il posa ses pieds sur la table en les croisant, sans quitter du regard la belle en face de lui.

- Ça pour sortir de l’ordinaire, elle sort de l’ordinaire cette soupe. Tu vas pas être déçue…. Même si j’ai comme l’impression que t’avais autre chose en tête en venant ici…

Lara n’était pas faite pour les enquêtes, ça semblait évident. Elle était bien trop pied dans le plat, à foncer dans le tas. Mais qu’est-ce qu’elle aurait dût faire ? Rester les bras croisé pendant que Marleen s’occuper d’un problème qui la concerné directement ? Lara était bien consciente qu’elle n’avait rien à faire ici mais son courage était sans limite. Son inconscience aussi aurait dit certain ! Est-ce l’homme qui lui faisait face était un braconnier ? En tout cas elle n’arrivait pas à donner le change avec sa carte. Et crotte ! Elle poussa un léger soupir agaçait quand elle entendit son «  invité improvisé » l’appelait « ma belle ». Lui en tout cas il semblait clairement avoir sa place ici ! Il avait un air de filou et Lara ne lui aurait confier ni sa bourse ni sa vie ! Elle le regarda perplexe, ses mots lui donnant l’impression de menace ou d’une envie de la voir partir au plus vite et partout malgré cela il commanda une soupe.

«  Mais je ne vous ai jamais… » Elle ne pût protester d’avantage plus qu’il était déjà assis à sa table, faisant comme chez lui. Ce type était rustre mais il n’avait pas l’air d’être un braconnier. Quand Lara disait «  sort de l’ordinaire » elle avait pensé peut-être lui tendre une perche sur du ragout de Dragon ou  autre mets de ce genre. Elle leva les yeux aux ciels et poussa un nouveau soupir. «  Deux Rhums ! » rajouta-t-elle alors qu’elle commençait déjà ce dire qu’elle était venue pour rien. «  Et qu’est-ce qui fait penser cela ? » demanda-t-elle sur ses gardes.

La sorcière ne sembla pas apprécier son choix de plat, mais c’était sans doute parce qu’elle ne connaissait pas le reste du contenu de la carte. La soupe était le loin le plus ragoutant de tous. Pourtant elle changea d’avis pour prendre la même chose qu’Aram. Ce dernier lui offrit un sourire narquois, imaginant mal ce petit visage angélique avaler une seule goutte de l’alcool local. Ce dernier avait cependant au moins un avantage : le verre serait désinfecté. Se penchant prudemment vers lui, elle lui demanda ce qui l’avait amené à penser comme il l’avait fait.

- Ta cape est propre, commença Aram en pointant du doigt ses vêtements immaculés. T’as donc pas passé beaucoup de temps sur le marché, ou alors t’es maniaque. Et si t’es maniaque, tu viendrais pas salir ta petite frimousse dans ce troquet. Si t’es venue, c’est pour une bonne raison, et pas pour manger puisque même la soupe ne t’intéresse pas. Mon intuition, c’est que tu cherches quelque chose, ou quelqu’un… Et c’est pour ça que tu nous écoutais…

Le sorcier rom ne s’était pas départi de son sourire et il avait croisé ses mains pour poser son menton dessus. Pourtant, il restait sur ses gardes, car s’il se méfiait de la petite demoiselle, le Romanez avait moins confiance encore en le reste des occupants des lieux. Le patron fit apparaître deux verres de rhum devant eux, crasseux à souhait. Aram attrapa le sien du bout des doigts pour en boire une gorgée qui le fit grimacer.

- Chez mon peuple, on dit que le regard est le reflet de l’âme. Et tes yeux renvoient beaucoup d’innocence… S’il y avait bien quelque chose que le rom n’aimait pas, c’était voir un oisillon se faire pervertir par ce genre d’ambiance dangereuse. Pourtant… En plissant le nez, Aram se rapprocha d’elle en reniflant. Tu sens pas très bon…

Un éclair de danger traversa ses pupilles sombres alors qu’il se recula brusquement. Le loup. Elle sentait le loup.

- Tu devrais pas t’éterniser ici, gadji. Si les choses dégénèrent, je pourrai rien faire pour toi.

Ta cape est propre. Lara fronça le visage, comme elle faisait toujours quand elle était perplexe et qu’elle avait du mal à comprendre. Elle tourna alors la tête vers les autres personnes présentes, essayant de savoir si cela la différencier vraiment des autres. C’est vrai que même à bonne distance, ses vêtements semblaient bien plus entretenus que les morceaux de tissus douteux que porter les autres. D’ailleurs c’était des vieux restes de ketchup ou du sang qui lui semblait apercevoir sur la cape du jeune homme présent face à elle ? Elle préférait ne pas savoir. Elle se contenta d’écoutait la suite de ses arguments.

«  Hey ! » se défendit Lara, piqué au vif alors qu’il était en train d’affirmer qu’elle sentait mauvais, la reniflant comme s’il avait été un chien et elle un vieux morceau de fromage. Il la poussait à quitter le marché au troll. Etait-ce par réelle intérêt pour sa personne ? Elle en doutait. Il voulait seulement ce débarrassé d’elle. «  Qu’est-ce que c’est une… Gadji ? » Demanda-t-elle comme si c’était le plus important dans ses mots. Il la rendait curieuse, elle se demandait également ce qu’il voulait dire par «  mon peuple ».

«  Je voulais seulement… Je voulais aider une amie à… » Elle se pencha vers lui pour chuchoter à peine ses derniers mots.
« … dénicher des braconniers. » Elle commençait à se dire qu’effectivement elle n’aurait pas dût venir ici. Les regards commençaient réellement à s’éterniser sur eux et elle se sentait comme un biche en pleine savane, en proie à tous les prédateurs du coin. Cette fois pas de Charles pour la sauver si effectivement ça finissait mal. Ton gout pour le danger finira par te perdre Lara pensa-t-elle en rependant la capuche de sa cape sur sa tête, comme si se camoufler l’aiderait à détourner les regards.

La sorcière semblait avoir un très mauvais instinct de survie. Elle commença par s’offusquer du fait qu’elle sentait mauvais, et Aram l’observa en plissant des yeux, tentant de deviner si elle était vraiment si innocente ou si elle jouait très bien ce rôle. Enfin, loin de prendre en considération ce qu’elle lui disait, elle se borna à chercher à connaître le sens de ses paroles en langue romani. Aram leva les yeux au ciel en soupirant alors que la jeune femme choisit finalement de se pencher vers lui pour chuchoter quelques mots qui attirèrent le fit se figer.

- Des braconniers ? Le sorcier rom leva un sourcil intéressé. La sorcière avait finalement réussi à le surprendre. Le Romanez lança un nouveau regard à côté d’eux pour vérifier qu’ils n’avaient attiré aucune attention malintentionnée, avant de siroter une nouvelle gorgée d’alcool. Heureusement, les habitués du troquet semblaient bien trop occupés à palabrer entre eux pour les écouter. Ce fut au tour du rom de se pencher en avant effleurant du doigt l’épaule de la jeune fille.

- Une gadji, c’est une petite blanche comme toi qui n’appartient pas à mon peuple. Il leva une épaule, son visage prenant un air bien plus fier alors qu’il répondait à sa question silencieuse. Le peuple Tzigane ma belle ! Je suis un sorcier rom jusqu’au bout des bagues. Avec un sourire narquois, il fit tourner certains de ses anneaux avec un geste habitué.

- Grâce à moi, t’as rien à craindre ici. Quoi qu’il se passe, ça sera moi l’ennemi numéro un de toutes ces braves gens. Un rom est rarement le bienvenu dans les parages… On est souvent vu comme des oiseaux de mauvais augure.

Le Romanez se pencha de nouveau vers elle en fronçant les sourcils.

- Mais dis-moi, tu cherches quel animal précisément ? Demander des braconniers, c’est pas banal pour une fille qui sent… le canin comme toi…

«  Vous ne savez pas ce qu’est un braconnier ? » demanda-t-elle alors qu’il levait un sourcil interrogateur. Après tout ça aurait très bien pût, l’homme face était-il… instruit ? Elle jugeait sans connaitre mais visiblement c’était réciproque puisqu’il ne tarda pas à la traiter de Gadji. Ça ne sonnait pas vraiment bien à son oreille. C’était une insulte ? Ça résonnait comme telle et elle ne pût s’empêcher de lui poser la question. Une petite blanche donc. Il anticipa sa question suivante. Par principe Lara ouvrit la bouche pour répliquer quelque chose à son «  ma belle » parce qu’elle n’était à lui de rien du tout ! Mais il avait raison sur un point, elle avait l’air un cible facile ici et il valait mieux qu’elle ne se mette pas à dos son seul allier.

«  A juste titre ? Ou ce sont des idiots ? »

S’il portait la poisse elle préférait le savoir, bien que Lara n’avait pas besoin de ça pour s’attiré des ennuis, ayant la fâcheuse tendance à mettre les deux pieds dans le plat. A sa remarque concernant son odeur elle baissa la tête et commença à se renifler.

«  Mais je ne sens pas le chien ?! »

D’où lui venait pareil ? Quel curieux personnage ! «  Je cherche… » Elle se pencha de nouveau sur lui pour chuchoter. «  Je cherche des braconniers qui s’en prendrait à la créature qui vit dans les orages. » Elle n’était pas sûr qu’il comprendrait si elle disait Tonitrum, son nom.

Aram haussa les épaules à sa question en plongeant sur son verre avant de répliquer d’une voix lente dans laquelle il laissait son accent rouler librement.

- On a toujours peur de ce qu’on ne connaît pas… Les personnes présentes ici sont parmi les plus bêtes que je connaisse effectivement… Ils ont cependant raison de se méfier de moi.

Le resquilleur eut un rictus amusé alors qu’il passait son regard de roublard sur la sorcière au petit visage rond et innocent. Cette dernière s’offusquait de sa remarque, prétendant qu’elle ne sentait pas le chien mouillé. Curieuse sorcière qui criait au loup… Mais ses dernières paroles lui firent relever le visage d’un air interloqué avant qu’il ne lance un rapide regard vers les piliers de comptoirs accoudés au bar.

- Tout ça te dépasse princesse, siffla-t-il, soudain sur ses gardes. Tu ne devrais pas être ici, et surtout pas poser ce genre de questions…

La sorcière n’avait clairement pas conscience du danger dans lequel elle se mettait, et un frémissement à côté d’eux lui confirma ses inquiétudes. On les avait entendus. Ils n’étaient plus en sécurité. Le rom envisagea un instant de la laisser là, à faire face aux conséquences de ses actes. Après tout, ils ne se connaissaient pas, et il n’avait pas l’âme d’un saint. Pourtant, il ne put s’y résoudre, et lui attrapant le poignet, il la força à se lever alors que les regards se tournaient vers eux.

- Viens, sortons d’ici !

A pas rapides, il l’entraîna dehors mais perçut clairement des raclement de chaises et des bruits de bottes derrière eux.

- Mierda, souffla-t-il en la pressant de marcher plus vite à sa suite, atteignant une petite ruelle dans laquelle ils se faufilèrent, attendant, l’oreille aux aguets, pour vérifier s’ils étaient suivis.