Mr Loverman | Nathaniel Seymour

Mr Loverman
Ft. @Nathaniel Seymour



25 septembre 2022, 16h.

Elle avait toujours trouvé qu’il y avait une sorte de mélancolie aux fins d’après-midi des dimanches de septembre. Lorsque le vent commençait à souffler la brise fraîche annonciatrice de l’hiver à venir, les journées, se faisant plus courtes, offraient un éclairage à la fois doré et blafard, comme si les rayons cherchaient toujours à colorer le paysage tout en étant entravés par la couche nuageuse habituelle. Le dimanche concluait le week-end un peu trop tôt au goût de la plupart des gens, et, bien que la journée était encore loin d’être terminée, tous commençaient à ressentir ce petit pincement au coeur en se disant que le court congé était passé beaucoup trop vite.

Elle avait toujours été Fille du printemps, émerveillée par la renaissance et la vie qui bourgeonnaient avec la chaleur qui commençait à s’installer. C’était donc sans surprise qu’elle avait été la Voix d’Ánoixi à Koukouvágia. Elle devait avouer être toujours un peu attristée par tout ce que l’automne apportait. Les insectes tombaient au sol, nombreuses étaient les abeilles qui s’échouaient par terre, engourdies par le froid et vidées de toute énergie. Les animaux sauvages se préparaient pour l’hibernation et retournaient se cacher dans leurs terriers… Des départs pourtant nécessaires mais tout de même nostalgiques pour le coeur fragile de la sorcière.

Pourtant, rien ne l’empêchait de voir et d’adorer la beauté de l’automne. Les feuilles se coloraient davantage, le blé qui ornait les champs se faisait d’un or éclatant sous le soleil plus discret. Et surtout, c’était le temps des vêtements plus chauds, des écharpes et des pulls ; une réalité qui avait déstabilisé Naivy lorsqu’elle était arrivée, un an plus tôt. Cela dit, elle avait vite trouvé une forme de réconfort dans les chocolats chauds onctueux et les feux de bois qui craquaient en réchauffant ses joues. C’était bien différent de la chaleur annuelle de la Grèce ou du Népal, mais pas moins merveilleux.

Alors là voilà emmitouflée dans un long manteau beige que plusieurs jugeraient trop chaud pour la saison, mais qui la mettait suffisamment confortable pour profiter de la fin d’après-midi à l’extérieur. Les parcs magiques de Londres étaient plein de vies à ces temps-ci de l’année. Elle devait avouer que, même en y allant seule, se retrouver entourée de rires et de gens débordants d’énergie lui apportait un sentiment de réconfort, comme une illusion que sa solitude n’était que passagère.

Alors que ses pas lui faisait emprunter un sentier longeant un petit ruisseau, Naivy tourna la tête en entendant les aboiements joyeux d’un croup qui se dirigeait vers elle avec entrain. Déjà charmée, elle se pencha afin de l’accueillir avec des caresses énergiques.

« Heeey ! Bonjour toi ! », fit-elle en lui gratouillant l’arrière des oreilles.

Elle releva le regard, s’attendant à voir son propriétaire pointer le bout de son nez tout en se préparant à le sermonner poliment quant à l’importance de garder ses animaux de compagnie en laisse, mais… Rien. Elle glissa doucement ses mains dans la fourrure du croup pour voir s’il possédait une médaille, mais son coeur se pinça en constatant l’absence de collier.

Des bruits de pas lui firent relever la tête, ses yeux pétillants d’espoir se posant sur l’inconnu qui passa devant elle.

« Excusez-moi ! », s’exclama-t-elle en gardant une main sur le croup, afin d’éviter qu’il s’éloigne pour aller vagabonder. Mais un coup d’oeil vers lui lui suffit pour se rendre compte qu’il s’était déjà sagement assis à ses pieds, lui permettant de se redresser convenablement pour aborder l’étranger. « Pardon de vous déranger, mais je voulais juste savoir si vous connaissiez ce croup. »

Mr Loverman
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[Ignorez tout le blabla sur l’automne, on change la date et pouf maintenant c’est le 14 janvier et il fait froid ]


Son coeur s’alourdit légèrement lorsque la réponse de l’étranger tomba. Le coeur serré pour le chien qu’elle caressait, ses petits yeux piteux l’attrendrirent plus qu’elle ne l’aurait voulu. Lorsqu’elle bossait pour le refuge, on lui avait souvent reproché qu’elle s’attachait trop facilement à ces petites bêtes, qu’il fallait qu’elle apprenne à mettre de la distance entre elle et les petites bêtes. Pour se protéger, qu’ils disaient, puisqu’elle versait toujours une petite larme lorsque ses petits préférés s’envolaient vers leur nouveau foyer. Mais ce qu’elle évitait de leur répondre, c’est qu’elle s’attachait trop facilement à tous, qu’ils soient des petits chats perdus ou des sorciers.

Elle aurait pu se décourager aussitôt, attristée de voir le petit chien se coller à elle alors qu’il lui semblait tout froid. S’il s’agissait d’un lâche abandon, qui sait depuis combien de temps il traînait dans la neige… En soit, son pelage épais devait sans doute le protéger de la morsure hivernale, mais elle ne pouvait s’empêcher de se laisser ronger par des inquiétudes qui n’avaient probablement pas lieu d’être. Si ça se trouve, un.e sorcier.e à bout de souffle accourait vers eux en quelques minutes et il ne s’agirait que d’une petite fugue ou une marche sans laisse ayant mal tourné.

Pourtant, la douceur de l’espoir lui insufflait toute sa patience et la sorcière se retrouva à contempler l’idée de l’emmener avec elle à son appartement. Qu’est-ce que Dani en penserait ? Non, ce ne serait pas raisonnable d’avoir un chien avec eux, pas alors qu’elles attendaient des nouvelles de leur futur colocataire. L'amener au refuge était sans doute la chose à faire, si le propriétaire ne se pointait pas.

« J’espère aussi… », souffla-t-elle d’un air distrait avant de se rendre compte qu’elle n’avait pas accordé beaucoup d’attention à son interlocuteur, qui observait à son tour le jeune chien sans collier.

D’un oeil curieux, la brune observa l’homme de haut en bas, tentant de se faire une petite idée de la personne debout devant elle. Il aurait très bien pu continuer sa route sans lui prêter grande attention. À vrai dire, cela venait tout juste de la frapper qu’il s’était vraiment arrêté pour l’aider, alors qu’elle ne s’y était pas vraiment attendue. Lorsqu’elle était arrivée en Angleterre, elle avait été un peu choquée par la façon dont tout le monde semblait constamment pressé de se rendre quelque part au loin, sans dire bonjour aux passants qu’ils croisaient.

« Oh, j’ai tout mon temps de le chercher, vous savez. Si ça se trouve, nous serons plus efficace à deux. » Le regard brillant, Naivy lui offrit un petit sourire chaleureux. « Je l’amènerai à un refuge si on ne retrouve pas son propriétaire, je ne voudrais pas qu’il passe la nuit au froid, le pauvre... »