Your own grave

J'étais dans notre chambre, dans la Tour Gryffondor. Une pièce où nous avions beaucoup partagé, que ce fût lui ou moi, jusqu'à parfois tard dans la nuit. Nous eûmes quelques fous rires, quelques douleurs, des peines partagés. Mais ce soir-là, c'était la première fois qu'en moi, une colère coulait dans mes veines à l'égard de mon cousin. Il lui avait fait beaucoup trop de mal en la quittant comme un mal propre sur ce terrain de Quidditch alors qu'elle l'avait attendue comme une veuve éplorée attendant le retour de son mari tombé au combat. C'était quelque chose que je ne pouvais lui passer, que personne ne pouvait lui passer. @Yeleen Sô, celle qui avait tant vécu de douleurs et de frustrations, se retrouvait là, seule, probablement dans sa chambre de Serdaigle, le cœur en miette, l'âme dans une sombre tourmente, de celle qui nous assaillîmes tout l'été alors que nous attendions leur retour.

Sean n'avait pas le droit de se fermer comme cela. Je l'avais vu dans le train, mais je n'avais rien fait sinon en parler à notre oncle Jameson lorsque j'eus fait ma demande pour intégrer le cours de @Luke Korrigan.

Si l'esprit morose de mon cousin durait depuis son retour, j'avais mis cela sur le compte d'un besoin de tranquillité. Sur les Hébrides, le calme était relatif. Je ne l'avais d'ailleurs expérimenté que lorsque nous partîmes de l'île pour retrouver la terre ferme de Tinworth, où mon oncle et ma tante avaient décidé d'y bâtir notre nid et celui de mon petit cousin à venir. Pour autant, là, c'était pour moi inacceptable. Peut-être parce qu'@Asel Misra ne le vivait pas ainsi ? @Milo Clearwater non plus, d'ailleurs. Ils n'étaient plus comme avant, c'était un fait. N'importe qui pouvait le voir. Je voyais le bonheur dans les yeux d'Asel à chaque fois que nous nous retrouvions, nous apportant l'un et l'autre un soutien indéfectible. Elle était mon âme sœur. Comme Yeleen l'était pour Sean. Peut-être ne l'aimait-il pas ? Du moins, pas comme elle, elle l'aimait ? Cette pensée me fit me mordre la langue alors que je sentais comme une pulsation de haine liquide s'échappait de mon cœur.


Le soleil tombait à l'horizon, disparaissant derrière l'épaisse forêt interdite qui s'étendait à perte de vue. J'étais assis au milieu de la pièce, le regard tourné vers la porte d'entrée, à l'affût de chaque pas que j'entendais venir de l'escalier en colimaçon. Je voulais le voir pour lui parler bien que je ne savais pas encore quoi lui dire. Tout ce que je voulais, c'était une explication. Je voulais du solide, je voulais pouvoir apporter quelque chose de fort pour réconforter Yeleen. J'osais encore espérer que ce n'était qu'une passe. Pourtant, il y avait cette petite voix dans ma tête qui ne pouvait s'empêcher de me dire qu'il n'était autre que le digne fils de @Braxton Clearwater.

J'avais beau entendre les propos de mes parents, de @Maeve Cynfeirdd ou encore de @Luke Korrigan sur le fait de laisser pisser, de ne pas alimenter cette colère à l'égard de mon oncle, pourtant, là, tout de suite, je sentais de nouveau naître en moi les ténèbres qui me consumaient de ses flammes noires, laissant ma rage et ma haine s'emparaient de moi.

Il fallait que je garde la tête froide. Pour le début au moins, me souffla cette obscure noirceur dans le creux de mon cœur. Je me devais de lui accorder le bénéfice du doute. Il avait cette excuse d'être mon cousin. S'il ne l'avait pas été, je ne sais pas ce que je lui aurais fait. On ne pouvait pas faire du mal à Yeleen. Pas après ce qu'elle avait vécu. Pas après tout ce que nous avions vécu, pas après cet été à se soutenir contre vents et marées, pour ne pas sombrer dans le désespoir et la douleur de ne plus jamais les voir revenir.

La pièce était noire lorsque la porte s'ouvrit. Noire comme mon âme. Je sentais une vive tension dans ma poitrine, comme si j'allais jouer mon destin aux dés dans une sinistre taverne, un peu à l'image de celle où le professeur Korrigan m'eut emmené. Ma colère se lisait sur chacun de mes traits de visage, et ma jambe se mit aussitôt à trembler. Mon calme ne serait que passager, j'en avais bien peur.

Ma patience avait des limites, mais la porte avait fini par s'ouvrir devant la silhouette de mon cousin. Aussitôt, je fus frappé par une vieille odeur d'alcool me laissant penser qu'il venait de se mettre minable. Si cela devait m'amadouer, il n'en fut rien. Mon regard se durcit un peu plus, alors que le monstre que j'avais en moi, commençait à réclamer vengeance pour le mal qu'il avait fait à ma meilleure amie. Pas de chance pour lui, @Yeleen Sô comptait beaucoup à mes yeux, surtout après l'été que nous avions vécu tous les deux.

Un court instant se passa avant qu'il ne bouge, ou ne parle. Je ne savais pas du tout de ce qui se passait dans sa tête. Observant ses traits au cas où il me faille réagir vite et fort. J'avais un peu cette impression d'être sur un ring, avant que le combat ne commence. Ce moment où deux adversaires se jaugent rapidement avant de porter le premier coup. Mon instinct me disait toujours de frapper le premier, de ne pas lésiner sur les efforts. Ne jamais rien laisser au hasard. Pourtant, avec le temps, je sentais qu'au fond de moi, cette colère avait évolué. Si plus jeune, j'étais comme un lion en cage, aujourd'hui, je me sentais plus... Libre, plus déchainé. Ce n'était pas tant dans ma façon de me battre, mais plutôt dans la façon dont ma colère se libérait.

Je me souvins, l'espace d'un instant, de ce court laps de temps qui s'était passé avant que je ne bondisse sur @Michel-Ange Grimm aux Trois Balais. Ce court moment où le prédateur ne fonde sur sa proie pour n'en faire qu'une bouchée. Sauf que cette fois, j'avais utilisé les mots comme poings, frappant sans retenue dans les endroits les plus douloureux pour ce bon vieux Micky que j'aimais malgré tout, prenant un plaisir malsain de le voir se défigurer sous le poids des mots dont j'eus honte plus tard. Si je voyais le visage d'@Asel Misra me dire que je l'avais déçu, je ne pouvais m'empêcher de voir mon souvenir se brouillait devant la colère qui affluait violemment dans mes pensées, nettoyant de bon sens toute parcelle de mon corps. Une partie de moi avait peur de ce qui allait se passer tandis que l'autre sautait à pieds joints sur ma raison en me disant d'ajouter un peu plus d'essence sur cette situation triste à en mourir dans laquelle se trouvaient Sean et Yeleen.

Alors lorsqu'il me dit qu'il ne voulait pas en parler, j'éclatai d'un rire sans joie. Bien sûr que tu ne voulais pas en parler, Sean ? Je me sentais glissé dans les ténèbres, révélant ce monstre que j'avais en moi. Cette chose que je détestais du plus profond de mon être dont j'adorais pourtant toutes ces sensations de puissance que cela me donnait. Comme un soufflet de cheminée, mes sentiments à l'égard de Sean partaient dans tous les sens. Sur l'instant, tout l'amour que je lui portais se changeait progressivement en haine. Je n'avais qu'une envie c'était de l'avoir cette discussion. Dans le fond, le Adil que j'étais tous les jours n'avait qu'une envie, c'était de l'interpeller sur sa bêtise, sur cette rupture qui rendait Yeleen désemparée dont j'étais sûr en plus qu'il en souffrait tout autant. Mais dans la forme, c'était autre chose. Le message que je souhaitais lui faire passer était altéré par cette noirceur qui éteignait tout mon bon sens ou mon empathie.

Envie de lui faire mal, de l'énerver, de lui faire sortir tout ce qu'il avait pour que nos deux flammes ne se changent en un incendie capable de raser cette chambre, puis cette salle commune et enfin ce château. C'était comme si mes émotions s'éteignaient peu à peu pour laisser place à ce monstre qui m'habitait depuis toujours. J'entendais cette petite voix dans ma tête qui me montrait tous ses défauts tout à coup. Entre le rejet de son plus grand amour qui me renvoya au rejet de ma mère petit à mon égard, et le fait que ce soit le fils de @Braxton Clearwater, je devais lutter pour ne pas virer fou. Je mélangeais tout. Un tout alimentait par une douleur qu'on me demandait d'étouffer en allant de l'avant.

Ma colère était insensée. Un éclair de lucidité ?

« - C'est comme ça qu'on traite l'amour de sa vie chez les Clearwater ? En le détruisant ? »

Je jetais un regard rapide sur ses affaires, m'approchant de lui, comme si j'attendais qu'il fasse le premier sang. Je ne pouvais m'empêcher de faire un parallèle avec la situation que vivaient actuellement ses deux parents. C'était terriblement bas. Je le savais. Mais en même temps, je détestais tellement voir Sean faire ce qu'il avait fait à Yeleen. Je voulais qu'il s'en rende compte pour se relever et qu'il se rende compte de sa bêtise. Je voulais le voir fuir notre conversation pour qu'il la retrouve devant la salle commune de Serdaigle pour lui demander pardon, pour qu'il l'implore à le reprendre.

Je revoyais les larmes sur sa peau métissée, son visage défait par une douleur qui ne pouvait être décrite. Elle avait tellement souffert. Peut-être pas autant que Sean, mais elle, en dehors d'@Apolline Dunn, elle n'avait pas eu beaucoup de familles autour d'elle pour devenir cette jeune femme forte qu'elle était aujourd'hui. Alors qu'elle pensait avoir enfin trouvé son bonheur, sa famille car c'était ce que nous étions, encore plus depuis cet été, il lui retirait tout.

Au nom de quoi ?

Mes mains agrippèrent sa chemise dès ses premiers mots pour lui serrer le vêtement avec cette force que me conférait cette colère. Qu'est-ce qu'il voulait dire ? Hein ? J'allais très bien, plus que bien même, je n'avais pas été enlevé par une sombre organisation pour finir aussi fou que lui ! Parce qu'il fallait être complètement dingue pour abandonner son seul réel support lorsque tout était noir autour de soi. Je n'imaginais pas une seule seconde faire ce qu'il avait fait à @Asel Misra. C'était impensable. Tout comme @Yeleen Sô, j'avais attendu le retour de mes cousins dans la couleur, mais le plus dur pour moi fut bien évidemment cette attente dans laquelle on me mit lorsque je sus qu'Asel avait retrouvé les siens.

La colère animait mes traits qui n'avaient plus rien du jeune homme doux que je pouvais être dans d'autres circonstances.
« - Qu'est-ce que tu veux dire, hein ? Je vais très bien ! »
Oui, j'allais bien. J'allais plus que bien même, j'étais avec Asel, moi, j'l'abandonnais pas, attendant le moindre moment de faiblesse de sa part pour me montrer présent pour l'accompagner dans sa guérison. Parce que c'était ce que faisaient deux personnes qui s'aimaient d'un amour sincère et profond.

Je ne comprenais pas ce qu'il voulait dire. Je sentais le sang battre à tout rompre dans mes tempes.

Mais lorsqu'il parla, lorsqu'il répondit, je crois que... Je crois que ma tête allait exploser. La rage s'empara de moi, car je savais qu'il avait raison. Chez les Mesli, on n’était pas du genre à tirer les vers du nez. Tonton attendait toujours que ma tante ou moi venions vers lui pour se montrer présent, nous laissant toujours un peu de temps pour digérer nos émotions, notre douleur. Quelque chose qu'il avait hérité de mes grands-parents qui avaient fait pareil avec leurs deux enfants, puis avec moi lorsque je restai chez eux quelque temps. Il fallait que cela vienne de nous pour une meilleure écoute, une aide plus... Impactante... On ne guérissait pas quelqu'un qui ne le voulait pas.

Cela ne m'avait pas empêché de lui demander comment elle allait, ou même de me montrer plus doux, plus avenant afin de l'aider dans certaines tâches que nous fîmes lorsque nous nous vîmes au cours de l'été. Mais ce qu'il ne se rendait pas compte, le Sean, c'était qu'à cause du nom de ma tante, de ce qu'avait fait son père, je n'avais pas pu approcher autant de fois que je l'eu voulu l'île de Skye. C'était compliqué, pour sûr, car c'était à cause des Clearwater qu'Asel avait été kidnappé, c'était à cause de son père à LUI. Et il se permettait de lui balancer tout ça à la figure sans même essayer de comprendre ?

Les mots de mon cousin eurent l'effet d'un coup de couteau entre mes omoplates. C'était perfide. Je me fichais bien de savoir si j'l'avais cherché ou pas. Ma première réaction fut de le repousser pour me donner suffisamment d'élan pour abattre mon poing sur son visage avec toute la force dont j'étais capable sans l'élégance d'une attaque comme j'avais pu tenter de l'apprendre à Amy quelques mois plutôt.

Je sentis que ma main s'écrasait sur son visage avant de me mettre à lui hurler dessus.
« - SI ON EN EST LA C'EST À CAUSE DE TON PERE ! HEIN ? DEMANDE À TA MÈRE ! »
Je n'attendis pas qu'il se redresse ou un quelconque geste de sa part, je revenais à la charge pour le redresser moi-même, la haine me conférant une force que je n'aurais jamais eue si je n'avais pas été dans cet état.
« -SOUVIENS-TOI DE CE QU'A DIT ASEL. SOUVIENS-TOI. »
Je le repoussais à nouveau, inspirant profondément pour essayer de reprendre le contrôle de mon corps qui baignait dans cette colère si exaltante. J'avais le goût du sang dans la bouche. C'était une dangereuse sensation qui me galvanisait malgré la douleur que je ressentais au plus profond de mon cœur.
« - On en est là parce que ton père a baisé notre putain de prof. de soins aux créatures magique. TU LE SAIS ! »

Mes mains me démangeaient, mais j'avais besoin de parler.
« - Alors ouais, on a pas été torturé comme vous. Mais l'attente dans laquelle nous étions, Yeleen et moi, c'était notre torture. C'était notre P U T A I N de torture. À ne pas savoir ce qui se passait, à ne pas avoir le droit de quitter l'île, à ne pas pouvoir chercher les deux seules personnes qui comptaient plus que nos vies, à ne pas savoir si on allait revoir les deux personnes que nous aimions le plus au monde, hein ? Mais ça, tu n'y as pas pensé, hein ? HEIN ? »
Mon torse se levait au rythme de ma respiration qui me demandait plus d'air que ce dont j'en aurais eu besoin si j'étais calme. Une larme roula sur ma joue sans savoir si elle contenait l'essence de ma rage ou de ma douleur.
« - Mais t'as bien fait. T'as bien fait Sean. De la larguer. Tu la mérites pas. Et ça lui évitera d'avoir le même destin que ta mère dans vingt ans parce que t'auras été trop nul toute ta vie pour te rendre compte que ta famille continuait d'avancer sans toi. »

Je le regardais avec une haine mêlée à un dégoût comme jamais je n'avais eu pour personne sauf pour son père, justement.

Sean ne répliquait pas, et ça me rendait dingue. J'avais qu'une envie, c'était qu'on se batte comme des chiffonniers, quitte à ce que l'un de nous deux restait sur le carreau. J'en avais rien à foutre que ce soit lui ou moi, tout ce que je voulais c'était le cogner suffisamment fort pour qu'il se rende compte de sa connerie. Je ne pouvais m'empêcher de souffler comme un buffle. Mon corps était secoué par d'intenses émotions et l'adrénaline qui affluait de mon cœur semblait être doper par ma colère. Il me fallut quelques instants pour comprendre ce qu'il me répondait.

Je ne savais pas quoi répondre. Mon rythme cardiaque semblait se calmer, tandis qu'une éclaircie se faisait voir sur mon visage plein de colère. C'était comme si j'approchais de la lumière, comme si c'était la fin de ce coup de sang qu'on venait d'avoir lui et moi. Nous revenions doucement à nous même, à cette relation que nous entretenions depuis des années, et ma colère sembla se dissiper. Je parvenais enfin à avoir un peu de recul sur ce qui venait de se passer : de la rupture avec Yeleen, jusqu'au coup de poing que je lui mettais.

Je baissais la tête. Je comprenais mieux que quiconque ce qu'il voulait dire malgré que nos situations furent inversées. Pourtant, ce qu'il redoutait, c'était exactement ce que j'étais capable de faire pour Asel. D'échanger ma place avec elle, de tout encaisser, en espérant que mon dos et ma tête soient suffisamment résistants pour tout endurer. Par amour, peut-être, tinter d'une certaine forme de stupidité. Mais c'était aussi ça l'amour. Se préserver l'un l'autre contre tout et n'importe quoi.

Je regardais ma main qui était rouge par le coup que je lui avais mis. Mon regard se brouilla un instant alors que mes yeux se remplissaient de larmes. Que devais-je lui dire pour qu'il comprenne ce que Yeleen et moi ressentions pour Asel et lui ? Que devais-je faire pour combler sa douleur ? Comment lui promettre que tout était fini, qu'il s'en faisait pour rien quand on ne savait rien de ce que faisait son père, ni même de ce qui se passait avec cette @Kathleen J. Jones ? Je reniflai, abattu. Sean était dans le même cas que moi. Il avait tout perdu. Sa santé mentale, son corps sali par les tortures subites, et l'amour que ses parents se portaient l'un à l'autre.

Je voulus le prendre dans mes bras, je voulais sincèrement, mais je ne me sentais pas capable. Pas maintenant. Nous devions parler pour que tout ceci ne se reproduise plus. Sean, c'était mon cousin, mon meilleur ami, mon frère. Je ne pouvais pas le laisser dans cette douleur sans lui avoir extirpé tout son venin. Il fallait qu'il parle. Il fallait que je parle. Il fallait que nous nous ouvrions l'un à l'autre comme nous l'avions toujours fait après quelques instants de silence particulièrement gênant (surtout pour moi).
« - Sean... »
Je relevais mon visage pour croiser son regard. J'essuyais rapidement mon visage, avant de continuer.
« - Tu le sais aussi bien que moi que c'est pas bien ce que tu fais sinon tu s'rais pas aller te bourrer la gueule après l'avoir fait. » Lui fis-je constater. « Tu veux la protéger ? OK. Mais c'est pas comme ça que ça marche... Comment tu crois qu'elle est en ce moment, hein ? »

Je m'approchais de lui, tentant de remettre maladroitement ses habits que j'avais froissés correctement, en vain. Je relevai mon regard vers lui.
« - Je suis pas un Clearwater comme toi, mais je pense aussi que l'amour est quelque chose de fort, quelque chose sur lequel s'appuyer pour se sortir de... Des ténèbres. »
Je baissais le regard, car je parlais de quelque chose qui m'affectait profondément. Je lui parlais de ma relation avec Asel. Elle était un phare dans ma nuit, capable de me guider vers son rivage pour apaiser mon cœur.
« - Te fais pas ça, Sean. Ne lui fais pas ça... Va juste lui dire ce que tu viens de me dire. »
Ma lèvre se mit à trembler, tandis qu'une larme roula le long de ma joue. On s'en sortirait jamais de cet été.

Je regardais Sean l'air interdit alors qu'il me révélait certaines informations que nous n'avions pas eu au moment de sa libération. Je ne savais pas trop quoi penser de ce qu'il me disait. Une espèce de calme étrange s'installait en moi alors que j'analysais les informations qu'il me donnait, réfléchissant à ce que je pouvais réfuter ou pas. Je trouvais cela perturbant que ce fut ce Ryan à l'origine de sa libération. Je compris alors pourquoi il ne se sentait pas aussi bien que s'il avait été libéré. De ce que j'avais compris par mon oncle Amastan, il avait été dans un endroit pas loin de la Russie. C'était à se demander ce que faisait la douane sorcière quand on voyait qu'on pouvait déplacer aisément des sorciers d'un pays à l'autre sans qu'on leur posât des questions.

Je fronçai les sourcils en imaginant une espèce de ceinture piégée sur mon cousin. C'était exactement l'idée que je me faisais de l'idée d'être transformé en arme. Un peu comme ce qu'on voyait à la télévision moldue de temps en temps. Je déglutis difficilement, me demandant tout à coup si je ne devais pas tenter de lui jeter un sort ou quelque chose dans ce goût-là pour m'assurer qu'il n'y avait rien avant de finalement en être sûr. Jamais mes oncles ne l'auraient laissé rejoindre Poudlard s'il y avait eut le moindre doute sur ce que Sean cachait malgré lui quelque part dans sa tête.

Je secouais la tête négativement, lui faisant comprendre que je n'étais pas d'accord avec lui. Il ne tenait pas en place. Je le voyais bien, il ressentait cette même envie que moi de parler, de s'ouvrir. Je serrais mon poing, content de l'avoir celui-ci vu qu'il avait eu l'effet escompté.

Il avait beau tenter de me convaincre. Je crois que lui, comme moi, nous restions campé sur nos positions. Nous n'étions pas des Gryffondor pour rien, bien que j'en doutais de plus en plus pour ma part.
« - Les vieux agissent pour nous protéger, pas pour le tuer. C'est ça qu'il faut faire. » Lui rétorquai-je, mon regard brillant d'une intensité particulièrement étrange. Sombre. Je laissais voir à mon cousin cette part d'ombre qui logeait en moi, prêt à sortir dès que je l'avais pu.

J'en étais à me demander si j'étais devenu un obscurus, si j'étais parvenu à le maîtriser, si les choses se seraient passées différemment. J'étais certain que oui. Je le ressentais comme si mes muscles avaient gardé en mémoire, comme s'ils avaient été préparés, à être ce que j'aurais pu devenir si mon oncle n'était pas intervenu in extremis.

Alors que je m'adonnais à penser des choses que je ne devrais pas, je vis le tasbeh de mon oncle dans sa main, me serrant contre lui, tentant de sortir la noirceur de mon cœur en me récitant Al-Baqarah avant de m'embrasser sur le front et de me dire que je devais... Une larme roula sur ma joue. Même après toutes ses années, je n'étais pas capable de me laisser aller dans ce souvenir à la fois si douloureux, mais plein d'amour. D'un amour que mon oncle était capable de m'offrir alors qu'il ne me connaissait pas plus que cela au vu de la distance qui nous séparait à l'époque.

Sean était en pleine dépression. Est-ce que mon oncle parviendrait à le sauver ? Je n'en savais rien. Mais s'il y avait bien une personne à laquelle mes pensées vinrent en plongeant mon regard dans les yeux pleins de souffrance de mon cousin, c'était sa mère. Sa mère et mon oncle Jameson. Ces deux-là avaient une belle emprise sur lui. Il faudrait que je les contacte. Et c'était bien ce que je ferais quand je quitterai ce dortoir.

« - J'y pense tous les jours à Asel. Comme je pense à toi, à Yeleen, à Apolline, à Micky. »
C'était vrai. Plus que vrai, maintenant qu'on avait vécu tout ce qu'on avait vécu. Six années. Six. Ce n'était pas rien. En plus de tout ce que j'avais déjà pu partager avec lui. Avec mon cousin. On était si proche, si semblable et si différent.

Je le regardais alors qu'il me tenait le col. Je ne voulais pas rompre notre contact visuel. Je voulais lui montrer que j'affronterai ses problèmes comme si c'était les miens.

Lorsqu'il me lâcha, j'amorçai un geste pour le retenir un peu près de moi, comme si j'espérais pouvoir aspirer sa douleur. Je ne pus m'empêcher de secouer la tête.
« - Si tu fais ça, il aura gagné. Parce que c'est exactement ce qu'il veut. Que tu souffres, et par extension, que nous souffrions tous. Car c'est exactement ce que je ferais si j'étais à sa place. »

Je levai le regard vers lui.
« - Si Asel venait à me quitter pour un autre, si je laissais exprimer ce que j'ai là - je tapotais mon cœur - alors c'est exactement ce que je ferais à la place de Ryan. Lui faire le plus de mal possible en m'attaquant à la famille de son nouveau copain, en détruisant chaque personne pour qu'elle me supplie d'arrêter. Qu'elle me jure de se remettre avec moi quand bien même ce serait la relation la plus toxique de tous les temps. »
Un étrange feu ronflait dans mes pupilles. J'étais très sérieux. Il y avait une espèce de colère froide sur mon visage, quelque chose d'effrayant. Je lui parlais à cœur ouvert même si c'était des choses pas très belles à entendre.

« - En voulant nous éviter de subir le même traitement que tu as vécu, tu nous punis en nous forçant à te sortir de nos vies. Tout le monde souffre, Ryan a gagné. »
Mon regard n'avait pas changé d'un iota. Je le regardai longuement avant de finalement soupirer. Mon visage se détendit quelque peu, laissant la tristesse s'accaparait de nouveau de mes traits. L'amour que je lui portais malgré tout revint dans mes pupilles devenus si sombres par mes propos.
« - Laisse-nous t'aider, frérot. » lui dis-je d'un ton qui se voulait compatissant, mais qui sonnait plus comme une supplique qu'autre chose.
Je détestais me mettre à genou pour obtenir quelque chose. J'avais beau vivre depuis longtemps en Angleterre, mon sang kabyle et algérien m'imposait de garder la tête haute, même dans la douleur.