Calamity (Finn)

Le soleil s’était déjà levé depuis un petit moment. Sentir le soleil timide des débuts de printemps écossais sur son front n’avait pas suffi à le tirer des bras de Morphée dans lequel il s’était profondément installé. La veille avait eu lieu une soirée légèrement agitée pendant laquelle l’alcool avait coulé à flots. Il fallait bien évacuer les tensions d’une façon ou d’une autre et Finn ne pouvait pas casser la gueule à ceux qui avait imaginé la nouvelle loi.

Déclarer son statut. Qu’est-ce que ça pouvait bien leur faire? Étaient-ils effrayés à ce point des sorciers différents de la norme pour leur demander une telle chose? Si un pauvre étudiant qui usait de ses charmes seulement pour séduire les faisait sursauter, il n’avait clairement plus rien à faire pour le gouvernement actuel.

Alors Finn avait bu, beaucoup trop bu, à tel point que toute une partie de sa mémoire s’était effacée. On aurait aussi bien pu lui jeter un Oubliettes hier soir que le résultat aurait été identique.

« Le crochet de serpent… » commença-t-il à dire en agitant les bras avant de continuer: « Vu sur son balai… » Cela n’avait aucun sens. « Arrête Evelyn » Puis il s’était tu. Du début à la fin, Finn dormait, ce qui n’était pas le cas d’  @Edel Almadovar, son voisin, qui lui était éveillé. Sentir la main du Almadovar sur son épaule ne suffisait pas à le sortir des limbes.

Un grand ronflement sorti du nez de Finn avant qu’il n’ouvre les yeux en grand. Si l’on puit dire. En réalité, ses yeux étaient si minces qu’on aurait pu croire à un magnifique soleil d’été. « Par Merlin » avait-il commenté avant de se tourner dos à l’astre.

« Bien dormi beauté? » dit-i, la voix rauque,l à l’attention d’Edel pour rire. « J’crois que j’ai trop bu hier. » Il posa une main sur son front, comme si cela avait pu l’aider à apaiser le marteau qui cognait contre son cerveau. « On a cours ce matin? Par pitié, dis-moi que non. Si c’est Métamorphose, je saute de la Tour d’Astronomie. » Il soupira. « Remarque, ça fait trop haut à monter avec l’alcool que j’ai encore dans le sang. »

« Me demande pas de te foutre une tarte, tu sais très bien que je m’y donnerais à cœur joie. » lâcha-t-il avec un gloussement. Il ne fallait pas lui demander deux fois d’emmerder un bon pote. Finn adorait ça, quitte à pousser le bouchon un peu trop loin et faire déborder la potion. Après quoi, il faisait un joli sourire de lutin espiègle et la moitié, parfois tout, était oublié. C’était si facile et si drôle.

« Merlin soit loué, j’aurais pas supporté les brimades de mon daron d’aussi bonne heure. » C’était à hurler de rire. Il n’était pas si tôt que cela et, à vrai dire, Finn n’avait strictement aucune idée de l’heure qu’il était. La pendule aurait pu sonner juste contre son oreille qu’il n’aurait rien entendu tant il avait bien dormi.

« Rappelle-moi de baiser les pieds de @Xris Andērson quand on lèvera… A moins qu’il soit déjà occupé à embrasser une nana. » Un sourire de mutin se dessina sur ses lèvres alors qu’il se tourna pour regarder Edel. « Tu crois qu’il y a quelqu’un dans son lit ce matin? » demanda-t-il, véritablement curieux. Xris était un drôle d’oiseau, mais c’était un bon gars et un de ses meilleurs amis ici. « Ah, il cache bien son jeu. » remarqua-t-il dans un soupir avant de croiser ses bras derrière la tête.

Il n’était pas d’humeur à frimer sur son balai ce matin. Son intuition lui murmurait à l’oreille que ce ne serait pas de la sueur mais de l’alcool qu’il transpirerait à grandes gouttes s’il se pointait sur le terrain d’entraînement. « Quel dommage, je ne pourrai pas satisfaire les beaux yeux de ces dames. » glissa-t-il avant de ricaner.

« Qu’est-ce que tu racontes? T’es encore ivre ou quoi? » avait-il demandé à l’évocation d’  @Evelyn Morgan. « Je sais pas de quoi tu parles. » avait-il menti. A tous les coups, comme un imbécile, il avait soupiré son nom dans son sommeil. Evelyn et lui ç’avait été court mais intense. Elle avait marqué son esprit comme personne ne l’avait encore fait, mais tout s’était bien trop vite terminé. C’était certainement la seule histoire dont le Korrigan ne parlait jamais, par simple pudeur. Peut-être aussi pour éviter d’admettre que, quelques temps, son cœur avait un peu flanché.

« Ah. » avait-il soufflé, presque déçu. Si Edel n’était pas réellement de ceux qui aimaient alimenter les ragots ou broder autour d’une rumeur, Finn raffolait de ces choses.  @Xris Andērson était son ami, ce qui le poussait à conserver quelques scrupules, mais le Korrigan rêvait de papoter autour de ce sujet autour d’une tasse de thé. Cela intéresserait-il  @Siobhán Gavalagh-Korrigan?

« Oh, par pitié, dis-moi que j'rêve. » grimaça-t-il en s’imaginant embrasser les orteils poilus de son ami. « Dis-moi qu’il avait des chaussettes, ou au moins qu’il avait les pieds propres?! » gueula-t-il, les mains sur ses yeux comme pour lui cacher cette horrible vérité.

La discussion avait soudainement pris une toute autre tournure. Edel avait sciemment dévié toute son attention sur Finn. Il ne se cachait pas réellement de ses histoires de coucheries, surtout entre potes. Sauf quand elles possédaient un sens bien plus profond qu’il le prétendait.

Finn avait longuement regardé Edel avant de détourner la tête, faisant mine de frapper dans son coussin pour s’installer plus confortablement. Pourtant, à ce moment précis, Finn mourait d’envie de prendre ses jambes à son cou. Rien que pour éviter le sujet. Il n’y avait pas grand chose à cacher, si ce n’est le pansement que le Serpentard avait appliqué sur une de ses plaies. C’était difficile à admettre, mais  @Evelyn Morgan avait laissé une marque unique sur son esprit. C’était certainement la seule femme qui, pour l’heure, le rendait fébrile. Ces histoires de coeur étaient censées être à des années lumière de celles auquelles le Korrigan prétendait s’intéresser.

« T’as dû rêver. » conclua-t-il, cherchant à ne pas épiloguer. Edel n’irait certainement rien raconter. Tout comme Finn qui gardait ce genre de choses pour lui. Personne ne savait ce qui l’avait autrefois relié à Evelyn, pas même Siobhán. « Crois-moi, j’aimerais te raconter quelque chose. » dit-il avec un sourire félin. Un petit mensonge sans importance. Au moins, il lui lâcherait peut-être la grappe.

Finn se cala, songeant à la petite blonde qui avait traversé ses rêves cette nuit, à cette jeune femme qui avait partagé quelques unes de ses nuits sans jamais totalement s’abandonner à ses bras. A cette femme indomptable qui lui avait retourné le coeur sans qu’il puisse jamais la retenir.

Une grimace affreuse s’installa sur son visage alors qu’il imaginait la scène qui s’était déroulée la veille. Le trop plein d’alcool, la goutte de whisky pur feu qui fait déborder la jarre, les chaussettes de  @Xris Andērson déglinguées par son entrain. A vrai dire, il ne se souvenait plus trop de la soirée, encore moins de l’incident que décrivait Edel. C’était certainement pour le mieux. Imaginer Xris avec des chaussettes dégueulasses le faisait cependant marrer et l’anecdote eut vite fait d’effacer le dégoût qui s’était peint sur les traits de Finn. « Ah, ça vient d’là cette drôle d’odeur de clacos, j’comprends mieux. Ça j’m’en souviens bien.» C’était faux, mais ça ferait sûrement rire Edel.

Il lui tourna le dos alors qu’il évoquait brièvement le sujet  @Evelyn Morgan. Finn avait choisi la fuite aujourd’hui et ça lui convenait très bien. Il avait déjà suffisamment de choses à gérer, suffisamment de problèmes pour ne pas s’en rajouter un dans le coin du ciboulot. Pourtant, lorsqu’il entendit le prénom de la jolie blonde franchir les lèvres du Serpentard, Finn retourna la tête aussi vite que si on lui avait dit que sa soeur courait un grave danger. Edel dû bien vite comprendre le sens que pouvait porter sa phrase, si bien qu’il mit peu de temps à ajuster ses propos. Et Finn, comme un idiot, avait porté plus d’attention à l’anecdote qu’il n’aurait dû le faire. Pour quoi allait-il passer maintenant? Un joli coeur qui va cueillir des fleurs?

Le Korrigan n’aimait pas vraiment lorsqu’Edel lui disait jouer avec Evelyn. Son coeur se serra un peu, ses froncils se froncèrent avant qu’il n’essaie de se reprendre. Ce n’était pas le moment de se fâcher. Finn faisait preuve d’un calme exemplaire, lui qui était connu pour vite laisser déborder ses émotions.

« Ouais, j’t’écoute. » dit-il, véritablement curieux de savoir ce qu’il allait lui confier. Il afficha un air inquiet alors qu’il examinait le visage de son camarade. Ce n’était pas le genre d’Edel d’afficher un air si torturé. Il était davantage un coq fier qu'un chien qui cache sa queue entre ses pattes.

« Si t’as un truc à m’dire, regarde-moi dans les yeux au moins. T’as fait quoi encore comme connerie? » demanda-t-il, encore plus inquiet. Que lui avait-il caché de si horrible? Pourquoi cela changerait-il quelque chose au juste? Finn énuméra rapidement une liste de conneries qu'Edel pourrait bien avoir faites en son nom sans jamais recenser quoi que ce soit qui mérite une once de ressentiment.

Son coeur se serra un peu plus fort, sentant que la situation allait rapidement leur échapper des mains.

« Calm down. » avait-il dit pour apaiser les choses. « Molo l’asticot, sinon j’risque de pas te suivre. » Finn voulait bien écouter, il voulait bien entendre toutes sortes de bêtises, mais il risquait de ne pas supporter que quelqu’un décide de l’asticoter de bon matin. La maladresse était l’un des nombreux défauts du Serpentard qui, malgré lui, faisait toujours des remarques qui avaient le don de déplaire. « Tu sais très bien que c’était une manière de parler. » Si Edel n’avait pas pris un air si sérieux, il lui aurait certainement tourné le dos pour lui faire une grimace ou pour l’imiter en train de grogner. Mais visiblement, l’heure n’était pas à l’humour et plus le temps passait, plus l’air sérieux d’Edel l’inquiétait. Il était si rare de le voir dans un tel état que cela valait presque le coup de faire une croix dans le calendrier.

Les yeux de Finn durent s’agrandir autant que ceux d’une chouette en pleine nuit tant la surprise qu’il manifestait était grande. Elle? Elle qui? Qui était la demoiselle qui chamboulait tant Edel? Je l’savais qu’il y avait un truc qui tournait pas rond! Se félicita-t-il alors que le mystère planait toujours. Il avait envie de le bousculer un peu, de pousser son épaule pour l’encourager à continuer. Pourtant, quelque chose lui disait que s’il le chatouillait un peu trop, son camarade risquait d’exploser en chemin. Il semblait si tendu que Finn n’osait même pas bouger le moindre petit doigt. Alors, il ne l’encouragea pas à continuer bien que tremblant d’impatience à l’idée de se mettre un nouveau ragot sous la dent.

« Tu sais que j’suis une tombe. » répondit-il d’un air parfaitement convaincu. Il l’était quand ça l’arrangeait, en réalité.

Il patienta, assis en tailleur entre les draps d’Edel. Lorsque ce dernier lâcha le morceau, Finn en resta bouche-bée, ne disant rien pendant l’espace de quelques secondes, comme si l’information était trop grosse. Etait-on déjà rendus au premier avril?

« Pardon? » avait-il simplement réussi à dire au début, stupéfait. « T’as dit que t’étais amoureux, j’ai bien compris? » Il regarda Edel, estomaqué, comme s’il n’avait jamais rien entendu de tel dans sa vie. « Waaaaaah. » lâcha-t-il avant de s’affaler de tout son poids dans le lit. « Alors je m’attendais à tout, vraiment à tout, sauf à ça. J’y crois pas. » Il prit un peu de temps pour accepter l’idée, ravi pour son pote à vrai dire, avant de réaliser qu’il ne connaissait que la moitié du secret.

Il se releva d’un coup, surexcité. « C’est réciproque tu crois? Mais attends, c’est qui d’ailleurs cette nana qui t’as fait perdre la tête? »