Mellon Collie And The Infinite Sadness

Mellon Collie And The Infinite Sadness

03 mai 2023

Il n'avait trouvé aucun plaisir à porter l'insigne de préfet ces derniers temps. Les resquieurs se faisaient légion et il ne pouvait que les comprendre. Après tout, n'avait-il pas été tenté lui aussi de prendre des nouvelles de ses parents ? A la seconde où  @Adil Mesli avait fait ce cruel parallèle entre l'histoire moldue et l'histoire des sorciers, l'idée n'avait fait qu'un tour dans sa tête. Il avait fait en sorte que "The Book Wyrm" tire le rideau le temps que ça se calme. Il s'était rassuré comme il pouvait en envoyant ses parents loin de tout ça sous un faux prétexte, il ne voulait même pas savoir comment M. Vorpe s'y était pris. Une partie de lui même crevait pourtant de savoir vraiment, pour être sûr. L'autre craignait de désapprouver trop fortement.

Ce soir là, il faisait moins froid que les précédentes, mais le ciel semblait devoir hésiter entre un voile aveugle ou un drap piqué d'étoiles jusqu'au point du jour. Par chance, il ne serait pas debout toute la nuit pour le vérifier. Il était près de vingt-trois heure, quand, se rappelant les directives de  @"Neizan Almadovar" , le préfet en chef, il prit sur lui de prendre à gauche plutôt qu'à droite, ce qui l'aurait ramené plus rapidement à la salle commune de Poufsouffle. En dehors de la désespérante statue de Wilfrid le Mélancolique, Sheraz ne s'attendait à absolument rien de bien transcendant. Alors évidemment, quand son regard accrocha une petite silhouette à la tignasse blonde qu'il avait l'habitude de fuir en temps ordinaire. Sur le coup, il ne se posa pas vraiment la question. Après tout, Brynn portait l'insigne, tout comme lui.

« Hey... qu'est-ce que tu fais ? », demanda-t-il plus pour ne pas lui laisser l'initiative qu'autre chose.

Chaque fois qu'elle lui coupait l'herbe sous le pied, il le regrettai. C'était écrit dans le marbre.

C’est quand Brynn avait signé la lettre qu’elle s’était dit que ça ne pouvait plus durer comme ça. La lune s’afficherait presque pleine ce soir et ne pas savoir s’il allait bien ou ne simplement pas tenir ses promesses la rendait folle. Elle plia malgré tout soigneusement la lettre, qu’elle avait baigné comme à chaque fois dans de l’essence de délicate de minuit, et elle se leva, toute prête à faire sa ronde et plus encore.

Les pieds nus sur la pierre du château, Brynn Gwent était la préfète la plus redoutée sans doute, tout juste après la casse-pied en chef Apolline Dunn. C’est qu’à la façon d’un serpent, elle se faufilait partout et interrompait tous les moments sans sourciller, sans pour autant punir. Elle savait que sa présence était déjà bien assez pénible, et elle rendait mal à l’aise quiconque croisait son regard piquant.

Cette fois, elle se planta sans un mot devant la statue de Wilfrid le Mélancolique.

La gorge un peu serrée, elle se demanda ce que ça lui vaudrait de retour au tertre, de la part de sa mère. Branwen n’était pas exactement une femme à accepter le puéril des réactions de sa seule fille biologique. Brynn comprenait qu’elle refusait de la voir prendre un chemin semblable au sien, et pourtant, n’était-ce pas ce qu’elle envisageait ? Sa main serra plus fort la lettre qui serait désormais froissée, mais elle s’en fichait, s’intimant de ne pas l’envoyer par un quelconque hibou mais de la brûler en présence de son destinataire.

Alors qu’elle se décidait, des pas la tirèrent de ses sombres desseins.

Et comme s’il ne manquait plus que ça, Sheraz Mahal apparaissait devant elle. Elle détourna le regard, pensant un court instant avoir la paix. Le poufsouffle n’était pas très enjoué à l’idée de partager avec elle quelques mots. Elle avait noté avec un certain amusement qu’elle était d’ailleurs la seule qui ne lui tirait aucun bafouillement ou changement de couleur inopportun. Elle aurait pu s’en vexer, si seulement Brynn ne se fichait pas de ce genre de chose, comme elle avait l’habitude de prendre ce qui l’intéressait vraiment, sans jamais désirer obtenir pour le plaisir d’avoir.

« C’est une vraie question ? » souffla calmement Brynn, penchant la tête pour mieux marquer son étonnement.

Elle eut un petit sourire amusé, avant de baisser les yeux sur la lettre qu’elle tenait entre les doigts. Le papier lui brûlait l’épiderme. Elle en aurait presque eu envie de la jeter.

« J’ai besoin de sortir » avoua-t-elle sans concession, comme la jeune Gwent était toujours entière, franche du collier, chose qu’elle ne tenait pas de sa mère qui était toujours pleine de secrets.
« J’ai vraiment besoin de sortir. »

Elle eut un instant de silence, comprenant la portée de cette idée qui allait finir par devenir une obsession.
Brynn tourna la tête vers Sheraz, l’oeil brillant.

« Tu connaîtrais pas un passage secret qui mène dehors, par hasard, Mahal ? »

C’était certain, après avoir dit ça, elle était folle.
Folle d’y croire, en tout cas.

Elle avait beau s'adresser à lui sans le moindre venin, il ne pouvait s'empêcher de se méfier d'où cette réponse tirer du fond de la plus pure prose néandertalienne :

« Bah euh... »

Oui, c'était une vraie question parce qu'à son sens, il n'y avait rien à faire ici sinon se poser des questions existentielles sur la marbrerie et la sculpture sur ocre. Enfin, rien de suffisamment fou pour les avoir attiré ici tous les deux. Bien loin de la soupçonner de quoi que ce soit - il n'était pas fou, du moins pas au point de lui jeter ses doutes à la figure - il eut l'étrange sensation qu'elle venait de balancer une brique dans le fond de son estomac alors qu'elle avouait de but en blanc s'apprêter à faire précisément la chose pour laquelle ils s’étreignaient à ces rondes rébarbatives.

Alors là Sheraz la regardait comme deux ronds de flanc. Pourquoi le lui avouait-elle comme ça, sans ambage, juste à lui ? Peut-être considérait-elle, comme tant d'autres, qu'il n'était que le petit Mahal et qu'il n'aurait jamais le cran de lui mettre les points sur les i, quitte à faire tomber quelques émeraudes en dehors du sablier des Serpentards... c'était carrément vrai. Mais il ferait de son mieux pour qu'elle y croit... du moins il en avait l'intention avant qu'elle ne pousse jusqu'à lui demander s'il connaissait un passage secret.

Il fallait dire qu'il lui avait largement laissé le temps de meubler la conversation pendant qu'il se remettait de ses émotions.

Euh bah aurait pu être la première réponse sortie de sa bouche si Moustache, le chat de Griselda Lovely ne s'était pas amoureusement enroulé autour des jambes de Brynn avant de disparaître derrière la statue de Wilfrid le Dépressif.

Alors ça : s'il avait voulu le faire exprès, ce satané animal n'aurait pas trouvé meilleur moment.

Sheraz adressa un regard effaré à Brynn avant de finalement se ressaisir.

« Attends, attends, attends. Ça n'est peut-être pas ce qu'on croit. », tu parles.... « Après tout il a pas tout à fait le même gabarit que toi ce chat. », et ça m'embêterait vraiment de devoir t'enlever des points.... hurla-t-il en pensée, « t'es sûre qu'il y a pas moyen de juste l'envoyer par hibou cette lettre ? »

C'était mieux que rien, pas vraiment dissuasif mais au moins il essayait d'engager le dialogue. S'il ne la faisait pas changer d'avis alors il ne savait plus quoi faire.

Derrière ses mèches blondes, Brynn Gwent se demanda ce qui pouvait bien se passer dans le crâne pourtant réputé prodigieux et fertile de Sheraz au moment où il bredouillait, peu assuré. C'était quelque chose d'assez courant, aussi elle ne fit plus attention à ses hésitations aussitôt un chat passant contre ses jambes.
Elle le suivit d'un regard curieux, avant de se rendre compte que ce dernier venait de lui offrir sa porte de sortie. Enfin, elle le pensait visiblement assez fort pour que Mahal ne s'ébroue à côté, sans doute angoissé à l'idée qu'elle ne s'enfuit à son tour.
Appréhension totalement justifiée, au demeurant.

C'est totalement ce qu'on croit, corrigea-t-elle sans faire preuve de suffisance, juste d'une excitation qu'elle avait du mal à contenir aux limites de son sourire trop grand.
Tu veux dire que je suis trop grosse, Mahal ? persifla Brynn sur un ton moqueur, alors qu'elle glissait dans ses cheveux sa main pour en tirer le reptile endormi, comme elle aurait retiré une brindille d'une mèche.

A la dernière phrase du préfet, Brynn lui adressa seulement un regard. Un seul.
Un regard puissant, profond, inquiet également.

Non, je peux pas, souffla-t-elle, le cœur en miettes à l'idée de devoir toujours se contenter de mettre en mot ce qu'elle brûlait de démontrer par ses actes.

Ce n'était pas une histoire de fesses ou une lubie de petite fille, c'était bien plus profond et important que ça.
Du moins, ça l'était à ses yeux.

C'est une question de vie ou de mort, termina-t-elle, sans en faire de trop.

Noodle, le python jusqu'alors endormi, se déplie lentement, extirpant sa longue queue constructice de la nuque de sa maîtresse.

Une fois au sol, il sonda le passage récent et Brynn se mit tout contre la statue, avant de commencer à la pousser tant bien que mal.

Tu peux me retirer des points, marmonna-t-elle dans l'effort, je dois…juste… m'assurer que… tout va bien… chez moi…

La statue ne bougea pas d'un pouce, frustrant davantage la petite blonde.
D'un geste rageur, elle frappa le granite qui, sous l'effet du désespoir de la gamine, se fit totalement intangible. Elle vit sa main disparaître dans le cœur de la pierre, comme si ça n'avait jamais été qu'une illusion.

Brynn jeta un regard à Sheraz et s'enfonça à l'intérieur de la statue, commençant une lente descente dans un escalier en colimaçon sombre qui s'enfonçait dans les entrailles du château.

Brynn Gwent avait le don de toujours appuyer là où ça faisait mal. C'était le genre de sadique à vous coller une bande de cire sur la barbe pendant que vous dormiez et à vous laisser vous démerder avec ça au réveil. Evidemment que c'était ce qu'ils croyaient mais Sheraz avait prié un instant qu'elle se mette à douter. Bien sûr, elle n'en fit rien. Mieux encore, elle lui mit le nez dans le caca, insinuant bien plus que ce qu'il avait voulu dire quand il avait sous entendu qu'elle ne passerait pas par le même endroit que le chat.

« Mais pas du tout ! Je - tu n'es pas grosse tu es... magnifique... pour- pour l'instant parce que tu sais, les femmes ont tendance à ressembler à leur mère mais je suis sûr que ta mère est parfaite aussi... enfin je sais pas, je la connais pas, je voudrais pas que tu te fasses des idées. J'ai pas d'avis sur ta mère hein... », et voilà qu'il était reparti sur cette pente glissante où jamais rien ne l'arrêtait. Ca ne se voyait pas tant que ça dans le peu de lumière où il ils se trouvaient mais ses cheveux avaient commencé eux aussi à changer de couleur sans trop savoir sur quelle nuance s'arrêter. Ils s'accordèrent brusquement sur leur noir d'origine en même temps que Sheraz se raclait la gorge.

La blonde tira une espèce de serpent de ses cheveux et lui ne put s'empêcher de se demander ce qu'elle y cachait d'autre. A quoi devait s'attendre son copain quand il croyait passer un moment romantique avec une fille pareille ? Un peu écœuré, le préfet de Poufsouffle se demandait ce qu'elle comptait faire de ce curieux familier, sans doute pas envoyer son courrier avec, encore que... il avait vu des choses bien plus étranges que ça depuis qu'il était à Poudlard.

Le ton changea lorsqu'elle lui répondit qu'il s'agissait d'une question de vie ou de mort, du moins il changea de son côté à elle. Lui, toujours aussi observateur lui retourna sur un ton goguenard :

« Toujours plus, t'exagère pas un peu ? »

Mais elle n'en fit aucun cas, profitant de ce que sa bestiole avait fait reculer Sheraz d'un pas, elle se mit à pousser la statue, ou du moins à essayer tout en soufflant une explication qui parlait un peu plus à son homologue de la maison d'à côté. S'assurer que tout aille bien chez elle ... il savait qu'il n'était pas le seul à se faire du souci pour ses parents. Il avait simplement tendance à l'oublier jusqu'à ce qu'on le mette devant le fait accompli.

« Je ferais pas ça si j'étais toi. J'ai un pote qui s'est pété - Hey ! », bon sang, c'était qu'elle venait de passer à travers la statue. Sans réfléchir, il lui emboîta le pas, prêt à lui faire la morale pendant tout le chemin s'il le fallait. Avec un peu de chance, ce passage secret ne menait nulle part.

« Attends mais t'es dingue, tu ne sais même pas où mène ce passage. Et si tu tombes sur .. un basilic ! tu n'as jamais lu l'histoire de Herpo l'Infâme, ou les annales de l'école ?! En Mille neuf cent quatre-vingt douze... »

La voix étranglée de Sheraz se perdait en échos dans le dédale de l'interminable escalier, mêlé au bruit de ses pas, comme il cherchait à rattraper une Brynn trop déterminée pour ne serait-ce qu'envisager la voie de la raison. Il était beaucoup trop tard pour lui enlever des points maintenant...

"Magnifique, hein."

Le sourire de Brynn rajouta sans doute une couche à la tangible anxiété de ce pauvre Sheraz Mahal. Il lui en fallait peu si on demandait à la Gwent, mais ce fut amusant de le voir virer de couleur comme une pierre iridescente. Elle termina de tirer Noodle de son sommeil et d'essayer de comprendre quel était l'étrange illusion qu'on avait jeté à cette statue pour ainsi dissimuler un passage secret.

"J'aimerais dire que j'exagère", souffla-t-elle alors qu'elle tentait de pousser la pierre à la force de ses bras. C'était vain mais il fallait qu'elle essaye, tout simplement, pour être certaine d'avoir fait tout ce qu'elle pouvait pour y arriver.

Au bord de l'agacement, et plus proche d'être désespérée en réalité, la jeune fille réussit enfin à traverser la pierre.

Elle vit bien le visage tordu de Sheraz, prêt à lui dire qu'il allait lui retirer des points, et même en parler avec son directeur de maison, mais Brynn s'en fichait. @Viper Saito occupait toutes ses pensées et elle en avait assez. Assez de cet enfermement, assez de devoir correspondre seulement par lettre et assez, encore plus, de se retrouver à ne pas pouvoir s'assurer qu'il allait véritablement bien.

Derrière elle, la voix agaçante de Sheraz sonnait comme le bourdonnement d'un moustique. Il lui était d'ordinaire sympathique, mais ce soir, elle n'était pas tant d'humeur que ça à le taquiner.

"Et alors ? Qu'est ce que ça fait si on tombe sur un basilic, mh ?" maugréa-t-elle, bien qu'elle savait très bien que le fait d'être fourchelangue n'allait pas lui offrir de survivre à une telle rencontre.

Et voilà maintenant qu'il partait dans des élucubrations sur les annales de l'école, et son historique, comme un dictionnaire qui aurait récité sa leçon par cœur.
Brynn eut une grimace, descendant toujours plus loin dans le boyau qui devenait toujours plus sombre, l'obligeant à sortir sa baguette et à chuchoter un lumos.

"Je pense que si un basilic nous trouve, c'est parce que tu auras fait trop de bruit, Mahal."

Avec ça, elle espérait un peu de silence, alors qu'elle devinait au-dessus de sa tête un boyau ancien. Ses doigts glissaient sur les pierres qui étaient douces et chaudes.

A en juger par la chaleur moite de la pierre, ils étaient quelque parts sous le lac.

Brynn eut une petite moue, espérant secrètement déboucher sur la forêt interdite que sur une cave d'un vieux fou ou d'un esprit qui aurait vécu ici. Un sourire amusé passa sur ses lèvres à cette idée, mais elle n'en fit pas part à Mahal, sinon il aurait été bien capable de repartir sur une myriade de mots agaçants.

La jeune Gwent s'arrêta finalement au pied d'un escalier, baguette levée mais qui ne révélait rien de ce qu'ils allaient trouver tout en haut de la montée.
En revanche, l'air s'engouffrait jusqu'à eux, balayant les cheveux blonds.

"C'est quoi ça encore…"

Brynn jeta un regard par dessus son épaule, voyant un Sheraz Mahal peu rassuré.
Maintenant qu'ils étaient aussi loin que ça, il n'était plus question de faire demi-tour, non ? La petite blonde grimpa les marches, doucement, en tentant de faire le moins de bruit possible.

Sans qu'elle ne sache quand et où, son lumos ne fit bientôt plus d'effet. L'obscurité les avala et alors qu'elle faisait un pas de plus, le boyau les jeta à même un sol fait de feuilles mortes et humides. C'était comme si soudainement leur monde avait basculé de 90° en avant, les propulsant vers le sol, avec l'effet d'avoir loupé une marche.

Derrière elle et Sheraz, aucune trappe ou porte. Seulement le sol et l'obscurité du soir.

Brynn leva de nouveau sa baguette avec un faible lumos, avant de murmurer :

"Si je ne me trompe pas, on est dans la forêt interdite… loin, dans la forêt interdite"  souffla la Gwent, ses pieds nus s'enfonçant avec délice dans l'herbe. Elle frissonna un instant de la brise encore fraîche, avant de jeter un regard aux alentours.

Les remparts étaient hors de vue et elle ne reconnaissait pas du tout les environs.

"J'ai laissé un porte-au-près pas loin du lac aux licornes. Je voulais pas qu'on me le confisque. Si jamais on le retrouve, on devrait pouvoir sortir d'ici."

Elle posa son regard sur le sol alors que son serpent sifflotant tendrement. Brynn se pencha, approcha le jeune python de son oreille et eut une petite moue perplexe.

"On devrait bouger, Sheraz. Noodle pense que nous ne sommes pas loin d'un nid d'acromantules."

D'un petit geste, Elle laissa glisser le python dans ses cheveux, ce dernier ne sortit la tête de sa tignasse blonde que pour siffler vers Sheraz.

Et là, comble du comble, Sheraz Mahal était en train d'essayer de faire abstraction de Brynn, qui parlait - à son goût - encore plus que lui. Il s'étrangla à moitié quand il vit avec quelle désinvolture elle envisageait la rencontre avec un basilic. Avait-elle oublié tous ces cours de SACM qu'elle avait passé à se moquer de son incompétence à lui ? Ce talent exceptionnel qu'il avait pour faire enrager n'importe quelle bestiole allait faire tourner court leur petite aventure hors les murs vite fait bien fait. Et d'ailleurs, c'était la première fois qu'il s'aventurait "hors les murs" depuis qu'il était à Poudlard. Il avait bien évidemment profité des transplanages d'escorte pour se rendre ici ou là mais ce soir, ça n'avait rien à voir.

Renfrogné et pétri de stress, Sheraz se recroquevillait dans sa robe de sorcier. Il prisait peu l'humidité ambiante, au même titre que tout le reste et la légère odeur de moisi le prenait aux narines. Alors, sans même maugréer, il suivit Brynn, presque docilement, espérant secrètement ressortir à un endroit ou un autre du château. Au bout d'un moment, la voyant donner du revelio dans tous les sens, il sortit de son sa robe , ses lunettes de précision, apparemment indifférent à l'air crétin que ça lui donnait. Un jour, il se pencherait sur la question pour apporter quelques optimisations à ce précieux outil.

L'air frais qui les accueillit au pied d'un nouvel escalier ne lui disait rien de bon. Au pire ils étaient quelque part dans le parc, près du lac. Encore une fois, il la laissa passer devant, fermant les yeux en attendant la révélation.

« Brynn ? », appela-t-il d'une voix plaintive et étouffée.

Il venait de se passer une chose qui défiait parfaitement son sens logique. Comme si... l'obscurité les avait englouti. Peut-être étaient-ils morts tous les deux, frappés par un maléfice fulgurant. Ou peut-être... LE BASILIC ! Non, ça n'était pas le basilic mais bien pire...

« Tu m'ôtes les mots de la bouche. », chougna-t-il en réponse à la supposition qu'elle faisait quant à l'endroit où ils se trouvaient. Dans un geste désespéré, il se rapprocha d'elle au point de presque la coller mais quelque chose qui glissait entre leurs jambes lui fit faire un spectaculaire bond en arrière. Sale bête ! Quelle idée d'avoir un serpent pour familier ?!! Mais non, ça n'était pas noodle, et d'ailleurs :

« Comment ça "Noodle pense", tu es fourchelangue maintenant ???!! », il ne savait pas trop s'il trouvait ça super cool ou d'autant plus flippant. Ni comment il avait pu ne pas s'en rendre compte jusqu'à maintenant. Le sifflement de Noodle acheva de le convaincre de ne pas se poser trop de question. « Ca va ça va, j'ai pas plus envie que toi de me frotter aux accromantules. », protesta le jeune homme, flipette comme pas deux, « J'aurais dû emmener mon compass, ou un stormglass, comment on va savoir qu'on est pas en train de se jeter tout droit dans la leur tanière et puis.... si on pouvait grimper... j'ai une idée ! »

De manière très décousue, certes, il était en train d'avancer le début d'un plan pour se sortir de là.

« Je vais grimper en haut de cet arbre. Toi tu feras le guet et comme ça on aura à peu près une idée de la direction à prendre... enfin j'espère. Tu as une meilleure idée ? »

Si oui, il était preneur.

Le petit python siffla de nouveau sur Mahal quand ce dernier grommela sur lui, ce qui tira un petit rire clair à Brynn comme elle entendit très bien et comprit très clairement la petite insulte de l’animal. Elle préféra ne pas rebondir, ni sur l’un, ni sur l’autre. Tout ça, ce n’était que des histoires de garçons, et elle avait des soucis plus urgents à régler.

Alors qu’elle réfléchissait à comment se repérer dans la nuit noire et à partir d’un coin de la forêt interdite qu’elle ne connaissait pas, Sheraz eut une idée.

Les deux billes claires de la jeune fille passèrent sur le visage du poufsouffle, l’air perplexe un instant. Il n’avait peut-être pas tort. Ca pouvait peut-être marcher. Brynn se gratta le menton quelques secondes, pesant le pour et le contre, et finalement hocha la tête d’un air entendu.

« J’ai pas mieux en tête, alors on va partir là dessus. Tu grimpes, et moi je surveille. »

Elle ne fit aucun commentaire sur le fait qu’il avait visiblement assez confiance en elle pour croire qu’elle ne l’abandonnerait pas aux crochets des acromentules si jamais l’une d’entre elles débarquée à l’improviste. La jeune Gwent n’allait en revanche pas mener le sujet sur la table.

« Quand tu seras là-haut, tu devrais repérer la direction du lac aux licornes, parce qu’il brille même dans la nuit la plus profonde. Il émet une luminescence bien particulière en tout temps et à toute heure. Ca ressemble un peu à l’intérieur d’une pensine », même si elle ne savait pas si le poufsouffle savait à quoi ça pouvait bien ressembler.

Elle-même le savait uniquement car sa mère lui en avait parlé une fois. Si un jour elle venait à le vouloir vraiment, à le vouloir de tout son être, un souvenir bien particulier l’attendait au sein du Domaine. Un souvenir qui ébranlerait tout son être, et c’était pour cela que Branwen attendait que sa fille soit le plus solide possible pour le lui offrir... Maintenant qu’elle y pensait, elle n’avait presque plus envie de se rendre à Gorsedd.

Une petite grimace passa sur le minois de la serpentard. Du coin des yeux, elle suivit la silhouette de Mahal qui grimpait avec ses lunettes jusqu’à quelques mètres au dessus du sol. Elle attendit quelques secondes avant de sentir dans son dos comme un frisson désagréable.

Ce n’était pas elle - c’était Noodle. Les écailles du petit python se soulevèrent, traversés par un sentiment d’urgence et de danger. La jeune Gwent se retourna lentement et calmement, coupant un instant sa respiration en espérant seulement que cela suffirait à ne pas être repéré, mais les cliquetis joyaux émis par les crochets des deux acromentules qu’elle voyait s’extirper mollement du sol la renseigna aussitôt : oui ils étaient repérés, et elle, elle n’en voyait que deux pour l’instant.

« Sheraz » commença-t-elle, sa voix se gardant de trembloter, son sang-froid tentant de sauvegarder les apparences pour ne pas affoler le poufsouffle, « il faut que tu descendes... maintenant. »

Le timbre de sa voix sonna quelque peu autoritaire. La petite serpentard réfléchissait déjà à ce qu’elle devait faire pour la suite, mais plus elle y pensait, plus elle se demandait ce qu’elle allait pouvoir inventer. Deux acromentules... Ils n’arriveraient jamais à les semer.
Sa gorge se fit sèche alors qu’elle inspira profondément, chassant l’angoisse dans un coin de son âme, se répétant avec fermeté ce que Owen répétait souvent : la peur n’évite pas le danger.

La peur n’évite pas le danger.

Elle se placa devant Sheraz alors que ce dernier atteignait le sol.
« Laisse-moi faire » lui souffla-t-elle, alors que les immenses pattes des deux créatures approchaient d’eux deux.

« Pas un pas de plus » clama assez fortement la Gwent aux deux araignées, sans trembler ou hésiter.

Les deux acromentules émirent un petit bruit de mandibule s’entrechoquant, comme si elles étaient amusées. Leur repas avait l’air d’avoir de l’humour et cela faisait bien longtemps qu’elles n’avaient pas goûté un peu de chair humaine.

« Pourquoi devrions-nous t’obéir, petite fille ? »

« Nous n’obéissons qu’au père et à la mère de la colonie, tu n’as aucune autorité ici. »

Un sourire se dessina sur les lèvres de Brynn alors qu’elle repensait à la diarrhée verbeuse de Sheraz Mahal un peu plus tôt, alors qu’ils s’enfonçaient dans le passage secret. A l’histoire du Basilic et d’Herpo l’Infâme. C’était amusant, elle n’aurait jamais cru qu’être fourchelangue lui serait un jour utile à ce point, et surtout pas aux côtés de Sheraz Mahal.

« Je suis Brynn Gwent, fille de Branwen, et je dois traverser cette forêt. Si vous ne me laissez pas passer, je lâcherais sur vous la seule créature dont vous avez peur. La créature qui dévore vos frères et vos sœurs, et je la ferais dévorer vos pères et vos mères. Si vous ne me laissez pas rejoindre mon domaine, je lâcherais sur votre colonie votre vieil ennemi - un Basilic. »

A ce seul termine, les acromentules furent prises de doute.

Les deux araignées piétinèrent sur place, se jaugeant d’un drôle de regard, leurs seize yeux se figeant un long moment sur le visage sûr et ferme de Brynn. La gamine ne semblait pas doutée un seul instant, mais malgré ça, l’appétit était toujours là. L’une des deux acromentules avança un peu, se frottant les crochets l’un contre l’autre.

Brynn brandit soudainement Noodle à la face de cette dernière, avant de siffler en fourchelangue une menace que les acromentules sentirent résonner jusque dans le plus profond de leur essence. Cette vieille peur, ce vieil ennemi - ils l’avaient cru mort pourtant...

Noodle persifla à son tour, et si discrètement Brynn pensa pouvoir lancer un sort d’engorgement sur le python, son sortilège échoua lamentablement.

La plus petite des deux acromentules avait déjà reculé, mais pour la plus grosse, cela termina de la motiver à passer à l’attaque.

« Bon, c'est raté, maintenant, on court Sheraz » souffla Brynn, prenant ses jambes à son cou, suivant Mahal en espérant que ce dernier savait au moins où ils allaient et avait au moins eu le temps de repérer le lac.


__________
Jet de rencontre : 2 acromentules arrivent
Jet de détection : Elles repèrent les deux étudiants
Jet de persuasion : Brynn arrive à intimider une des deux acromentules
Sort engorgement (40%) : sort raté

Ses pieds s’enfonçaient dans le tapis d’herbes humides alors qu’elle détalait, prenant de temps en temps le soin d’observer par dessus son épaule les immenses crochets cliquetant des acromentules. C’était là peut-être la seule fois qu’elle en verrait d’aussi proches et d’aussi peu amicales, et malgré tout, il y avait chez Brynn Gwent un quelque chose de froid et de stable. De sa façon de se déplacer tout en analysant, en essayant de se repérer et de repérer les chemins potentiels. Des années à courir dans Gorsedd Arberth, souvent pour avoir désobéi à Branwen, un peu moins souvent pour tirer Myrddin Gwelt de situations qu’elle avait plus ou moins provoqué, tout ça l’avait conditionné afin qu’à ce moment-là, son coeur ne s’emballe pas et qu’elle n’en perde pas le fil. Il y avait, finalement, chez Brynn, un quelque chose d’implacable que n’avait pas sa mère, un quelque chose d’assuré. Comme si elle avait eu l’habitude, depuis toujours.

Quand elle tourna la tête, ce ne fut que pour voir l’explosion de lumière les baignait tous - comme s’ils entraient, Sheraz et elle, dans un Paradis. La Daphnée aux cheveux blonds eut un rire presque trop joyeux au vu de la situation alors qu’elle se rapprochait du jeune Mahal, tirant d’une main sur sa robe qui battait furieusement ses mollets, dans le seul but de ne pas perdre sa trace.

Le voile blanc les recracha et sans qu’elle ne s’en rende vraiment compte, sa main était dans celle du poufsouffle et ils courraient, l’un à côté de l’autre, loin des acromentules jusqu’à un petit replis de terre. Son coeur battait à tout rompre à cause de l’effort, et alors qu’elle pensait ralentir, Sheraz lui abandonna complètement, le front en sueur et l’air grave.

Comme s’il avait frôlé la mort.

Brynn Gwent eut un rire qui l’aurait fait passé pour folle pour quiconque ne la connaissait pas. Elle reprit son souffle, entrecoupé de petits rires, avant d’essuyer son visage.

« Tu-tu verrais ta tête », la petite Artémis posa une main sur un tronc alors qu’elle perdait doucement les couleurs de la course. Sa salive avait le goût du sang, comme à chaque fois qu’un effort trop important était fait, mais ç’avait aussi le goût de la vie.

Elle jeta un regard autour d’eux alors qu’il s’était plié en deux, face vers le sol.

« Si je te l’avais dis, tu serais tombé de l’arbre de peur » commenta la serpentard, en essuyant du revers de sa main son front mouillé. Ses mèches blondes avaient fini par y coller, malgré un cardio à toute épreuve à force de courir sur les collines du tertre.

Le regard de la jeune vipère passa sur les cheveux qui ondulaient de couleur sans lui faire remarquer le turquoise qui s’y était accroché. Elle imaginait que c’était sa façon de montrer qu’il avait eu peur, extrêmement peur ? Elle inspira profondément avant d’expirer bruyamment puis de reprendre la marche, se tapant sur les cuisses comme pour se donner un peu d’entrain.

Il fallut quelques minutes de silence pour que Brynn ne jette un coup l’œil à Sheraz qui suivait bien malgré lui la petite Artémis dans ses pérégrinations nocturnes. Elle en aurait presque eu un peu de peine si elle n’avait pas une pensée pour @Viper Saito qui devait, au même moment, être seul. La jeune sorcière enfonça ses mains dans les poches de son sweat, avant de briser le silence :

« C’était quoi... le flash lumineux bizarre de tout à l'heure ? »

Brynn pencha la tête, décortiquant du coin de l’oeil le profil du jeune Mahal.

Elle avait vaguement entendu que Sheraz faisait parti du club de Mécamagie, avec @Adil Mesli, @Israfel Clearwater et @Michel-Ange Grimm, autant dire aucun des garçons avec lesquels elle avait des affinités, et franchement, elle se demandait même pourquoi le poufsouffle s’infligeait une telle compagnie. Si la Mécamagie n’était pas exactement sa tasse de thé, elle s’était toujours demandée ce que c’était exactement. Ce que ça pouvait être, du moins.

La seconde personne qu’elle connaissait de nom à pratiquer était Elffin Cynfeirdd, et on ne pouvait pas dire que les perspectives d’un chasseur de créatures armé jusqu’aux dents ne l’enchantaient. Pour ne pas dire que cela la rebutait. Il fallait seulement penser à tout ce qu’il était possible de faire pour piéger un dragon de perseli ou un dogue d’Arawn pour en déduire ce qu’il était possible de faire aussi pour un loup-garou de taille moyenne.

Sheraz Mahal n’avait sans doute jamais eu tout ça à l’esprit, et ne l’aurait sans doute jamais puisqu’il était de ces garçons naïfs mais profondément gentils (c’était aussi pour ça qu’il était si amusant de l’asticoter) qui ne font rien et ne pensent à rien de mal.

Noodle s'extirpa mollement des cheveux de la jeune femme qui le prit entre ses doigts, pour lui laisser glisser sa langue sur son visage - une façon de la renifler en quelque sorte.