Windowstill (Xris)

Après l'entraînement, ce soir-là, Siobhán avait trainé des pieds pour quitter le stade, ne pouvant s'empêcher de lancer plusieurs regards en arrière alors qu'elle rejoignait, aux côtés de @Finn Gavalagh-Korrigan, le chemin qui lui permettrait de regagner le château. Si habituellement, elle se faisait une joie de rejoindre @Edel Almadovar dans les gradins après sa douche pour rentrer avec lui, ce dernier avait cette fois-ci décidé de fouler l'herbe du terrain pour rejoindre le capitaine des Serpentard, quelques jours à peine après la soirée qu'il avait organisée en l'honneur de son équipe et durant laquelle les deux amis s'étaient soigneusement ignorés.

Avant de partir, elle n'avait pas manqué de faire en sorte que @Xris Andērson vienne à sa rencontre, laissant trainer volontairement une malle en plein milieu du terrain alors qu'elle aurait complètement pu se charger de la ranger elle-même.

Mais parfois, le destin pouvait avoir besoin d'un petit coup de main.

Les plus longs des silences étaient parfois révélateurs des plus grandes tensions, et il ne faisait aucun doute que ces deux-là auraient beaucoup à se dire si seulement ils acceptaient de se parler. Et de s'écouter. Voyant que son plan avait marché, l'Irlandaise s'était contentée de les regarder de loin, de temps à autre, s'éloignant lentement alors qu'elle envisageait de s'asseoir un peu plus loin en attendant qu'ils aient pu s'expliquer et d'en croiser un sur la route du retour au château.

« Pars devant, Finn, je te rejoins. T'inquiète pas  », avait-elle lancé à son frère après s'être arrêtée brusquement sur le chemin, quelques mètres plus loin.

Une intuition, sans doute, qui l'avait poussée à rester non loin du stade. Juste au cas-où.

Regardant son frère s'éloigner, Siobhán était restée là quelques temps, réajustant sa veste pour ne pas laisser le froid pénétrer sous ses vêtement. Les nuits d'avril étaient encore fraîches mais elle aimait profiter du calme laissé derrière une obscurité naissante alors que le soleil passait peu à peu le relais aux étoiles.

Mais le silence fut de courte durée.

Laissant son sac sur place, pleinement consciente qu'elle pourrait le récupérer au retour, l'Irlandaise n'eut pas besoin ni de réfléchir ni d'attendre de pouvoir saisir le sens des mots qui résonnaient à l'intérieur du stade pour rebrousser chemin et rejoindre ceux qu'elle avait laissé discuter en tête à tête. Si les éclats de voix lui étaient perceptibles de là où elle était, et si la voix qu'elle reconnaissait était bel et bien celle de Xris, alors il y avait peu de chances que la discussion soit en train de prendre un tournant constructif.

Siobhán savait que l'un comme l'autre pouvaient facilement laisser leurs esprits s'échauffer. Elle en avait fait les frais. Avec l'un, comme avec l'autre. Et elle ne pouvait les laisser se dire des choses qu'ils allaient regretter.

Quelques mètres la séparaient encore des deux Serpentard quand elle vit son capitaine pousser Edel. Le geste était léger mais sa portée était bien plus lourde de sens. Franchissant la distance qui lui restait à parcourir, elle remarqua qu'Edel ne riposta pas. Mais elle savait que ses mots pouvaient être tout aussi douloureux qu'un coup porté au coeur, et elle ne doutait pas un seul instant qu'il était bel et bien temps de mettre fin aux hostilités quand elle l'aperçut cracher sur le sol.

« Temps mort », lâcha-t-elle en se positionnant rapidement entre eux, regardant d'abord Xris droit dans les yeux. « Je pense que vous en avez assez dit pour ce soir.  » Elle se tourna cette fois-ci vers Edel, ses yeux bleu sombre parlant pour elle, le suppliant silencieusement de s'arrêter là. « Personne ne va penser pour personne, d'accord ?  » Marquant une pause, elle bascula la tête en arrière avant de se baisser vers le sol, les pupilles rivées sur la pelouse. « S'il vous plait. »

Cette scène n'était pas sans lui rappeler les arbitrages opérés entre son père et son propre frère. Si elle ne savait pas tous les tenants et les aboutissants de cette dispute-là, elle était dores-et-déjà persuadée qu'il n'y aurait plus rien à en tirer.

Alors qu'elle les séparait dans une volonté de calmer leur échange, Siobhán ne put s'empêcher de remarquer que quelque chose semblait s'être cassé bien avant qu'elle n'arrive sur les lieux de la dispute. Ce genre de faille pouvait se lire dans un seul regard, et force était d'admettre que si elle y prêtait attention, elle pourrait la déceler aussi bien dans les iris azur de Xris que dans les reflets ambrés d'Edel. À cette idée, la Serpentard ne put réprimer un soupir, voyant bien que son intervention avait simplement mis un terme à des gestes que l'un comme d'autre auraient probablement pu regretter. Et si elle n'apprécia pas la façon dont son ami s'était adressé à elle et qu'elle s'apprêtait à répliquer, celui qui avait son cœur entre les mains avait réagi bien plus vivement, bien plus rapidement. Comme si ses propos étaient la goutte d'eau qui venait de faire déborder le vase, alors qu'il faisait déjà demi-tour, non sans avoir craché le reste de son venin.

« Edel... », le rappela-t-elle en essayant de le retenir par le bout des doigts.

Mais la rage qui devait faire fureur à l'intérieur de lui était bien trop forte pour qu'il accepte de s'arrêter. Et, dans un sens, la vélane préférait qu'il se retire plutôt que cette dispute ne prenne d'autres proportions, la forçant à s'immiscer plus vivement encore. Cela lui laisserait le temps de souffler un peu avant qu'elle ne le retrouve, un peu plus tard dans la soirée. Jamais elle ne pourrait le laisser seul dans de telles circonstances, et tout ce qu'elle pouvait espérer serait qu'il accepte sa présence.

En attendant, Siobhán se tourna vers Xris, son visage se teintant d'une sincère tristesse en même temps qu'il semblait se questionner. Ses traits à lui étaient complètement fermés, et elle se doutait par avance qu'il serait difficile d'obtenir ne serait-ce qu'une réponse de sa part. Pourtant, elle savait que c'était sa manière de se protéger de la souffrance. Elle l'avait vu de ses propres yeux, en janvier dernier.

« Dis-moi ce qu'il s'est passé... Ça ne peut pas être simplement le sourire à Apolline qui vous a mis tous les deux dans cet état. »

Instinctivement, elle eut envie de poser sa main sur son avant-bras, sans parvenir à s'y résoudre de peur que ce simple geste qu'elle voudrait réconfortant ne soit vécu comme une nouvelle tentative de se mêler aux recoins les plus sombres de ses pensées.

« Xris, je sais que c'est entre lui et toi mais c'est pas possible d'en arriver là après ce que vous avez traversé. Parle-moi. »