Eïd mubarak

Voilà à présent quatre mois que Samir était à Poudlard, et sa vie avait été bouleversée à bien des niveaux. Après avoir rencontré son frère, tout était allé très vite. Il avait rapidement été présenté à sa petite amie @Asel Misra, qui devint lors de leur première rencontre sa fiancée officielle. Samir découvrit aussi l’existence de différents cousins qui appartenaient à la famille de sa tante par alliance. Les cours s’étaient enchaînés, en même temps que la découverte du château et du système universitaire magique britannique. Certains étudiants s’étaient révélés de véritable soutiens dans cette aventure, tandis que d’autres avaient au contraire fait de son parcours un calvaire.

Mais dans ce tourbillon d’évènements s’enchaînant les uns après les autres, Samir n’avait que peu eu le temps de se poser pour réfléchir. Ce n’était pas qu’il appréciait particulièrement l’exercice, mais il semblait par moment au jeune algérien qu’il était en train de foncer à grande vitesse sans savoir où, et la peur de s’écraser violemment se faisait parfois tellement forte qu’il avait du mal à se concentrer correctement. Aussi, quand Adil lui avait proposé de rencontrer le frère de leur père qui l’avait élevé comme son propre enfant, Samir avait pris peur et avait demandé à son frère de retarder cette rencontre.

Le mois du ramadan lui avait fait beaucoup de bien, le forçant à ralentir malgré lui, prenant plus de temps pour être à l’écoute de ses besoins et de ceux des autres. Vivre ce jeûne avec son frère les avait fait se rapprocher considérablement et Samir avait enfin commencé à considérer Poudlard comme ce qui pouvait se rapprocher le plus d’un « chez-lui ». Adil lui avait alors fait la proposition de fêter l’Aïd avec leur oncle et leur tante, et bien qu’anxieux à cette idée, Samir avait finalement accepté.

Quand l’aube se leva sur la journée du vendredi, Samir ne s’était pas endormi depuis bien longtemps. Cela ne l'empêcha pourtant pas de se réveiller en sursaut. Le jeune étudiant ignorait ce qui avait le plus troublé son sommeil, mais un regard jeté à un parchemin posé sur sa table de chevet lui fournit un indice de taille. C’était la lettre qu’il avait tenté d’écrire à sa mère avant de renoncer. Il était encore trop tôt… Il ne savait que lui dire, et n’avait encore aucune envie de lui pardonner ses erreurs passées… D’un étirement, il attrapa le courrier plein de ratures qu’il froissa avant de le lancer droit dans la poubelle.

Mais quand de longues minutes plus tard, il revint errer dans son dortoir après s’être habillé et aspergé d'huile parfumée, il se figea devant la corbeille. Finalement, il finit par s’accroupir pour récupérer le parchemin en boule afin de le défroisser et de le glisser sous son coussin. Ces quelques égarements était pour lui la preuve qu’il était encore un peu perdu sur de nombreux points. Peut-être que sa rencontre avec son oncle l’aiderait à y voir plus clair ?

Malgré tous ses doutes, la vision de son frère qui l'attendait devant sa salle commune lui attira un air ravi sur le visage tout en lui réchauffant le coeur. Finalement, peu importait comment allait se dérouler cette journée. La présence de son frère l'emplissait d'un sentiment de reconnaissance qui lui donnait l'impression d'être invincible. Avec Adil à ses côtés, il ne craignait absolument plus rien.

- Salut Adil, lui lança-t-il avec un sourire. Wow, tu t’es fait beau… J’aurais dû m’habiller plus correctement tu crois ?

Alors que l’appréhension le rendait légèrement nerveux, le jeune Mesli baissa les yeux sur son t-shirt blanc et sa veste de survêtement noire simple mais élégante enfilée par-dessus. Depuis que @Siobhán Gavalagh-Korrigan lui avait enseigné le sortilège de réchauffement, il était heureux de ne plus avoir à enfiler d’épais manteau pour se tenir au chaud. Dans sa poche, il avait fourré son éternelle casquette qui n’était pour une fois pas vissée sur son crâne. Il se réservait cependant le droit de changer d’avis s’il avait besoin d’un rempart plus sécurisant entre lui et le monde extérieur.

Adil ne tarda pas à rassurer son frère, comme à son habitude, lui indiquant que sa tenue était tout-à-fait convenable. Samir n’en doutait pas vraiment, mais le fait que son frère le lui confirme était tout-de-même réconfortant. En l’espace de quelques secondes, Samir se remémora la manière dont ils avaient l’habitude de fêter ce moment avec sa mère, ses voisins à Constantine, ses cousins en France. C’était toujours des instants emprunts d’une convivialité simple mais qui valaient bien plus que tout l’or du monde à ses yeux. Quelque part et malgré le stress, il eût hâte de retrouver cette impression de se sentir appartenir à une famille en fête.

Ce fut donc avec un enthousiasme sincère qu’il hocha la tête avant de suivre son frère à travers les couloirs du château, vers ce fameux secret qui leur permettrait de quitter l’école. Poudlard regorgeait de passages mystérieux vers l'extérieur.  Aussi, le jeune Mesli avait tendance à douter de la soi-disant sécurité de l’université de sorcellerie. S’il était aussi facile d’en sortir, est-ce qu’on ne pouvait pas tout aussi aisément y pénétrer ? En des temps aussi troublés, cette forteresse semblait bien plus vulnérable que ce que tout le monde pensait…

Quand Adil reprit la parole, ce fut pour tenter de calmer de nouveau ses angoisses. La crainte latente du jeune Mesli devait sans doute se lire sur son visage si son frère s’empressait à ce point de le rassurer. De nouveau, Samir hocha la tête en restant cependant muet. Si son oncle était un tant soit peu responsable de ce qu’était devenu Adil, alors il devait être une bonne personne. Le jeune étudiant n’en doutait pas un seul instant. Tout comme il savait que les noirceurs qu’il cachait au creux de son cœur devaient forcément lui avoir été transmises par sa mère. Non, l’appréhension de Samir ne reposait pas sur les qualités indéniables de son oncle, mais plutôt sur les siennes. Au fond, Samir restait persuadé que s’il avait été écarté de cette lumineuse famille, c’était pour une bonne raison.

Plusieurs scenarii s’enchainaient dans son esprit, présentant son oncle tantôt cachant bien mal le dégoût de voir un être si impur franchir le seuil de sa porte en ce jour de fête si cher à leurs cœurs ; tantôt le visage déformé de colère, accusant Samir de mensonge comme avait pu le faire Adil lors de leur première rencontre, et refusant tout lien avec lui. Heureusement pour le Constantinois, la série de transplannages qu’il subit aux côtés de son frère lui demanda tant d’énergie qu’il eut besoin de toute sa concentration pour tenter de ne pas être malade. Adil semblait lui aussi en bien mauvais état mais un simple geste de sa part suffit à maintenir son frère à ses côtés pour le tranquilliser.

Plutôt que de fixer le visage dangereusement pâle de son ainé, Samir reporta son attention sur le lieu dans lequel ils avaient atterri. La petite ville était relativement similaire à celle dans laquelle il avait vécu le temps nécessaire pour mettre un peu d’argent de côté. Une ville balnéaire où le temps semblait s’être arrêté, avec des bâtiments d’un autre âge. Cependant, ça et là, il percevait une architecture qui n’était pas sans rappeler celle des quelques villages magiques qu’il avait pu connaitre – preuve indéniable pour ceux dans le secret que des sorciers vivaient là.

Suivant son frère, Samir sentit sa nervosité grimper en flèche à mesure que la nausée du transplannage se dissipait – comme si son corps n’était en capacité de ne gérer qu’un problème à la fois. Finalement, il reconnu la maison avant même qu’Adil ne la lui indique, car elle se démarquait clairement des autres, dans un style bien différent, plus chaud et coloré que tout le reste. Son impatience teintée de malaise explosa, et il aurait été tenté de tourner les talons pour s’enfuir s’il n’avait perçu le regard bienveillant de son frère qui le questionna de nouveau sur son état. Samir ne put que hocher la tête, éternel et seul mouvement qu’il parvenait encore à produire.

S’il ne parlait pas, il ne fuyait pas non plus. C’était dans cet équilibre incertain qu’il franchit le seuil de la porte, sans quitter d’une semelle son frère.

- Sabah al-kheir, marmonna-t-il faiblement, presque plus par habitude que mû par une quelconque volonté alors que son regard curieux se portait déjà tout autour de lui en découvrant l'intérieur confortable de la demeure.

Une voix de femme leur parvint et Samir eut besoin de sentir la main d’Adil posée sur son épaule pour se rendre compte de la manière dont son visage s’était crispé dans une attitude peu chaleureuse. Il inspira lentement, cherchant avant tout à imiter son frère en tout point en retirant à son tour ses chaussures. Le jeune homme n’eut que le temps de relever le visage pour voir arriver sa tante, avec son petit cousin dans ses bras.

Alors, il eut l’impression que son cœur allait imploser, et quand ses pupilles sombres croisèrent celles du petit Haroun, il se mit à sourire sans même y penser. Il était si petit, semblant si fragile, et pourtant si calme… Et il était de sa famille. C’était comme si un lien évident le reliait à présent à ce petit être qui n’existait pas vraiment pour lui jusqu’à quelques instants auparavant, et qui allait prendre tant de place dans sa vie.

Son regard se releva vers sa tante quand elle l’accueillit en lui tendant une main. Un brin intimidé, il se pencha vers elle lui la lui serrer en marmonnant un bonjour assez inaudible. Cependant, il ne se garda pas de l’observer avec une certaine curiosité alors qu’Adil la serrait dans ses bras. Elle aussi était tellement petite ! Il y avait quelque chose chez elle qui lui rappelait Sean Clearwater. Peut-être sa taille… Mais elle avait sur son visage un air doux et affectueux qui allait le mettre rapidement à l’aise.

Samir les suivit tous jusqu’à un salon qui n’aurait pas dépareillé en plein Constantine. Des petites banquettes finement brodées longeaient les murs autour d’une table de bois aux pieds sculptés. Il aurait pu inviter toute sa classe dans cette vaste pièce. S’asseyant silencieusement, le jeune Mesli ne perdait pas une miette de l’échange entre Adil et sa tante qui expliquait que leur oncle était encore à la Mosquée. Le cœur anxieux du jeune homme s’apaisa à cette idée, comprenant que si tout allait peut-être les opposer, il se retrouverait cependant dans les valeurs d’Amastan. Il voyait également là un levier qui lui permettrait de se faire plus facilement accepter dans sa vie. Adil à ses côtés faisait tout pour s’assurer que Samir lui allait bien, et le jeune homme hocha la tête d’un air bravache pour faire cesser son inquiétude.

Elisabeth revint de la cuisine avec un grand plateau ainsi que des boissons tout en ayant toujours le petit Haroun dans ses bras. Heureusement, la sorcière s’aidait de la magie pour parvenir à tout apporter sans casse. Samir la remercia sobrement sans lâcher le petit des yeux. Finalement, il se pencha en avant pour s’adresser brusquement à elle.

- Elisabeth… Est-ce que je peux porter le petit Haroun ?

Il ignorait si cela se faisait dans leur famille, ou si la sorcière était trop protectrice depuis l’accident dont lui avait parlé Adil. Il ne s’était même pas encore présenté, ni n’avait répondu à ses questions. C’était sur cette unique demande que s’était concentré son esprit depuis qu’ils étaient apparu dans ce couloir. Recevant l’enfant entre ses bras malhabiles, il se contenta de sourire bêtement en fixant les petites boucles sombres sur le sommet de son crâne.

- Ahalan, kayfa ḥālun ṣadīqay alshābbu,* lui murmura-t-il avec un plaisir difficilement contenu.

Il se perdit ainsi un moment dans son observation avant de relever le nez vers la mère de l’enfant d'un air beaucoup plus détendu.

- Il est beau ! Il vous ressemble.




* Comment ça va mon petit homme ?

Alors que Samir cherchait à graver dans son esprit les traits arrondis de ce petit cousin qu’il découvrait, il perçut le son d’une porte qui s’ouvrit. Relevant alors vivement le visage, il sentit les battements de son cœur s’accélérer d’appréhension. Une voix retentit. Amastan. Ce moment qu’il redoutait tant allait arriver. Heureusement que Samir tenait Haroun dans les bras et que, sans bien savoir comment porter un si petit enfant, il avait peur de lui faire mal s’il bougeait le moindre muscle. Sans ça, il se serait peut-être levé pour se sauver en courant.

Quand le sorcier fit son apparition, Samir retint sa respiration en l’observant. Il sentit toute sa témérité le quitter alors que l’homme perdait peu à peu son sourire. Le jeune Mesli sentait pleinement tout le poids de son illégitimité à être assis là, dans son salon, en tenant son propre fils dans ses bras. Il aurait aimé se lever, par respect pour son arrivée. Cependant, et sans savoir comment réagir autrement, il restait aussi immobile que lui. Quelque part, au fond de lui, Samir restait persuadé que l’homme n’allait pas tarder à lui demander de quitter sa maison.

Après tout, il était celui que Nima avait préféré garder par rapport à Adil. C’était quelque part à cause de lui qu'Amastan et Elisabeth avaient été obligés de recueillir Adil. Ils avaient dû être témoin de tout ce que son grand frère avait subi, et malgré lui, Samir s’en sentait en partie responsable – tout comme il pensait que c’était ainsi que son oncle le considérait. Mais ce dernier finit par lui sourire d’un air paisible en le saluant.

Samir n’osa toujours réagir alors qu’Amastan sembla hésiter un instant avant de s’installer finalement entre lui et Adil. L’explication de sa femme vint perturber encore davantage le jeune homme avant que le petit Haroun dans ses bras ne gigote de manière bien trop énergique. Il voulait les bras de son père. Le jeune Mesli tenta tant bien que mal de tendre le bébé à Amastan avant de relever les yeux vers lui.

- Euh… Désolé. Bonjour. Vous ne me mettez pas mal à l’aise…

Ce n’était pas vraiment vrai, ni tout-à-fait faux. Samir aurait été mal à l’aise peu importait la situation. Une fois qu’il se fut assuré qu’Haroun soit entre de bonnes mains, il prit une distance respectueuse avec Amastan sur le sofa avant de baisser la tête devant lui.

- Merci de m’accueillir chez vous pour l’Aïd. C’est vraiment très gentil à vous… Jazakallah kheir.*

Lentement, il releva le regard vers lui, cherchant inconsciemment à reconnaître en lui les traits de son père. Quand Amastan était arrivé dans la pièce, ça l’avait frappé. Il avait beau n’avoir qu’un souvenir confus de ce dernier, il lui avait semblé le voir apparaître, là, à la place de son oncle. Mais à présent qu’Amastan lui souriait d’un air acceuillant, Samir avait du mal à retrouver la ressemblance.

- A moi aussi, Adil m’a beaucoup parlé de vous, Amo**. Il tourna brusquement le visage vers Elisabeth avant de se reprendre. De vous deux… Vous avez l’air… exactement comme il vous a décrit.

Bienveillants, équilibrés, lumineux, aimants… Samir se tut, incapable de poursuivre sur cette lancée. Il lança un coup d’œil nerveux à Adil avant de tourner de nouveau son attention sur son oncle. Son grand frère était devenu le sorcier qu’il était aujourd’hui grâce à eux, et cette simple évidence valait tout le respect du monde.



* Que Dieu vous récompense (religieux)
** Oncle (respectueux)

Les mots de son oncle s’inscrivirent en lettres de feu dans son esprit, et leur chaleur provoqua chez Samir une sensation étrange. Tu es des nôtres. Curieusement, cet élan de pur bonheur fut assombri par une crainte qui l’emplit tout aussi vite : celle de le perdre. Le jeune homme fronça les sourcils en baissant la tête alors que son cœur n’arrêtait pas de s’emballer. S’il avait du mal à bien comprendre ce qui lui arrivait, l’étudiant percevait cependant que tout ça faisait beaucoup pour lui. Après n’avoir passé son existence qu’avec elle, il n’avait pas échangé un seul mot avec sa mère depuis des mois. Il avait quitté son pays et ses amis pour découvrir son frère perdu, et rencontrait à présent cet oncle à la fois si étranger et si familier.

A côté de lui, Amastan embrassa le front de son petit, et Samir détourna le visage d’un air embarrassé devant cette scène. Un père qui montrait son amour pour son enfant. Rien n’aurait dû être plus évident, ni plus banal. Mais pour lui, ça ne l’était pas. Cette vision était aussi douloureuse que troublante. Elle avait cependant également un côté rassénérant. Cet homme n’était pas n’importe qui. Il était le frère de son père. Et il venait de l’appeler wouldi…

La femme d’Amastan réagit de manière si spontanée à ses propos que Samir en rougit, comprenant cependant que ce trait de caractère semblait partagé dans cette famille. Son oncle reprit la parole, évoquant des changements à venir dans le petit village semi-magique où ils vivaient tous depuis quelques mois. Il s’en suivit un échange sur ces projets qui paraissaient emballer Adil mais Samir, lui, resta bloqué aux paroles de son oncle. Celles qu’il avait espéré entendre, tout en les redoutant de par l’excès de gratitude qu’elles auraient provoqué. Il était le bienvenu dans cette maison. Le jeune algérien gardait le regard baissé, n’osant croire à cette chance qui s’offrait à lui. Adil le lui avait déjà suggéré évidemment, persuadé qu’Amastan l’accueillerait aussi chaleureusement. Mais Samir n’avait osé y croire jusqu’à présent. Au fil des semaines, il avait compris que Poudlard pourrait devenir pour lui comme une deuxième maison. Cependant, le château ne restait qu’un lieu temporaire d’apprentissage. Le jeune étudiant s’était évidemment demandé où il passerait ses vacances, jusqu’à anticiper l’argent qui viendrait inévitablement à manquer.

La proposition d’Amastan aurait dû le combler de joie. C’était une telle pression qui le quittait… Alors pourquoi cette sensation le prenait-elle à la gorge, lui piquant furieusement les yeux ? Samir s’étonna en secouant lentement la tête. Il n’avait pas pleuré depuis… à vrai dire il l’ignorait. Avait-il déjà pleuré un jour ? Peut-être quand il était petit garçon. Jusqu’à ce qu’il comprenne qu’il était à présent l’homme de la maison, et qu’il devait se montrer fort pour sa mère. Un refuge illusoire qui qui s’était finalement dissipé dans un nuage de poussière. Furieusement, il frotta ses paupières rougies pour empêcher le moindre élan de faiblesse supplémentaire alors que son oncle réitérait son invitation.

- Merci, finit-il par souffler sans être capable d’en dire plus pour montrer sa gratitude. Il avait été mieux éduqué que cela, et aurait sans doute dû refuser par politesse avant d’accepter en s’assurant que sa présence serait la moins pénible possible pour eux, mais les mots s’étaient perdus sur ses lèvres curieusement sèches.

- Yemma et Jeddi ?

Les mots d’Adil lui firent relever soudainement le visage vers son frère, son émotion visiblement gravée sur ses traits. Aller voir ses grands-parents ?

- Je… Oui… Mais je veux pas… Gêner ? Il ne parvenait pas à finir sa phrase pour la rendre un peu plus correcte et détourna le regard. Cette perspective était en réalité bien trop folle pour lui permettre de l’appréhender et le jeune Mesli préféra repousser ses craintes et angoisses pour s’attacher sur quelque chose qu’il maîtrisait.

- Il faudrait que je travaille tout le mois de juillet alors j’imagine…

 Son visage se tourna de nouveau vers son frère à qui il finit par lancer finalement un léger sourire reconnaissant. Il hocha lentement la tête avant de se répéter.

- Merci…

Il y avait derrière ce mot tout ce qu’il ne savait exprimer mais qu’il réservait exclusivement à son grand frère. Adil avait eu raison d’insister, malgré les doutes persistants de Samir. Il avait bien fait de le traîner ici pour lui faire rencontrer sa famille. C’était un nouveau refuge qu’il lui proposait, la protection qu’il avait reçue qu’il étendait à son jeune frère. Evidemment, Samir continuerait à le suivre dans tout ce qu’il aurait encore à lui faire découvrir.