Eïd mubarak

Adil, peut-être parce qu'il était lui-même un grand pudique, semblait comprendre l'état dans lequel son jeune frère se trouvait. Samir était visiblement déstabilisé par cette rencontre, mais quelque chose sur son visage ou son regard laissait sous-entendre qu'il aimait plutôt ce qu'il voyait et ce qu'il entendait. La peur du rejet, très certainement. C'était quelque chose qu'Adil connaissait plutôt bien pour être toujours un peu sous la coupe de cette terrible sensation. Avec @Asel Misra, il se sentait mûrir, prendre de l'assurance et de la confiance. Elle le rendait meilleur et plus fort. C'était quelque chose qui commençait peu à peu à lui passer, de sa propre analyse. Mais Samir était en plein dedans. En le regardant, là, avec sa tête probablement tourmentée par des pensées tout aussi sombres qu'Adil avait pu les avoir, le Gryffondor n'avait qu'une envie, c'était de se lever et d'aller le prendre dans ses bras.

Amastan semblait s'en rendre compte. Il avait élevé Adil. Il ne lui fallut pas longtemps pour se rendre compte que Samir semblait avoir des cicatrices similaires. Il interrogea brièvement Ellie qui acquiesça d'un signe de tête discret. Un sourire au coin des lèvres, Amastan prit la main de Samir pour la lui serrer avec la sienne. Il plongea son regard plein de chaleur dans celui du Serpentard pour lui faire comprendre qu'il n'avait pas à s'en faire. Amastan était sincère dans sa proposition de lui proposer une chambre où dormir lorsqu'il n'avait pas cours. C'était important pour le Kabyle de leur assurer une figure paternelle quand il savait pertinemment que ses deux neveux en manquer terriblement. Ils avaient besoin de stabilité, et c'était quelque chose qu'il pouvait leur assurer. Ellie, qui était très famille, ne pouvait que comprendre et appuyer la démarche de son époux.

Il lui lâcha la main tout en se relevant.

« - Allez, j'vais terminer le repas sinon on ne mangera jamais. »

Il serra brièvement l'épaule de Samir avant d'ébouriffer le peu de cheveux qu'Adil avait sur le caillou et disparut dans la cuisine. Ellie observait les deux garçons avec un sourire amusé.

« - Vous vous ressemblez tellement... »

Elle se redressa doucement, faisant bien attention à la tête d'Haroun.

« - Je vais aller le coucher un peu. Adil, montre-lui sa chambre. »

Adil acquiesça d'un signe de tête. Un sourire lumineux sur son visage, il fit signe à Samir de le suivre. Une fois seule, Samir le remercia. Adil s'arrêta dans son élan pour se retourner vers son frère. Le dévisageant un instant dans le silence, il finit par l'attirer vers lui pour lui donner une embrassade digne d'un ours avant de le laisser se reculer avec un sourire amusé sur son visage.

« - J'vais te montrer la maison en même temps. »

Cette dernière s'élevait sur un étage. En bas, Adil lui montra le salon, la cuisine, l'entrée, une toute petite salle d'eau, un bureau (où Amastan travaillait (et priait)), puis une pièce qui devait leur servir de débarras ou de stockage (Adil fut surpris de retrouver quelques affaires qu'il connaissait bien de Finsbury Park, mais il se garda bien de le dire à Samir sur l'instant). À l'étage, il y avait des toilettes, une salle de bain (bien plus spacieuse), et quatre chambres. Une pour Adil, une autre pour Haroun, et l'autre qui était celle d'Ellie et Amastan, puis une chambre d'amis (généralement utilisée pour les cousins du Clan d'Ellie).

Adil poussa la porte. D'un signe de la main, volets et fenêtre s'ouvrirent pour laisser entrer la brise qui soufflait de temps à autre sur Tinworth afin de l'aérer. Aux yeux d'Adil, la chambre était sobrement décorée. Pourtant, on y voyait certains détails très écossais, comme d'autres, très kabyles. Un sourire s'installa sur les lèvres d'Adil alors qu'il se retournait vers son frère, l'air un peu niais.

« - C'est drôle, mais j'ai l'impression d'officialiser notre lien fraternel. »

Il baissa la tête quelques instants, digérant les émotions qui le submergèrent subitement, avant de la relever rapidement vers son frère. Son regard était troublé par ce qu'il ressentait pour Samir.

Eïd mubarak

ft @Adil Mesli
21/04

La femme de son oncle relevait leur ressemblance et s’il cacha son air ravi, Samir en ressenti une grande joie et une immense fierté. Il n’y avait en réalité pas meilleur compliment possible pour lui. Son oncle venait de lui prendre la main, avant de poser la sienne sur son épaule. Le jeune Mesli se sentait étrangement bien au sein de cette nouvelle famille qui rendait tout si naturel. L’ambiance ici était calme et harmonieuse. Elle donnait envie de rester, de poser son sac et de se reposer en toute sécurité.

Adil semblait comprendre tout ce que ressentait son jeune frère pour l’avoir vécu avant lui. Il ne répondit à son frère que par un long silence avant de le prendre brièvement entre ses bras. Samir ravala son émotion pour éviter de craquer, le visage fermé devant tout ce qu’il éprouvait, avant de le suivre en silence jusqu’à l’étage.

Le jeune algérien avait bien du mal à prêter attention aux différentes pièces qu’ils croisaient, tant il s’attachait à garder son air composé. Finalement, ils parvinrent dans une chambre qui semblait un peu moins personnalisée que les autres, bien que diverses décorations rappellent de bien différentes parties du globe. Adil en ouvrit les fenêtres, faisant ainsi comprendre à son frère qu’il pourrait dormir ici. L'aîné posait un regard lourd de sens sur son frère, avant de révéler son sentiment d’officialisation de leur lien.

Samir se détourna légèrement avec un sourire en coin, passant nerveusement sa main sur son crâne rasé de près.

- Ouais ça fait bizarre, marmonna-t-il avec un air embarrassé, avant de se rendre compte qu’au contraire, tout lui semblait étonnement aller de soi.

Son visage se tourna vers la vision du petit village de Tinworth qu’offrait la vue de la fenêtre. Une légèrement brise leur parvenait, rafraichissant l’air en lui apportant ce petit goût salé transporté par les embruns. Tout ici donnait une impression de sérénité, comme si la vie s’écoulait lentement sans que rien ne puisse venir la perturber. Samir devait faire un effort pour se rappeler que la famille venait de s’installer ici après avoir vécu des évènements tragiques quelques mois auparavant. Il inspira lentement avant de se tourner vers son frère.

- Amastan et Elisabeth ont l’air exceptionnels. Je suis heureux qu’ils aient été là pour toi…

Pour une fois, il n’avait pas vraiment réfléchi avant de parler. D’habitude, il avait tendance à marcher sur des œufs quand il évoquait l’enfance d’Adil. Malgré lui, il ne pouvait s’empêcher de se sentir coupable, et de porter une part de responsabilité quant au fait que leur mère ait abandonné le grand frère mais ait gardé le petit auprès d’elle. Pouvait-on vraiment se réjouir à l’idée qu’Adil ait été arraché à son foyer tout jeune, poussant son oncle à le recueillir ? On pouvait décemment en douter. Et pourtant, bien qu’il soit conscient de la forme d’amour que lui avait transmis sa mère et dont avait été privé Adil, Samir se sentait réellement heureux et rassuré de voir l’environnement dans lequel avait grandi son frère.

Il acquiesça la tête avec un sourire alors qu’étrangement il sentait son cœur se serrer dans sa poitrine.

- Je suis vraiment content pour toi, mon frère.

Ce mot sonnait toujours un peu curieusement dans sa bouche, mais le fait de l'entendre rendait tout plus réel, et plus bouleversant. Aucun mensonge n’était permis quand il le prononçait, aucun faux-semblant. Samir n'aurait jamais cru que le bonheur d'un autre pouvait à ce point le combler. Et pourtant, sur l'instant, il s'oubliait complètement face à son frère.

Adil acquiesça d'un signe de tête, et c'était probablement pour cela qu'il avait tant lutté plus jeune pour ne pas sombrer dans certains travers, quitte à moins passer de temps avec certains de ses amis pour éviter d'être entraîné dans des bêtises plus grosses que lui. La façon dont Amastan et Ellie s'étaient accrochés pour lui permettre de panser le plus gros de ses plaies l'avaient toujours poussé à donner le meilleur de lui-même. Outre ses colères particulièrement dévastatrices, Adil, pour lui, avait réussi bien des défis grâce à leurs présences constantes. Il ne remercierait jamais assez le ciel pour ce don qui lui avait été fait.

Un sourire s'était donc dessiné sur ses lèvres alors qu'il détourna les yeux l'espace d'un instant, se demandant malgré lui ce qu'il en était de leurs parents. Amar ne s'était pas remontré depuis Sainte Mangouste. Il était probablement là, dans les ombres, à guetter le moment le plus opportun pour retenter une percée dans sa vie. Adil était curieux de le revoir contrairement à ce que Samir lui avait laissé penser quand ils avaient rapidement évoqué le sujet aux Trois balais. Peut-être parce qu'il espérait toujours qu'une bonne raison à sa disparition si soudaine.

L'espace d'un instant, il se rendit plus ou moins compte que ses souvenirs de lui commençaient à se dissiper dans sa mémoire. Les traits de son visage étaient moins précis, sa silhouette semblait toujours plus distante comme inaccessible.

Enfin, il eut une pensée pour Nima. Contrairement à son père, il se souviendrait toujours de son visage et de son air déterminé, mais grave qu'elle avait eu sur le perron de chez ses grands-parents. Un élan d'empathie se fit pour cette mère qui devait probablement se faire un sang d'encre à l'égard de Samir.

Adil reposa son regard sur le Serpentard lorsque ce dernier lui fit part de sa joie à son égard. Le Gryffondor sourit de nouveau alors que ces quelques mots chassaient les nuages gris qui commençaient à se former au-dessus de lui. Le Kabyle s'approcha de Samir pour le serrer dans ses bras.

« - Allez viens, on va manger. »

Il s'était reculé pour mieux l'observer, avant de lui passer devant pour descendre les marches de l'escalier. Un sourire niais s'affichait sur son visage alors qu'il traversait le salon, visiblement heureux. Son regard avait croisé celui d'Ellie qui ne pouvait que le lui rendre avec cette pointe d'amour maternel au fond de ses yeux.

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