The magic key [ft. Dilshad]

Curieusement, Vicky vit son voisin s’enfoncer toujours un peu plus le nez dans sa tasse, alors qu’elle aurait aimé au contraire soulager un peu sa peine. Clairement, elle ne s’y prenait pas de la bonne manière… C’était sans doute son défaut de prononciation qui rendait son discours incompréhensible pour le pauvre homme. S’apercevant qu’elle avait posé la main sur son bras, la couturière la retira prestement en se réprimandant intérieurement. Sa famille le lui répétait pourtant suffisamment : Vicky, évite de parler, tu nous donnes mal à la tête !

Dilshad voulu s’excuser de lui apparaitre si abattu, et la Graham se contenta de secouer la tête ce qui – avec son corps inversé – ressemblait plus à un acquiescement. Deux énergies si négatives n’étaient elles pas sensées se transformer en quelque chose de positif en se rencontrant ? Mais eu lieu de partir dans une nouvelle métaphore sur la beauté de la vie, la sorcière s’obligea à rester silencieuse, souhaitant respecter le temps de silence dont son voisin semblait avoir grand besoin. Quand il reprit la parole, ce fut pour lui dire quelque chose de si particulier que l’habilleuse s’en senti transpercée d’allégresse.

Il la voyait, enfin, pour qui elle était : c’est-à-dire extraordinaire !

Relevant les cils vers lui, Vicky écarquilla les yeux en se sentant emplie de fierté. Les Graham étaient nombreux et il était parfois difficile de la distinguer parmi ses frères et sœurs. Les clients qui connaissaient un peu sa famille, se souvenaient bien plus facilement de Norman, l’aîné aux talents de négociateur hors pair, Brent et son élégance si travaillée, ou encore la petite dernière, Felicia, absolument ravissante et à la bonté d’âme inégalée (@Nott Tyrfing). Vicky passait inaperçue, souvent reléguée à l’atelier pour seconder son père loin des regards. Et pour la plupart, elle restait l’infirme un peu bizarre qui n’avait pour elle que sa joie de vivre. Alors quand Dilshad lui révélait qu’il la reconnaissait enfin, et même qu’il la trouvait même extraordinaire, cette révélation lui alla droit au cœur.

Rougissante, transpirante d’un bonheur facilité par les quelques relents d’alcool qui lui restaient encore dans les veines, Vicky se sentit presque sur le point de pleurer de joie. Le sorcier avança sa main, et pensant qu’il voulait attraper la sienne, Vicky s’empressa de lever sa paume. Il s’avéra cependant qu’il souhaitait simplement remplir sa tasse de chocolat chaud. Heureusement, Vicky pouvait toujours compter sur son corps inversé pour préserver son égo, et c’était le mauvais bras qu’elle avait levé. Elle put ainsi faire retomber innocemment sa main à côté de sa tasse de nouveau fumante.

Dilshad lui proposa une bien amusante activité qu’il avait l’habitude de mener avec sa sœur et Vicky se prit à sourire pensivement. Dans la situation opposée, elle aurait pu lui sortir presqu’exactement les mêmes mots, avec quelques inversions en prime. Est-ce que tous les frères et sœurs du monde vivaient des expériences similaires, croyant naïvement que chacune de leurs anecdotes étaient uniques ? C’était un peu comme s’ils reproduisaient tous les mêmes motifs dans la grande étoffe de la vie. Chaque fil se croisant et s’entortillant sans jamais se rendre compte de leurs mouvements parallèles.

- Oh je ne paix ça… sais pas si j’aurai échelle que cause… quelque chose de mien bêchant… bien méchant à dire luire sue… sur lui, commença-t-elle avec un rictus gêné en secouant sa chevelure. Il n’a ma geais… jamais été mon motte y tapis… petit ami, et ce n’est pas fa saute… sa faute si je n’ai ça pue… pas su saisir sa manche… ma chance…

Se reconcentrant sur Dilshad, elle fut prise d’une pointe de curiosité. Et lui comment avait-il saisit sa chance avec sa femme ? L’avait-il courtisé, ou à l’inverse s’était-il laissé séduire ? Ce genre de pensées envieuses lui paraissaient presqu’interdites, et comme toutes proscriptions elles ne s’en inscrivaient que bien plus profondément dans son esprit.

- Si je roi dit… dois dire quelque sauje… chose. Eh bien… Je ridais… dirai… Qu’il n’a pas ma loyauté… la moitié de ton écoute viens brillante… bienveillante. Oui Charlie parle qu’aux bouts… beaucoup trop pour arriver à thé couté… écouter les gens… Et son gueux rat… regard n’est pas tomme que lien…comme le tien : goût et drave… doux et grave. Il est fou vent suivant… souvent fuyant, comme s’il avait chèque et clause… quelque chose à cacher. Il prend des ces disions… décisions très rapidement, sans trame joyaux... jamais trop réfléchir. Alors que j’ai peint laisserons… l’impression que toi pue taise… tu pèses plutôt toujours l’aire ton temps… très longtemps le pour et que l’outre… le contre. Non mère vent… vraiment, vous ne vous se remblaie… ressemblez pas du tout…

30.11. Dilshad fronça légèrement les sourcils lorsque Vicky lui avoua alors que cet homme n'était personne en réalité. Tout du moins, qu'il n'avait jamais été qu'une envie particulièrement virulente, animant alors chaque respiration de la jeune sorcière comme une adolescente devant le gars le plus populaire de l'école. Si n'importe qui s’était alors moqué de Vicky, Dilshad n'en fit rien, sentant alors son histoire faire un miroir à celui qu'il était à son entrée à Poudlard. Dix-huit ans avec un esprit plus mâture malgré une immaturité certaine sur certains domaines, Dilshad n'avait jamais réussi à s'ouvrir plus que de mesure avec cette sorcière de son âge qui était capable de lui couper le sifflet rien qu'en entrant dans une pièce. Force lui fut de constater qu'il ne serait jamais quelqu'un d'intéressant pour cette jeune femme qui ne se souvenait probablement plus de lui aujourd'hui.

Il acquiesça donc d'un signe de tête, sans trop savoir quoi dire comme à chaque fois qu'on lui rappelait une période de sa vie qu'il préférait ne pas s'attarder dessus.

Mais cela n'arrêta pas Vicky. Si sa bonté d'âme n'était plus à démontrer, elle se montrait plus douce encore vis-à-vis de Dilshad en relevant ses qualités. Gêné, mais pas moins flatté, Dilshad esquissa un léger sourire en se cachant derrière sa tasse. Trempant ses lèvres dans le chocolat pour cacher son malaise, il n'aimait pas les flatteries, car c'était une sensation qui lui réchauffait le cœur plus qu'il ne l'aurait voulu le plongeant alors dans une espèce d'incompréhension de ses propres émotions. C'était un domaine qu'il ne pouvait apprendre dans un grimoire ou comprendre grâce à un sortilège. Il préféra sourire avec sa fine moustache de chocolats sur ses lèvres avant de finalement s'essuyer les lèvres en attrapant une serviette qu'il venait de faire apparaître au milieu de la table.

L'idée de la flatter également pour lui remonter le moral ou pour lui donner l'espoir qu'elle finirait par trouver quelqu'un à son tour lui passa au-dessus.

« - Je ne sais pas trop quoi dire... Peut-être parce que je suis d'un naturel réfléchi... Plus factuel. »

Il ajouta d'un air désolé :

« - Je n'ai jamais vraiment compris les émotions. Ce que je ressens. Parfois, il faut me mettre la tête dedans pour que je m'en rende compte. »

Au final, il n'y avait qu'avec Yasmine que les choses s'étaient faites naturellement. Ou avec @Luke Korrigan. Probablement pour cela que seuls ces deux sorciers avaient réussi à percer son cœur. Bien sûr, le kidnapping de son enfant lui a permis de débloquer certaines choses comme le renfermer sur d'autres... S'il y avait un bien dans toute cette histoire d'ailleurs, c'était bien sa capacité à se mettre au petit soin de sa fille Layla (ou du reste de sa famille).

« - Tu trouveras peut-être quelqu'un de mieux, qui sait ? » Ajouta Dilshad, imitant alors sa grande sœur qui avait longtemps été sa référente en relation sociale.

Par-dessus sa tasse, Vicky observait avec un sourire attendri son voisin ne pas savoir comment réagir devant ses compliments. Il y avait ces hommes qui savaient se mettre en avant, montrer leur meilleur profil et cueillir les flatteries comme pour s’en faire un panier garni. Et puis il y avait Dilshad.  Incapable de reconnaître ses propres talents, il ne lui en apparaissait que plus précieux. Comment ne s’était-elle pas rendu compte de son étonnante fraicheur plus tôt ? Coincé derrière les engrenages de ses machines bien huilées, le sorcier se camouflait à merveille. De l’or déguisé en cuivre ; peut-être même persuadé d’en être ?

- Oh je s’ennuie…n’en suis pas sursis…si sûre, répondit-elle avec un rire à sa certitude qu’elle trouverait un autre amour. Mais tapais roux… après tout, je n’en ai bas soin peu … pas besoin pour être rose eux… heureuse. J’ai bien issu riz… réussi à l’être en sans éteule… étant seule jusque-là…

Curieusement, pour une personne sociale comme elle, la solitude n’effrayait pas Vicky. Au contraire, elle appréciait ces moments où elle pouvait se retrouver, se reconnecter à ses émotions qu’elle embrassait pleinement – à la différence de Dilshad selon ses dires. De même, elle n’osait se risquer à dire qu’elle le prenait en modèle. Car malgré toute l’affection qu’elle portait à son voisin, Vicky ne pouvait affirmer que Dilshad paraissait heureux. C’était navrant de le voir ainsi retranché derrière un mur qui ne semblait bâti que pour le protéger. Mais ce même rempart ne faisait-il pas que l’étouffer chaque seconde un peu plus ? …

Attristée à cette idée, Vicky détourna le regard du sorcier pour suivre le sien qui se promenait sur son mur, lui permettant ainsi de deviner cours de ses pensées. Passant sur une photographie animée de sa fille, la couturière se pencha pour mieux voir le sourire éclatant de la jeune sorcière. Elle sut alors qu’il n’y avait qu’une manière pour ramener le sourire sur les lèvres de son hôte : lui parler de sa fille adorée !

- Comme Layla bêlai… est belle sur cette photo, murmura-t-elle en détaillant l’image. Ça me par elle… rappelle le jour où elle est ne vue… venue se faire une robe mur serrure sur mesure pour fêter tronc séant… son entrée à Poudlard ! Tu te vous sien… souviens Dilshad ? Tu tuais c’est … souhaitais qu’elle prenne un tissu son alitant… non salissant, et elle, elle louvait… voulait de la sange orage… soie orange ! Elle a fini râpe avare… par avoir sa robe orange aiment dévie… évidemment ! Et elle a su héron… eu raison car elle lui allait varia… à ravir !

Vicky s’esclaffa à ce souvenir qu’elle chérissait dans sa mémoire avant de se reconcentrer sur sa tasse de chocolat. Victime de sa gourmandise, cette dernière était déjà presque vide alors que Dilshad venait de la reremplir. Incapable de se réfréner pour autant, la modiste se chargea de finir sa boisson chaude pour reposer la tasse vide devant elle avec un sentiment d’accomplissement. Était-ce le goût sucré du chocolat, la bienveillante attention de Dilshad, ou bien simplement la chaleur de ce moment partagé ? Toujours était-il que la Graham ne ressentait presque plus les effets de l’alcool qui l’avait anéantie un peu plus tôt. Même la tristesse qui avait causé son ivresse lui semblait à présent bien plus relative, comme si elle l’observait de loin, se tenant à une distance raisonnable d’elle.

- Merci tour poux… pour tout Dilshad, lui souffla-t-elle en se penchant en avant pour se rapprocher de lui. Je vais maux bout qui eux… beaucoup mieux maintenant, trace à goix… grâce à toi ! Je ne peux va … veux pas abuser trop thon dotant… de ton temps, alors je vais traie rends… rentrer chez moi à c’est prend… présent !

Avec un sourire entendu, elle secouait la tête à son intention, le couvant de son regard compatissant. Oui, Vicky savait à présent parfaitement comment échapper à sa tristesse. Il lui suffisait d’arrêter d’observer égoïstement son pauvre nombril pour se concentrer sur ce qui l’entourait. A commencer par son voisin qui était le sorcier le plus digne et estimable qui pouvait exister. Vicky pouvait bien renoncer à l’amour, tant qu’elle pouvait se dédier à tout un tas de petites missions qui rendaient selon elle le monde un peu plus beau. Et l’une d’entre elles serait de s’attacher dorénavant à faire sourire le plus souvent possible cet homme qui ne méritait que d’être heureux.

30.11. Être seul n'était pas un mal, bien au contraire. Avec sa fille capable de se débrouiller seule, Dilshad pouvait s'enfermer dans ses travaux sans se préoccuper de ce qui se passait autour de lui pendant des heures. C'était quelque chose d'agréable, quand bien même cela restait un échappatoire de cette réalité qui lui avait tant causé du mal. Il eut un sourire plein de fierté lorsque Vicky lui rappela la rentrée des classes où, effectivement, Dilshad avait accompagné Layla chez Tissard & Brodette pour ses différentes tenues requises pour sa scolarité.

« - Elle est magnifique ma petite princesse. » Avait commenté Dilshad, plus pour lui-même, avec un sourire attendri alors qu'il se plongeait à son tour dans ce souvenir commun qu'il entretenait avec Vicky.

L'orange lui allait si bien... À vrai dire, toutes les couleurs lui allaient terriblement bien. C'était peut-être le cas pour Dilshad, mais il préférait s'emmitoufler dans des teintes passe-partout pour ne pas trop attirer le regard. Layla avait ce truc qui la rendait si unique quand il posait ses yeux dessus. Il aimait quand elle portait le turquoise, il aimait quand elle était en rose ou en rouge aussi. Elle était mise en valeur, ce qui renforçait un peu son image de princesse dans le cœur de son père. Dilshad était bien trop innocent pour penser que cela attirerait le regard des garçons de son âge.

Vicky le remercia, lui annonçant qu'elle allait mieux et qu'elle était prête à rentrer chez elle.

« - Tu es sûr ? » S'assura Dilshad qui s'était quelque peu fermé malgré lui à la conversation.

Dilshad l'observa quelques instants, droit dans les yeux, comme s'il cherchait un quelconque signe de douleur. Mais Vicky semblait aller bien mieux que tout à l'heure, lorsqu'il l'avait trouvé sur les marches de son perron parmi son bordel de créations mécamagiques entreposés là pour montrer aux passants ce qu'ils étaient capables de faire dans la Wheel of Time.

Porto, lui, s'était animé en se secouant légèrement de tout son long. Ses bras tournaient autour de son corps jusqu'à ce qu'ils se figent pour tendre les habbits à la jolie sorcière. Dilshad le regarda avec dépit et le porte-manteau haussa les épaules, l'air visiblement désolé.

« - Tu veux que je te raccompagne ? Il est tard maintenant. » Ajouta Dilshad alors qu'il voyait à peine la rue malgré la présence des lampadaires et des devantures lumineuses des autres boutiques.

Le porte-manteau de Dilshad réagit bien avant lui, s’empressant de tendre ses affaires à la sorcière alors que son voisin se contentait de la fixer sans bouger, comme si elle s’était soudainement fait pousser un groin à la place du nez. En grognant un rire embarrassé pour faire honneur à son groin imaginaire, Vicky attrapa gauchement son manteau, remerciant Porto en opinant du chef.

- Cerf mi… Merci, gel se quête… quels gestes précis et dos couronnés… coordonnés ? Vous sans dés… dansez la valse ? Vous roupillez… pourriez être un élan sexe… excellent danseur ! Si vous vous taie mai… mettez à donner craie doux… des cours, vers peinée… prévenez-moi ahah…

Empêtrée dans son écharpe, la Graham tourna sur elle-même pour se faire enrubannée par le pantin de bois si attentionné. Elle gigotait en gloussant, poussant un petit cri admiratif alors qu’il réussissait à lui faire enfiler une manche, tandis que l’autre pendait misérablement au sol. Enfin, Porto abandonna la bataille en reculant, la laissant à moitié fagotée, mais malgré tout prête à braver le froid. Des deux, c’était elle qui ressemblait le moins à un humain et le plus à un épouvantail.

Enfin, le mécamage se réanima à son tour, lui proposant de la raccompagner. Réagissant à retardement à la vapeur de chocolat, les joues de Vicky rosirent de plaisir mais elle se contenta de secouer les mains comme la tête dans un bruissement de vêtements.

- Oh non, mais versant… c’est vraiment gentil mais… bas gîte… J’habite juste ta okay… à côté, alors ça vrai deux… devrait aller !

Trottinant jusqu’à Dilshad, elle se sut comment le saluer convenablement et se contenta finalement de lui effleurer l’épaule en lui offrant l’un de ses sourire dont elle avait le secret et qui devait renvoyer toute l’affection qu’elle lui portait.

- Vos aurores... Au revoir version choix... cher voisin !

Puis, sentant le courage lui revenir – ou au contraire lui échapper - Vicky prit d’un pas décidé la direction de la porte. Autant qu’elle se concentre sur l’idée de ne pas se perdre de nouveau. C’était simple : pour ne pas se tromper de côté, il lui suffisait de trouver le dôme qui surplombait Gringotts. Mais après quelques pas dans la rue, Vicky se rendit bien compte que son sens circulaire de l’orientation l’avait entraînée du mauvais côté. Aussi, elle put ainsi saluer une deuxième fois Dilshad de la main en repassant devant sa porte qu’il n’avait pas encore eu le temps de refermer.

La sienne de porte ne fut en effet pas bien difficile à trouver quelques pas plus loin, et une fois que le battant claqua derrière elle, Vicky soupira d’aise en s’effondrant au sol. Elle aurait pu s’endormir sur place en ronflant si le châle de son ancêtre Victoria n’était venu la cueillir pour la transporter telle quelle dans son lit afin qu’elle s’enroule enfin de ses rêves chocolatés.