Excelsior (Zoey)

Je me rapprochais d’elle et brusquement, je l’attrapais par le col pour l’amener à moi et mettre son visage à quelques centimètres du miens. Une vision qui aurait certainement plu à Léandre d’ailleurs…

« Si tu ne me choisis pas, je brûle toute la Grande Bretagne, et je commence par ce bar, Zoey Woods. »

Je l’embrassais sur le front, et je lui remis le col de ses vêtements correctement avec un petit sourire. C’était du lard, ou… du cochon. Quoi qu’il en soit, j’étais extrêmement sérieuse dans mes propos, il était hors de question que quelqu’un me prenne cette place. Je me mis à rire et je mis mes mains pour faire des guillemets.

« Voyez vous ça ! Un Bourguignon de Champignon, français Baguette madame merci beaucoup. »

Je ne parlais pas un mot de français et je venais de dire tous ceux que je connaissais dans une seule phrase. Je fronçais les sourcils, et… un petit sentiment de jalousie s’empara de moi. A quelle occasion ce mauvais Ayden lui avait fait la cuisine ? Et quand ? Non, je me faisais des films, c’était ma meilleure amie et… elle allait se marier. Je rêvais, très certainement. Je regardais Eole dormir sans rien dire, puis je fronçais un peu plus les sourcils. Visiblement elle avait un tableau bien plus noir que le miens et c’était inquiétant, puisqu’elle était dans un endroit où… généralement les évènements brûlants partaient.

« La Lycanthropie n’est pas faites pour se battre à l’origine. C’est un don de la nature. Une magie offerte, que certains voient comme une malédiction mais qui est en réalité une bénédiction. Si tu continues à voir ça comme un problème et non comme un don de Mère Nature, alors tu avanceras pas Zoey... »

Je me rassis dans mon fauteuil et je l’observais d’un air calme et détendu. Notre famille avait une opinion bien à elle de la Lycanthropie, mais en même temps, nous étions des Loups-Garous depuis des générations et générations. Notre savoir se transmettait de bouche d’adulte à oreille d’enfant depuis la naissance, il y avait beaucoup à rattraper.

« Déjà, il va falloir oublier la cage. Tu peux la garder pour ta lune de miel si tu veux, mais ça c’est contre productif. La Potion Tue-Loup aussi. Les soirs de pleine lune, tu les passeras avec moi et Eole. On te guidera ne t’en fais pas. »

Je n’avais jamais vu Zoey sous sa forme de Louve et… une question me tarauda.

« La couleur de ta robe a changé lorsque tu te transformes Zoey ? »

La couleur de la robe changeait avec le temps et notre coeur. La mienne était blanche comme neige mais… une tâche noire était apparue récemment sur mon torse.

Ft  @Ellie Yard
The Sorcerer
11 Novembre
TW : viol, avortement


Mon visage se ferme aussitôt, ma mâchoire se crispe. Ce discours n’a pas su m’atteindre au Domaine, malgré les paroles emplies de sagesse de Paul ou Glenn, et il n’y arrivera certainement pas maintenant. Comme à l’époque, elle n’arrivera qu’à me braquer. Je réalise qu’on évolue dans deux mondes tellement différents… En temps normal, ça fait le charme de notre amitié, la souris des villes et la souris des champs, avec le contraste de ses manières plus bourrues mais son caractère plus posé que le mien. Cependant cette espèce de choc des cultures me gêne aujourd’hui. Son air calme m’agace encore plus que son petit speach. Je me lève, tente de canaliser la colère qui remonte, me concentre sur ma respiration alors que je commence à faire les cent pas.

« Evidemment, c’est Mère Nature qui m’a attaquée cette nuit-là et qui m’a mordue. C’est aussi elle qui m’a valu de me faire kidnapper, torturer, violer et avorter. Quelle bénédiction ! Quel don ! »

Sous l’énervement, je viens de laisser échapper ce détail dont je n’avais parlé à personne. Je pince les lèvres, serre les poings. Je ne voulais pas que ça sorte de cette façon, surtout pas ici où tout ce qui est dit arrive jusqu’à ses oreilles, bien qu’il semble déjà en savoir long… Cette grossesse indésirée, imposée et arrachée avant que je n’en prenne pleinement conscience. C’est certainement pour cette raison que je n’arrive pas à être aussi optimiste qu’elle quant au fait qu’on ne m’a pas totalement détruite et qu’il existe des solutions. Si mon corps peut surpasser ce qui m’a été fait, mon esprit reste lourdement impacté, les souvenirs revenant petit à petit, plus douloureux les uns que les autres.

« C’est toi qui a exigé que j’avale cette merde… »

Je me montre plus agressive que je ne le veux mais sa réflexion sur la potion Tue-Loup me fait encore plus grincer des dents. C’est elle qui m’a demandé d’en prendre alors que ça fait des années que je m’y refuse, d’où l’intérêt des barreaux. Je ne veux plus que quoi que ce soit joue avec mes perceptions, avec mon cerveau, j’estime avoir été suffisamment droguée. Je préfère encore la louve à l’état sauvage que faussement apprivoisée. Et l’idée d’être encadrée par ce môme inconscient n’arrange pas mon humeur ! Je me retiens de lui répondre un bon gros Qu’est-ce que ça peut te foutre ?! quand elle me demande si mon pelage a changé mais l’idée est bien là.

« Tu n’auras qu’à poser la question à Léandre. Je ne m’admire pas dans le miroir une fois transformée. »

Je regrette lui avoir demandé son aide, réalise que ce n’est peut-être pas celle qui me faut. Cela n’a pas marché avec Glenn, pourquoi ai-je cru qu’Ellie aurait une meilleure approche ? Ils ont eu la même enfance baignée de joie où ils ont fait leurs premiers pas de loup protégés par l’amour de leur famille. Mes débuts ont été tout autre. J’ai dû prendre mes distances d’avec ma famille, tirer un trait sur mes rêves et revoir mes plans à la baisse. M’adapter à un monde que je n’ai jamais voulu. Qu’on m’a imposé. Quel don de merde !

« C’était une mauvaise idée... »

Je me pince l’arrête du nez, les yeux clos, au bord de l’implosion. Si seulement je pouvais revenir en arrière de quelques minutes, retirer mes demandes et oublier cette matinée. Retourner me coucher comme si rien n’était arrivé… Je ne tiendrais pas une heure, pas dans ces conditions. Je fais apparaître un autre bout de parchemin et y note une adresse. Je soupire, agacée, avant de poser un regard fatigué sur Ellie et de lui tendre le bout de papier.

« Ayden doit être arrivé dans sa maison secondaire à l’heure qu’il est… Il y a tout ce qu’il faut pour votre confort et vous serez à l’abris. Je pense qu’il ne posera aucune question, à toi de voir si tu lui expliques ou non… Tu ne pourras pas transplaner dans l’enceinte de l’Ensorceleur, le mieux c’est que vous sortiez. »

Je pris ça comme une gifle. Une double gifle d’ailleurs. Non seulement j’en apprenais plus sur la sordidité de sa séquestration, mais en plus elle me… foutait dehors. J’ouvris la bouche, hésitant un très long moment entre me mettre en colère après elle, son attitude et mordre… Ou… Comprendre ce qu’elle ressentait, me lever, prendre Eole et partir. J’optais pour un mix des deux, passant moi aussi calmement mes doigts sur l’arrête de mon nez, j’avais conscience que les câlins et les marques d’affection envers elle ne me serait plus d’aucun secours. Je fermais la bouche, réfléchissant bien à ma réponse et puis finalement je déclarais d’un ton doux :

« Zoey… Tu peux pas garder ça pour toi sans te faire aider plus longtemps. »

Je fronçais les sourcils et je passais ma main dans ma veste et j’en ressortis un petit bout de parchemin. Je notais un nom sur un bout de papier et je le laissais sur la table. Avec des yeux calme, mais exprimant une profonde tristesse, je déclarais :

« Il y a des Médicomages et Psychomages spécialisés dans ce genre de traumatismes à Ste Mangouste. Il faudrait que tu y songes, après c’est pas obligatoire… Tu… tu fais comme tu veux. »

Je m’étais ensuite relevé, observant Eole et réfléchissant à comment j’allais le transporter jusqu’à chez Nathanael ou Ayden. D’ailleurs, elle avait un peu précipité le truc. Je ne savais pas où j’allais aller. Certainement au Chaudron Baveur, finalement. C’était peut être mieux comme ça, j’en avais assez fait.

« Je vais me débrouiller. J’ai compris, on s’en va. On va prendre le Magicobus un fois sortie du Marché. »

Je soulevais Eole comme s’il s’agissait d’un sac de pomme de terre. En me tournant, je manquais de cogner sa tête contre le mur. J’allais faire une énorme blague en disant que j’étais prête à être Maman/Soeurette pour ce môme si j’arrivais déjà à lui faire une belle bosse mais… au vu de la situation, je préférais m’abstenir. J’allais partir, un peu comme ça, en même temps j’en avais assez fait et… j’étais complètement perdu, sans plus aucune famille, j’avais aussi l’impression que ce soir, Zoey c’était un peu éloignée.

« Je t’aime, et pour moi tu es toujours la même et c’est pas ce qui t’es arrivée qui changera qui tu es. Je… je suis désolée pour tout ce que je t’ai dit ce soir. »

Et je m’en allais de la pièce, cognant la tête d’Eole contre le montant de la porte au passage.