Not all those who wander are lost

Quand je les vis enfin arrivé, un immense poids dans ma poitrine me quitta. Elle était bien là… En chair et en os. Toute la perspective de devoir poursuivre la route de la vie, si pénible et si dure sans elle venait de s’être envolé et le soulagement fut si grand que je continuais de la serrer un peu trop longtemps.

« Ouf. Tu es sauve. J’ai pas à brûler la forêt. »

Je lui fis un sourire léger, et je la libérais enfin de mon étreinte. Voyant le regard de Jameson, je me dirigeais vers lui et je déclarais d’un ton un peu amusé, et les joues un peu plus colorés car depuis qu’ils étaient là, j’étais bien moins blême.

« Laisse moi deviner, toi t’es jaloux, aller viens là. »

Je le serrai dans mes bras à son tour. Mais d’une étreinte bien moins longue car je n’avais pas trop envie que quelqu’un s’imagine quoi que ce soit. Le prenant par les épaules, je fronçais les sourcils. Il était défoncé ou quoi ? Il avait encore un peu le regard hagard et j’espérais que mon petit câlin allait le réveiller. Lui aussi, j’étais content de le revoir. C’était un des derniers membres de l’ordre que je connaissais, et ça comptait beaucoup à mes yeux.

« Et voilà les quatre Fondateurs à nouveau réuni ! » dis-je pour détendre l’atmosphère.

Puis, à Morana je poursuivais sur ma lancée :

« Toi tu feras Poufsouffle, ça t’apprendra à dire des conneries. Je me suis très bien défendu. Un mental en acier, et une volonté de fer ! Et… bon.. surtout une bonne compagnie, hein Poufsouffle ? »

Je libérais Jameson et je lui fis une horrible grimace. Certes, sans elle je ne m’en serais pas sorti, mais je détestais passer pour un con. Alors bien sûr je continuais mon petit numéro. Ne donnant pas tout de suite le parchemin à Maeve, afin de lui laisser le temps, je me tournais vers elle pour rebondir sur ce que disait Morana :

« Ouais, Morana a raison, raconter nous un peu votre lune de miel. »

03.12. Jameson feinta le dégoût lorsque Luke vint le serrer contre lui avant de finalement lui rendre son accolade avec la force d'un ours. Il l'aimait bien quoique puisse en dire le Korrigan qui aimait se plaindre à qui lui donnait un peu d'attention. Mais Jameson aimait bien le malmener aussi. C'était une relation qu'il chérissait tout particulièrement, même s'il eut préféré se couper les couilles plutôt que de le lui dire de vive voix. Une fierté mal placée, certes, mais due à un début plutôt chaotique du fait de la forte amitié de Luke pour son frère, Braxton.

Jameson laissa Maeve leur expliquait ce qu'elle voulait bien leur expliquer. Lui, il n'en avait pas envie. Égoïste, il voulait garder ce souvenir du Tir NA NOg pour lui seul. C'était un endroit tout particulier où il était l'un des rares sorciers à avoir eu la chance d'y poser un pied. Il ne serait pas surpris d'entendre que les derniers humains à s'être rendu en ces lieux furent les chevaliers de la Table ronde.

Se contentant d'écouter sa douce, mais redoutable guerrière leur raconter ce qu'elle avait bien envie de leur dire,  Jameson comprit qu'elle filtrait ce qu'elle avait à leur raconter. N'étant pas stupide quoique pouvait en dire Luke, il se garda donc de parler de cette étrange menace qui planait au-dessus de Maeve. Les propos de la Banshee étaient toujours bien présents dans sa tête, tourmentant le pauvre homme qu'il était face à l'amour qu'il portait à la descendante de Taliesin.

« - Laisse-moi le ramener auprès des siens, Maeve. Je suis fatigué et j'ai bien envie de voir quelque chose de joyeux pour finir ma journée. »

Jameson vint saisir l'enfant dans les bras de Morana pour venir le serrer contre lui avec toute la douceur dont il était capable. On voyait là, très facilement, le genre de père qu'il pouvait être lorsque le besoin s'en faisait sentir.

« - Et n'oublie pas de leur raconter comme Jameson Clearwater a reçu la bénédiction des faeries. » Ajouta-t-il, en se tournant vers Maeve avec une moue espiègle, quoiqu'un peu forcée.

Il s'approcha de sa sorcière bien-aimée pour déposer un baiser volé sur la joue avant de disparaître parmi les arbres, le dos étrangement vouté comme s'il eut les poids du monde sur ses épaules. Un effet notable du glamour très certainement...

J’étais assez content de mon accolade avec Jameson. Et aussi content de la réponse de Morana. Je trouvais qu’on formait un super quatuor et ça me rendait heureux. J’allais proposer qu’on mange tous ensemble, mais Jameson prétexta, à juste titre rendre l’enfant à ses parents. Morana quand à elle déclara être fatiguée, ce qui était certainement un faux prétexte pour nous laisser parler. Me tournant vers elle avant qu’elle ne s’en aille, je déclarais :

« Bonne idée ça, et laisse la porte ouverte derrière toi s’il te plaît. On peut jamais rentrer comme on veut dans ce fichu château. »

Fier de ma blague, je les laissais partir. Et à l’instant même où Morana disparut, mon sourire s’effaça de mes lèvres, laissant mes vrais émotions et ma vraie nature reprendre le dessus. Le masque éternel du sorcier bon vivant, joyeux, blagueur et loufoque disparut pour révéler mon vrai visage actuel. Mes sourcils se contractèrent et ma mâchoire se serra. Je restais là, un long moment à regarder Maeve que je considérais comme ma sœur puis…

« Je suis content que tu ailles bien. Me voilà rassurer. Partir en guerre contre un peu peuple tout entier, c’est plus vraiment de mon âge et entre nous… On sait très bien que j’aurai perdu. »

Je lui fis un léger clin d’oeil. Triste malgré moi. Puis, regardant autour de nous, comme si la réponse à sa demande de tout à l’heure allait sortir des fourrés pour venir vers elle à ma place, je repris mon visage las et fatigué. Pour dire finalement :

« Il faudra que tu leur en parles toi même. Je crois que Siobhan ne m’adresse plus tellement la parole, et que ma place dans son coeur est trop loin désormais pour qu’elle puisse accorder le moindre crédit à ce que je lui dirai. »

Je posais une main sur l’épaule de Maeve et je tapotais nerveusement sur cette dernière, comme à une étudiante. C’était comme ça, c’était la vie. Bon. J’avais bien merdé, et cette fois-ci, uniquement en lui disant la vérité : que j’avais maintenu pendant des années, sa mère en vie pour la guérir une fois que j’aurai trouvé une solution. Et qu’au final, la magie des pierres avaient fini par s’estomper et… qu’elle avait définitivement rejoins l’au-delà. Mais ça, bien sûr, je me gardais bien de le dire à la personne en face de moi.

« Donc, faudra que ce soit toi, ou quelqu’un d’autres. Mais… Je crois que j’ai fait assez de dégâts. »

Mes yeux se détournèrent, parce que ça me mettait assez mal d’en parler. Changeant la conversation, assez rapidement pour éviter d’être trop dans le drama, je lui tendis un petit parchemin noué et et scellé des armoires de Poudlard.

« Oh, et ça c’est pour toi. Tu le liras à tête reposée. T’es pas obligé de répondre tout de suite. Mais sache que… ce qu’il y a sur ce parchemin. C’est pas un passe-droit. C’est pas parce que t’es comme ma sœur. C’est parce que je pense sincèrement que ta place est là. »

Je lui fis un léger clin d’oeil, et je lui glissais le parchemin dans les mains. Avant de porter un sourire sur elle, je la pris encore par l’épaule, et je la serrai dans mes bras, comme j’avais serré Jameson. On sentait bien, que j’avais besoin de présence en ce moment. Car ça n’allait pas fort.

« Je vais te laisser, j’ai du travail. Réfléchis bien, et porte moi ta réponse en main propre s’il te plait. »

J’amorçais un demi tour. Je fis quelques pas, mais, comme si je voulais dire quelque chose d’important, je me tournais à nouveau vers elle pour dire :

« Si je suis moins présent prochainement, ne t’inquiète pas. C’est normal, j’ai besoin un peu d’air, et d’un peu de temps. »

Faisant tourner mon chapeau, je la regardais d’un air un peu désolé. Et je soupirai, prêt à partir.