Une sombre harmonie #Zion

13.01 Un maigre sourire éclaira le visage de Zion qui continuait pourtant de la regarder avec tout le sérieux que cette situation demandait. En d'autres circonstances, il se serait probablement permis de venir cueillir ses lèvres pour venir sceller cette déclaration mais là, il se contenta de serrer un peu plus fort la main de Freya. Si l'amour était son unique bouclier pour ne pas sombrer face aux tentations de la magie noire, Zion se rassura quelque peu car s'il avait bien appris quelques choses à son contact avec la magie, c'était que les émotions vives et fortes étaient capables d'être de parfait bouclier face à des situations qui semblaient pourtant périlleuse.

Zion lui parla alors de la magie qu'utilisait les Ayodele sans pour autant la nommée. Freya semblait vouloir en apprendre plus. Provoquant une bouche pâteuse comme à chaque fois que le Gryffondor amenait le dossier du vaudou sur la table, il se contenta d'abord de prendre une profonde inspiration.

« - Ce n'est pas quelque chose dont nous avons l'habitude de parler. Le vaudou a tendance à faire peur aux non-initiés. »

Il se racla la gorge, préférant prendre son temps pour lui expliquer tout ce qu'il en retournait. Si le vaudou était vu comme une magie négative en occident, il s'avérait qu'elle n'en était rien puisque le bien et le mal ne faisaient qu'un tronc commun au sein de cette magie où seules les intentions comptaient. Bien sûr, certains pactes pouvaient s'avérer dangereux lorsqu'ils n'étaient pas honorés par les loas mais c'était comme partout : une parole était un gage d'assurance. Et si elle n'était pas tenue, alors la complexité de cette magie se mettait en œuvre. C'était ce qui se passait pour son cousin Zeke.

Zion demanda à Freya si son père était encore en vie. Mais lorsque cette dernière lui parla de tour des âmes, sans qu'il ne sache réellement de quoi il en retournait, Zion écarquilla des yeux face à cette information. Il se doutait, dès lors, que l'âme du père de Freya était en jeu.

« - C'est quoi ? Il a emprisonné son âme ? » Demanda Zion, en parlant de la tour des âmes. « Tu as passé un pacte avec lui ? » Ajouta le Gryffondor dont la voix ne parvenait pas à cacher la crainte qu'il ressentait.

13.01 Quand bien même Freya ne semblait pas effrayée par cette révélation, Zion ne pouvait s'empêcher de garder sa réserve sur le sujet. Le vaudou était un art si décrié dans cette partie du monde que le Gryffondor, qui avait été éduqué dans le secret de leur art, avait toutes les peines du monde pour lui faire entièrement confiance sur ce sujet. Mais Freya semblait sincère. La vie de son père était en jeu et elle ne semblait vouloir reculer devant rien pour y parvenir.

Si cela devait calmer ses craintes sur la découverte de son secret, il n'en fut rien. Au contraire, Zion ne pouvait s'empêcher de se renfermer un peu plus. Peut-être la peur d'être vu comme un nouvel outil pour atteindre son objectif ?

Zion préféra donc se concentrer sur l'étrange situation de Freya. Lui, qui d'habitude, n'était pas très porté sur les introspections, trouvait qu'il en faisait un petit peu trop ces derniers temps. Insécurisé comme jamais, le Gryffondor tentait de garder le contrôle de ses émotions en se concentrant sur le moment présent.

Freya n'avait fait aucun pacte. Zion ne put s'empêcher de soupirer de soulagement. Il serait donc plus aisé de la sortir de tout ce merdier si jamais Freya décidait de faire marche arrière.

Elle lâcha ses mains pour lui montrer un anneau pour le moins étrange. Zion aurait aimé se pencher un peu plus sur cet étrange artefact lorsque Freya jugea le moment opportun pour se serrer contre lui avant de plonger son regard dans le sien comme si elle attendait quelque chose.

Zion ne semblait pas vraiment d'humeur à l'embrasser pendant des heures. Beaucoup trop de choses venaient de se passer pour qu'il s'adonne à ce genre de choses. Il se contenta alors de poser ses mains sur les hanches de Freya pour l'embrasser sans trop d'enthousiasme.

« - Beaucoup de choses à digérer. » Ajouta-t-il, après un bref moment de silence où le Gryffondor ne savait quoi faire.

Il tendit machinalement la main vers l'anneau de Freya pour s'en saisir. Se reculant légèrement de la Serdaigle, il lui montra la bague et d'un air interrogateur.

« - C'est un portoloin ? »

13.01 En écoutant l'explication de Freya sur l'étrange anneau gorgé d'une vile magie, Zion ne pouvait s'empêcher de se demander ce qu'il se passerait s'il l'enfilait sur l'instant. Serait-il emmené dans le fief de son sinistre mentor ? L'envie d'essayer lui traversa rapidement l'esprit avant de finalement détacher son regard du bijou. Cette idée ne lui plaisait vraiment pas. Le Gryffondor n'avait confiance qu'au vaudou lorsqu'il fallait sortir des sentiers de la magie moderne. Peut-être parce qu'elle faisait partie de son héritage ? Peut-être parce que c'était plus clair sur ce qu'il fallait payer lorsque l'on en faisait appel ? Zion n'en savait rien. C'était son ressenti, quelque chose d'inexplicable.

Enfin, lorsque Freya lui demanda s'il était prêt à accepter cette partie d'elle, Zion ne sut quoi répondre. Conservant le silence pour mesurer ses mots, il ne put s'empêcher de plonger son regard sombre dans le bleu polaire de ses yeux. C'était une question épineuse à laquelle il n'avait pas envie de répondre. Une partie de lui lui soufflait de laisser les choses se tarirent entre eux. Pour n'importe qui, la situation de Freya serait un redflag. Elle semblait plus que déterminée à l'idée de se plonger dans cette espèce de vengeance afin de ramener son père. Et l'usage de la magie noire ne semblait pas plus que cela l'inquiétait. Peut-être avait déjà elle mesurer l'ampleur d'une telle chose ? Zion n'en savait rien.

Tout ce qu'il savait, c'était qu'il n'était plus très sûr de la connaître. Elle lui sembla tout à coup très loin de celle avec qui il avait aimé passer du temps ou encore embrassé. C'était une situation qu'il n'aimait pas du tout. Lui, il s'imaginait finir comme ses parents : Auror. La magie noire, même si elle faisait partie du vaudou selon la vision très étriquée de l'occident, n'était pas quelque chose qui cohabitait avec cette ambition.

Mais en même temps, elle avait une motivation qui trouvait son écho chez Zion. Bien qu'il n'ait jamais tenté quoique ce soit pour ramener ses parents à la vie après en avoir longuement parlé avec les siens, le Gryffondor pouvait comprendre ce besoin que la Serdaigle ressentait. Néanmoins... Devait-il seulement se baser sur son intention et vivre dans la peur qu'un jour elle puisse succomber aux ténèbres tentatrices ?

Zion baissa le regard.

« - C'est un jeu dangereux. Même si ton plan de faire la naïve est probablement le meilleur qui soit dans ta situation, il y a de fortes chances pour qu'il en ait, lui aussi, conscience. Généralement, ce genre de sorciers ont toujours un ou deux coups d'avance. Ils sont... Ils sont différents. Comprendre quelqu'un qui ne cherche qu'une chose sinon contrôler ou s'adonner totalement à la plus vile des noirceurs ne peut laisser sous-entendre qu'une chose : c'est qu'il est passé par des chemins que tu n'imagines même pas. Et si, effectivement, il a cette capacité de piéger les âmes... Je ne sais pas si tu te rends compte... Il interfère littéralement sur la conception même de notre monde. »

Qui aurait cru voir un jour Zion aussi mature, lui qui ne semblait même pas savoir lacer ses chaussures ? Le Gryffondor avait peur. Cela se voyait dans le fond de ses yeux. Il avait peur pour lui, bien sûr, mais il avait également peur pour Freya. Elle risquait de se faire avaler par cette engeance des ténèbres sans même s'en rendre compte.

« - Dans ma famille, on affronte toutes les menaces ensemble. Je ne sais pas comment fonctionne la tienne, mais je ne peux que te conseiller de voir avec les tiens. Ma grand-mère a eu vent de certaines rumeurs sur ton clan. Vous n'êtes pas que de simples bardes. Alors, pourquoi ne pas mettre fin à cette menace ensemble ? »

Les limites de sa compréhension étaient franchies.

13.01 « - En ça, nous sommes au moins d'accord. » Avoua Zion, dans un léger sourire, alors que Freya lui faisait part de ses pensées à l'égard de la magie et de son utilisation.

Pour Zion, cela allait même plus loin. Selon lui (et son éducation), il n'y avait pas de bonne ou de mauvaise magie. Tout venait de l'intention, de la volonté du sorcier dans l'exercice de son Mawuena(m), que tout n'était qu'un et qu'un était tout. C'était l'origine même du vaudou, des Bokors dont les Ayodele faisaient partis. Certaines choses se faisaient de la manière la plus paisible, d'autres demandaient un prix parfois terrible pour obtenir ce que l'on voulait. Tout dépendait de ses intentions, de son objectif, du Lwa que l'on invoquait.

À bien des égards, ce mage noir, dont elle s'était faite apprentie, avait tout pour être un lwa en devenir. Zion ne pouvait que le sentir à travers cet étrange anneau que Freya avait posé sur la table. De ce qu'elle lui avait raconté, pour le jeune Webb le doute n'était pas permis. C'était ainsi que les plus grands Bokors étaient devenus des guides. Il leur suffisait d'un suivant pour obtenir le début d'un pouvoir infini. Freya ne se doutait pas un seul instant qu'elle venait peut-être de sceller le destin d'un nombre incalculable d'âmes si ce dernier parvenait à ses fins.

Zion soupira lorsque Freya lui demanda de l'accompagner pour en parler à sa mère. Si le Gryffondor se montrait plutôt enchanté à l'idée que cette dernière dévoile cette information à la matriarche du Clan Cynfeirdd, l'idée d'y être mêlé le dérangeait un peu. Mais cela venait seulement de son éducation où les problèmes d'une famille ne devait être lavé qu'en famille. Que la présence d'un témoin ne pouvait que complexifier les choses et que cela ne pourrait que devenir plus destructeur encore que ce que c'était déjà.

Si Zion était encore bien trop jeune lorsque son cousin Zeke fut limogé par le ministère pour usage de magie noire au cours d'une enquête malgré son intention plus que bonne, il se souvenait également de tous les problèmes qu'avaient du faire face son clan lorsque Chinenye s'était bien décidée à restaurer l'honneur de son petit-fils autant que celui de sa famille quoiqu'en pensait son fils, Chikere qui avait commandé l'exil de ce dernier. Sa grand-mère avait du faire preuve d'efforts et de trésors incommensurables pour rappeler l'intégrité que les Ayodele représentaient depuis leur arrivée en Angleterre, il y a de cela plus de cent ans à cause des répercussions médiatiques que cela avait eut.

« - OK. Je veux bien t'aider sur ce coup-là, Freya. » Marmonna Zion, guère enchanté, mais bien déterminé à lui montrer qu'il serait présent pour elle et uniquement parce que c'était elle.

Le Gryffondor lui tendit alors la main comme s'il désirait conclure ce pacte de mots qui était bien plus profond pour lui que ce qu'il n'y paraissait.

13.01 Freya saisit la main que Zion lui tendait. Un léger sourire se dessina à la commissure de ses lèvres alors qu'il se laissait entraîner doucement vers la sortie de la salle de classe sous l'impulsion de la Serdaigle. Le coeur un peu plus apaisé qu'il ne le fut au début de leur retrouvaille, Zion passa la porte comme s'il laissait ses problèmes au pied de son encadrement. La tête un peu plus légère malgré la rencontre compliquée avec la mère de Freya, Zion semblait déjà plus enclin à regarder l'avenir, plus serein.

La fatigue s'abattit sur ses épaules plus vite qu'il ne l'aurait voulu d'ailleurs. Freya se tourna de nouveau vers lui mais cette fois, elle semblait, elle aussi, plus légère. Zion était beaucoup trop épuisé maintenant pour se rendre compte de la demi-teinte de son sourire alors qu'elle lui annonçait qu'elle envoyait un hibou à sa mère après pour la prévenir de leur entrevu à tous les trois.

Zion sentit son cœur se serrer légèrement avant qu'elle ne lui rappelle qu'il pouvait abandonner l'idée de l'accompagner s'il le désirait. Le Gryffondor se contenta d'hocher de la tête de gauche à droite. Il ne reviendrait pas sur sa décision. Il lui avait donné sa parole et il comptait bien la tenir. Leur relation se voulait baser sur la confiance. S'il lui avait demandé un peu plus de transparence, il se devait, aussi, de montrer l'exemple.

Avant de la quitter, il leva délicatement de son index le menton de Freya pour venir déposer ses lèvres dans un chaste baiser sur le front de la Serdaigle.

« - Essaie de te reposer un peu, quand même. » Fit Zion avant de se reculer pour finalement lui tourner le dos avant d'aller retrouver son lit, quelques étages plus haut.