Sans rien répondre, je me contentais de baisser le regard sur ma boisson et de faire littéralement le dos rond. Mes muscles se contractèrent comme ceux du Lynx pour que je m’abaisse sur mon verre comme si c’était mon seul bien le plus précieux. Comme si le monde extérieur était beaucoup trop dur pour moi. Je me contentais alors de grogner, et de répondre sans regarder Yara :
« Si tu te transformes, l’affaire sera différente et compte sur moi pour te faire rejoindre le Valhalla. » dis-je sans rien rajouter de plus.
Si c’était ce qu’elle voulait après tout. J’essayais de savoir comment elle avait pu en arriver là ? Ce genre de chose devait se sentir. Est-ce qu’elle l’avait refoulé toutes ces années ? C’était certains. Sa haine et sa soif de vengeance avait certainement du faire ce qu’il fallait pour qu’elle ne s’en rende compte que sur le tard.
Alors qu’Olaf allait me resservir, elle lui attrapa le bras et le menaça avec vivacité. De nature douce et gentille malgré son physique impressionnant, il se recula et se contenta d’obéir en grognant quelque chose d’incompréhensible. Mais, un verre d’eau glissa jusqu’à moi. Je le regardais en diagonal, puis Yara. Je me mis à grogner légèrement moi aussi.
« Commence déjà par t’occuper de ton propre cul et de ce que tu ingurgites. » dis-je avec la rage des gens victime de ce maux.
Car clairement, elle avait gâcher la fête. Je savais que lentement, mais surement, mon cerveau allait sortir de son bain d’éthanol pour reprendre les ficelles et les souvenirs nauséabonds qui flottaient à l’intérieur de lui. Je reverrais le visage de Maragaret, implorant ma pitié et mon pardon. Et je reverrai encore ce carreau d’arbalète se ficher dans son front, sans miséricorde.
« Je n’ai pas besoin d’aide. » dis-je alors en me redressant un peu sur mon tabouret. « Et si tu veux aider ma famille, adresse toi à mon Chef de Clan. Nikolai Dagoniat, manoir du même nom, à Tinworth. »
J’émis un léger rire moqueur, curieux de voir le tableau qui allait s’offrir à elle si elle se pointait là bas avec pour vocation de l’aider. Tournant enfin la tête vers elle, d’un geste lent et mesuré, je me contentais de prendre le verre d’eau pour finalement le porter à mes lèvres, signe que je n’étais quand même pas le dernier des imbéciles et que je comprenais malgré ma mauvaise humeur son envie de me protéger un peu.
« Et si tu veux un conseil, vit ta foutue vie comme tu l’entends. J’en ai rien à carrer. Bosse avec qui tu veux, bois avec qui tu veux, baise avec qui tu veux. Peu m’importe. Si tu veux m’aider, redeviens celle que j’ai connu, alors après on pourra reparler. »
Je me levais, prenant mon épais manteau en peau de bête et le remettant sur mes épaules.
« J’en f’rai de même rassure toi. Pour le bien de cette bonne vieille Angleterre hm. »
Je déposais alors les mornilles et les noises pour payer nos boissons sur le comptoir, et j’amorçais un départ silencieux, comme une ombre et un renard rentrant dans son terrier, dans l’optique de terminer ce que j’avais commencé ici, sans être coupé dans mon élan en emmerder par de la jouvencelle.
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