[Septembre 2023] Le stagiaire

Après le long discours de la rousse sur la société magique, le mérite et les raisons de son refus, il se mordit la lèvre. Cracher sa haine de la société et des élites n'était peut-être pas l'idée du siècle... Ce n'était pas tant le faire devant une auror qui était idiot. Cela l'était, mais disons que ça l'était moins que de le faire en plein milieu du ministère où les murs avaient des oreilles, comme le disait si bien sa supérieure. Passant nerveusement sa main dans ses cheveux pour se recoiffer et garder son calme, l'esprit du Gallois chauffa pour trouver une réponse politique correcte.

« J'ai toujours évité l'exclusion du château, mon dossier scolaire ne fait pas de mention d'avertissement ou autre. Je suppose que s'ils ont parlé au concierge, ils savent que j'ai eu pas mal de soucis, mais s'ils ont parlé aux professeurs dans la majorité des cas, j'ai dû avoir des compliments... »

Du moins, c'était ce qu'il pensait. En défense contre les forces du Mal ? Il n'y avait pas de raison... Histoire de la Magie, le professeur était un con, mais il n'avait jamais saqué le Gallois... Non définitivement, il voyait mal qui que ce soit le saborder. Sauf s'ils sont rentrés dans le détail... Enfin, si on devait rentrer dans le détail, il y avait des fils d'aristo qui n'avaient rien à faire dans leur stage. Rien que d'y penser, le cœur du garçon s'accélérait et son regard se faisait mauvais. Pourtant, il faisait de son mieux pour se contrôler.

« Au niveau des notes, si on met de côté les deux premières années à Poudlard... Je n'ai que des notes excellentes. Et quand je dis excellentes, ce n'est pas Effort Exceptionnel... Donc... À moins qu'ils soient remontés à la primaire où il y a effectivement quelques éléments... Erm. Disons à charge, il n'y a pas de raison. Je suis peut-être prétentieux, mais quand je dis que personne n'est meilleur que moi en Histoire de la Magie ainsi que dans toutes les matières littéraires nécessaires pour la politique, c'est la vérité. Je suis très bon duelliste, excellent bagarreur, mais je suis encore meilleur pour... Ce que je voulais. »

Il claqua sa langue contre son palais. Une chose le tracassait. Non, ce n'était quand même pas son dossier à l'école primaire qui avait joué en sa défaveur ? Certes, il avait manqué de peu de se faire exclure pour violence... Il avait frappé un camarade de classe jusqu'à l'envoyer à Sainte Mangouste... C'était ça qui avait autant alarmé ses parents, mais... Non, il était irréprochable depuis. Enfin, pas vraiment, mais son dossier n'était plus marqué au fer rouge, ça, c'était certains. Il l'avait échappé belle plus d'une fois, avec un comportement en dents de scie, sachant jouer ses cartes tout en restant fidèle à un certains code d'honneur. Reprenant peu à peu ses esprits, son sang se refroidissant assez rapidement, il lui adressa un sourire aussi hypocrite que faux. Ce n'était pas qu'il cherchait à lui mentir, non, il se mentait à lui-même. Cherchant à apaiser sa rage, il se contenta de dire avec une mine digne d'un politicien véreux qui cachait des squelettes dans le placard une simple banalité.

« Enfin, je suppose que ce n'est pas grave ! »

Il n'en pensait pas un mot. Pourtant par Merlin ce qu'il aurait voulu... Se concentrant de nouveau sur la mission, laissant sa rancœur pour une autre fois, il se décida à faire du rentre-dedans à la demoiselle. Était-ce sale que de jouer un numéro de charme à quelqu'un par simple intérêt ? Il ne s'était jamais posé la question et il ne comptait pas commencer maintenant. De toute façon, c'était simple, ici, il était en territoire ennemi s'il avait bien compris les indications d'Urielle. Un territoire ennemi dominé par les sangs purs. Alors s'il devait jouer salement pour pouvoir faire tomber un de ces aristocrates consanguins ou un de leur larbin qui servait de faire valoir, ce n'était pas l'aspect Gryffondor qui ressortirait des agissements de Rhys.

« Comment ça joli cœur ?! Désolé de traiter les charmantes demoiselles comme elles le méritent ! »

Jouant le jeu, il ne s'agissait ni plus ni moins que de gagner du temps. En fait, même s'il en faisait trop, ce serait toujours bon à prendre. Visiblement, ce n'était pas le cas et la secrétaire était troublée. Était-ce le charme du Gallois qui faisait mauvais garçon au cœur tendre digne d'une mauvaise comédie romantique ou était-ce le fait qu'elle venait de se faire rentrer dedans et donc bousculé physiquement ? Même si la deuxième option était plus probable, l'ego de Rhys préférait la première. Et alors qu'elle prenait sa défense, Rhys saisit l'occasion de détourner un peu plus son attention.

« Ne vous en faites pas, elle me disputera plus tard. C'est son passe-temps préféré depuis qu'elle m'a rencontré. Mais bon, cela vaut le coup. Je ne pensais pas rencontrer si charmante compagnie ici. »

Juste quelques secondes, c'était tout ce qu'il voulait pour permettre à sa tutrice de pouvoir faire ce qu'elle avait à faire. Soit elle fondait face à cette remarque, soit elle allait le repousser. Finalement cela importait assez peu. Finalement, alors qu'elle se tournait vers Urielle et qu'elles discutaient tranquille, le garçon lâcha la demoiselle, n'ayant plus besoin de la torturer.

Comme on sifflait un chien, sa tutrice lui dit qu'il était temps de partir. Alors d'habitude, le Gallois aurait obéit sans broncher, mais là ça aurait été idiot et suspect. Si les murs avaient des oreilles, les murs sauraient que le stagiaire n'était pas du genre à faire ce qu'on lui disait sans commentaire. Surtout qu'au départ, il voulait aller aux toilettes.

« Mais... Et les toi... »

Regardant vers la secrétaire comme pour ne pas assumer le fait de parler de toute forme de commission devant elle, il soupira de manière un peu exagérée, mais qui collait bien à ses airs un peu exubérants.

« Vous aurez ma mort sur la conscience, vous le savez ça ? Mademoiselle, ce fut un plaisir de vous rencontrer. Si un jour vous passez au bureau des aurors, n'hésitez pas. Je serai ravi de me faire pardonner autour d'un verre ! »

Un baisemain aurait été exagéré. Et un clin d'œil aurait été arrogant et gênant. Il se contenta d'un petit sourire en coin avant de raccompagner sa tutrice jusqu'à l'ascenseur. Dès qu'il fut retourné, il perdit son sourire ne pouvant jouer la comédie plus longtemps. Même si sa nature rusée était parfois de sortie, il n'avait pas assez d'expérience pour maintenir toute comédie plus de quelques minutes. Exténué, il haussa un sourcil à la réflexion de la rouquine. Puis il eut l'illumination du sous-entendu. Ne surtout pas parler de la mission tant qu'elle ne lui dirait pas de le faire. Génial... Soupirant de nouveau, il se contenta de parler pour deux, lassé.

« Quoi ? Vous allez me faire la morale ? Je vous jure que vous ne connaissez pas les serpentards que je connais. Xris par exemple... Je vous jure qu'il n'y a pas plus énervant que lui. Il est beau comme un dieu ! C'est injuste. Normalement, les mecs beaux sont débiles. Mais lui non, en plus il est brillant, doué au quidditch... Par contre niveau émotionnel, le mec, c'est le pôle nord. Il est aussi humain qu'un caillou ! Et il est coincé... J'en connais des mecs qui ont un balai dans le cul, mais lui, c'est tout le placard qu'il a ! Il pourrait aller sur la lune sans soucis. Enfin bref... Elle est mignonne cette Nicolette... Vous la connaissez bien ? »

Bien sûr, il aurait bien demandé si le Popplewell dont il était question avait un lien avec l'élève de Poudlard, mais finalement si les murs avaient des oreilles, il préférait passer pour une tête de gland qui ne pensait qu'avec ce dernier.

« Ne me regardez pas comme ça, c'est de votre faute si je parle autant. Il faut bien que l'un de nous deux comble les silences ! Sinon je vais entendre l'air passer entre mes deux oreilles. »

Là encore, c'était un peu forcé, mais jouer les idiots, cela faisait six ans qu'il le faisait au point que c'était devenu une seconde nature. La dérision était sans doute le meilleur bouclier contre la fatigue qu'il ressentait tout de suite. Quand on lui avait parlé d'être auror, il avait imaginé des sortilèges interdits, des mages noirs, des embuscades... Pas des surveillances ennuyantes. Ceci dit, il ne s'était pas ennuyé, grâce à elle.

« Par Merlin j'ai envie de pisser... »