Genius (Lennox)

Depuis tout petit, je nourrissais une certaine amertume envers les parents de cette famille qui ne s'occupaient de leurs enfants que lorsqu'ils n'avaient rien de mieux à faire. Ce n'était pas forcément vrai, je savais mon point de vue biaisé, mais je ne pouvais m'empêcher de vivre avec ce ressentiment depuis que j'avais l'âge d'exiger de mes parents - les deux - une journée complète, que ce fut pour mon anniversaire ou pour Noël. Que vous le croyiez ou non, il se passait toujours un truc pour que je parvienne à finir cette journée avec les deux réunis. Avec le temps, en vieillissant, c'était devenu aussi rare qu'une neige en plein désert subsaharien surtout maintenant que mes deux parents avaient divorcé. L'un autre au Département des Mystères, l'autre à la tête de l'Institut, bref, des trucs qui restaient malgré tout très MacGregor.

Peut-être était-ce aussi à cause de la disparition de mon enfant ? Cela n'avait fait que s'exacerber avec le temps. À l'instar de mon cousin @Nero MacGregor, j'avais développé une certaine attitude vis-à-vis de la famille qui voulait que lorsque je prévoyais quelque chose avec l'un d'entre eux, ma journée dût se terminer avec. Tout du moins, je me devais d'aller jusqu'au bout de l'entrevue, même s'il s'agissait de s'occuper de Mamie Chat en l'amenant chez un toiletteur ou autre. Tant pis s'il y avait une urgence ou autre. Comme je disais souvent, je travaillais sur des pièces vieilles d'un millier d'années, elle n'allait pas disparaître si je prenais quelques heures de plus. Malgré cette amertume, j'arrivais à passer outre pour vivre une vie plus ou moins normale.

L'arrivée d'Aurore dans nos vies me fit le plus grand bien. Peut-être parce que je désespérais un jour de retrouver mon enfant, elle combla certains de mes besoins comme la présence naïve et candide qu'un enfant amenait dans la vie des adultes. Elle me rappelait beaucoup de choses qui ne pouvaient me faire que du bien. Une petite chipie à qui je parvenais difficilement à dire non. Je ne pouvais m'empêcher de retarder mes travaux lorsque je la croisais dans le domaine familial. M'asseoir à ses côtés pour lui lire un livre ou l'aider à coiffer ses poupées, c'était quelque chose que je faisais avec une véritable passion. On était devenu copain et copine, même si c'était souvent moi qui me retrouvais maquillé ou coiffé de bien des façons.

Aujourd'hui, j'avais mes cheveux poivre et sel suffisamment courts pour qu'elle ne parvienne pas à faire ce qu'elle en désirait. Je ne pus m'empêcher de rire lorsqu'elle me proposa de boire une potion capillaire pour augmenter rapidement ma pousse afin que ce soit plus facile. Même si l'idée était alléchante pour mettre un joli sourire sur le visage de ma petite tête blonde préférée, je lui expliquai qu'il était important de laisser faire les choses. Je ne sais pas si elle comprit réellement tout ce que je lui dis - je partais généralement trop loin pour un adulte alors pour un enfant - mais je finis par résumer que la nature avait été faite ainsi et qu'il fallait la respecter. Oui, j'étais, parmi les MacGregor, celui qui s'engageait pour toutes les causes du coin. Je cherchais probablement à combler quelque chose.

La présence d'Aurore me guérissait. C'était peut-être aussi pour cela que j'aimais passer du temps en sa compagnie. Si les premières années, je refusais de la prendre dans les bras, prétextant la fragilité de ce petit être, je ne pouvais m'empêcher de m'extasier lorsque je la voyais commencer à se déplacer ou à parler aux gens qui l'entouraient. Je pouvais imaginer alors comment aurait été la vie en compagnie de mon enfant. Et même si cela m'était difficile de vous le dire, de vous l'expliquer, il y avait quelque chose de bénéfique là-dedans. J'avançais plus que ce que je ne le pensais. Peut-être qu'un jour je serais prêt pour refaire un enfant ? Bien sûr, il faudrait que je me retrouve une nouvelle sorcière pour cela.


Je laissais Aurore quelques instants dans l'immense salon recouvert de trophées ramenés des expéditions par le reste de la famille pour me rendre dans la cuisine où j'allais me faire un café le temps de lui préparer son goûter. Un verre de jus de citrouille et un muffin de Fortârome avaient été sa demande, alors en tant que le meilleur tonton, je me devais de m’exécuter dans la préparation de son encas.

Un sourire ornait mes lèvres. Je l'entendais jouer, et cela me suffisait à calmer certaines douleurs qui me revenaient de temps en temps. Un traumatisme, hein ? Oui, un traumatisme. Vous ai-je dit que j'avais refait toute la sécurité du domaine quand je sus qu'Aurore allait probablement y passer une bonne partie de son enfance ?

Je secouais la tête, chassant mes sombres pensées que je tentais de noyer dans ma tasse à mesure que je me versais un café. Je reposais la cafetière pour me retourner vers la grande table afin d'installer ma tasse non loin du goûter d'Aurore lorsque je vis enfin la présence de Gabriel, le père de ma petite nièce ou cousine ou que sais-je, devant moi. Ne m'y attendant pas, je sursautai.

Un sourire vint se loger à nouveau sur mes lèvres après que mon visage est trahi par ma surprise.
« - Elle voulait que je prenne une potion de pousse ! »
Lui répondis-je, l'air faussement énervé.
« - Aurore est dans le salon. J'ai un œil et une oreille dessus. »
Je me devais de le rassurer. Ou peut-être était-ce moi que je tentais de rassurer ? Certaines blessures me faisaient la vie dure.
« - Je me faisais un café pour l'accompagner dans son goûter ! Tu en veux un ? Il n'est pas aussi bon que celui d'@Iris Faux-Orpin - cette femme a un véritable don, je te jure, Gabriel - mais je me débrouille ! »

Je n'attendis pas forcément sa réponse que déjà je saisissais une tasse accrochée sur le mur de la cuisine pour la lui remplir de mon breuvage ambré que je lui poussai le long de la table avec un sourire. Le sucrier s'anima tout seul, sautant du centre de table pour s'approcher de Gabriel.

Par acquit de conscience, je ne pus m'empêcher de regarder mon café avec un petit regard plissé avant d'éclater de rire. Aurore faisait déjà preuve d'une ingéniosité qui surpassait très clairement les autres enfants de son âge. Avais-je un point de comparaison pour en tirer cette conclusion ? Non. Et alors ? Elle était forcément la meilleure vu qu'elle était ma nièce. Je me fichais bien de ce que faisaient les autres enfants. De toute façon, par mon travail, j'étais très rarement à leur contact. Lorsque ma mère annonçait les portes ouvertes de l'Institut de Découverte et d'Exploration magique aux classes de Cracbadaboum, j'évitais généralement de me trouver dans les locaux pour travailler.

« - Iris m'a expliqué sa façon de faire qui n'est pas bien différente de la façon dont on fait du café. Elle m'a dit y mettre tout son amour et j'avoue ne pas avoir compris ce qu'elle voulait dire en disant cela. » Répondis-je, mes sourcils froncés trahissant mon incompréhension face à ce problème dont la réponse était pourtant facile à comprendre, mais que mon cerveau refusait d'assimiler. « Mais j'aime bien le mien ! » Fis-je en levant ma tasse vers Gabriel, avant de le porter à mes lèvres.

Tout à coup, on entendit Edwin rouspéter, râlant à propos d'une eau qui dégueulassait son beau tapis touareg qui ornait le sol de son bureau. Je ne retins d'éclater de rire, redoublant d'efforts lorsque j'entends Aurore éclatait de rire à son tour. Un peu plutôt, nous lui avions tendu un piège en nous demandant quand est-ce qu'il se prendrait ce magnifique seau d'eau dans la figure. Bien sûr, ce piège avait eu un côté ludique puisque j'expliquai à Aurore les lois de la gravité en même temps.

« - Comme tu peux l'entendre, je n'ai pas travaillé beaucoup. » Je n'avais pas l'air agacé, bien au contraire.

Mon visage orienté vers le bureau d'Edwin, je reportai mon attention vers Gabriel. Peut-être trop préventif, ou peut-être ne voulait-il pas donner l'impression de s'imposer, il était toujours en train de donner l'impression de s'excuser lorsqu'il s'agissait de ma nièce, comme si j'étais de ceux qui pourrait le juger étant donné la nature conflictuelle de sa relation avec ma cousine.

Personnellement, je n'en avais rien à faire. Je ne prenais pas parti pour la simple et bonne raison que si j'avais un parti à prendre, ce serait très certainement celui de Gabriel. J'avais passé une grande partie de mon enfance puis de mon adolescence à essayer de capter l'attention de mes parents, fatigués de devoir les suivre aux quatre coins du monde si je souhaitais passer du temps avec eux. Et même-là, je me retrouvai à devoir m'occuper en patientant quelques longues heures pour avoir leur regard ou espérer partager mon repas en leur compagnie.

Voir @Sorcha MacGregor refaire les mêmes bêtises que celles que nous subissions petit via nos parents m'attristait plus que ce que je voulais bien en dire. Mon rapport au temps passé à la famille n'avait fait que se détériorer maintenant que je vivais sans mon enfant. La chance de ne pas refaire les mêmes bêtises que mes aînés au sein du clan MacGregor m'avait été retirée. Combien de fois m'étais-je demandé si j'avais pu faire mieux si l'occasion m'avait été donnée ? Je préférais noyer ma réflexion dans le café que je portais à mes lèvres.

« - Elle est de ma famille, Gabriel. C'est un privilège de pouvoir partager quelque chose avec elle. » Pas besoin d'en dire plus pour qu'il comprît ce que je voulais bien insinuer par ces mots.

J'espérai, par la même occasion, qu'il éviterait à l'avenir de voir le temps passé avec ma cousine comme une corvée dont je voudrais me débarrasser.

« - De rien. » Répondis-je lorsqu'il me remercia pour le café.  « Super. Ce matin, ce fut compliqué de me tirer du lit. J'ai encore du mal à me dire que j'approche la cinquantaine et que les nuits blanches ne sont pas forcément le meilleur comportement à adopter. »
Un sourire amusé se dessina sur mes lèvres alors que je me levai pour sortir une boîte de biscuits. Ils étaient semblables à ceux de ma cousine Sorcha, sauf que ceux-ci étaient mangeables.

Je piochai dedans avant de lui montrer la boîte pour qu'il se serve à son tour. Trempant mon biscuit dans mon café, je répondis :
« - Je bosse sur une palette retrouvée près de Tuna el-Gebel. C'est un véritable bijou archéologique. Superbement bien conservé, on l'a retrouvé dans une espèce de grotte de vieux sorciers dont on soupçonne leur appartenance à la noblesse de Narmer. Plus de 3200 ans, tu te rends compte des secrets qu'on pourrait y trouver ? » Je parlais comme un passionné. J'étais un MacGregor, même si j'essayais parfois de nager à contrecourant.
« - De ce que l'on sait, c'était des gens qui étudiaient l'immortalité. Certains de leurs squelettes nous ont montré qu'ils parvenaient à vivre plus de deux cents ans, tu t'en rends compte ? »
Et nous qui peinions à atteindre les 120 ans. Nos civilisations s'étaient améliorées, pourtant, ils vivaient mieux et plus longtemps. De quoi laisser songeur sur nos comportements dans la vie de tous les jours.

« - Fergus est passé. L'enquête avance ? Si je ne dis pas de bêtise, c'est la même organisation qui a attaqué le clan du petit, hein ? Comment il va ? » Demandais-je sans essayer de cacher mon inquiétude derrière mes mots que je prononçais après avoir avalé mon biscuit imbibé de café.

J'aimais le café d'@Iris Faux-Orpin, et il était rigolo de constater que quiconque goûtait son breuvage tombait irrémédiablement dans les mailles de sa décoction. Cela n'avait beau être que du café, sa boisson donnait surtout l'impression d'être une potion contre la dépression capable d'affronter n'importe quel détraqueur au même titre qu'un patronus. Elle était douée. J'avais toujours trouvé regrettable de la voir uniquement à l'accueil de l'entreprise de ma mère. Pour autant, cela semblait lui plaire. Elle était rudement douée, d'ailleurs. Elle se coltinait certains énergumènes avec brio, là où beaucoup auraient fini par exploser (dont moi).

Notre discussion s'orienta sur mon activité de la journée après qu'Edwin ait râlé sur la farce qu'Aurore et moi lui avions tendue. Gabriel semblait taquin sur nos occupations. Je ne pus m'empêcher de rire, trouvant la situation très drôle. C'était ce genre de choses que j'aimais faire pour passer le temps avec Aurore. Ça lui permettrait d'avoir de vrais souvenirs sur notre famille si particulière. Ce n'était pas parce que je n'avais plus mon enfant, et que j'avais rejoint l'Institut de ma famille que j'étais devenu un être aussi fantomatique pour les siens que pouvait l'être un MacGregor.

C'était toujours un sujet épineux pour moi. Je me fichais bien d'avoir l'air d'un sale gosse pas fichu de grandir. L'ironie du sort voulu que la seule MacGregor à peu près accessible de la famille n'était autre que @Marleen MacGregor. J'avais beau l'aimer comme ma sœur le fait était que sa profession me levait le cœur à chaque fois que je la voyais en uniforme. C'était, très certainement, à cause de cette vilaine blessure que je cherchais à guérir, sans pour autant y arriver. C'était comme être la Lune qui passait le plus clair de son temps à courir après le Soleil. Peut-être qu'un jour, à la manière d'une éclipse, je retrouverais mon enfant ?

« - La première couronne de Pshent... » Répétais-je, rêveur.

Qu'est-ce que j'aurais aimé pouvoir la tenir entre mes mains et constater toutes présences magiques... Je m'imaginais l'espace d'un instant la saisir et sentir mes mains vibrées sous la puissance de l'objet. De par son importance et son histoire, elle devrait cacher d'innombrables secrets et peut-être même révéler la vérité sur ces dieux dont nous ne savons rien ? Contrairement au Dieu unique dont nos principales recherches en occident nous ont amenés à croire qu'il y avait bien quelque chose sans que l'on puisse réellement se prononcer, une théorie reprise par beaucoup d'archéologues ou de briseurs de sorts voulait que ce soit les tout premiers sorciers du monde. C'était une idée, mais jamais nous n'avions trouvé quoique ce soit en ce sens non plus. Le mystère restait entier. Et avec la couronne de Pshent, il était quasiment sûr qu'on y trouve des brides de réponses !

Je n'étais pas un croyant au sens strict du terme. Je ne pensais pas que les religions étaient nécessaires quand bien même je les trouvais utiles pour avoir préservé l'humanité pendant toutes ses années. J'avais des débats endiablés avec des amis à moi, que ce fût ici ou au Moyen-Orient sans pour autant me permettre de blasphémer, je maintenais ma position sur l'existence d'un quelque chose qui nous reliait tous, qui était à la source de toute création, sans pour autant abonder croire en leurs idées. Ils avaient beau me montrer certaines preuves qu'ils jugeaient irréfutables, moi, j'avais un réel besoin de constater la véracité de leurs arguments.

Ma position me faisait rire. J'étais un utilisateur de la magie, un sorcier, mais je ne défiais littéralement les règles de la normalité imposée par nos amis les moldus, et je n'arrivais cependant pas à croire à 100% à leurs arguments. Bref, encore une fois, on parlait d'un truc et je finissais sur un autre. Je relevais la tête vers Gabriel, me trahissant encore une fois sur ma réflexion trop poussée, mais surtout hors sujet (même si j'étais capable de prouver le contraire, mais on n’allait pas s'en sortir).

« - Désolé, j'ai... J'ai perdu le fil. » Fis-je en haussant les épaules, l'air désolé.

Je relançai un sujet de conversation pour ne pas perdre la conversation avec Gabriel en lui parlant de Fergus que j'avais croisé récemment pour ses histoires de runes sur un bâtiment dont je ne connaissais rien de rien. Visiblement l'enquête qui les animait tous deux n'avançait pas vraiment et au vu de la situation, je ne pouvais que comprendre, levant un sourcil, constatant avec surprise que cette organisation semblait être particulièrement violente. Ce n'était pas vraiment le cas de la Main d'Atoum qui me sortait parfois par les yeux, me forçant à tirer la baguette magique pour me défendre. Le Thanatos semblait être déjà trop présent parmi nous et pourtant, personne n'en savait quoique ce soit.

J'écarquillai les yeux devant l'explication de Gabriel. Un désir de vengeance ? Mais de qui ? De quoi ? Pourquoi ? Pour quelles raisons ? Qu'est-ce qui pouvait animer une vengeance pour qu'un clan d’Écossais (un clan d’Écossais en plus ! (Les CLEARWATER en plus ! Et même les McGil Fhaolain qui était le clan le plus autarcique de tous les clans d’Écosse)) se fasse attaquer de la sorte ? @Sorcha MacGregor et moi ne faisions que nous croiser en ce moment. Peut-être qu'elle en savait davantage ? Au vu du lien qui l'unissait au chef des Aurors, peut-être qu'elle ne lui avait pas tout dit juste pour l'embêter ? Ou l'occuper ? Ou peut-être était-elle de connivence avec les Clearwater qui souhaitaient faire cavaliers seuls ? C'était un des derniers clans importants aux idées bien trempées où les relations avec l'Angleterre étaient entretenues pour dégénérer rapidement au besoin.  

Je m'inquiétais réellement.

Gabriel préféra changer de sujets. En parlant du sceptre de Ptah, ce fut comme si une ampoule venait de s'allumer au-dessus de ma tête.
« - Je m'inquiète sincèrement sur l'étendu de mes recherches, tout à coup. Si le Thanatos cherche à combattre la mort comme il me le racontait, je devrais peut-être faire un peu plus attention. » Fis-je en baissant la tête, signe de ma réflexion.

Je passais ma main sur mon menton où je sentais que ma barbe repoussait. J'aimais bien quand elle était comme ça. Douce et rugueuse en même temps. J'arrêtais de la caresser, sentant que ça me distrayait plus que m'aider dans ma concentration.
« - La palette que j'ai entre les mains à l'Institut, outre le fait qu'elle soit de la même époque que la palette de Narmer, pourrait me donner des pistes sur la longévité des sorciers de l'époque, et... »

Je ne savais pas trop quoi en penser, mais je ne parvenais pas à cacher mon trouble. J'étais devenu plus courageux en vieillissant. Bien sûr, je n'étais pas un Clearwater ou un Auror. Il y avait certaines choses que j'étais capable de faire, et même si je ne doutais jamais de mes capacités magiques, le combat n'était pas une chose dans laquelle j'excellais particulièrement. Juste assez pour survivre des attaques de pillards ou de la Main d'Atoum, comme on nous le rabâchait depuis des mois. D'ailleurs, et c'était bien stupide et j'allais en parler à ma mère dès que possible, mais il ne serait pas idiot que les sorciers de l'Institut aient des formations de combats magiques.

« - Je ne sais pas trop pour le sceptre. Ptah était une divinité liée à la création. Mais si ce genre d'artefacts est bien sur le marché noir, alors, je comprends que certaines organisations soient aux quatre cents coups. »
Je ne faisais pas bien avancer la discussion. C'était comme si je venais de faire le parallèle entre... Entre toutes ces histoires. L'idée d'y être impliqué personnellement ne me faisait clairement pas rêver. Pour autant, défier les lois de la magie, puis de manière plus large, les lois de la vie me perturbaient beaucoup. C'était à l'encontre de mes principes. Si on a le savoir, si on a la possibilité de connaître ce qui nous entoure, ce n'était pas pour remodeler notre réalité à notre aise !

Malgré moi, un léger sourire vint se dessiner sur mes lèvres. C'était exactement ce que m'avait sorti un candidat pour un poste que j'avais ouvert récemment. Un certain Amastan Mesli.

« - C'est surtout que si le but de cette organisation est de combattre la mort, au vu de mes travaux, je pourrais potentiellement les intéresser, et cette idée me... » Faisait froid dans le dos. Je regardais Gabriel, l'air stressé. Ce n'était pas que je ne savais pas me défendre, bien au contraire, grâce au métier de Briseur de sorts, j'avais acquis des réflexes. En vingt ans, j'étais devenu assez bon, sans vouloir me jeter des fleurs. Peut-être pas autant que le chef des Aurors qui devait probablement se battre tous les jours ou presque, mais j'étais assez content de moi. Puis vu ma figure, je bénéficiais toujours d'un effet de surprise. Qui penserait qu'un nerd tel que moi pourrait vendre durement sa peau ?

Si je découvrais le secret de longévité de ces sorciers de l’Égypte antique, peut-être voudraient-ils en savoir plus ? C'était surtout en cela que j'avais peur. Je n'avais peut-être pas la meilleure des vies, mais l'idée qu'une telle menace puisse planer sur mes épaules me mettait dans une situation inconfortable me rappelant ma lâcheté du temps de la guerre sorcière avant que finalement je ne prenne part à la dernière bataille de Poudlard. Je soupirai, me résignant à cette idée. Je n'allais tout de même pas arrêter de travailler. Je pouvais mourir de bien des façons dans mon métier, alors une de plus ou de moins ne devait pas m'effrayer pour autant.

« - Oui, c'est vrai. En Angleterre, nous sommes plutôt tranquilles. Puis en Égypte, nous avons le Nazar qui font du bon travail malgré cette main d'Atoum. »

À croire que le monde entier semblait crouler sous le nombre de menaces. Il était loin le temps de l'insouciance de mon jeune âge de l'époque.

« - Non, t'inquiète. On est tranquille, ici. » Avec Aurore dans les parages, j'avais fait de mon mieux pour mettre un niveau de sécurité décent sur le domaine (en plus de celui de mes ancêtres). « Il faut savoir que Ptah est un dieu créateur, en plus d'avoir un puissant symbole de justice et de vérité. On peut supposer énormément de choses sur la puissance de cet artefact s'il est à la hauteur de son nom et de ce que l'on peut imaginer. »

Ptah était le dieu créateur dans l’Égypte antique. Considéré comme le père des dieux, il jouissait d'une réelle influence auprès des Égyptiens de l'époque, surtout qu'il était capable d'entendre les prières de ses partisans. Il aurait conçu le monde par sa pensée, qu'il aurait réalisée par son Verbe. Vous saisissez l'ampleur d'un tel sceptre si mes idées s’avéraient exactes entre les mains d'une organisation comme celle d'Atoum ou de ce Thanatos ?
« - C'est une discussion bien sombre pour un papa qui vient chercher sa fille. » Fis-je avec un sourire pour tenter de désamorcer cette espèce de tension dans laquelle j'avais l'impression que l'on s'enfermait. Gabriel était probablement habitué à ce genre de conversation, pas moi.

Je fus bien content de le voir changer de sujets. En effet, nous avions recruté quelques personnes dernièrement. Je pensais à ma nouvelle aide de terrain, mais aussi aux petits jeunes qui venaient grossir les rangs de l'IDEM le temps de quelques mois (@Apolline Dunn, @Michel-Ange Grimm ou encore celle que je supervisais : @Théa Rosewell). Ils avaient l'air intéressants, mais je ne m'exprimais jamais sur les apprentis. Ils étaient très souvent jeunes et leurs idées étaient parfois trop fantasques. Ce n'était pas forcément une mauvaise chose, car cela nous permettait toujours d'avoir un autre point de vue plus neuf, même si des fois, il m'arrivait d'en rire gentiment.
« - Je pense que ça va pouvoir le faire, comme toujours. Faut juste qu'ils se rendent bien compte des dangers que l'on peut rencontrer... Peut-être, les cadrer un peu aussi sur leur fougue. Mais je suis assez mal placé pour leur dire quoique ce soit là-dessus. » Fis-je avec un éclat de rire.

Je restais malgré tout un MacGregor. Le danger, c'était toujours un peu rigolo et pris avec dérision. On était pas les mieux placer pour leur faire comprendre les enjeux que l'on pouvait rencontrer. Surtout lorsqu'il fallait faire des tests : appuyer sur le gros bouton rouge ? Bien sûr ! Et advienne que pourra !

Mon rire perdura quelque peu en me remémorant la bagarre que nous avions eue avec @Fergus Clearwater.
« - Tu aurais vu la bataille que nous avions eue avec Fergus contre un golem dans les locaux de l'IDEM. » J'essuyais le coin de mon œil. « Je crois qu'on devrait plutôt nous interdire de former des jeunes si tu veux mon avis. »

Un souvenir intense qui restera marqué au fer rouge dans ma mémoire. Plus sérieusement, je lui demandai :
« - Tu veux que j'aille te chercher Aurore ? Ou tu préfères t'y rendre toi ? Elle doit être en train de lire le dernier numéro de Boulbrax que @Nero MacGregor lui a ramené la semaine dernière ! »
Ce bon vieux Nero. Lui et moi, nous avions pas mal de choses en commun. Notamment concernant les enfants.

Gabriel n'avait peut-être pas connu cela, mais pour ma part, je n'étais pas si sûr de la sécurité de Poudlard. Bien sûr, elle restait à mes yeux comme étant l'une des places sorcières du monde de la magie les plus sécurisées du monde, mais pour y avoir vu les gens s'y battre à plusieurs reprises, je ne pouvais m'empêcher d'y émettre quelques réserves silencieuses. C'était quelque chose dont nous étions tous plus ou moins ressortis changer. Moi, le premier. Quand je voyais certains élèves de ma promotion comme @Braxton Clearwater, je ne pouvais décemment plus penser Poudlard comme étant une place forte. Elle restait, malgré tout, puissante, protectrice, mais il y avait ces souvenirs qui... Disons que j'étais bien plus en sécurité ici, au domaine, quoique je pouvais penser de ma famille et de leur façon de gérer leurs relations familiales.

Peut-être intégrerais-je Poudlard pour m'assurer de la sécurité d'Aurore lorsqu'elle sera en âge de devenir étudiante ?

C'était une idée qui me plaisait. Je tenterais probablement d'y enseigner la botanique. Faire d'une de mes passions un métier était probablement un de mes plus grands rêves. Je n'avais pas trop à râler sur celui que je faisais actuellement, puisque je m'y amusais beaucoup.

« - Fergus est très bon ! Son seul souci, c'est d'être un Clearwater. » Rajoutais-je derrière Gabriel, en m'esclaffant comme un gosse. Ils étaient tous fous dans cette famille. C'était quelque chose que je leur enviais un peu au fond. Une famille soudée, fêtarde, terriblement Gryffondor, même si certains finissaient à Poufsouffle ou Serdaigle.

J'eus un petit sourire plein de tendresse en revoyant @Fergus Clearwater plus jeune. Lui, et la petite Lucy, accompagnée d'Arya, à faire les quatre cents coups jusqu'à être rejoint par les autres. Cela aurait pu être un de mes désirs les plus chers de fonder une petite tribu avec mon ex- si l'on ne nous avait pas enlevé mon fils. On aurait probablement continué et j'aurais troqué ma frustration de ne pas être aux quatre coins de la planète contre celle du manque de sommeil sans hésiter une seule seconde.

Je regardais Gabriel sortir de la pièce pour aller récupérer ma nièce dans le salon avec un sourire quelque peu nostalgique, perdu entre le rêve et la dure réalité de la vie. Ma tasse de café me réchauffait l'intérieur des mains. Je me demandais comment serait ma vie si mon gamin ne m'avait jamais été retiré. Mes yeux étaient larmoyants lorsque Gabriel et Aurore revinrent dans la cuisine. Aussi, je me dépêchai de les essuyer d'un revers de manche pour ne pas provoquer de questions indiscrètes auquel je n'avais pas envie de répondre que ce fut au chef des Aurors ou à ma nièce préférée.

« - T'excuses pas d'être un enfant, ma puce, et profite tant que tu peux. » Lui fis-je, avec un clin d’œil encore humide.

Gabriel enchainait sur l'anniversaire de @Nero MacGregor. Un sourire se dessina sur mes lèvres pour ce cousin avec qui j'avais tant à partager. Je ne dis rien, pensant à ce petit couteau suisse que j'avais déjà bien empaqueté dans un coin de mon appartement pour le moment venu. Il était toujours ailleurs, à gauche ou à droite, en Angleterre ou ailleurs. C'était un homme torturé qui ne pouvait s'empêcher de continuer sa pénitence pour quelque chose dont il n'y était pour rien. Malgré ça, je ne pouvais décemment pas lui en vouloir, le comprenant peut-être mieux que quiconque bien que je pouvais toujours caresser l'espoir de revoir mon fils un de ces jours. Du moins, l'espérais-je lorsque j'avais des élans de naïveté que je ne saurais expliquer.

« - T'inquiète, Gabriel, c'est pour moi. »
Me devoir quelque chose parce que je passais du temps avec ma nièce... J'haussais les épaules en secouant la tête tellement cette idée me paraissait saugrenue. Je lui fis un sourire malgré tout.
« - Essaie de lever un peu le pied avec le travail. Ça te ferait un peu de bien de penser à toi, un petit peu. »

Il pouvait bien y mettre ce qu'il voulait derrière, car c'était particulièrement ouvert pour lui laisser suffisamment de liberté pour croire ce qu'il voulait. J'espérais bien le voir refaire sa vie un de ces jours, histoire que ça le soulage  un peu de sa relation avec ma cousine @Sorcha MacGregor. C'était compliqué de se lier à un MacGregor, et le pauvre, il en faisait les frais tous les jours, maintenant qu'il nous était lié par la présence de sa petite princesse.

Je me mis à genou en écartant les bras pour faire un câlin bien fort à ma petite nièce que je serrais contre mon cœur. Je lui embrassai le front avant de me relever doucement pour tendre la main à son père.
« - À plus tard. » Lui fis-je avec un sourire plein de chaleur.
Je jetais un dernier regard à ma nièce, lui saisissant doucement son petit nez de frimousse avant de disparaître dans le couloir pour rejoindre la bibliothèque du domaine avec un air revigoré.