Surrender (Luke)

Le mot avait été passé pour l'ensemble des étudiants qui avaient pris les potions, leur professeur @Ewan Nilsen avait été noté absent pour aujourd'hui, laissant un trou béant de deux heures dans leur emploi du temps. Mais loin de s'en réjouir, ni de s'en sentir désappointer par un cours pourtant si important pour les MULOTs s'annuler à la dernière minute, la Serdaigle se dirigeait vers le premier étage, quittant précipitamment les cachots pour échapper aux murmures des autres camarades de classe faisant déjà des plans pour faire passer l'heure de creux qu'ils avaient.

Cela faisait quelques jours que Yeleen avait une routine presque inhabituelle, si on avait eu pour habitude de l'observer, il était fort probable de mettre en cause ses regains d'énergie sous le compte de potions qu'elle ne prenait plus depuis la fin de l'année précédente. Muette 24/24h, 7/7jr, la Serdaigle passait pourtant presque inaperçue pour une grande majorité de sa promotion, étant la première à se présenter en cours pour être la première à partir sans s'arrêter pour poser des questions à ses professeurs. Assimilant les cours avec une autre facilité, elle passait du temps à la bibliothèque, plus que d'habitude, s'exerçant avec la magie informulée depuis le début de l'été en espérant ne jamais rater son coup.

Mais au delà de cette nouvelle façon d'appréhender la magie et les cours à Poudlard, c'était depuis la rentrée que Yeleen était seule. Bien que la veille, elle s'était encore mis en binôme avec sa cousine @Apolline Dunn pour le cours d'étude des moldus, la jeune Serdaigle était absente des foules présentes dans la Grande Salle ou même dans les parcs le week end, abandonnant sourire, froncement de sourcil et autre source de douleur qu'elle n'arrivait plus à contenir depuis de nombreux jours. Pourtant chacune de ses pensées n'allaient que pour une seule personne, guettant le moindre son, la moindre de ses paroles ou de ses regards qui étaient de moins en moins à son attention.
Egoïstement, Yeleen s'était repliée dans le Quidditch, dans les livres et dans tous ce qu'elle n'avait pas en commun avec d'autres camarades de classe au même moment, fuyant volontairement leur présence comme pour tenter de se retrouver elle-même.

Ouvrant une salle de classe vide, elle s'y enferma pendant quelques minutes, soufflant péniblement en fermant les yeux, tentant de se reprendre de toutes ces journées où elle se forçait à présent à éviter Sean, tout comme lui l'évitait également. Pour faire simple, elle se sentait désaccordée depuis la fin de l'été, comme si tout ce qu'elle avait de plus précieux lui avait échappé depuis le retour de Sean. Elle avait beau tenté de le retrouver, elle sentait bien qu'il n'avait pas besoin d'elle, il lui faisait comprendre à chaque regard qu'il détournait d'elle.

Loin de vouloir se sentir aussi faible, elle jeta un œil sur la leçon de classe encore affiché au tableau pour les années inférieurs. Transformer un rocher en fleur, 1ère année. Elle esquissa un sourire, levant sa baguette sur un des pupitres où trônait une pierre et tenta de se le transformer, s'aidant de tous ce qu'elle avait appris d'Amastan durant cet été : concentrer son énergie entre ses mains, ressentir la magie inhérente à Poudlard. Sa main trembla, faisant bouger le vulgaire caillou qui ne souhaitait à cet instant là prendre l'aspect délicate de la fleur qu'elle aurait du devenir.

Alors par dépit, Yeleen se jeta sur la pierre pour la balancer de l'autre coté de la salle, cassant le carreau de la fenêtre au passage et étouffa un hoquet de surprise en voyant les dégâts qu'elle venait d'occasionner. Elle manquait déjà de patience depuis plusieurs jours, répondant rapidement, hâtivement pour vite en finir, quelque soit la nature de la conversation. Mais elle du se retenir contre la porte au moment où elle remarqua son professeur de métamophose dans un coin de la salle l'observer et se raidit à l'instant où elle comprit que la seule personne à présent témoin de son véritable état n'était nul autre que son directeur de maison.

"Je vais réparer ça." signa-t-elle rapidement en se reprenant alors que le sortilège de traduction laissait les mots flotter entre ses doigts.

Sans un mot j’avais observé la jeune femme s’installer dans ma classe et commencer à souffler. A la fenêtre, j’étais resté totalement silencieux. Après tout, ma classe pouvait être un refuge et je n’y voyais pas d’inconvénient. Avec calme, j’allais sortir quand soudain j’entendis une pierre filer à la vitesse de l’éclair dans un des carreaux de la classe. Surpris, je haussais un sourcil en regardant alternativement la jeune Yeleen et la fenêtre. D’un coup d’oeil, je la vis s’excuser.

« Ce n’est rien, Yeleen. » dis-je d’une voix grave, calme et apaisante.

Avec lenteur, je levais ma baguette pour réparer la vitre et je me baissais pour ramasser la pierre qui n’avait pas réussi à passer à travers grâce aux renforts en métal. Sans un mot, je me dirigeais vers elle et… avec un sourire bienveillant et amusé je lui remis la pierre dans la main.

« Je crois que tu as perdu ça. » dis-je avec un sourire en coin.

Sans un mot de plus, je restais devant elle et j’observais alternativement la pierre et Yeleen. Passant une main dans ma barbe, que j’avais fait poussé plus rapidement grâce à la magie depuis la rentrée je restais un moment silencieux puis… d’une voix calme, mesurée et surtout apaisante je continuais.

« Qu’est ce qui ne va pas Yeleen ? »

D’un air certes calme et bienveillant, je lui barrais néanmoins le passage vers la sortie. Ce n’était pas anodin comme comportement, surtout de la part de Yeleen que je connaissais depuis sa première année et qui faisait bien sûr partie de ma maison. Et quand bien même elle aurait fait partie de n’importe quelle autre maison que j’aurai agi de la même manière.

« Ecoute, je ne vais pas te parler en tant que Directeur et Professeur mais… en tant qu’adulte proche. On ne peut pas dire encore ami, car malheureusement nos statuts font que c’est impossible ! »

Je lui adressais un regard malicieux, sous-entendant qu’une fois sortie de Poudlard, je comptais bien sur son amitié et qu’elle me donne des nouvelles. Trop nombreux étaient les élèves qui m’avaient quitté sans donner des nouvelles. Ca me rendait toujours un peu triste. Prenant soudain un air plus sérieux je poursuivais.

« Je viens bien comprendre ce qui se passe. Ce que vous avez vécu, toi et la famille Clearwater laisse des marques. Des stigmates. Mais il faut essayer d’avancer un maximum. Chacun à son rythme, chacun à sa manière et surtout tous ensemble. »

Je lui souriais tristement. La vie avait aussi changé pour moi. J’étais aller chercher Israfël qui était parti en quête de Milo. Puis, je m’étais grimé le jour de la rentrée, au Poudlard express pour veiller sur mes précieux élèves. Désignant les murs autour de moi, je tentais de la rassurer en lui disant :

« Et temps que vous êtes ici, rien ne pourra vous arriver. Enfin… Si vous ne cassez pas les vitres ! »

Mon regard se fit malicieux et pétillant. C’était quand même une bonne blague non ?

En vingt trois jours, c'était la première fois qu'elle laissait à quelqu'un l'opportunité de lui demander ce qui n'allait pas et elle se rendit compte à cet instant qu'elle bridait ses sentiments pour ne rien ressentir, pour ne pas subir, ne pas se focaliser sur sa propre personne. Elle n'avait jamais fais ça, préférant largement se contenter du bonheur des autres pour se sentir bien. Elle voyait bien Asel et Adil heureux main dans la main, traversant la douloureuse épreuve ensemble et pourtant, elle ne pouvait s'empêcher de se sentir noyer à chaque fois que Sean lui tournait le dos. Qu'avait-elle fait de mal?

Sentant sa gorge se serrer, Yeleen leva les yeux vers son professeur qui lui avait déjà tendue la pierre, comme sa propre main et oreille attentive, dans l'espoir de comprendre une élève de sa maison. Revenant sur le poids qui avaient surtout incombés les Clearwater durant tout l'été, Yeleen haussa légèrement les épaules. Non, elle n'avait rien vécu, elle avait juste senti le sang de Betty entre ses doigts, incapable de la défendre, ni de la soigner, elle avait juste attendu qu'elle ait regagné ses forces à St Mangouste avant d'attendre, comme tout le monde, le retour des trois étudiants.
Mais si Asel et Milo étaient rentrés, non sans encombre, Sean était revenu que bien plus tard, physiquement et mentalement secoué, sans qu'aucune présence ne puisse soulager ses cauchemars. Pire, elle avait fini par comprendre qu'il lui avait suffit de mettre un pied à Poudlard pour s'ouvrir à d'autres personnes, ce qui était un bien en soi. Et vraiment, elle était heureuse de penser que durant quelques instants, Sean pouvait être apaisé en ces lieux, le professeur Korrigan avait bien raison, Poudlard offrait une protection et une sécurité bien méritée.

C'était sa présence à elle qui était de trop et elle n'avait pas envie d'en parler.

Ses genoux s'entrechoquèrent légèrement, le faible physique de la capitaine de Quidditch se dévoilant soudainement. Avancer un maximum, à son rythme et peut-être prendre des chemins séparés, était-ce vraiment ce que voulait dire Sean en s'éloignant d'elle?

"Quand on se sent, le temps d'un été aussi impuissant et qu'on se rend compte que ça continue même une fois que c'est fini ... qu'est ce qu'on est censé faire? "

Les doutes parasitaient son esprit jour et nuit, sans la laisser tranquille. Elle qui n'avait jamais eu une grande confiance en ce qu'elle était, qui elle était même en tant que de Clare, elle avait réussi à trouver un semblant de ses origines et de son histoire chez les Sô, redorant une image d'elle-même qui avait toujours été bridé. Mais cette impuissance qui s'étalait à présent sur la rentrée, sur le mois de Septembre, ne la quittait pas. Bien sur, elle s'était améliorée dans ces sortilèges informulés, puisqu'elle s'en était fait un objectif en demandant son alternance à la Brigade de la Police Magique, mais ses journées n'étaient rythmés que par ce but. Et une fois atteint, elle savait qu'elle tomberait de haut. Par respect pour Sean et son soudain besoin de s'éclipser en sa présence, elle lui laissait tout l'espace et le temps désiré, meurtrie malgré elle par un rejet proche de l'abandon. C'était si égoïste de ne ressentir que ce mal alors que Sean en avait probablement besoin.

Levant sa baguette, les mains encore un peu tremblante, elle lança un simple Reparo vers le carreau brisé dont les verres regagnèrent leur place, comme si de rien été. La magie avait réussi à réparer la fenêtre sans qu'aucune faille ne soit visible à l'œil nu, mais l'épisode de cet été, les avait marqué à jamais.

J’avais ouvert la bouche et je l’avais refermé. Observant les lettres se dessiner au dessus de Yeleen, j’avais un moment voulu la réconforter mais… je m’étais ravisé. Elle méritait des conseils bien plus avisé qu’un simple «Ca va s’arranger ». D’un geste lent et précautionneux, je m’asseyais sur une table en face d’elle et je l’observais en passant ma main dans ma barbe.

« Parfois les évènements s’enchaînent sans que nous puissions réellement y faire quoi que ce soit. »

Je l’observais, me demandant qu’est ce qui pouvait bien autant la tracasser dans sa vie d’étudiante. Ils avaient le don de se faire tout un monde de pas grand-chose, surtout cette promotion là qui connaissait de nombreux spécimens particuliers. Mais là c’était différent. Des informations que j’avais eu, et j’étais plutôt bien informés, ils avaient tous vécus un véritable traumatisme. Et s’en suivait ce sentiment profond d’impuissance, comme pouvait aussi ressentir le jeune Adil Mesli.

« Mais il est vrai que ce qui c’est passé cet été pour vous, va changer beaucoup de chose… »

Je soupirai, et mon visage s’assombrit. Marchant vers la fenêtre, je mis les mains derrière mon dos, observant l’extérieur tout en parlant à Yeleen.

« Je devais être un peu plus jeune que toi durant la Grande Guerre. »

Je n’en parlais jamais. Les seuls avec qui j’en parlais étaient en général ceux qui l’avaient vécu avec moi, comme les frères Braxton Clearwater et Jameson Clearwater. Mais c’était tout. Je n’en avais jamais parlé avec des étudiants et aussi je me rappelais d’avoir rougi au banquet de début d’année quand la Directrice nous avait nommé comme des « héros de guerre ». Je n’avais jamais beaucoup aimé cette expression.

« C’était une époque bien différente et un contexte aussi particulier. Mais une chose est sur, le départ de la Guerre était en tout point identique à ce qui se passe en ce moment. Une communauté divisé, des groupuscules qui s’en prennent à leurs congénères… Et comme vous, nous n’étions pas du tout préparer à tout ça. »

Je me tournais vers elle, et j’avais la même expression qu’elle sur le visage, d’une profonde peine d’avoir vu beaucoup de mes amis mourir ce jour là. Il n’y avait que les vieilles carnes comme Braxton pour s’en être sorti avec dignité.

« Et pourtant… Nous y avons été confronté. Et nous en avons souffert. Et comme toi, c’est ce sentiment d’impuissance qui nous a rendu plus fort par la suite. Une fois que nous nous sommes rendus compte de notre niveau que la paix avait rendu mauvais, nous avons redoublé d’effort pour devenir les sorciers que nous sommes aujourd’hui. »

Je me retournais vers elle, et je lui fis un sourire bienveillant et désolé. Puis, sourcil froncé, je poursuivais :

« Et vous n’avez pas à avoir honte. Aucun étudiant et même la majorité des sorciers accomplis étaient en mesure d’affronter ce que vous avez affronter. Je te rappelle qu’il y avait Fergus, qui a été un des élèves les plus brillants que j’ai rencontré en duel magique. Et pourtant, il n’a pas fait le poids lui aussi. »

Je soupirai. Il était vrai que la paix les avait certainement un peu ramoli. Mais c’était naturel, et c’était peut être mieux ainsi. Même si c’était au fond de notre faute, car nous avions toujours refusé qu’ils vivent la même vie que nous. Et nous avons toujours fermer les yeux sur les prouesses magiques comme le duel, préférant qu’ils accumulent des enseignements de spécialités pour les préparer à un métier.

« Penserais-tu qu’il serait plus avisé pour vous d’apprendre réellement à savoir vous battre ? »

C’était une véritable question, à laquelle je réfléchissais depuis cette attaque sur les Clearwater.

Elle ne sut ce qui la poussa a se confier à demi mots sur les doutes qui l'assaillaient depuis le début de l'été mais c'était cette perte de contrôle que même son professeur arrivait à pointer du doigt qui était incriminé. Mais les événements n'avaient pas fait que s'enchainer, ils s'étaient tous littéralement déchainés sur les Clearwater, Sean ayant été déjà éprouver par leur escapade dans la planque de Braxton et du professeur Jones. Il n'avait eu à peine quelques mois de répit pour se remettre d'un épisode plus que traumatisant, les séquelles d'une enfance oubliettée venant déjà hanté ses nuits, Ryan ne semblait qu'avoir fait déborder le vase.

Mais elle se raidit au moment où son professeur de métamorphose osa aborder un sujet sur lequel il ne revenait que très rarement, la deuxième guerre. Levant les yeux vers lui, attentive mais soudainement terriblement petite face à une guerre d'une telle ampleur, Yeleen ne put que constater les dégâts encore visible dans le regard de l'homme qui était également le meilleur ami du père de Sean. Ils avaient vécu les mêmes traumatismes, le même combat avant que chacun ne semble en avoir grandit différemment. Le professeur Clearwater avait également fait cette guerre mais tous les trois semblaient en sortir autrement, même s'il était encore difficile de parler de toutes les pertes, ô combien nombreuses, ils avaient du faire face.

Si les paroles de son professeur l'aidèrent un moment à relativiser, elle ne put s'empêcher de frissonner à l'idée de voir Sean ou même @Adil Mesli en plein milieu d'un champs de bataille, cherchant à protéger Asel ou même Eléanora. Cette vision lui enleva tous les mots de la tête, comprenant que même si le contexte était différent, l'été qu'ils avaient passé à se battre pour tous les retrouver avait réveillé de vieux démons partout autour d'eux. Ce n'était pas seulement la famille Clearwater qui avait été touché mais l'ensemble des alliés qu'ils avaient sur les îles avoisinantes et les familles comme celle du professeur Korrigan qui avait donné plus que de leur temps et de leur énergie pour les étudiants.

Et si tout le monde s'en était sorti, plus soudé que jamais, Sean semblait être le seul à détonner et à s'être replié de tous. Aucun d'eux n'avait été préparé, même si Sean avait suivi des entrainements du professeur Clearwater pendant quelques mois avant les vacances, rien n'avait suffit pour éviter le mal fait.

Hochant la tête en comprenant qu'il ne fallait pas perdre de vue l'objectif qu'ils s'étaient fixé depuis des mois, Yeleen releva légèrement les épaules alors que son directeur de maison mentionnait le fait d'apprendre à présent à réellement se battre. Avant l'épisode du mois de Mars, la jeune Serdaigle s'était fixé un but plus simple pour l'avenir, foncer dans une équipe de Quidditch et tirer son épingle du jeu mais depuis, elle avait opté pour une toute autre carrière qui la poussait à s'acharner contre son propre handicap.

"J'ai choisi mon MULOT en conséquence." signa-t-elle, avouant ainsi qu'elle était passé d'un choix simple de sport magique à la justice magique. C'était un fait qu'elle n'avait jamais réellement avouer à Sean, bien que son choix de carrière était personnel mais depuis qu'elle avait vu Braxton lever sa baguette sur son propre fils, elle savait que le Quidditch ne devait être qu'une passion et qu'elle devait se perfectionner en duel et en sortilège informulé pour l'occasion. Si la faction volante de la capitaine @Marleen MacGregor lui offrait une opportunité de pouvoir allier deux de ses objectifs, elle avait sauté le pas au moment même où elle n'avait plus souhaité être un poids sans savoir défendre son prochain. En parler durant l'été avec @Solvi Nibelungen n'avait que que la conforter dans son choix d'ailleurs, malgré le sang d'encre qu'elle s'était fait lorsque Fergus s'était lui-même retrouvé hospitalisé.

"Je ne veux plus qu'on puisse tous rester inerte si ça arrive de nouveau." continua-t-elle, le regard bien plus sur et le corps moins frêle. Amastan leur avait donné des cours pour mieux maitriser leur magie, elle s'était même mis en tête de demander des cours en plus au professeur de défense contre les forces du mal @Cléopatra Amonwë d'ici peu, dès que son emploi du temps avec son alternance se serait bien stabiliser. "On veut tous pouvoir se battre, pas seulement à arme égale mais les vaincre."

C'était une certitude qui ne l'avait pas quitté malgré le sentiment d'impuissance qui reprenait le dessus lorsque Sean s'éloignait de plus en plus d'elle. Elle savait qu'elle devait continuer de se donner à 500% pour être à la hauteur qu'importe les obstacles, il fallait qu'elle mette le pied à l'étrier malgré tout. Malgré Sean, parce qu'elle le faisait pour lui.

"Malgré les pertes, vous êtes tous restés soudés... ou est-ce que certains de vos camarades se sont éloignés après la guerre?" demanda-t-elle avec un certain tact en tentant de mieux poser ses mots pour ne pas blesser ou rouvrir d'éventuelles blessures.

 La lumière toujours dans mon dos, je soupirai. Elle avait donc fait le choix de son cursus par… obligation. C’était à la fois une grande preuve de courage et un manque de discernement qui ne ressemblait aux Serdaigles habituellement. Mais… Ils étaient si imprévisible ces petits aiglons. Un sourire triste sur le visage, je me mis à dire honnêtement.

« Oui, j’avais compris Yeleen. Et c’est bien dommage, l’Angleterre a certainement perdu une grande joueuse. Mais tant pis, au moins sans toi, l’Irlande pourra les battre sans trop de soucis. »

Les yeux rieurs, je restais assis contre la fenêtre tout en écoutant les propos de… il ne fallait pas le dire… mon élève préférée. Bras croisés, j’écoutais ces propos, toujours aussi sage, aussi intelligent et aussi pertinent. Elle avait toujours fait les bons choix, non pas en fonction de ses sentiments ou de ses avis, mais en fonction de la situation. Ce qui me fit abroger la pensée que j’avais eu juste avant. C’était peut être l’élève la plus intelligente et la plus Serdaigle que je n’eus jamais eu.

« Ce n’est pas si facile. Ce sont des sorciers accomplis. Qui n’utilise pas la même force que vous, ni les même armes. Ils sont déloyaux, mauvais, et n’ont peur de rien, et surtout pas de vous briser et de briser ton entourage. Mais ça, tu as dû t’en rendre compte par toi même. »

Peu de chose m’échappait dans ce château. Et je savais que quand il y avait de l’eau dans le gaz entre deux de mes protégés ( tu vois Sean Clearwater arrête de pleurer Luke t’aime autant), j’en étais bien évidemment informé. Les tableaux de l’école avait toujours eu cette particularité d’être… Vraiment très bavard. Et quand on savait les écouter, ils étaient une mine d’information infinie.

« Certains sont morts. D’autres ont été brisé et n’ont plus jamais été les même. Et d’autres… On décidait de vivre avec. De l’accepter. »

Je penchais la tête et observait Yeleen de mes deux yeux bleus pénétrant pour bien lui faire comprendre qu’il n’y avait pas tellement de chose à dire sur le sujet. Du moins, je n’en avais pas encore le coeur. Le seul psychomage de cette Université, ne pouvait en plus pas m’écouter en raison de ma proximité familiale avec elle. Mais… avais-je vraiment envie de parler de la guerre à @Maeve Cynfeirdd ?

« Je ne vous souhaite pas cela. C’est pourquoi je pense qu’il y aura une petite mise à jour des enseignements généraux. Et que certains cours supplémentaires seront donnés par prévention. »

J’avais en tête quelques idées pour améliorer leurs défenses. Et je savais que Jameson Clearwater n’attendait que cela. De plus, le nouveau professeur de duel magique allait certainement pouvoir nous faciliter la tâche.

« Quoi qu’il en soit, il est certainement temps de réfléchir à l’après. De prévoir, éventuellement une bascule vers les ténèbres. De rester souder, afin d’éventuellement être prêt à toute éventualité. A savoir la Résistance. »

Je n’exprimais que rarement le fond de ma pensée. J’avais un devoir de réserve envers mes étudiants, mais là, ce n’était pas pareil. Nous étions plus dans un cadre privé et quand bien même. Je sentais que là où nous allions, la réserve ne serait pas de mise. Quand je pensais à cette organisation… Thanatos. Elle avait eu la perfidie de s’en prendre aux sorciers n’ayant pas accomplis toutes leurs études, jeunes et encore fragile. Personne n’était venu cherché @Braxton Clearwater, @Jameson Clearwater ou moi même.

« Et tu es sûr qu’il n’y a que ça qui ne va pas Yeleen ? Je commence à te connaître. Quand tu es soucieuse au point d’en arriver là, c’est qu’il ne s’agit pas de toi, mais de quelqu’un qui t’es proche. »

Je m’étais avancé, et je nous avais fait apparaître deux fauteuils d’un coup de baguette et repousser les plants de travail dans la salle de Métamorphose. Un Lémurien s’était mis à lui grimper sur l’épaule et à lui chatouiller les oreilles.

Elle ne put s'empêcher d'avoir un léger sourire en coin, acceptant le compliment sur ses prouesses au Quidditch que certains professeurs lui avaient reconnu avec le temps. Pendant longtemps, elle avait toujours pensé qu'elle se détachait du lot uniquement par le vol, parce qu'elle n'avait pas besoin de baguette magique, ni de sa voix pour être une excellente batteuse mais à présent qu'elle y voyait plus clair, elle se rendait bien compte que continuer dans cette voie n'aurait été que la solution de facilité. Surpasser son handicap était un défi conséquent et sa motivation n'avait fait qu'être exacerbé par la présence de Sean dans sa vie, tout comme l'ensemble des Clearwater. La force et la détermination d'@Adil Mesli l'avait probablement contaminé dans un désir de justice et de protection et l'inspiration que lui soufflait @Apolline Dunn chaque jour en se battant pour enchainer deux cursus différents l'avait également poussée à dépasser la sorcier qu'elle pensait être.

Alors que son professeur dépeignait un portrait noir de Ryan et des autres ravisseurs qui étaient encore dans la nature, libre et en total position de force, la Serdaigle ne put s'empêcher de sentir cette frustration grandir de nouveau, comme durant tout l'été. Aucun des étudiants n'étaient encore de sorciers accomplis, c'était justement ce soucis d'infériorité qu'elle voulait renverser, sans se sentir inutile.

D’autres ont été brisé et n’ont plus jamais été les mêmes.

Elle ne put que voir le visage de Sean totalement paniqué à l'orée du domaine des Clearwater lorsqu'il avait transplané le 3 Aout. Une date fatidique qu'elle avait tant attendue mais qui avait tout changé, Sean était constamment en alerte sans trouver le repos, ni le répit que des vacances auraient du apporter. C'était un regard qui l'avait elle-même hanté durant des nuits sans trouver de solutions viables pour que Sean puisse un minimum décompresser, sans réussir à parler de ce qu'il avait pu vivre. Elle savait juste, tout comme Asel, qu'il avait lui aussi perdu sa baguette, détenu prisonnier par Ryan et miraculeusement échappé. Les sévices subis n'avaient nullement été évoqué, Yeleen refusant de lui poser des questions pour ne pas réveiller des démons qui attendaient au pied de la porte depuis déjà des mois.

Si dans les apparences le professeur Korrigan semblait avoir acquit une paix avec cette époque, elle se rendait néanmoins compte qu'il était aisément facile d'y replonger. Le père de Sean semblait y être rester, tandis que son frère tentait vainement de le tirer, les disputes ayant éclaté à de nombreuses reprises au domaine durant l'été. Yeleen se pinça les lèvres, consciente à présent que le professeur Korrigan était un exemple à suivre mais que chaque homme avait son propre épouvantard.

Elle releva néanmoins la tête vers lui au moment où il lui annonça que des cours avaient été rajouté, par prévention afin de reprendre une marche vers la Résistance. Un mot si bien connu dans tous les bouquins d'histoire de la magie et très peu abordés en dehors de quelques discours ou conférences sur toutes les effets de ce noyau de sorcier qui avaient mené toute une communauté magique vers sa liberté.

"J'ai beaucoup entendu parlé du nouveau professeur de combat magique, @Anthony Abercroft. Avec vous et le professeur @Jameson Clearwater, je suis certaine que nous serons parés pour le futur."

C'était certainement la première fois qu'elle complimentait un professeur de vive main, reconnaissant le travail qu'ils fournissaient pour leur élève, encore plus depuis qu'elle avait vu le professeur Clearwater à l'œuvre durant cet été. Elle ne prétendait pas connaître à présent les dessous d'une réalité édulcorée pour les étudiants mais elle ne pouvait que reconnaître que Poudlard avait d'excellents professeurs pour les former à la dure vérité du monde.

Pourtant elle se tut un instant au moment où son professeur semblait comprendre que son inquiétude allait bien au delà de tout. Elle s'inquiétait pour un seul homme sans réellement savoir vers qui se tourner sans avoir l'impression d'être la personne la plus inappropriée pour parler du mal qui rongeait Sean jour après jour.
Elle ignorait tout de ce qu'il pouvait penser, si elle arrivait jusque là à décrypter certaines de ses angoisses en observant sa façon d'être, le regard du Gryffondor s'était désespérément fermé à elle sans qu'elle puisse tenter de désamorcer le réel problème. L'état de @Sean Clearwater la préoccupait, certainement bien plus que leur relation qui finissait par ne plus en être une au fur et à mesure que les journées creusaient une véritable distance entre eux.

"Il a eu trois enlèvements ... chacun a réagit à sa manière mais l'un d'entre eux, est rentré brisé comme jamais. Vous le savez."

Même la présence du lémurien qui lui avait tiré les cheveux plus d'une fois en cours de métamorphose ne la fit pas tilter au point de mettre une distance raisonnable entre l'animal et elle. Avec un certain automatisme, elle se dirigea vers un des fauteuils dans lequel elle s'empêcha de se lover, pliant juste ses jambes pour s'y installer un peu plus confortablement.
Le professeur Korrigan n'avait pas besoin d'un nom pour savoir de qui elle parlait, il était venu à de nombreuses reprises au domaine des Clearwater pour savoir qu'un étudiant n'arrivait pas à passer au dessus de ce qui s'était passé.

"Et je sais que ce n'est pas le temps qui va lui faire accepter ce qui s'est passé."

Sans solution, Yeleen exposait presque à nu certains de ses doutes. Elle avait fini par ne plus avoir de questions mais de ne constater que l'évidence même que Sean n'avait pas la paix, bien au contraire. Elle leva les yeux encore embuée vers son professeur en soufflant péniblement. Comment être là pour son meilleur ami qui avait fini par fermer toutes les portes en partant? Cette impuissance la saisissait de nouveau.

"Je commence à comprendre la panique qu'a ressenti son père quand il l'a oubliétté durant son enfance et ... c'est assez dérangeant comme ressenti." avoua-t-elle, en baissant les yeux, coupable d'avoir pendant si longtemps jeter la pierre sur la réaction excessive de Braxton qui ne souhaitait que retrouver son fils.

Je souriais au compliment. J’étais quand même humble. Même si la Directrice lors de son discours nous avait défini comme des exemples Jameson et moi, et des héros de guerre, je ne voyais pas cela du même œil. Nous avions subi la guerre, et nous n’avons eu d’autre choix que de défendre notre peau et celle de nos amis. Cela ne faisait pas de nous des héros. Je gardais néanmoins mon sourire bienveillant et je fis apparaître deux tasses de thé et une théière fumante. Un plateau de gâteau divers et variés arriva également tout droit des cuisines dans un POP sonore.

« On n’est jamais vraiment paré au futur. Un scientifique moldu, dont je te recommande sa lecture et qui s’appelle Charles Darwin a décrété que ce ne sont pas les forts qui survivent. »

Je servais le thé, à la main et d’un geste simple. Je n’aimais pas non plus abuser de la magie. Il y avait certains gestes du quotidien que j’aimais faire manuellement. Servir le thé en faisait parti.

« Ce sont ceux qui s’adaptent aux changements. »

Je lui tendais un regard pétillant de malice et brillant en lui offrant la tasse. Je sous-entendais bien évidemment qu’en cas de guerre, Yeleen saurait très bien survivre étant donné qu’elle avait surmonter son Nom, son handicap et maintenant qu’elle allait surmonter ce qu’elle avait vécu par procuration avec Sean Clearwater. D’ailleurs, lorsqu’elle parla de Sean, cette fois-ci ma main se mit à trembler. Ma voix se cassa un peu et je baissais les yeux.

« Oui, je suis au courant. »

C’était la première fois que je devais montrer un élan de faiblesse. En même temps, j’étais véritablement chagriné de voir Sean ainsi. Je l’avais toujours considéré comme mon neveu… Et je l’avais toujours aimé à ma manière, peut être d’un peu trop loin. Si j’avais pu… J’aurai éliminer Ryan de ma propre main sans aucune chance de survie. D’ailleurs, je m’installais dans le fauteuil, joignant mes mains devant moi, j’observais Yeleen avec un regard qu’elle n’avait certainement jamais vu. Une véritable colère froide.

« Et crois moi, cela ne restera pas impuni. Si justice ne se fait pas, je la ferai moi même. »

Je m’assombris encore un peu plus. Contrairement à Yeleen, j’avais plus d’expérience en la matière et je savais qu’elle m’avait demandé un conseil sous-entendu avec sa phrase qui mettait en avant une évidence. Je me détendis légèrement et je m’avançais pour boire un peu de thé. Je gardais quand même un air bienveillant et rassurant pour Yeleen, même si cette conversation me secouait beaucoup.

« Il n’y a pas de recette miracle. En revanche, effectivement le temps ne fait rien. Ce n’est qu’une question d’acceptation. Il faudra qu’il apprenne à vivre avec et il faudra surtout qu’il comprenne qu’il ne peut pas résoudre ses problèmes seuls. Mais il n’y a que lui pour s’en rendre compte et ouvrir les yeux. S’épuiser à l’aider ne fera que le braquer. Garder la porte ouverte, être présent si nécessaire, et surtout quoi qu’il arrive et quoi qu’il fasse assurer une fidélité sans faille. »

Je pensais avoir plutôt bien répondu. Et je pensais aussi que la fin du calvaire allait se terminer, mais elle amorça un sujet extrêmement délicat et extrêmement tendu. Mon coeur rata un battement comme l’on rate une marche d’escalier. En paraître, j’avais juste légèrement blêmi. Avec soin, je déposais ma tasse de thé devant moi.

« Je n’aime pas parler spécialement de cette anecdote. »

J’avais passé ma main sur mon visage, dans ma barbe et j’avais fini par me pincé l’arrête du nez. Les trois signes qui montrait que j’étais un peu nerveux. Mais ça, elle n’était pas sensé le savoir. Pesant le pour et le contre, j’observais Yeleen avec intensité. Après quelques longues secondes voir minutes de silence, je me décidais à la briser en essayant de garder mon ton bienveillant et calme, même si on sentait que ma voix commençait à se briser légèrement.

« Je ne sais pas si Braxton a bien agi ou mal agi ce jour là. C’est une question qui nous tourmente tous, à certains niveaux différents. Lui en particulier puisqu’il porte encore cette responsabilité sur ses épaules. Mais… Il a agi sur l’instant, comme un père. Il a fait cela par amour, car il ne voulait pas que son fils vive avec les même souffrances que lui toute sa vie. Il a uniquement fait cela pour le protéger du mal qui le rongeait lui. C’est peut être, si on le regarde sous cet angle, l’acte le plus courageux de sa vie. »

Je marquais une légère pause, l’ambiance se fit un peu pesante. Mais après tout, elle avait droit à des vraies explications. C’était ce qu’elle était venu chercher non ?

« Nous ne pouvons le juger ou le blâmer. Personne ne sait ce que nous aurions fait à sa place. Sean n’aurait peut être pas été le jeune garçon qu’il est aujourd’hui sans cela. Nous ne saurions jamais ce qu’il en serait advenu réellement. Mais… A choisir, quelques déficiences de mémoire valent parfois peut être mieux... »

Je m’asseyais, un peu abattu sur mon siège.

« Que de très mauvais souvenir de guerre. »

Et mes yeux se mirent à briller.

Alors que le directeur des Serdaigles faisait apparaitre un plateau de gâteau, Yeleen leva les yeux vers lui en pensant soudainement à @Neve Walsh qui aurait été la première à proclamer un disclaimer sur cette idée. Qu'avaient-ils tous à vouloir manger dans une telle situation? Peut-être était-ce l'éducation qu'elle avait perçu mais il lui était réellement difficile de manger entre les repas, déjà que manger ces derniers temps à sa propre table et non celle des Gryffondors lui semblait inconfortable.

Cependant, elle eut un sourire qui s'évapora rapidement à la mention de Darwin dont elle avait entendu parlé durant les cours d'étude moldus il y a quelques années mais surtout par la mère de Sean qui l'avait déjà cité une fois durant l'été, rendant Yeleen fière de connaître une référence de plus dans le monde moldu. Betty, anciennement Clearwater et à présent Jones, libre de ne plus être lié à Braxton depuis quelques semaines. Alors que le professeur comprenait qu'elle parlait de Sean, elle fut surprise par le ton soudainement froid qu'il usa pour décrire ce que le Clearwater avait connu durant l'été. Si elle le savait proche de son père, elle n'imaginait pas au combien les alliances entre les clans et les proches de la famille avait enrôlé bien des personnes autour des tragédies de l'attaque. Les Mesli avaient perdu un membre de leur famille, le clan d'Asel s'était presque replié à ses yeux au moment où la jeune femme était rentrée, rendant même les visites d'Adil relativement difficile.
Son professeur se battait encore et n'avait pas arrêté d'alimenter le feu de la justice au retour de Sean. Alors lorsqu'il se mit à parler d'acceptation, Yeleen baissa légèrement son menton en regardant le bout de ses pieds. C'était là où résidait tout le problème, le jeune Gryffondor n'avait pas encore surmonté cette épreuve, loin de là. Ces gestes, ces regards étaient tous paranoïaques, à l'affut du moindre bruit ou transplanage, il était constamment en alerte comme si le danger allait rebondir sur eux au moindre moment. Poudlard était censé leur assurer une autre protection que celle du domaine mais tout aussi effective et pourtant, rien n'avait calmé Sean jusque là. Tout empirait au fur et à mesure et elle n'avait fait que cela, laisser la porte grande ouverte en espérant qu'il la franchirait pour lui en parler. Mais Sean n'était encore jamais venu sur le sujet, il l'évitait.

Elle sut cependant que sa vision sur le geste commis par Braxton il y a plus de treize ans ne laissa pas son professeur de marbre, bien au courant de ce qui avait pu se passer comme bon nombre de personnes au domaine à sa plus grande surprise. Personne n'en parlait mais tout le monde était au courant et avait son point de vue, comme un sujet tabou et délicat qu'on ne devait aborder sous aucun prétexte.

Seul la voix légèrement brisée de son professeur lui indiqua qu'elle venait d'avancer dans un terrain dangereux et miné, exactement à l'image de Braxton. Elle déglutit difficilement, observant ces gestes ralentir et ses yeux briller d'une étrange lueur. Yeleen ne parlait peut-être pas, mais avait apprit à noter les changements corporelles et les actions de chacun, véritable moyen de connaître l'état émotionnel d'une personne et ne se trompait que rarement. Il tentait aussi de comprendre les actions de son ami vis à vis de l'histoire qu'ils avaient tous vécu en temps de guerre.

Pourtant, rien ne justifiait d'un tel acte quand Sean avait tout oublié de la présence de son parrain dans sa vie. Si son père pensait pouvoir recommencer, elle l'en empêcherait parce que Sean avait besoin de vivre et d'accepter ce qui s'était passé durant l'été. Mais une part égoïste avait envie de le revoir sourire, innocemment comme durant leur première année, les yeux pleins d'éclats. Le Gryffondor était devenu l'ombre de lui-même en seulement quelques semaines et démunie, Yeleen s'empêchait de lui poser un milliard de questions pour ne pas le braquer.

"Ce n'est pas courageux, c'est égoïste." tenta-t-elle de rectifier, s'entassant un peu plus dans le fauteuil.

Mais il n'était pas question d'un retour en arrière, Sean s'était construit autour de cet oubli et tentait de se retrouver malgré les obstacles qu'on lui mettait encore sur sa route. Il a probablement besoin de temps, de plus d'appuis malgré la présence inestimable d'une famille soudée. Mais ça ne semblait pas suffire, déjà qu'elle ne semblait pas suffisante, il était évident que Sean n'arrivait tout simplement pas à en parler.

"Je ne remet pas en question les souvenirs qui peuvent être atroces mais comment en apprendre et accepter si on nous force à oublier des événements douloureux?"

Elle releva le visage vers son professeur, un peu plus sure d'elle.

"Peut-être que s'il n'avait pas été oublietter en premier lieu, il saurait comment réagir maintenant avec la tête froide." signa-t-elle avec un peu plus de force

On ne lui avait pas laissé le choix, il lui semblait que Sean s'était retrouvé piéger dans l'égoïsme de son père sans avoir pu vivre la vie qu'il voulait réellement. Tout n'était qu'une question de conséquence et il en subissait les frais, sans savoir quoi faire de ce fardeau avec lequel il était revenu.

"Depuis tout petit, on apprend à tomber pour mieux se relever." se rappela-t-elle avec une certaine innocente, les images qu'elle s'était construite avec sa mère se baladant devant ses yeux sans jamais avoir exister. "Je sais qu'il est trop tard ... je voudrais juste que ce ne soit pas trop tard pour Sean maintenant."

Je restais moi aussi dans mon fauteuil, écoutant les mots durs qu’on avait pour mon meilleur ami. Mais je mettais cela sur le compte de l’inexpérience, et de la jeunesse. Je n’étais pas non plus totalement impartial ; et j’avais également connu Braxton d’une manière bien différente qu’eux et… pas à la même époque. A la différence d’eux, je savais qui il était au fond de lui. J’accordais un petit sourire désolé à Yeleen, car la suite de mes propos allaient être moins sympathique.

« Il ne faut pas être trop hâtif en jugement envers Braxton. Nous ne pouvons véritablement pas dire si ce qu’il a fait est bien, mauvais, juste ou injuste. Comment aurions nous réagi à sa place ? »

Je joignis mes mains et j’observais Yeleen dans les yeux, les mains jointes et les yeux plissés. Un petit éclair passa dans mes yeux.

« Tu veux que je rende à Sean sa mémoire ? »

On pouvait briser les sorts d’Oubliette, mais le risque avait toujours été trop important pour Sean. Elle savait, elle était assez intelligente et elle connaissait suffisamment les risques encourus. Bien évidemment c’était une pure question rhétorique. Je n’allais pas le faire… A moins qu’il me le demande expressement.

« Et qu’est ce que je lui rendrais ? Des réponses ? Tu penses vraiment qu’il y a des réponses dans ce qui s’est passé ce soir là ? Liam était aussi un ami. Sean n’était qu’un enfant le traumatisme fut déjà important pour les adultes. Tu oublies ce détails. Tu penses réellement qu’un enfant de son âge se serait remis de ce qui s’est passé ce soir là et en serait sorti plus fort ? Allons Yeleen... »

J’avais passé ma main las devant mon visage. Je commençais à faire le poids des années et mes cheveux blanc et mes rides se firent certainement plus visible avec cet aspect abattu.

« Je te suggère de passer par les traumatismes infantiles à Ste Mangouste. Vous avez tous tendance à oublier un détail : Sean n’était le même Sean qu’aujourd’hui. Et c’est son éducation qui la rendue si fort à tes yeux. Car c’est ce qu’il est effectivement. Mais tu places le mauvais Sean au mauvais endroit, en te basant sur celui qu’il est aujourd’hui. »

C’était vraiment complexe, aussi, je soupirai. Il n’y avait pas eu de bonnes ou de mauvaises actions ce jours là. Si j’avais eu un de mes enfants qui aurait vu la même chose, comment aurais-je réagi ? Surpris par sa dernière remarque, je lui accordais un regard et un sourire bienveillant. Me penchant vers elle et sortant du fauteuil ; je lui répondis calmement :

« Il n’est pas trop tard pour Sean, crois moi. Il faut garder espoir. Tous ceux qui errent ne sont pas perdus. »

Sur cette phrase mystérieuse je tapotais l’épaule de Yeleen dans un geste que je voulais réconfortant. On n’avait bien dépassé la relation enseignant/étudiant aujourd’hui alors perdu pour perdu… Je lui adressais un sourire et j’essayais d’être encourageant pour la suite.

« Tout va bien se passer. Il lui faudra du temps, mais il va guérir. C’est un Clearwater. Ils transforment tous leurs maux en courage, et devienne plus fort à chaque coup porté. »

J’hochais la tête d’un air calme et sur de moi. Sans un mot de plus, je croquais enfin dans un gâteau car personne n’en avait pris depuis le début. Ces biscuits à l’orange avec des épices étaient véritablement bons et la meilleure chose que les elfes pouvaient servir en guise de collation !

« Je m’inquiète pour vous tous. Tu as certainement eu vent de la réaction de Miss Misra. Elle n’est pas normal. Je ne sais pas ce qu’ils ont subi mais il faudra le découvrir pour les aider. Et… cela ne peut passer que par la confidence à leurs amis. C’est crucial. Tu ne veux pas un gâteau ? Tu es sur ils sont délicieux ? »

Je la regardais d’un air entendu. Oui, je lui demandais clairement de découvrir ce qui s’était passé avec précision. Je savais que c’était déterminant pour la suite.