The Safety of Disbelief

Un sourire presque nostalgique s’afficha sur le visage du jeune Mesli à la mention de ce soda dont raffolait tous les algériens contre l’avis du reste du monde. Est-ce que le village de Pré-au-Lard cachait ce genre de produit derrière ses façades si atypiques ? On aurait dit que toutes ces constructions s’étaient faites d’elles-mêmes sans respecter aucun ordre ni aucune logique. L’architecture ici était bien différente de celle qu’il avait pu connaître dans son enfance. Les villages magiques français qu’il avait pu visiter semblaient cependant par certains aspects similaires.

Adil parlait de la politique actuelle de l’Angleterre magique et Samir l’écoutait respectueusement sans oser l’interrompre. Il n’osait avouer qu’il ne connaissait même pas le nom du Ministre de la Magie britannique, s’étant assez peu intéressé à ces questions. Adil révélait adorer Londres mais avoir déménagé depuis peu. Le jeune sorcier accusa silencieusement le choc de savoir qu’il avait potentiellement habité et travaillé plusieurs mois non loin d’une partie de sa famille. Il ignorait où se trouvait exactement Tinworth mais ils n’avaient sans doute jamais été aussi proches.

Enfin, ils finirent par arriver devant les portes de ce qui ressemblait à une immense auberge, et en entrant, Samir fut surpris par l’aspect plutôt confortable de l’intérieur. Adil se dirigea vers une table dans un coin de la salle et son jeune frère le suivit docilement, s’installant en face de lui, son regard ne sachant où se poser tant tout ici le fascinait. Finalement, il finit par dévisager discrètement son frère, cherchant à discerner leurs possibles traits de ressemblance. Mais, haussant soudain les sourcils, le jeune homme interrompit son examen alors que son aîné lui expliquait son idée derrière son envie de faire son portrait.

- Ma couleur préférée, répéta-t-il sur un ton de surprise. Il détourna brièvement les yeux, ne s’étant jamais posé la question. Quelle pouvait bien être sa teinte favorite ?

Immédiatement, le jeune algérien revit les larges et pendantes feuilles des albizias en fleurs qui coloraient les rues de Constantine de leur vert si éclatant. Si ce vert-là n’avait pas pour la couleur de l’espoir, c’était celle qui se rapprochait le plus l’idée qu’il pouvait se faire d’un foyer.

Instinctivement, Samir se mit à secouer nerveusement sa jambe, comme il le faisait bien trop souvent. Mais en replongeant dans le regard de son frère, le jeune Mesli se détendit immédiatement. Il n’avait pas à se sentir testé, ni acculé. Adil posait sur lui un air souriant alors qu’il enchaînait des interrogations sur le sport puis sur la nourriture, comme s’il avait l’envie d’aborder avec lui tous les sujets possibles et imaginables. Samir se fendit d’un franc sourire avant de baisser à son tour les yeux sur la carte.

- Là où j’ai travaillé en début d’année, j’ai appris à en faire ! Mes fish'n'chips étaient pas terribles… Je veux bien gouter celui-ci mais honnêtement, je donnerai tout pour une chorba frik avec un bon matlouh !

Le jeune frère releva le regard vers Adil, se demandant s’il partageait son goût pour la cuisine algérienne. Peut-être que le tournure qu’avait pris son enfance l’avait dégouté de tout ce qui pouvait avoir trait à ses origines ? Comment avait pu l’élever leur oncle ? Samir aurait aimé se concentrer sur les points qu’ils pouvaient avoir en commun, et devina qu’Adil lui tendait certainement la batte en évoquant le Quidditch.

- J’ai eu des cours de balais pendant ma première année, acquiesça-t-il vigoureusement. Mais j’ai pas encore pu participer à un match… J’en ai pas mal regardé par contre. C’est vraiment impressionnant. Tu en fais toi ? J’aimerais bien en faire je crois…

Prenant une petite pause, il tapota la table de ses doigts avant de relever les yeux vers le sorcier en demandant dans un rire un peu nerveux.

- Alors, et toi ? … C’est quoi ta couleur préférée ? Se sentant un peu idiot avec sa question, il enchaîna immédiatement avec deux autres sans doute plus sérieuses. Tu fais des études de quoi à Poudlard ? Tu sais ce que tu veux faire après ?

Adil confirma qu’il connaissait et appréciait tout autant que son frère la cuisine algérienne. Il y avait dans ses propos une forme de validation que Samir prit comme une bénédiction. Son frère ne rejetait pas en bloc ce qui provenait de son pays d’origine et tout ce que cela pouvait représenter pour lui. Samir bouillonnait d’envie d’en savoir plus sur l’enfance d’Adil, la manière dont il avait quitté l’Algérie, les souvenirs qu’il en avait… Il avait cependant peur de poser la question de trop, celle qui fermerait le visage d’Adil et qui le ferait placer Samir dans le même panier que sa mère. Mais pour l’heure, l’aîné Mesli voulait en savoir plus sur son activité du premier semestre.

- J’étais dans un petit hôtel, où je m’occupais de la réception, mais aussi un peu de la cuisine et du ménage. Je travaillais de nuit, j’étais seul pour tout gérer. La journée, j’ai pris des cours d’anglais. C’est pour ça que je parle bien. Tu m’aurais vu y’a quelques mois, on aurait pas pu avoir ce genre de conversation…

Mais alors qu’Adil avait évoqué la cuisine de leur oncle, le jeune Mesli avait pensivement baissé le regard. Pourquoi Amastan avait-il quitté l’Algérie ? Était-il parti pour les mêmes raisons que leur père ? Adil en savait-il plus que lui à ce sujet ? Salut se rendit compte qu’il secouait de nouveau sa jambe et s’imposa de reporter son attention sur son frère alors qu’il lui parlait de ses diverses activités sportives: boxe, foot, Quidditch… Le jeune Mesli haussa les sourcils d’un air impressionné, lui qui n’avait jamais que fait du foot et du basket de rue… Il avait une soudaine envie de voir son frère en plein exercice, et déjà, ses yeux brillaient d’un éclat d’envie et de fierté alors que la certitude l’habitait qu’Adil était le plus doué des joueurs.

Ce dernier lui conseillait de tester ce sport sous les couleurs de sa maison, sous-entendant qu’il devrait sans doute lui-même porter les siennes pour éviter les problèmes. Cette histoire de répartition en quatre confréries différentes paraissait revêtir une grande importance pour tous les étudiants qu’il avait croisés jusqu’à présent. Adil était-il déçu de ne pas voir son frère réparti dans la même maison que lui? Ça n’avait pas l’air de le déranger plus que ça...

Samir l’observa attentivement alors qu’il commandait, ne baissant le regard que lorsqu’Adil retourna les yeux vers lui. Les couleurs chaudes et la magizoologie. Ses réponses déstabilisèrent le jeune frère qui espéra n’en rien montrer. Dans son tout premier échange avec Adil, il avait perçu chez lui de la noirceur, de l’agressivité, et même une forme de violence maîtrisée par une force inébranlable. Samir avait immédiatement sentit qu’il éprouverait un immense respect pour son frère avant même de le connaître. Uniquement pour ce qu’il avait senti chez lui. Une puissance tranquille qui pouvait imploser à tout moment. Adil avait ça en lui, Samir en était persuadé, ne serait-ce que pour se sentir similaire à ce si mystérieux et impressionnant frère. Aussi, il aurait imaginé pour lui un choix d’orientation moins… doux.

Mais de nouveau, Adil le surprit en mentionnant sa jambe qui tremblait discrètement et les autres gestes nerveux que Samir ne pouvait s’empêcher d’avoir.

- Ah non, c’est rien, tenta de s’excuser le jeune homme en passant sa main sur son crâne rasé de près. C’est juste que… ça fait des mois que j’attends de te rencontrer mais… j’ai jamais imaginé au-delà du moment où on se rencontrait. Tout ça c’est un peu stressant…

Il ne pouvait pas aller jusqu'à lui révéler qu’il avait craint qu’Adil ne le rejette purement et simplement. Samir ne savait pas ce qu’il aurait fait, n’ayant aucunement l’envie de rentrer en France. Peiné, seul, perdu, il aurait sans doute pris les pires décisions en arrêtant ses études pour quitter tous ceux qui l’avaient un jour connu, le temps de cicatriser.

- De toute façon, je suis de nature nerveuse… Je réagis tout le temps au quart de tour… Des fois ça me crée des problèmes…

Il passa sa main dans le cou pour éviter de revenir précisément sur cette exclusion de Beauxbâtons qu’il avait frôlée pour une sombre histoire d’affrontement. Samir préférait que la discussion change de direction et il profita du retour de la serveuse avec les plats commandés pour demander à son frère.

- Et Amastan, il fait quoi dans la vie ? Est-ce qu’il est venu en Angleterre… pour s’occuper de toi?

Adil l’écoutait avec sérieux tandis qu’un léger sourire venait orner son visage. C’était agréable à voir… Comme une douce fin d’après-midi qui laissait présager une belle soirée d’été au ciel étoilé. Les mots que son frère prononça en l’observant touchèrent le jeune Mesli en plein cœur. Il le trouvait courageux... Samir baissa les yeux, presque trop stupéfait pour réagir. Il n’était lui-même absolument pas capable d’une telle franchise, et de fait, il ne savait comment réagir devant les compliments. C’était assez ironique pour une mentalité aussi ambitieuse que la sienne, mais Samir préférait se persuader que toutes les actions qu’il entreprenait étaient avant tout pour lui et pour exister aux yeux du monde.

Aussi, il haussa les épaules en détournant le visage, presque prêt à lui prouver à quel point il manquait de courage mais Adil finit par lui confier qu’il pouvait se laisser aller. Le jeune homme ne s’était jamais senti en danger, alors pourquoi ces propos eurent un tel écho chez lui ? Certes il avait toujours vécu seul avec sa mère qui, bien qu’aimante, n'avait jamais accepté de parler ni de leur passé, ni de leur avenir. Il avait quitté à regret son pays de naissance, et à peine avait-il commencé à se faire à la France qu’il devait apprendre à se débrouiller seul dans le monde magique, ses défis et ses promesses. Mais de nouveau, son monde s’était écroulé avec la découverte d’Adil et il avait tout quitté pour le rejoindre… Et voilà qu’à présent, Adil lui signifiait qu’il pouvait enfin se détendre, qu’il était en sécurité.

Une nouvelle chaleur se répandit en lui, similaire à celle qu'il avait perçu quand Adil avait posé sa main sur lui. Lentement, Samir releva le regard vers son grand frère avant de hocher la tête en souriant en retour. L'aîné Mesli lui confirma avoir partagé le même trait de caractère nerveux que lui. Un nouveau point commun dont se réjouissait Samir. Il avait craint que cet aspect un peu sombre chez lui ne puisse repousser son frère. Mais l’intérêt chez le jeune algérien se réveilla d’autant plus quand Adil entreprit de lui en raconter un peu plus sur leur oncle. Un sorcier Medjaÿ… Le terme résonna à ses oreilles, faisant briller ses yeux d’admiration. Dans le même temps, un regret lui tordait les entrailles, celui de ne pas avoir découvert la magie dans son pays d’origine. A quel point sa vie aurait été différente s’il avait lui aussi été élevé par un oncle sorcier ? Un détail attira de nouveau toute son attention et il haussa les sourcils avec un nouveau sourire illuminant son visage.

- Son petit ? Amastan a un enfant ?

La nouvelle était à la fois grisante, mais aussi légèrement angoissante. Le jeune homme secoua la tête, un peu perdu entre son envie de rencontrer toute cette famille et sa crainte toujours plus forte d’en être rejeté après tout ce temps.

- Wow… se contenta-t-il finalement de commenter après son discours. Ça a l’air d’être des gens… incroyables…

C’était sans doute bête à dire, mais à part ses professeurs, Samir n’avait pas encore vraiment côtoyé de sorciers "adultes" qui avaient tendance à l'impression ; et ces deux-là semblaient particulièrement extraordinaires. Il ferait sans doute bien pâle figure face à eux. Leurs plats étaient arrivés, apportant la diversion idéale sur laquelle se jeta Samir en se rendant compte qu’il mourrait de faim.

- Hum… ça ressemble vraiment pas à ceux que je faisais, lança-t-il la bouche pleine avec un enthousiasme renouvelé. La boisson en revanche était spéciale. Un peu trop sucrée à son goût, mais il n’en montra rien à son frère qui avait choisi pour lui. Après avoir bu quelques gorgées, il finit par relever le nez vers Adil, hésitant un peu à parler en se retenant de ne pas se remettre à secouer le pied sous la table. Finalement, il se lança en plantant son regard dans celui de son aîné.

- Tout-à-l ’heure, tu m’as dit que tu avais croisé Amar quand tu étais à l’hôpital… Qu’est-ce qui t’es arrivé ? C’était grave ?

Samir accusa le coup en fixant son frère, clignant plusieurs fois des yeux avant de les baisser sur l’assiette qu’ils partageaient. Haroun, le fils de son oncle... Une curieuse boule se formait dans son ventre à l’idée de rencontrer un jour son petit cousin. Comme si l’enthousiasme violent qui le saisissait l’effrayait à moitié. Plus il en découvrait sur Adil et sur sa famille, plus ses espoirs s’élevaient dans l'attente du bonheur d’une famille enfin réunie. Et le jeune algérien ne craignait qu’une seule chose : la descente. Pourrait-il le supporter si cette si parfaite image ne se révélait être qu’un mirage, s’effaçant dans un nuage de poussière alors qu’il tendait la main vers elle ?

Il était de toute manière trop tard pour chercher à ne pas trop s’investir dans cette découverte. Samir avait déjà tout laissé derrière lui pour se jeter dans l’inconnu. Il n’avait aucun filet de sécurité et si c’était une chute qui l’attendait, finalement mieux valait qu’elle soit assez violente pour l’achever. Le jeune Mesli releva vivement la tête en entendant son frère s’étouffer à moitié suite à sa question. L'aîné se reprit finalement, expliquant être surpris avant de se préparer à ce qui s’annonçait être une douloureuse histoire.

Sans que rien ne se lise sur son visage, Samir ne rata pas un mot de ce que son frère lui dévoilait. Seuls ses yeux s’assombrirent à la mention de l’attaque et de la blessure qu’il avait reçue. Il percevait les battements de son cœur s’accélérer douloureusement, faisant pulser son sang un peu plus vite dans ses veines en réaction à ce qu’il entendait. C’était comme si son corps se sentait lui-même attaqué et prêt à réagir au quart de tour. Il était déroutant de se sentir si investi et impacté par ce qu’avait vécu un sorcier qu’il venait tout juste de rencontrer.

Pour masquer son émotion, il jeta des coups d’œil autour d’eux, passant plusieurs fois la main sur son crâne. Cette brève mention de leur père l’avait laissé sur sa faim et il était mal à l’aise devant cette version qu’elle donnait de lui – presqu’un esprit protecteur. Amar n’avait jamais rien été d’autre pour lui qu’une cruelle déception, et le principal responsable du malheur de sa mère. Du moins, c’est ce qu’il avait pensé pendant des années, et il n’était pas prêt à changer d’avis.

- Et… ça va mieux ?

Ses mots furent étouffés alors qu’il renouait le contact visuel avec Adil. Cette histoire l’avait laissé sans voix, au propre comme au figuré. Il supposait cependant que le Mesli s’était remis car il n’avait perçu aucune gêne dans la démarche de son frère jusqu’à présent. Le jeune frère eut une brève pensée pour cette épicerie de Little Algeria qu’il n’aurait jamais la chance de connaître, mais délaissa bien vite sa propre rancœur pour se recentrer sur Adil.

- Et vous savez maintenant pourquoi vous avez été attaqués ? Ça a un lien avec lui ? Avec Amar ?

Inconsciemment, sa respiration s’accélérait de nouveau alors que la colère le traversait devant cette injustice manifeste. Comment un père absent pouvait en plus mettre une partie de sa famille en danger ? Dire qu’il avait failli risquer de ne jamais rencontrer son propre frère… En inspirant, il fit le tour en pensée des personnes qu’avait cité son frère pour revenir sur celle qui semblait tant compter à ses yeux.

- Et Asel ? Elle a rien eu j’espère ?

Adil se toucha brièvement le torse, et Samir suivit avec attention son geste, devinant qu’il y avait là une trace de son ancienne blessure. Sa mâchoire se contracta mais il se contenta de continuer à l’écouter alors qu’il tentait de répondre à ses questions. Ses sourcils se haussèrent cependant quand il comprit que cette attaque avait été une conséquence indirecte d’une affaire sur laquelle travaillait un de ses oncles – via la famille de la femme d’Amastan. Amar n’avait apparemment rien à voir avec tout ça…

Mais le sourire qu’Adil tentait vaillamment de garder sur son visage se fana immédiatement lorsque Samir mentionna sa petite amie. L’aîné Mesli se détourna mais son cadet put clairement voir ses yeux briller d’émotion. Alors, Samir baissa à son tour pudiquement le regard pour éviter d’être témoin de ce dont son frère voulait se cacher. Sourcils froncés, il ne pouvait qu’imaginer ce qui mettait Adil dans un état pareil. Qu’était-il donc arrivé à Asel ? Les battements de son cœur s’accéléraient de colère et d'appréhension pour une personne qu’il ne connaissait pas encore. C’était idiot mais c’était ainsi. De même qu’il était étrange d’être aussi déstabilisé de voir son frère meurtri alors qu’il ignorait jusqu’à son existence il y avait quelques mois de cela.

Adil finit par lui expliquer que sa petite amie avait été enlevée, mais qu’elle était finalement revenue à lui. Samir hocha brièvement la tête sans relever encore son regard. Il continuait de garder une prudente réserve, comprenant qu’il avait abordé là un sujet bien trop sensible pour une telle première rencontre. Aussi il ne réagit pas plus à cette annonce en fixant avec insistance son verre comme s’il ne trouvait rien à dire. Pourtant, Samir aurait eu beaucoup à révéler. Il sentait que s’il avait trouvé le moyen ici et maintenant de venger son frère, il l’aurait fait sur-le-champ, quitte à risquer sa peau.

Impossible cependant pour lui d’étaler ce genre d’émotion. Il en était déjà lui-même peu conscient et n’avait aucunement l'habitude à parler de ses sentiments. Mais il craignait également d’effrayer Adil par l’attachement déjà indélébile qu’il ressentait pour lui. Le jeune Mesli avait dit à son aîné un peu plus tôt qu’il n’attendait rien de lui. Il n’y avait rien de plus faux. Il voulait un grand frère – un vrai. Du genre sur lequel il pouvait compter les yeux fermés, et pour lequel il donnerait sa vie sans hésiter. Un frère à qui il n’avait rien besoin de dire car il comprenait ce qui se passait dans sa tête mieux que lui-même peut-être. Une famille. Le même sang. Une âme jumelle.

Alors seulement, il marmonna dans un souffle avant d’attraper son verre à la hâte.

- Je suis désolé…

Il devait à présent changer de sujet pour permettre à Adil de cacher cette fragilité qu’il avait bien malgré lui mise à nue. Mais Samir avait beau se creuser la tête, rien ne lui vint à son esprit soudain vide de toute idée. La nervosité le rendait bien maladroit et peu social.

- Un jour en jouant au foot, j’ai glissé et ma tête a cogné un muret, lança-t-il soudain de but en blanc en relavant le regard vers Adil. Mes potes ont cru que j’étais mort. Une blessure au crâne ça saigne beaucoup, même quand c’est superficiel. J’ai toujours la cicatrice là. J'ai réussi à cacher ma blessure à Nima pendant deux jours. Quand elle s'en est rendue compte, je me suis… fait engueuler...

Sa voix s’était tue progressivement, presque sans finir sa phrase et Samir baissa de nouveau le regard vers son verre. Il ne savait pas pourquoi il avait dit ça. Parce qu’Adil lui avait parlé d’une blessure, il en mentionnait une aussi ? C’était ridicule. Et surtout bien malavisé de mentionner Nima dans son rôle de mère…