Barefoot on the grass

Barefoot on the grass
"Perfect" by Ed Sheeran
... I'm dancin' in the dark with you between my arms
Barefoot on the grass while listenin' to our favourite song
When you said you looked a mess, I whispered underneath my breath

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Il accueillit ce merci d'un humble signe de tête. Curieusement, ce petit mot de français répondait parfaitement à l'étiquette et dans le même temps, il avait une certaine texture... une saveur qui ne tenait peut-être qu'à lui et comme il n'avait pas l'intention de la questionner là-dessus, cela resterait un mystère jusqu'au bout. Et c'était bien ainsi.

« Si ça ne se mange pas j'aurais quelques réclamations à adresser à Miss Krépine. », s'amusa-t-il en cueillant un met qui ressemblait étrangement à une fleur d'or. Il y croqua et une expression fugace de ravissement pétilla dans ses yeux, « Je crois bien que ça se mange Siobhán... », confirma-t-il, encore émerveillé de cette découverte gustative, « Mais je n'ai honnêtement aucune idée de ce que je suis en train de manger. », admit-il d'un ton amusé. C'était plutôt rare, il fallait le dire, lui qui avait le palais fin. C'était sans doute que la chemise de la trisaïeule savait à qui elle avait affaire.

Mais finalement ce fut la jeune femme qui l'accompagnait qui le surpris encore d'avantage, avançant spontanément qu'elle n'ébruiterait rien du secret de ce dîner. Une promesse qui ne pouvait que séduire Ares, et à plusieurs titres.

« Vous êtes pleine de surprises Miss Siobhán. Je ne suis pas certain que toutes les jeunes femmes de qualité que Lady Antonia a jugé bon de convier ce soir auraient eu la prévenance d'y songer. Cette chemise est un héritage rare et précieux, mais ce n'est pas ce qui me rend ce moment le plus agréable. », il eut un sourire courtois, ne poussant pas plus loin la confession. Il étendit alors sa main vers une bouteille où dansait un liquide violacée et dont la texture était si étrange que lorsqu'il la versa, on aurait cru qu'il versait de une épaisse mais docile fumée lavande, « Ça je sais ce que c'est. Vous m'en direz des nouvelles. Cela ne vous montrera pas à la tête, vous avez ma parole. »

Aussitôt dit, Ares Longerbane versa de ce même breuvage dans sa coupe et le porta à ses lèvres. Cela lui fit l'effet d'une petite gorgée de paradis. Il était serein, portée par sa propre joie de vivre et c'était comme si, pour lui, rien ne pouvait poser question. Les choses étaient simplement ce qu'elles étaient. Simples. Sans plus de fioriture.

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ft. Arès Longerbane

21 12 2023

Les mets étaient déposés avec soin sur la table immaculée comme s’ils avaient été servis par le sorcier le plus précautionneux du monde. Chaque couleur, chaque odeur qui leur parvenait était un régal pour les yeux, le nez et un plaisir annoncé pour les papilles.

Siobhán ne put se résoudre à y succomber que lorsque son hôte eut goûté à sa première bouchée. Son palais s’anima avec une telle vigueur qu’il activa un sourire des plus sincères sur son visage tendre qui aurait fait succomber n’importe quel homme sans même qu’elle n’ait cherché à activer ses charmes.

Arès ne semblait pas sensible à son don, sans quoi il se serait déjà pourfendu en éloges faussement amoureuses. Alors pourquoi se priver puisqu’elle prenait réellement du plaisir à passer du temps en sa compagnie ?

« Il n’y a rien à réclamer à Miss Krépine », dit-elle après s’être tapotée délicatement les lèvres avec une serviette, gardant en bouche le goût somptueusement subtil des pétales dorés. « Au contraire. Pourrons-nous faire un nouvel arrêt à la cuisine au retour ? Tout est parfait, elle doit être mise au courant », ajouta-t-elle en savourant le sourire mi-tendre mi-enfantin de son guide d’une soirée.

Inconsciemment, elle cherchait déjà une possibilité de faire durer ce moment encore un peu, quand bien même il venait à peine de commencer.

Dans les faits, Siobhán avait toujours mis un point d’honneur à féliciter les elfes pour leurs talents de cuisiniers. À Poudlard comme à Caisléan Korrigan, elle avait toujours trouvé qu’ils savaient marier les saveurs mieux que quiconque. Et pour ses papilles subjuguées, ils méritaient des remerciements — bien qu’il fallait admettre que jamais elle n’avait eu l’occasion de se prêter aux délices d’une cuisine aussi raffinée.

« Ne me dites pas si elles sont bonnes ou mauvaises. J’ai déjà hâte de regoûter aux délices de cette soirée en le découvrant dans le journal, qui sait ? Imaginez le titre : « Les Korrigan, ou l’art de gâcher la fête ». Ou mieux : « L’enfer irlandais : un tutoriel pour ruiner vos soirées mondaines » ».

Son rire se fit doux alors qu’elle attrapait une petite tartelette multicolore qui avait arrêté son regard un peu plus tôt. Un détail droit sorti de la bouche d’Arès avait interpellé encore plus fort son attention.

« Comme certains moments de vie, cette magie se doit d’être préservée. Et vous savez ce qu’on dit. Plus rare est le trésor, plus férocement le secret doit en être gardé », glissa-t-elle avec un sourire avant de faire mine de réfléchir. « À moins que je ne vienne d’inventer cette citation. » Ses yeux bleus brillaient de malice, et elle retrouvait le plaisir de la conversation légère après des semaines d’un lourd silence. Sa curiosité était trop heureuse de pouvoir à nouveau se faire une place dans son existence. « Lady Antonia doit se donner beaucoup de mal pour ne vous présenter que le meilleur de notre société. Mais quelque chose me dit que ces cérémonies dansantes ne sont pas vraiment ce que vous préférez et que vous aspirez à d’autres projets. »

Un silence plana dans l’air alors qu’elle laissait le Longerbane la servir d’un liquide dont les couleurs étaient inédites. Aucune potion sur le marché ne portait ces nuances, et cela lui donna d’ailleurs une idée, au cas-où Arès ne souhaitait pas davantage s’étaler en confessions :

« Imaginons que ce breuvage a la capacité de nous transporter n’importe où dans le monde du moment que vous le désiriez ardemment. Où atterririez-vous dans la seconde qui suit la première gorgée ? »

Elle porta à son tour à ses lèvres le contenu du verre qu’il venait de lui servir avec une grande attention. Quelques grains de sucre cristallisés firent pétiller l’intérieur de sa bouche alors qu’elle dut se retenir de lui demander de quoi il s’agissait. Elle espérait pouvoir poser toutes ses questions à Miss Krépine un peu plus tard car pour l’heure, Arès captivait l’essentiel de son attention.

« C’est divin », admit-elle finalement, sans préciser davantage sa pensée. Parlait-elle de l’instant, ou de ce qu’elle venait de boire ?

Il n’y avait pas besoin de réfléchir davantage aux raisons qui poussaient les femmes en quête d’un mari à le placer si haut dans leur estime. Arès Longerbane avait non seulement tout de l’homme parfait sur le papier, en tant que second héritier, il semblait aussi plus nuancé que son frère, ce qui ne le rendait que d’autant plus intrigant.

« Oh et j’oubliais, bien sûr, il vous oblige aussi à me dire la vérité », ajouta-t-elle avec un sourire caché au coin de ses lèvres.

Il n’avait aucunement l’air d’un menteur, mais qui savait les secrets qu’un tel charme pouvait dissimuler.

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Ares eut un petit ricanement déconcerté :

« Vous alors ! Son mauvais caractère ne vous a pas découragée pour autant... », plaisanta-t-il.

L'elfe avait un trempe telle qu'on n'en faisait plus et si lui, adorait véritablement la petite créature, il restait très lucide sur l'effet qu'elle pouvait produire chez les autres, à commencer par Lady Antonia qui ne pouvait souffrir qu'on la houspille de quelque manière que ce fut. Il sourit, à peu près certain d'avoir trouver la seule jeune femme de toute l'assemblée qui aurait pu conserver pareille impression de leur cuisinière en cheffe.

« Nous y retournerons rien que pour le plaisir de se voir assaisonner une seconde fois, c'est promis. »

Il ne se départit pas de son sourire en coin, approchant sa met d'un nouveau met rare et par avance délicieux. La conversation se poursuivit sur ce ton léger et taquin. D'ailleurs, à ce jeu là Miss Siobhán n'était pas la dernière. Trempant ses lèvres dans sa coupe, Ares la regardait par dessus le fil du verre avant de s'inquiéter :

« J'en étais sûr : vous cherchiez à me gâcher la soirée depuis le début ! », il posa son verre, le regard pétillant, « Laissez moi vous dire que vous vous vous y prenez très mal Siobhán. J'aurais quelques jeunes femmes bien plus habilles à vous présenter si cela vous intéresse... »

Il n'aurait pas l'indélicatesse de donner de nom, même si la brochette des soeurs McSwann s'imposait à son esprit presque spontanément comme il disait cela. Après quoi, sans qu'il l'ait vraiment vu venir, la conversation prit un tour curieux. Il la regarda longuement, interdit autant que convaincu. Il ne fit toutefois aucun effort pour rebondir sur cette vérité qui le touchait profondément - plus rare le trésor, plus fort le secret - se contentant d'acquiescer d'un geste appuyé. Pour une fois, ses lèvres restèrent scellées. Puis, elle revint à des choses plus terrestres. Cette soirée, les efforts de Lady Antonia, et entre les lignes, le petit vase clos dans lequel il semblait qu'elle les maintenait.

« Lady Antonia est assurément le capitaine de ce navire mais sous ses dehors très rigides, c'est un guide éclairé que je suivrais aveuglément s'il le fallait, quand bien même cela étoufferait d'autres projets... »

Il marqua un temps d'arrêt, ne sachant trop s'il pouvait se permettre de parler de ces autres projets. Il y en avait un à propos duquel, il se devait de se taire évidemment et de celui-là découlait tous les autres. Par chance, elle lui offrit une porte de sortie, non moins piégeuse cela dit :

« Dans le Tir Na NÓg. », répondit-il sans ambage, observant avec délice la réaction de son invitée à cette annonce. Il n'était pas sans savoir dans quel entourage Miss Siobhán avait grandi, « Ne dit-on pas que c'est l'endroit où tous les travers de l'existence humaine sont suspendus ? Du moins, si on se fie à nos illustres poètes, je n'ai pas connaissance de quelques témoignages d'archive à ce sujet, cela contreviendrait au sobriquet de Val Sans Retour je présume... »

Il avait dit cela avec une telle innocence qu'il était difficile de s'imaginer qu'il ait pu y avoir autre chose que de la naïveté derrière ces mots.

« Mais puisque vous avez bu, dites moi, où sommes nous à présent ? »

Quoi de plus naturel que de lui retourner la question ?

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ft. Arès Longerbane

21 12 2023

L'idée de revoir les yeux sévères de Miss Krépine penchés sur les mets délicieux qui s'apprêtaient à aller rencontrer de plus ou moins fins palais n'avait rien de déplaisant. Ses yeux d'azur à elle n'avaient beau avoir croisé ceux de l'elfe que durant quelques secondes, Siobhán y avait décelé suffisamment de nuances brillantes pour espérer passer dans son fief moins vite qu'en un coup de vent.

« Il faut une certaine dose de caractère pour se faire une place dans notre monde, ne croyez-vous pas ? », répondit-elle avec un fin sourire après un petit temps de réflexion, non sans avoir pris le temps de s'essuyer la bouche à nouveau — juste par précaution. « Je serais certainement très mal placée pour la juger. »

C'était peu de le dire. Et ce ne serait certainement pas @Luke Korrigan qui viendrait la contredire après la dispute qui les avait opposés un peu plus tôt dans la soirée.

Dans un autre monde, à une différente période de sa vie, Arès l'aurait probablement appris à ses dépends s'ils avaient été amenés à passer un peu plus de temps ensemble. Mais cette soirée avait ça de beau qu'elle serait aussi éphémère que la nuit et qu'aussitôt celle-ci disparue, la lumière du jour, accompagnée de la réalité, finirait par les rattraper.

En attendant, la jeune femme accueillit avec un nouveau sourire son invitation à repasser par les cuisines, où elle espérait déjà pouvoir interroger Miss Krépine sur quelques douceurs qui étaient venus réveiller ses papilles.

Très bientôt, un rire sincère vint remplacer la simple esquisse de plaisir sur ses lèvres, avant de reprendre rapidement un faux air sérieux. Beaucoup trop grave pour les pupilles chaleureusement malicieuses du Longerbane, si bien qu'elle l'abandonna sans même s'en rendre compte.

« Vous avez mis le temps à vous rendre compte de mon véritable objectif en acceptant cette invitation. Dois-je comprendre que je ne suis finalement pas si prévisible que ça ? »

Cette idée la ravissait plus qu'elle n'aurait jamais osé l'admettre. Le paradoxe était entier : d'un côté, Siobhán avait cette fâcheuse tendance à tout planifier depuis ses premiers jours de conscience, jusqu'à son parcours tout tracé.

Et pourtant, à ses yeux, rien n'avait moins de saveur que l'attendu. L'inopiné était infiniment plus savoureux. À commencer par cette rencontre pareille à une vraie bouffée d'air frais sous la lumière blanche et crue de la lune.

Quelques noms lui vinrent en tête alors qu'Arès lui soumettait l'idée de lui présenter quelques autres jeunes femmes présentes à cette soirée, probablement de celles dont la tête leur tournerait même après qu'elles aient rejoint leur lit. Mais elle préféra siroter une nouvelle gorgée de cette liqueur délicatement parfumée, tout en s'armant de ce regard qui en disait bien plus long que n'importe laquelle de ses suggestions, et qui accompagna les semi-confessions du jeune homme.

« Quels que soient ces projets, je ne peux que vous souhaiter qu’ils se réalisent », livra-t-elle à voix basse, se doutant qu'Arès les garderait précieusement pour lui. Puis elle reprit, après une pause qui lui permit de savourer tout le sucre qui avait trouvé refuge dans les pliures de ses lèvres. « À mon sens il n’y a pas meilleur objectif de poursuivre ce en quoi on croit. J'ai une profonde admiration pour celles et ceux qui ne se lassent pas. »

Probablement parce qu'elles et ils lui ressemblaient profondément et qu'elle n'imaginait plus vivre dans un monde où l'on cessait de croire en ce qui nous était cher. Elle refusait de s'imaginer qu'on puisse un jour cesser de croire, tout simplement.

Ces pensées résonnaient étrangement avec ses récentes aventures dans un monde dont elle effleurait à peine les prémisses.

Et elle ne se doutait pas combien les prochaines paroles d'Arès allaient donner une envergure encore différente à leur échange.

S'était-elle attendue à une telle honnêteté de sa part lorsqu'elle l'avait naïvement — un peu trop, sans doute — interrogé ?

Siobhán aurait pu s'étouffer avec cette nouvelle gorgée qui s'écoulait dans sa gorge si seulement elle n'avait pas su si bien feindre l'absence de surprise.

Arès ne l'aurait pas. Pas à ce jeu-là, du moins.

Pendant qu'il prenait soin de justifier sa réponse avec une justesse déconcertante, elle ignora avec brio le souvenir du regard posé de @Maeve Cynfeirdd qui s'était attardé sur chaque membre de sa famille lorsqu'elle avait raconté son dernier voyage avec @Jameson Clearwater en ces lieux d'où ils avaient failli ne jamais revenir.

Plutôt que de lui servir son étonnement sur l'un des innombrables plateaux d'argent étalés devant eux, la Korrigan s'affaira à réfléchir à sa propre réponse, se contentant d'un simple sourire énigmatique qu'il aurait probablement du mal à déchiffrer.

C'était tant mieux.

« C’est drôle. Il y a quelques mois je sais ce que je vous aurais répondu mais aujourd’hui, j’imagine qu’il nous faudrait boire une gorgée de cette potion pour le découvrir… »

Les paysages sauvages d'une île paradisiaque du Mexique qui lui était venue en rêve autrefois s'affichèrent un instant dans son esprit, avant de faner aussi vite qu'ils avaient éclos. Relevant les yeux vers l'héritier Longerbane et plongeant son regard d'azur dans le sien, Siobhán libéra ses mains et se repositionna gracieusement sur l'herbe fraîche de la nuit.

« Que savez-vous du Tir Na NÓg, Arès ? », demanda-t-elle d'une voix inquisitrice avec un réel intérêt doublé d'une sincère envie de savoir visibles jusque dans son regard perçant à jour chacune de ses réactions.

Beaucoup de sorciers auraient été effrayés à la seule mention de ce nom.

Mais là-dessus encore, Arès et Siobhán semblaient s'être bien trouvés.

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Il eut un petit sourire énigmatique à cette étrange remarque. Se faire une place dans notre monde...

« J'imagine oui... », fit-il rêveusement. Le status des elfes de maison avait fait un bond en avant sur les dernières décennies mais était-ce suffisant pour dire qu'ils avaient vraiment une place, à tout le moins, la considération qu'ils méritaient. Ares avait la chance d'être régulièrement témoin de ce qu'était la place des elfes dans la société magique. Il y avait encore beaucoup à redire sur cette place dont lui-même n'aurait pas voulu. « Pourquoi ? Pour le caractère ? », réabonda-t-il avec humour.

Son sourire lumineux tranchait avec la gravité qu'aurait pu prendre la conversation. C'était une direction qu'Antonia Longerbane ne lui aurait pas pardonné d'avoir prise. S'ils avaient bien plus que d'autres jeunes gens de leur milieu, une certaine liberté de penser, il y avait tout de même certaines choses qu'ils se devaient de s'interdire. Du moins pour l'instant...

La conversation dévia presque naturellement sur des sujets plus légers et il en fut reconnaissant intérieurement.

« J'espère bien, sinon vous auriez touché à l'objectif beaucoup trop vite. », convint-il. Il y avait un petit plaisir à deviner les pensées, devancer les paroles et les actes d'une autre personne, lorsqu'on n'en était qu'aux balbutiements d'une relation, quelle qu'elle soit. Mais à la longue, le jeu se serait montré lassant, « Je serais assuré de ne jamais m'ennuyer en votre compagnie comme cela. », fit-il avant de se rendre compte que cela pourrait laisser sous entendre beaucoup plus que ce qu'il avait eu l'intention de dire et que, dans ce cas, cela aurait pu paraître déplacé.

Il s'éclaircit la voix, chassant l'indélicatesse avec une gorgée de vin miellé.

« Se lasser ce serait accepter une mort à petit feu. J'espère que vous non plus ne cesserez jamais de croire Siobhán, entretenez votre flamme intérieure, quoi qu'en pense les autres. C'est ainsi que l'on m'a élevé et je suis profondément convaincu que c'est la seule manière d'être qui ait du sens. Cesser de croire et de se battre pour ça, c'est accepter de ne plus être, il n'y aurait rien de pire... »

Il ne s'était jamais surpris à soutenir ce discours qu'il avait cueilli tant de fois de la bouche de Lady Antonia. Et pourtant, il avait toujours eu pleinement conscience de son enracinement. Il était à ses yeux une règle de vie, élémentaire et inaliénable. A cet instant présent, il se prit à déplorer cette évidente convergence entre eux, ou plutôt à déplorer qu'elle n'advienne qu'à présent qu'il ne pouvait pas se déclarer sans passer pour un mufle indélicat. Ils n'avaient que cette nuit, après quoi, il lui faudrait s'armer de patience pour recréer l'instant, si un autre n'y avait pas triomphant avant lui.

Elle lui offrit un étrange sourire alors qu'il lui parlait de Tir Na NÓg, sourire qu'il aurait bien voulu prêter à l'ignorance mais, comme ses frère et soeur, il connaissait le pédigrée de chacun de leurs invités. Siobhán Korrigan l'avait dans le sang, elle ne pouvait ignorer ce qu'était le Tir Na NÓg, vers quelque qu'horizons qu'elle se tournât, son lignage le lui interdisait. Il ne dit rien cependant, réservant encore son jugement sur cette curieuse non réaction.

« Je suppose que nous traversons tous, à un moment ou un autre, ces moments d'étrangeté où nous devons prendre le temps de revenir à nous-mêmes... », fit-il avec une infinie délicatesse, peu désireux de jeter sur leur belle nappe les miasmes amer d'un divorce qui ne se pouvaient être déjà consumés.

Il plongea longuement dans son regard à sa dernière question, comme s'il sondait jusqu'au plus profond de son âme, jaugeant de quelque chose qu'elle ne pourrait pas définir.

« Eh bien, la même chose que vous, peu ou proue. Les Longerbane n'ont jamais eu de talent pour la chasse je dois dire, mais nous aimons à faire venir quelques bardes de temps en temps. », voilà pour la réponse bien policée qu'elle ne lui avait pas demandée. Il eut une espèce de sourire goguenard, « Vous êtes vous déjà demandé pourquoi on ne revenait pas du Val Sans Retour ? Je veux dire, la plupart gens s'accordent à penser que si on ne revient pas, c'est forcément parce qu'on est dans l'incapacité de le faire, n'est-ce pas... » Mais dans ce n'est-ce pas, tout était dit. Cette facilité qu'avait les Longerbane a penser autrement et qui était au firmament de leur façon d'être tout entière. « Pour quelle autre raison n'en reviendrait-on pas... », conclut-il, songeur.

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ft. Arès Longerbane

21 12 2023

Sans grande surprise, Arès Longerbane visait dans le mille, arrachant un énième sourire délicat sur un visage de poupée qui n'en avait finalement que les traits.

« Vous avez déjà matière à vous faire votre propre idée à ce sujet et s'il venait encore à vous en manquer, alors je songerai à vous donner de quoi vous fixer définitivement sur la question », glissa-t-elle en laissant son regard virer sur leur tablée improvisée et se demander quelle serait la prochaine saveur à venir titiller les papilles de sa propriétaire.

Mais surtout, ces yeux fuyants lui donnaient l'opportunité de se demander, sans pouvoir être sondés, si l'occasion leur en serait donnée de se découvrir plus loin que ce que cette réception leur permettait.

Nul doute que les événements avaient déjà donné à l'hériter Longerbane un aperçu de celle qu'elle était vraiment, loin de toute étiquette ou règle de bienséance. Car même si Siobhán savait se montrer polie et se plier aux apparences quand cela s'avérait nécessaire, elle avait surtout été éduquée par des femmes fortes et intransigeantes quand il s'agissait de laisser s'exprimer sa propre manière de penser. Jamais, ô grand jamais, il ne lui viendrait à l'esprit de déroger à ces préceptes élémentaires. C'était simplement ce qu'elle était. Nul ne pouvait lui en tenir rigueur sans prendre le risque de se voir accompagné vers la sortie.

Mais Arès était loin de se faire raccompagner où que ce soit pour le moment. Ce serait certainement valable tant qu'il afficherait sur son visage ce sourire si communicatif qui faisait instantanément naître le sien.

« Un objectif, voyez-vous ça... Puis-je savoir ce qu'il en est exactement ? Il est difficile de se plier aux règles du jeu lorsqu'on n'en connait pas la finalité », demanda-t-elle avec légèreté.

Il n'était pas sans savoir que c'était exactement le genre de mots pour la faire réagir, pour l'avoir entendu de sa bouche un peu plus tôt dans la soirée. Aussi, elle poursuivait, sans se détourner du ton général de la soirée :

« J'y veillerai personnellement, à l'avenir. » Puis, elle marqua une pause, réfléchissant à la portée des mots qui venaient de sortir de sa bouche. Sans même donner l'impression de se corriger, ni même percevoir l'indélicatesse des propos d'Arès - si tant est qu'elle existait -, elle reprit : « Sait-on jamais. Maintenant que j'ai vu un aperçu de ces jardins, je ne pourrai pas décemment me permettre de manquer un bal de printemps en des lieux aussi enchanteurs. »

Les propos suivants la plongèrent dans un moment de réflexion profond. Il fut tel qu'il lui enleva son sourire un court instant, tant ces termes résonnaient avec force à l'intérieur de son être vibrant sous l'impulsion de ces flammes dévastatrices qu'il mentionnait, encore une fois, à juste titre.

« J'en suis certaine aussi. Mais à quel prix... », souffla-t-elle, un brin trop pensive pour quelqu'un qui n'était pas concerné par de tels discours philosophiques, mais néanmoins véridiques.

Alors que la discussion s'aventurait désormais sur un tout autre chemin, Siobhán écoutait avec attention ce qu'Arès avait à lui répondre. Cette fois-ci, son regard d'azur se releva vers son interlocuteur avec une profondeur nouvelle, différente de celle qui avait ponctué leurs échanges jusqu'ici.

Car l'héritier Longerbane n'était pas sans savoir avec qui il avait abordé le sujet.

En revanche, ce qu'il ne savait pas à ce stade de leur relation, c'est qu'au-delà de ses ancêtres chasseurs, il y avait le sang d'une vélane qui courrait dans les veines de son invitée.

Que deux des membres de sa famille étaient justement récemment revenus de ce lieu d'où on n'était censé jamais revenir - à commencer par les Korrigan et les Cynfeirdd, qui ne seraient jamais vus d'un bon œil dans un lieu gouverné par les fae.

Qu'elle en savait, par conséquent, beaucoup plus que ce qu'on avait bien voulu lui raconter tout au long de sa vie.

La suite se devait donc d'être abordée avec la plus grande prudence car il y avait des détails de son existence qui ne sauraient être dévoilés. Par prudence. Elle se devait donc de ne rien trahir des émotions qui traversaient son corps de part en part.

« J'ai grandi dans le luxe d'avoir mes propres bardes à domicile, c'est l'avantage d'avoir été élevée par des Cynfeirdd », commença-t-elle pour introduire sa réponse dans une tonalité plus légère.

Une petite ride fit son apparition au niveau de son front, preuve de la réflexion dans laquelle cette discussion la plongeait. S'il y avait une chose à laquelle Siobhán prêtait attention lorsqu'elle faisait de nouvelles rencontres, c'était la qualité des échanges. Le Longerbane n'était en rien une déception de ce point de vue.

« Je pense qu'on n'en revient pas pour les mêmes raisons qui semblent vous donner l'envie cruelle et déraisonnée de vous y rendre. Et dès lors, il n'est plus question de ce qu'on peut faire, mais bien de ce qu'on veut faire. Qu'en dites-vous ? Me direz-vous ce qui vous attire autant vers cet endroit ? »

Ses joues rosirent un bref instant, trahissant une gêne éphémère, qu'elle tenta de masquer en se laissant aller à la parlante - un défaut qui saillait davantage lorsqu'elle était mal à l'aise.

« Je crois que j'ai la réponse à votre question, un peu plus tôt, et que j'ai une idée de la raison pour laquelle elle ne m'est pas venue avant. » Une pause, un silence. « Je suis très bien où je suis actuellement », confessa-t-elle en prenant soin de s'imprégner un instant de ces lieux enchanteurs, consciente plus que jamais de l'éphémérité du moment malgré le reste de ses pensées qui la trahissaient.

Du moins, continuerait-elle à l'être, très bien, si elle n'avait pas bientôt à s'enfuir pour préserver ses secrets et ceux de sa famille.

Bien sûr, elle se garda de remercier verbalement son hôte à nouveau, loin de vouloir ressembler à toutes celles qui avaient déjà croisé la route d'Arès Longerbane durant cette soirée.

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Il savourait ce petit jeu de joute amical entre toutes les autres conversations insipides qu'il avait pu avoir ce soir. S'il ne pouvait nier que Miss @Chelsea Waldorf avait su amener sa touche de piquant, c'était à Miss @Siobhán Gavalagh-Korrigan qu'il songerait dans les prochains jours et déjà dans un coin de sa tête, il imaginait par quel moyen, quelles occasions, ils pourraient susciter à nouveau cet agréable moment.

« Si vous voulez mon avis, il vaut bien mieux naviguer à vue que de se plier à des règles ridicules... », éluda-t-il d'un ton mystérieux et taquin. Combien de jeunes femmes s'étaient ce soir pliées aux règles de leur bonne société quitte à se galvauder pour finalement ne même pas laisser un soupçon d'empreinte dans le souvenir de leurs hôtes ? C'était regrettable car au fond, il ne doutait pas que chacune ait eu en elle quelque chose d'intéressant, au-delà des apparences. Mais presque aucune n'avait osé se dévoiler. Le regard des aînés n'y aidait sans doute pas.

« Moi qui espérai vous faire revenir pour une visite privée... les jardins sont une splendeur au printemps... », fit-il, disqualifiant le bal du printemps auquel elle serait forcément conviée de toute manière. Son regard se perdit sur les frondaisons presque amoureusement. Il était évident que les Longerbane habitaient leur demeure de toute leur âme, d'une manière unique et presque spirituelle. Du moins évident à l'oeil qui savait prêter attention aux petits détails insignifiants. « Ma soeur dit que toutes les saisons sont belles, mais moi je trouve qu'aucune n'égale la profusion créatrice du printemps... », fit-il, peut-être plus pour lui-même.

Laissant derrière eux le bonheur innocent de la Nature, ils se retrouvèrent à évoquer les vicissitudes de leur quotidien respectifs. Il eut un petit pincement au coeur à la regarder pensive, se demandant quelle était la couleur de ses tempêtes intérieures, sous ce visage au maintien exemplaire.

« Un héritage que beaucoup vous envie quand plus encore n'en évalue pas le prix. », nota-t-il alors qu'elle évoquait le rôle qu'avait tenu les Cynfeirdd dans son éducation en quelques mots seulement. Mais pour qui était suffisamment instruit des grandes familles britanniques, il n'y avait guère besoin d'en dire plus. Il ne pouvait que regretter que les Cynfeirdd se soient montrés si peu nombreux ce soir mais il ne doutait pas qu'il y avait une raison à cela.

« Oui, c'est en substance mon avis. Le vouloir c'est, je pense, le vouloir. Je ne pensais pas que ma réponse vous intriguerez à ce point Miss Siobhán... », releva-t-il, suspendant encore la réponse qu'elle appelait à nouveau, « Qui ne pourrait désirer une vie une vie exempte de souffrance, sur une terre où ne courre ni la maladie, ni la mort, ni même le temps. Une terre où la joie dure toujours et où il n'est ni faim ni soif,

Tá Tír na nÓg ar chúl an tí,
Tír álainn trína chéile,
Lucht cheithre chos ag súil na slí,
Gan bróga orthu ná léine,
Gan Béarla acu ná Gaeilge *.

N'est-ce pas ce qu'on en dit en votre Verte Terre d'Irlande ? Je crois qu'il faudrait être fou ou aveugle pour ne pas être nostalgique de ce paradis perdu... »

Il avait délivré ces quelques mots dans un parfait gaélique quoi que teinté d'un petit accent indéfinissable mais qui ne l'aurait définitivement pas fait passé pour un étranger.

* citation du poème "Cúl an Tí" de Seán Ó Ríordáin, traduction anglaise de Tony Dermody

At the back of the house is a land of youth,
A jumbled beautiful space among
The farmyard beasts unclothed, unshod,
Nor knowing the Irish or English tongue,
Walking the way.

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Barefoot on the grass

ft. Arès Longerbane

21 12 2023

Pendant de longues années, l'idée de faire de nouvelles rencontres et se plier aux jeux sournois de l'amitié ou de l'amour lui avaient été étrangères pour les risques que de telles alliances comportaient. Mais il fallait admettre que la fluidité et la simplicité de cette soirée partagée avait tout pour la convaincre qu'elle avait eu tord de refuser de s'ouvrir à de nouveaux horizons.

« Vous avez raison. Mais les règles n'ont-elles pas ça de bon qu'elles peuvent aussi être brisées ? », murmura-t-elle à son intention comme s'il s'agissait du plus précieux des secrets qu'elle lui confiait.

Jamais Siobhán n'aurait tenu de tels propos avant d'avoir connu Edel Almadovar. Son premier amour l'avait marquée beaucoup plus nettement que n'importe lequel des tatouages que l'on pouvait se dessiner sur la peau. Et pourtant, pour la première fois depuis bien longtemps, elle ne pensait pas à lui ce soir. Trop obnubilée par l'instant présent, la possibilité de se revoir offrir une visite guidée une fois que les fleurs auraient retrouvé toute leur splendeur lui faisait oublier tout le reste.

« Mais voyez-vous Arès, maintenant que vous m'avez donné cette idée, je vais attendre le printemps encore plus impatiemment que les autres années. » Il semblait donc qu'ils partageaient un autre point commun. « Car après votre œuvre favorite, j'aurais le plaisir de découvrir votre plante préférée sous son plus beau jour. »

De la même manière qu'un éden perdait de ses couleurs une fois l'hiver arrivé, leur discussion manqua de peu d'égarer sa légèreté. Mais Arès avait une façon bien à lui de voir les choses et Siobhán décida finalement de regarder la situation à travers ses yeux.

« J'espère que vous aurez l'occasion d'entendre ma tante Maeve à la mi-journée. Je suis certaine que les bardes à qui vous faites appel sont excellents. Mais elle est exceptionnelle. »

Cette fois-ci, ses joues rougirent pas sous le coup de la gêne, mais parce qu'elle prenait conscience qu'il s'agissait d'une invitation à entrer dans ce qu'elle avait de plus intime et de plus cher : sa famille. Celle qu'elle protègerait toujours envers et contre tout. Quelle aura Arès avait-il autour de lui pour la pousser dans de tels retranchements ?

Et puis, alors que le Tir Na nÓg prenait toute sa place dans le fil de leur discussion, l'attention de Siobhán se reporta entièrement sur cet homme qui, au-delà de ses réponses, l'intriguait entièrement, maintenant qu'il le mentionnait.

Elle se surprit à bouger les lèvres en simultané alors qu'il citait cet éminent poème dans une langue qu'elle ne parlait plus suffisamment à son goût. Elle savourait avec un sourire délicieux cet accent, sans se rendre compte qu'il ne lui avait suffit que de ça pour le voir revenir sur son visage. Sans se rendre compte qu'une seule et unique larme s'était écoulée de son œil. Elle flanchait devant le poids de ses émotions du moment, repensant à tout ce qu'elle vivait ces derniers temps, la crainte qu'elle avait ressentie lorsque Maeve et Jameson avait raconté leur virée dans cette contrée de jeunesse, mais d'un revers de main, la goutte d'eau salée disparut aussi vite qu'elle était arrivée.

La tempête ne pouvait tout avaler.

« Pardonnez-moi. Mais c'est que je n'aurais pas mieux dit », fit-elle pour tenter de reprendre la face. « Je ne vous savais pas si familier avec notre culture. Mon père serait capable de vous présenter ses excuses pour son esclandre s'il l'apprenait. Et croyez-le ou non mais ce serait déjà une victoire, venant de lui. » Elle marqua une pause sans en dire plus, car cette larme l'avait déjà suffisamment dévoilée à son goût et il lui fallait changer de sujet pour ne pas se révéler davantage. « Il faudra que vous pensiez à me faire part de vos défauts, un de ces jours. Je ne peux pas être la seule à partager ceux qui me concernent. »

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ANAPHORE

Barefoot on the grass
"Perfect" by Ed Sheeran
... I'm dancin' in the dark with you between my arms
Barefoot on the grass while listenin' to our favourite song
When you said you looked a mess, I whispered underneath my breath

je suis un PNJ

A nouveau il eut un petit rictus amusé.

« Ah vous êtes comme ça Miss Siobhán ? », on voyait à ses yeux rieurs qu'il n'était en rien offusqué par cette idée que les règles étaient faites pour être transgressées pourtant, s'il avait dû faire le compte des fois où lui les avait transgressé, il se serait trouvé bien embêté. Cette idée le laissa pensif un instant. A 24 ans, il n'avait pas le souvenir d'avoir une seule fois transgressé l'autorité de Lady Antonia. C'était le genre de choses qui ne se faisaient pas chez les Longerbane et pire encore, ça ne lui avait jamais pesé. Il éprouvait certes de la compassion à voir sa soeur Aphrodite rêver des bancs inaccessibles de Poudlard, mais il ne partageait en rien cette nostalgie. Il y avait dans sa vie tant d'autres sujets prompts à le grandir, à le pousser à l'accomplissement.

« Nous devrions toujours nous languir du printemps. », confirma-t-il avec douceur, « Je ne manquerai pas de vous la présenter. J'espère que vous saurez l'apprécier tout autant que ce vieux portrait. »

S'il ne se trompait pas, elle ne serait pas déçue quand bien même il n'y aurait sans doute presque rien à voir. De ce qu'il avait pu voir de Siobhán Gavalagh-Korrigan jusqu'alors, il ne doutait pas qu'elle serait voir un trésor là où d'autres passeraient leur chemin trop impatients et terre à terre pour se contenter de si peu.

« Je n'en doute pas. C'est un grand privilège que d'entendre l'histoire contée de la bouche des Premiers Bardes. On dit que leurs mots comme leurs notes sont emprunts d'une magie aussi vieille que le monde. Pour avoir fréquenté parfois les mêmes lieux que votre illustre tante - »

Il s'interrompit, se demandant ce qui avait pu troubler son invitée dont les joues s'étaient subitement colorées. Portant son attention sur elle un instant, il la laissa l'entraîner vers Tir Na NÓg, presque naturellement. Cette conversation les menait à s'ouvrir de choses qu'ils n'avaient pas pour habitude de partager et cela se faisait avec une facilité déconcertante. Il sourit en voyant ses mots faire écho sur les lèvres de la jeune femme, comme dans un unisson silencieux. Mais ça n'était peut-être pas si surprenant pour une irlandaise. Une larme roula sur la joue de Siobhán qui s'en excusait déjà.

« C'est à moi de vous présenter mes excuses, je ne voulais pas vous mettre mal à l'aise. », fit-il, un peu contrarié de cette indélicatesse commise par mégarde, « Je serais prêt à le rattraper sur le champ si vous n'étiez pas de si bonne compagnie. », il sourit à nouveau, espérant chasser ce petit vent de mélancolie et elle fut prompt à faire de même, insinuant qu'il n'avait pas de défaut, « Est-ce que nous parlons toujours de votre père ? », fit-il espérant lui tirer un rire joyeux quand elle évoquait entre les lignes ses défauts à elle, « Plus sérieusement, je dois être bien insipide à vos yeux si vous ne me trouvez pas le moindre défaut. Mais je connais quelqu'un qui saura me redonner un peu de lustre. Retournons en cuisine, vous pourrez dire à Miss Krépine ce que vous pensez de sa cuisine et elle se chargera de nous trouver à chacun quelques défauts insupportables. »

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Barefoot on the grass

ft. Arès Longerbane

21 12 2023

« Uniquement quand c’est nécessaire, je vous rassure. »

Bien qu’apportée sur un ton des plus légers, la précision était d’usage. La préfète des Serpentard avait été choisie justement pour faire respecter le règlement au sein de sa maison, un rôle qu’elle avait à cœur de tenir depuis que son père l’avait choisie pour être la figure d’autorité des vert-et-argent. Mais pour quelqu’un du rang d’Arès, pour un Longerbane, ce genre de distinction ne voulait certainement rien dire et aurait même certainement pu paraître un brin puérile. Aussi, elle se garda de l’assumer à haute voix. La vanité, bien qu’un trait partagé par la plupart de ses comparses, ne figurait pas encore sur la liste de ses défauts.

« Vous n’imaginez pas à quel point j’ai hâte de la découvrir » avoua la férue de botanique ses yeux bleus rivés dans les siens, tâchant de ne pas se laisser emballer par l’idée comme un vulgaire jouet à l’approche de Noël.

Pourtant, il y avait une sincérité chaleureuse dans sa voix qui ne nécessitait aucune promesse pour s’assurer de la véracité de ses propos. Siobhán ne s’embrasserait pas de faux semblants avec Arès ; au moins ce point-là semblait acquis. Elle avait toujours la croyance profonde que la façon dont un être, de quelque sang qu’il soit, traitait la nature révélait son sens profond et en disait bien plus sur sa personnalité qu’aucun autre mot. C’était donc une sorte de test qu’il s’apprêtait à passer sans même le savoir.

Le sujet du Tir Na NÓg avait ça d’important qu’il contribua grandement à la ramener à la réalité qui était la sienne. Passée cette parenthèse enchantée, il lui faudrait revenir à des préoccupations nettement moins douces et cette idée la fit presque frémir rien qu’en passant dans son esprit. Mais il n’était pas question que l’avenir gâche ce doux moment au présent. Ses traits regagnèrent bientôt leur onctuosité initiale alors qu’elle tenait à rassurer son hôte, posant instinctivement une main sur la sienne.

« Il n’y a nullement besoin de ces excuses, Arès. » Sa parade pour changer de sujet et balayer les nuages qui étaient venus assombrir son visage eut l’effet escompté. Son sourire revint. « Laissons-le où qu’il soit pour ce soir, si vous le voulez bien. Il n’a pas su profiter comme il se devait de l’hospitalité de votre famille et j’ai désormais de quoi faire en sorte qu’il s’en morde les doigts. » Elle se rendit compte subitement que sa paume était toujours posée sur le dos de sa main alors qu’il l’invitait à regagner les cuisines des Ombes-Moires. Dans un petit son de surprise, la Korrigan sembla se rappeler tout à coup que ce genre de gestes n’était pas le bienvenu dans l’étiquette, encore moins venant d’une demie-vélane et elle profita d’un mouvement pour se relever afin de le faire oublier.

« Je vous suis. »

Son ton était déjà un peu mélancolique, probablement parce qu’elle aurait aimé que ce moment dure encore longtemps.

Elle n’était plus tout à fait sûre de rester bien longtemps au château, une fois qu’ils se seraient quittés.

La raison en était bien simple : toute autre discussion à venir aurait un goût bien fade à côté de celle qui s’achevait.

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